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29/03/2018 | FRANCE | N°16/12519

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre b, 29 mars 2018, 16/12519


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 29 MARS 2018



N° 2018/159













Rôle N° 16/12519







[G] [M]





C/



SA CAISSE D'EPARGNE CEPAC





















Grosse délivrée

le :

à :

Me SIMON-THIBAUD

Me MATHIEU













Décision déférée à la Cour :



Jugement

du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 09 Juin 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 15/08848.





APPELANT



Monsieur [G] [M]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 29 MARS 2018

N° 2018/159

Rôle N° 16/12519

[G] [M]

C/

SA CAISSE D'EPARGNE CEPAC

Grosse délivrée

le :

à :

Me SIMON-THIBAUD

Me MATHIEU

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 09 Juin 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 15/08848.

APPELANT

Monsieur [G] [M]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Frédéric COSSERON, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Robin DOUCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SA CAISSE D'EPARGNE CEPAC, poursuites et diligences de son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée et assistée de Me Gilles MATHIEU de la SELARL MATHIEU-DABOT-BONFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 09 Janvier 2018 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Valérie GERARD, Président de chambre, magistrat rapporteur

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Madame Anne DUBOIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 29 Mars 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Mars 2018,

Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre acceptée le 29 décembre 2007, la Caisse d'Épargne et de Prévoyance Alpes Corse, devenue Caisse d'Épargne CEPAC (la CEPAC), a consenti à [G] [M] un prêt immobilier d'un montant en capital de 184 500 euros remboursable en 300 mensualités au taux nominal de 4,50 % et au TEG de 4,93 % pour un taux de période de 0,41 %.

Selon avenant du 7 février 2011, les parties ont convenu de fixer le taux d'intérêt nominal du prêt à 3,960 % pour les 263 échéances mensuelles restant à courir, le TEG s'élevant alors à 4,436 % et le taux de période à 0,370 %.

Par acte du 13 juillet 2015, [G] [M] a fait assigner la CEPAC devant le tribunal de grande instance de Marseille en nullité de la stipulation d'intérêts et à défaut en déchéance du droit aux intérêts.

Par jugement contradictoire du 6 juin 2016, le tribunal de grande instance de Marseille a statué en ces termes :

- dit n'y avoir lieu à écarter des débats les rapports d'Humania Consultants,

- déclare irrecevable à agir [G] [M] s'agissant de l'offre de prêt initiale,

- rejette l'ensemble des prétentions de [G] [M] s'agissant de l'avenant du 7 février 2011,

- condamne [G] [M] à payer à la Caisse d'épargne et de Prévoyance Provence Alpes Corse la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts,

- rejette toutes autres conclusions,

- condamne [G] [M] à payer à la Caisse d'épargne et de Prévoyance Provence Alpes Corse la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne [G] [M] aux entiers dépens distraits au profit de Me Bonfils,

- ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.

[G] [M] a interjeté appel le 4 juillet 2016.

Par conclusions du 6 décembre 2017, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, [G] [M] demande à la cour de :

- déclarer l'appel recevable en la forme et justifié au fond,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Marseille du 9 juin 2016 en toutes ses dispositions,

- déclarer la demande de [G] [M] recevable et bien fondée,

- dire que l'offre de prêt et l'avenant émis par la CEPAC enfreignent les dispositions légales,

À titre principal : prononcer la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels tant pour l'offre de prêt que pour l'avenant

À titre subsidiaire : prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts de la banque

En tout état de cause :

- condamner la CEPAC au remboursement des excédents d'intérêts indus au titre de l'offre de prêt et de l'avenant avec intérêt légal à compter rétroactivement de la saisine de l'assignation introductive d'instance,

- fixer les taux applicables à l'offre de prêt et à l'avenant à hauteur du taux d'intérêt légal pour la période à courir à compter de l'arrêt à intervenir,

- rejeter la demande reconventionnelle en procédure abusive formée par la CEPAC,

- condamner la CEPAC au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à ses obligations d'information, de loyauté et d'honnêteté,

- condamner la CEPAC au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la CEPAC aux entiers dépens.

Par conclusions du 7 décembre 2017, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la CEPAC demande à la cour de :

- dire que [G] [M] a conclu le prêt litigieux auprès de la Caisse d'épargne CEPAC le 29 décembre 2007,

- dire que [G] [M] pouvait donc agir pour erreur du taux effectif global jusqu'au 29 décembre 2012 à l'encontre de la CEPAC,

- constater que [G] [M] a assigné la CEPAC par acte extrajudiciaire du 13 juillet 2015,

- dire que l'action de [G] [M] au titre de l'irrégularité du TEG mentionné dans le prêt du 29 décembre 2007 est prescrite,

- dire que [G] [M] est irrecevable en ses demandes au titre du TEG qui serait soi-disant erroné dans le prêt du 29 décembre 2007.

À titre liminaire

- déclarer [G] [M] irrecevable en son action en annulation de la stipulation des intérêts conventionnels,

- constater que [G] [M] verse aux débats pour affirmer que le TEG mentionné dans l'offre de prêt serait erroné, des rapports non contradictoirement établis par la société Humania Consultants et par M. Robin,

- Écarter des débats les rapports produits par [G] [M] pour non respect du contradictoire,

- débouter [G] [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

À titre principal

- constater que [G] [M] fonde son action sur le seul fondement du rapport de la société Humania Consultants, qui ne réalise aucun calcul des TEG de l'offre du 7 décembre 2007 et de l'avenant et qui se contente de déclarer que ceux-ci sont faux, sans démontrer que l'erreur est supérieure à une décimale,

- dire que [G] [M] ne rapporte pas la preuve de la fausseté des TEG mentionnés dans l'offre,

- débouter [G] [M] de ses demandes, fins et conclusions.

À titre subsidiaire

- constater que la CEPAC verse aux débats le calcul détaillé du TEG en précisant exactement les données prises en compte correspondant à celles mentionnées dans l'offre de prêt et dans l'avenant,

- constater que la société Humania Consultants aboutit au même taux de période que ceux mentionnés par la banque,

- dire que les TEG mentionnés dans l'offre de prêt au titre du prêt de 184.500 euros et dans l'avenant ne sont pas erronés et ont été calculés conformément au mode de calcul prévu à l'annexe de l'article R313-1 du code de la consommation,

- dire que le TEG mentionné dans le prêt a été calculé conformément à l'article L313-1 du code de la consommation,

- dire que la mention d'un calcul des intérêts dus sur 360 jours n'a aucune incidence sur le TEG mentionné dans l'offre et dans l'avenant,

- dire que la mention d'un calcul des intérêts dus sur 360 jours n'a aucune incidence sur les intérêts calculés et mentionnés dans le tableau d'amortissement contractuel puisqu'ils sont calculés en mois et non en jour,

- dire que la différence d'intérêts perçus, durant la période de préfinancement ou de raccordement (c'est-à-dire entre la période de déblocage des fonds et la date d'amortissement) est infime,

- dire que la sanction ne saurait être la nullité de la stipulation d'intérêts mais l'éventuelle réparation du préjudice réel de l'emprunteur consistant à la différence d'intérêts à savoir, si on s'en réfère au calcul à 7,9 euros,

- constater que dans le cadre de l'avenant, il n'y a pas eu de période de raccordement,

- dire que les intérêts contractuellement prévus au titre de l'avenant ont été calculés en mois et non en jour, donc sur 365 jours,

- dire que [G] [M] s'est empressé d'agir à l'encontre de la Caisse d'Épargne CEPAC sur le seul fondement de rapports insuffisants ne démontrant pas l'inexactitude du taux effectif global,

- dire que cette procédure est abusive,

- condamner [G] [M] à régler à la CEPAC la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- condamner [G] [M] à régler à la Caisse d'épargne CEPAC la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Me Gilles Mathieu.

À titre infiniment subsidiaire - si par extraordinaire la cour venait à considérer que [G] [M] rapporte la preuve, par le rapport de la société Humania Consultants, de l'inexactitude du taux effectif global mentionné dans l'offre du 7 décembre 2011 et de l'avenant du 7 février 2011

- dire que la seule sanction d'un TEG erroné est la substitution des intérêts légaux aux intérêts conventionnels,

- dire que [G] [M] ne rapporte pas la preuve d'avoir refusé, lors de la souscription du contrat, une autre offre qui aurait été plus intéressante,

- débouter dans ces conditions [G] [M], qui ne rapporte pas la preuve d'un préjudice financier, de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- dire que [G] [M] ne peut demander à ce que la Caisse d'épargne CEPAC soit condamnée au paiement de dommages et intérêts,

- débouter [G] [M] de sa demande d'indemnisation,

- dire que le taux légal qui devra substituer le taux contractuel est le taux légal en vigueur au moment où il est acquis,

- dire qu'en application de l'article L312-33 du code de la consommation, le juge a un pouvoir d'appréciation dans la sanction du TEG erroné,

- ramener la sanction à de plus basse proportion que celle de la substitution totale du taux légal au taux contractuel,

- prononcer la compensation entre les sommes dues par [G] [M] au titre du contrat et les sommes pour lesquelles la concluante serait par extraordinaire condamnée à payer.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la prescription :

La CEPAC soulève la prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts et de l'action en nullité de ladite stipulation en indiquant pour l'action en déchéance que le point de départ est le jour de l'acceptation de l'offre et qu'elle est par conséquent prescrite depuis le 29 décembre 2012. S'agissant de l'action en nullité de la stipulation d'intérêt, dont le point de départ est le jour où l'emprunteur consommateur ou non professionnel a connu ou aurait dû connaître l'irrégularité alléguée, l'action est également prescrite depuis le 29 décembre 2012, le point de départ de la prescription devant être fixé au jour du prêt puisque celui-ci permettait de constater les irrégularités invoquées.

Le point de départ de la prescription quinquennale de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel formée à raison de l'inexactitude du taux effectif global mentionné dans l'offre de prêt court, s'agissant d'un consommateur ou d'un non professionnel, à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux, soit à la date de la convention si l'examen de sa teneur met l'emprunteur en mesure de déceler lui-même l'erreur à la lecture de l'acte, soit, lorsque tel n'est pas le cas, à la date de révélation de celle-ci à l'emprunteur.

L'action en déchéance du droit aux intérêts, fondée sur les articles L312-8 et L312-33 dans leur rédaction applicable au présent litige, soumise à la prescription de l'article L110-4 du code de commerce, a vu son délai de prescription de 10 ans être réduit à 5 ans depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008. Elle a le même point de départ que l'action en nullité.

Au soutien de son action s'agissant du prêt consenti le 29 décembre 2007, [G] [M] fait valoir que le taux effectif global est erroné en raison de l'omission des frais de notaires et de garanties, de l'omission de la phase de préfinancement et des frais y afférant et de l'omission des frais d'assurance incendie obligatoire. Il expose que le TEG est également erroné, en dehors de toute omission de frais, à raison de l'absence de mention de la durée de la période et du recours à l'année lombarde.

L'offre de prêt acceptée le 29 décembre 2007 comporte les mentions suivantes :

- montant 184 500 euros

- préfinancement 4,50 % fixe, durée 24 mois, périodicité mensuelle, nombre 24, assurance 42,44 €

- amortissement 4,50 % fixe, durée 300 mois, périodicité mensuelle, nombre 300, montant 1025,51 assurance 42,44, échéance assurance incluse 1067,95 8

- taux effectif global 4,93 %

frais de dossier 450,00

- frais de garantie :

- taux de période 0,41 %

- coût total sans assurance/accessoires : 123 153,00 8

- coût total avec assurance accessoires:136 335,00 €

- le coût total du crédit et le taux effectif global ne tiennent pas compte des intérêts intercalaires, de la prime de raccordement d'assurance et le cas échéant des primes d'assurance de la phase de préfinancement.

(')

- Garanties : privilège de prêteur de deniers rang 1

Les frais de garantie, évalués par le prêteur, sont donnés à titre indicatif, ils devront être définis par le notaire.

Sur ce dernier point, [G] [M] pouvait immédiatement constater par lui-même, à la seule lecture de ces conditions que les frais de garantie n'avaient fait l'objet d'aucune évaluation et qu'ils n'étaient donc pas pris en compte dans le calcul du TEG, l'article 3 des conditions générales et spécifiques du prêt stipulant que le TEG ne tenait compte des frais de garantie que s'ils étaient connus de matière précise antérieurement à la conclusion du contrat.

À la simple lecture des conditions du prêt, [G] [M] était également en mesure de constater, par lui-même, sans opérer aucun calcul, que n'étaient pas pris en compte dans le calcul du TEG, ni les frais de garantie, ni ceux relatifs à la période de préfinancement. La durée de la période est en revanche expressément indiquée s'agissant d'un prêt remboursable mensuellement, sans qu'il y ait lieu de distinguer la période et la périodicité comme le soutient l'appelant.

Dans la mesure où il avait connaissance, à la date du prêt, de certaines irrégularités dans la détermination du TEG indiqué qu'il reproche à la banque et qui pouvaient fonder son action alors qu'il n'a pas agi dans le délai de prescription qui expirait, en vertu des dispositions ci-dessus, au plus tard le 29 décembre 2012 alors que l'assignation introductive d'instance est datée du 13 juillet 2015, l'emprunteur ne peut invoquer la découverte de prétendues nouvelles irrégularités issues de travaux de tiers, auxquels il a eu recours, sous peine de faire dépendre le délai de prescription de sa seule volonté.

Ses demandes sont prescrites au titre de ce prêt.

S'agissant des irrégularités invoquées au titre de l'avenant du 7 février 2011, aucune prescription ne peut être encourue alors que l'assignation a été délivrée le 13 juillet 2015.

- Sur l'ouverture de l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels :

La CEPAC, exposant que l'inexactitude du taux effectif global dans une offre de prêt ne peut être sanctionnée que par la déchéance du droit aux intérêts, fait valoir que l'action en nullité est irrecevable, les dispositions spéciales prévues par l'article L312-8 devenu l'article L313-25 du code de la consommation primant sur les dispositions générales qui imposent, à peine de nullité, la mention écrite du TEG dans un contrat de prêt d'argent.

Mais les dispositions d'ordre public qui fixent, à peine de déchéance du droit aux intérêts, les informations de nature pré-contractuelle qui doivent être communiquées dans une offre de prêt immobilier, n'ont ni pour objet, ni pour effet, de déroger aux dispositions générales, également d'ordre public, qui obligent le prêteur, en vertu de la combinaison des articles 1907, alinéa 2, du code civil et L 313-2 devenu L 314-5 du code de la consommation, à fixer par écrit le TEG dans tout acte de prêt. Cette dernière obligation est une condition de validité de la stipulation de l'intérêt conventionnel qui ne supporte aucune exception quelles que soient la nature du prêt et la qualité de l'emprunteur.

Les actions en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel et en déchéance du droit aux intérêts sont distinctes ; elles n'ont ni la même finalité, ni le même régime juridique. Dans le premier cas, l'action tend à sanctionner la méconnaissance d'une condition de formation de la clause d'intérêt, dans le second, elle sanctionne l'inexactitude d'une information pré-contractuelle due à l'emprunteur. En outre, les sanctions prévues, qui peuvent se chevaucher sans se contredire, n'ont pas les mêmes caractères, dans un cas, la substitution de plein droit du taux de l'intérêt légal au taux conventionnel par l'effet de l'annulation de la clause d'intérêt, dans l'autre, la déchéance facultative du droit aux intérêts soumise à l'aléa du pouvoir discrétionnaire reconnu au juge.

Il en résulte que l'appelant est fondé à agir en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel.

- Sur la demande tendant à écarter des débats les rapports d'analyse financière produits et communiqués par [G] [M] :

Un rapport d'expertise extra-judiciaire, obtenu par l'une des parties de manière non-contradictoire, ne peut être écarté des débats lorsqu'il a fait l'objet d'une discussion contradictoire au cours de l'instance judiciaire dans laquelle il est régulièrement produit et communiqué.

Il incombe seulement au juge de ne pas fonder exclusivement sa décision sur cette pièce.

La demande tendant à écarter des débats les rapports d'analyse financière produits par [G] [M] est rejetée.

- Sur l'inexactitude du TEG en dehors de toute omission de frais :

[G] [M] soutient que l'analyse mathématique de l'avenant par la société Humania Consultants fait apparaître des inégalités qui sont en contradiction avec les dispositions d'ordre public de l'article R313-1 du code de la consommation, que le total des remboursements supportés par l'emprunteur est supérieur au capital disponible, que le montant de l'erreur est de 98,83 euros et que cela signifie soit que le TEG par période est erroné, soit que le coût du crédit est erroné, soit que le tableau d'amortissement est erroné. Il ajoute que le TEG annoncé par la banque ne permet pas de vérifier l'égalité exigée par les dispositions légales et qu'il est donc entaché d'une irrégularité mathématique de sorte qu'il est erroné en dehors de toute omission de frais.

La CEPAC réplique qu'il n'est démontré aucune erreur du TEG excédant une décimale, que le rapport Robin n'effectue aucun calcul mathématique du TEG et que les rapports Humania Consultants aboutissent à un taux de période identique à celui calculé par la CEPAC et mentionné sur le prêt.

Il appartient à [G] [M] qui se prévaut d'un TEG erroné de démontrer que l'erreur ou l'irrégularité dont il se prévaut affecte le TEG figurant sur le prêt de plus d'une décimale, à son détriment.

Le rapport Robin, qui se contente de valider la méthode employée par la société Humania Consultants sans procéder à aucun calcul du TEG du prêt souscrit par [G] [M], est par conséquent parfaitement inopérant.

Concernant l'avenant, le rapport de la société Humania Consultants calcule un taux de période de 0,36968 % établissant un TEG de 4,43616 % alors que l'avenant mentionne un taux de période de 0,370 % et un TEG de 4,436 % (donc identique à celui déterminé par la société Humania Consultants).

La « différence » provient manifestement d'un arrondi du taux de période mentionné par la banque, mais aucune erreur du TEG lui-même au-delà de la décimale n'est établie. Le moyen est rejeté.

- Sur le recours à l'année lombarde :

[G] [M] soutient que les intérêts conventionnels, qui doivent être impérativement calculés sur l'année civile à peine de nullité de la stipulation d'intérêts, ont été calculés pour l'avenant sur la base d'une année de 360 jours et il en veut pour preuve la clause figurant sur l'avenant.

La CEPAC fait valoir que la clause 30/360 est une clause de rapport ou d'équivalence financière, qu'elle n'a aucune incidence sur le calcul du TEG et que les intérêts ont bien été calculés sur une année civile.

Il résulte des dispositions combinées des articles 1907 alinéa 2 du code civil, L313-1, L313-2, R313-1 et R314-3 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable au jour de la conclusion des prêts, que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, l'année civile comptant 365 jours ou pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés, un mois normalisé comptant 30,41666 jours (c'est-à-dire 365/12) que l'année soit bissextile ou non.

S'agissant d'un prêt remboursable par mensualités, le calcul des intérêts prenant pour base le mois normalisé, ou la fraction d'année soit 1/12, aboutit au même résultat qu'en retenant le rapport 30/360 de sorte que le grief n'est pas justifié.

À cet égard le calcul opéré par l'appelant en page 31 de ses conclusions figurant une année à 12,66666667 mois aboutissant à un TEG de 4,9783 % ne peut être retenu, la fraction d'année utilisée ne correspondant pas à cette définition.

La demande en nullité de la stipulation d'intérêts est rejetée, tout comme la demande en déchéance du droit aux intérêts.

- Sur les manquements de la banque à ses obligations :

La demande en paiement de dommages-intérêts formée par [G] [M], sur le fondement de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, en réparation de manquements à des obligations d'information, de loyauté et d'honnêteté ne peut qu'être rejetée puisque fondée sur des griefs que la cour écarte.

- Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive :

La CEPAC forme une demande de dommages et intérêts pour procédure abusive eu égard à la faiblesse du contenu des rapports d'analyse financière produits par [G] [M].

Or en cette matière complexe, s'agissant du mode de calcul des intérêts notamment, [G] [M] a pu de bonne foi considérer que les rapports produits pouvaient justifier son action de sorte qu'aucun abus ni intention de nuire ou de porter atteinte à l'image de la Caisse d'Épargne CEPAC ne sont caractérisés. La demande est rejetée et le jugement infirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 9 juin 2016 en ce qu'il a alloué à la CEPAC la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

Déboute la Caisse d'Épargne CEPAC de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Confirme pour le surplus la décision déférée,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne [G] [M] à payer à la Caisse d'Épargne CEPAC la somme de trois mille euros,

Condamne [G] [M] aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/12519
Date de la décision : 29/03/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8B, arrêt n°16/12519 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-29;16.12519 ?
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