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22/02/2018 | FRANCE | N°16/12753

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 22 février 2018, 16/12753


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 22 FEVRIER 2018

jlp

N° 2018/ 187













Rôle N° 16/12753







[S] [H]





C/



[T] [N]

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES LE COUNTRY PARK ROQUEBRUNE

Syndicat des copropriétaires LES PERGOLAS





















Grosse délivrée

le :

à :



Me Lionel CARLES



Me Laur

ence CRESSIN



la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ



Me Florent ELLIA





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 28 Juin 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01639.





APPELANT ET INTIME



Maître [S] [H]

demeurant [Adresse ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 22 FEVRIER 2018

jlp

N° 2018/ 187

Rôle N° 16/12753

[S] [H]

C/

[T] [N]

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES LE COUNTRY PARK ROQUEBRUNE

Syndicat des copropriétaires LES PERGOLAS

Grosse délivrée

le :

à :

Me Lionel CARLES

Me Laurence CRESSIN

la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ

Me Florent ELLIA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 28 Juin 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01639.

APPELANT ET INTIME

Maître [S] [H]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Lionel CARLES de la SELARL CARLES, avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIMES ET APPELANTS

Monsieur [T] [N] en sa qualité de membre du Syndicat des Copropriétaires 'Les Pergolas'

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Laurence CRESSIN de l'ASSOCIATION JEAN CLAUDE BENSA & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

Syndicat des copropriétaires LES PERGOLAS sis [Adresse 2], représenté par son syndic en exercice la SAS TREPIER VENTURINI IMMOBIILIER, sis [Adresse 3]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Marcel BENHAMOU de l'ASSOCIATION BENHAMOU-HARRAR, avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIME

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES LE COUNTRY PARK ROQUEBRUNE dont le siège social est [Adresse 4], pris en la personne de son syndic en exercice le Cabinet LVS, [Adresse 5]

représenté par Me Florent ELLIA, avocat au barreau de NICE, assisté de Me Pascal ALIAS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Décembre 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller

Madame Sophie LEONARDI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Février 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Février 2018,

Signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

L'immeuble en copropriété « les Pergolas », qui abrite sept appartements et comporte quatre niveaux dont un sous-sol à usage de parking, a été édifié à [Localité 1] (Alpes-Maritimes) sur la base d'un permis de construire délivré le 3 mai 2004 et d'un permis modificatif en date du 24 novembre 2009 sur une parcelle de 1216 m² cadastrée section AV n° [Cadastre 1] ; le parking est accessible par une passerelle en bordure de l'avenue de France (ancienne RN n° 559) permettant d'accéder à la toiture terrasse de l'immeuble puis au parking grâce à un monte-voitures ; un accès à un garage sous la passerelle et un accès pour piétons ont également été aménagés sur le chemin de la Vigie, desservant en contrebas d'autres parcelles, dont la parcelle AV n° [Cadastre 2] constituant le terrain d'assise de l'immeuble en copropriété « le country Park».

Le 3 mai 2013, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park a déposé auprès du maire de [Localité 1] une déclaration préalable de travaux pour la mise en place d'un portail télécommandé à l'entrée du chemin de la Vigie, sans opposition le 28 juin 2013 ; le portail a été installé courant 2015, empêchant les copropriétaires de l'immeuble les Pergolas d'accéder à pied et en voiture à la résidence par le chemin de la Vigie, ce qu'a constaté Me [X], huissier de justice, dans un procès-verbal de constat établi le 13 novembre 2015.

Se fondant sur l'état d'enclave du fonds, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas a, par exploit du 10 février 2016, fait assigner à jour fixe le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park devant le tribunal de grande instance de Nice en vue d'obtenir, sur le fondement des articles 682 et suivants du code civil, la suppression du portail métallique à double battant radiocommandé et du portillon piéton installé sur le chemin de la Vigie et, subsidiairement, la remise contre remboursement de dix télécommandes permettant l'ouverture et la fermeture du portail.

[S] [H] et [T] [N], copropriétaires au sein de l'immeuble les Pergolas, sont intervenus volontairement à l'instance.

Le tribunal, par jugement du 28 juin 2016, a débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas, ainsi que MM. [H] et [N] de l'ensemble de leurs demandes et les a condamnés in solidum à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [H], le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas et M. [N] ont régulièrement relevé appel de ce jugement, respectivement les 7 juillet, 18 juillet et 29 juillet 2016, et les trois procédures d'appel ont été jointes.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas invoque, en premier lieu, le rapport d'expertise établi à sa demande par M. [S], géomètre expert, en date du 9 février 2017, de nature à remettre en cause, selon lui, la propriété du syndicat le country Park sur le chemin de la Vigie ; il soutient, par ailleurs, que l'installation du portail litigieux à l'entrée du chemin et sa fermeture ont eu pour conséquence immédiate de priver les copropriétaires et les résidents de l'immeuble de l'accès automobile au garage commun situé sous la rampe d'accès à la toiture terrasse, de l'accès piéton à l'entrée principale de la résidence située sur le chemin de la Vigie où sont installés les boîtes aux lettres, ainsi que les parlophones et vidéophones, et de l'accès des services de sécurité et des entreprises d'entretien ou de déménagement ; il fait ainsi valoir que l'accès, dont il dispose, par l'avenue de France, qui sert seulement aux véhicules des copropriétaires, est insuffisant pour la desserte normale de l'immeuble.

Il demande donc à la cour (conclusions déposées le 2 novembre 2017 par le RPVA) de :

A titre principal et in limine litis,

'désigner tel géomètre expert qu'il plaira à la cour avec la mission de :

' convoquer régulièrement toutes les parties,

' recueillir les explications des parties et se faire communiquer tous documents utiles, en l'occurrence toute la documentation cadastrale, hypothécaire, l'ensemble des titres de propriété, plans et plus généralement l'ensemble des pièces relatives à l'origine de la voie en cause,

' dire si le syndicat le country Park peut valablement se comporter en véritable propriétaire et justifie d'un titre sur la voie,

' plus généralement, déterminer les droits des parties sur la voie,

' faire toutes constatations utiles en vue de permettre la solution ultérieure du litige,

'surseoir à statuer au fond, dans l'attente de la désignation d'un expert géomètre et du dépôt de son futur rapport,

Subsidiairement sur le fond,

Vu les dispositions des articles 682 et suivants du code civil,

Vu les dispositions de l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965,

(')

'réformer dans son intégralité le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nice en date du 28 juin 2016,

'constater l'état d'enclave légale de l'immeuble les Pergolas,

'constater que depuis l'installation du portail par le syndicat des copropriétaires le country Park, il ne bénéficie plus d'un accès suffisant pour accéder à sa propriété et assurer une utilisation normale de son fonds,

'ordonner au syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park de procéder à la suppression du portail métallique à double battant et radiocommandé ainsi que du portillon piéton installé sans droit ni titre sur le chemin de la Vigie et de rétablir l'accès de cette voie à son profit et ce, sous astreinte de 1000 € par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

Subsidiairement dans l'hypothèse où la cour viendrait estimer que le portail serait de nature à sécuriser l'accès du chemin de la Vigie de sorte que sa suppression ne devrait pas être ordonnée,

'condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park à rétablir l'accès au chemin de la Vigie à son profit et ordonner la remise de 10 bips d'accès du portail, dont le coût lui sera remboursé, sous astreinte de 1000 € par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

'lui donner acte qu'il a offert de participer financièrement aux frais d'installation du portail et de son entretien,

En tout état de cause,

'condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park à lui payer la somme de 500 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis,

'condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park à lui payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [H] conclut également à l'instauration d'une mesure d'expertise destinée à déterminer le statut juridique de la voie carrossable dénommée chemin ou route de la Vigie ; subsidiairement, il sollicite de voir :

Vu les articles 544 et suivants du code civil,

Vu l'article 1382 du code civil,

Vu les titres de propriété versés aux débats,

'dire et juger que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park a commis une faute engageant sa responsabilité en procédant d'autorité à l'installation d'un portail sur la route de la Vigie alors qu'elle ne dispose d'aucun titre sur cette voie et en privant la copropriété les Pergolas de l'accès à l'immeuble par cette route au mépris du droit de passage qui lui a été reconnu par les titres de 1924 et donc, par voie de conséquence, privant la copropriété d'une desserte suffisante pour accéder à son fonds et en assurer une utilisation normale,

'dire et juger que ces faits constituent une faute entraînant la responsabilité civile de la copropriété le country Park,

'dire et juger qu'il a subi un préjudice du fait de l'impossibilité de jouir normalement pendant plus d'un an de ses biens immobiliers, mais également du fait de l'impossibilité en l'état de procéder à leur vente,

'condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park à lui payer la somme de 500 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis,

'condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park à lui payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile (conclusions déposées le 27 novembre 2017 par le RPVA).

M. [N] demande à la cour (conclusions déposées le 24 octobre 2016 par le RPVA) de :

Vu les articles 682 et suivants du Code civil,

Vu les articles 1382 et suivants du Code civil,

Vu la théorie des troubles anormaux de voisinage,

'infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nice le 28 juin 2016,

'faire droit aux demandes du syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park,

'condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park à lui payer la somme de 10 000 € en réparation du préjudice subi suite au retard pris dans la réalisation de la vente,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas était débouté de ses demandes,

Vu les articles 1382 et suivants du Code civil,

Vu la théorie des troubles anormaux de voisinage,

'condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park à lui payer la somme de 40 000 € en réparation des préjudices subis,

En tout état de cause,

'condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park sollicite de voir (conclusions déposées le 1er décembre 2017 par le RPVA) :

'déclarer irrecevable la demande de M. [H] relative à son droit de propriété, comme étant formulée pour la première fois en appel et de manière nouvelle, sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile,

'en tout état de cause, rejeter les prétentions des appelants comme étant mal fondées,

'confirmer la décision dont appel,

'condamner chacun des appelants à lui payer la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose pour l'essentiel que la demande d'expertise visant à déterminer le statut juridique du chemin de la Vigie constitue une demande nouvelle irrecevable, que son droit de propriété sur le chemin n'est d'ailleurs pas contestable, dont l'origine procède d'un acte de vente (par Sir [K] à Mme [R] de la villa Kairo) des 10 et 14 juin 1924, ainsi qu'il ressort d'un courrier de M. [F], géomètre expert, que l'immeuble les Pergolas, dont l'accès principal est situé par l'avenue de France, ne se trouve nullement enclavé et que le mur d'origine constituant la clôture de la copropriété a été démoli en sa partie mitoyenne en haut du chemin de la Vigie pour aménager une aire de stationnement « sauvage », laquelle n'était pas prévue au permis de construire et qui ne desservait pas la copropriété, ne donnant accès qu'à une restanque en friche située à l'arrière de l'immeuble.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 5 décembre 2017.

MOTIFS de la DECISION :

1-la demande d'expertise visant à déterminer le statut juridique du chemin de la Vigie :

Il résulte de l'article 564 du code de procédure civile qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; l'article 566 du même code dispose que les parties peuvent également ajouter aux prétentions soumises au premier juge toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.

En l'occurrence, la demande d'expertise, en ce qu'elle tend à rechercher si le terrain d'emprise du chemin de la Vigie a été ou pas inclus dans la vente par Sir [M] [K] de la villa Kairo par acte 10 et 14 juin 1924 et donc, si les copropriétaires de l'immeuble le country Park en sont devenus propriétaires par l'effet des actes translatifs de propriété successifs, n'a strictement aucun rapport avec la demande initiale, dont le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas a saisi le tribunal de grande instance de Nice sur le fondement des articles 682 et suivants du code civil en vue du désenclavement de la parcelle AV n° [Cadastre 1] sur laquelle l'immeuble a été construit ; la circonstance que le syndicat des copropriétaires ait fait procéder, en cours d'instance, à une expertise privée par un géomètre expert, M. [S], qui conclut notamment, dans un rapport en date du 9 février 2017, que la partie la plus en amont du chemin, prenant son accès sur l'avenue de France, acquise par Sir [M] [K] le 16 avril 1898, n'a pas été comprise dans la vente des 10 et 14 juin 1924, ni dans un acte ultérieur, ne peut être regardé comme un fait, dont la révélation justifierait la demande d'expertise, présentée pour la première fois devant la cour, alors que les copropriétaires regroupés au sein du syndicat disposaient, avant l'introduction de l'instance devant le tribunal, de l'ensemble des éléments leur permettant, éventuellement, de s'interroger sur le statut juridique du chemin litigieux, dont ils ne revendiquent d'ailleurs pas eux-mêmes la propriété ; la demande d'expertise, formulée pour la première fois en cause d'appel, doit donc être déclarée irrecevable.

2-l'état d'enclave de l'immeuble les Pergolas construit sur la parcelle AV n° [Cadastre 1] :

Il résulte des pièces produites, notamment les plans établis le 3 décembre 2003 par le cabinet d'architecture [O] dans le cadre du dépôt de la demande de permis de construire, finalement obtenu le 3 mai 2004, la notice explicative rédigée par M. [B], architecte, en annexe à la demande de permis modificatif, obtenu le 24 novembre 2009, le plan de masse à l'échelle de 1/100 joint à cette demande (pièce n° 7 du syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas) et le plan de masse à l'échelle de 1/200 également joint à la demande de permis modificatif (pièce n° 6. 2 du syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park), que l'immeuble, dont la construction a été réalisée sur la parcelle AV n° [Cadastre 1] comportait initialement une entrée pour véhicules par l'avenue de France au moyen d'une rampe d'accès conduisant au parking en sous-sol par un « monte voitures », l'accès à l'immeuble se faisant sur le toit par un escalier ouvert avec deux ascenseurs internes desservant l'un le garage (le « monte voitures »), l'autre les niveaux d'habitation, ainsi qu'une entrée piétonne sur le chemin de la Vigie par un portail où se trouvaient un interphone et les boîtes aux lettres (au nombre de 9), visibles sur les photographies n° 4, 5 et 6 du procès-verbal de constat dressé le 13 novembre 2015 par Me [X], huissier de justice, et que la modification, objet du second permis délivré le 24 novembre 2009, a consisté pour l'essentiel à déplacer l'entrée principale piétonne du chemin de la Vigie sur l'avenue de France et à fusionner deux appartements, le nombre d'appartements passant ainsi de 9 à 7, sans modification de la SHON de 608 m² initiale.

Entre-temps, par un courrier du 29 août 2006, le conseil des propriétaires indivis de la parcelle AV n° [Cadastre 1] (MM. [N], [I] et [A]), bénéficiaires du permis de construire du 3 mai 2004, ont sollicité auprès du syndic de la copropriété le country Park l'octroi d'un droit de passage sur la route privée de la Vigie afin de pouvoir accéder au terrain, moyennant le paiement d'une indemnité forfaitaire de 100 000 €, ce courrier précisant que le droit de passage ne doit porter que sur une distance d'une vingtaine de mètres entre la RN 7 (l'avenue de France) et l'accès au garage aujourd'hui détruit sur le terrain ; soumise au vote de l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble le country Park réunie le 20 octobre 2006, cette demande a été rejetée aux termes de la décision n° 13 ; il est constant et cela résulte clairement du plan topographique établi le 10 novembre 1998 par M. [S], géomètre expert, que les anciennes parcelles AV n° [Cadastre 3] et [Cadastre 4] (formant l'actuelle parcelle AV n° [Cadastre 1]), sur lesquelles se trouvaient édifiés une villa et un garage attenant, démolis lors de l'édification de l'immeuble, n'étaient accessibles que par le chemin de la Vigie, l'entrée du garage se trouvant sur cette voie, de même que la villa au moyen de deux portails, l'un près du garage, l'autre en contrebas.

L'immeuble construit sur la parcelle AV n° [Cadastre 1], qui comporte quatre niveaux, a permis la réalisation d'un accès par l'avenue de France, puisqu'une rampe a été créée conduisant au toit de l'immeuble à partir duquel on accède au garage et aux appartements ; jusqu'à la mise en place, au cours de l'été 2015, d'un portail et d'un portillon sur le chemin de la Vigie, les copropriétaires de l'immeuble les Pergolas bénéficiaient d'une tolérance, leur permettant d'accéder par cette voie à un parking situé sous la rampe d'accès et d'utiliser le portail piétons installée dans la partie basse de la parcelle ; en mettant en place ce portail et ce portillon sur la base d'une déclaration préalable sans opposition du maire de [Localité 1], le 26 juin 2013, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park a nécessairement révoqué cette tolérance.

Contrairement à ce qu'indique le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park, le mur d'origine constituant la clôture de la copropriété les Pergolas n'a pas été démoli, en haut du chemin de la Vigie, pour aménager une aire de stationnement « sauvage », non prévue au permis de construire, puisque le parking sous la rampe à la place de l'ancien garage est clairement mentionné sur les plans joints à la demande de permis de construire de 2004, de même que sur les plans de masse annexés à la demande de permis de construire modificatif sollicité en 2009, y compris sur le plan de masse à l'échelle de 1/200 que produit le syndicat intimé ; il est établi par les pièces produites que ce parking situé sous la rampe d'accès était utilisé, avant qu'il ne fut rendu inaccessible courant 2015, par les entreprises chargées de la maintenance de l'immeuble ou de l'entretien des espaces verts, qui y stationnaient leurs véhicules ; il ne peut donc être soutenu que cet espace de stationnement était dépourvu d'utilité et ne permettait d'accéder qu'à une restanque en friche située à l'arrière de l'immeuble.

Rien ne permet d'affirmer que l'entrée piétonne à l'immeuble, qu'il a été prévu d'aménager en vertu du permis modificatif du 24 novembre 2009 par l'avenue de France, soit insuffisante à sa desserte normale au sens de l'article 682 du code civil ; tel n'est pas le cas, en revanche, pour l'accès véhicules par l'avenue de France, qui ne peut permettre d'accéder qu'au garage en sous-sol des habitants de l'immeuble, et ne peut être utilisé pour le stationnement des véhicules utilitaires des fournisseurs et prestataires de services ; s'il existe un parking d'attente en bordure de la rampe d'accès, les entreprises doivent pouvoir accéder, dans des conditions normales, à la partie basse de la parcelle pour assurer la maintenance de l'immeuble ou l'entretien des espaces verts ; de ce point de vue, l'immeuble ne dispose pas d'un accès suffisant à la voie publique, alors que le permis de construire obtenu prévoyait la réalisation d'un parking sous la rampe pour en assurer la desserte complète.

Il convient, dans ces conditions, non pas d'ordonner la suppression du portail et du portillon télécommandés, mais de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park, selon des modalités qui seront précisées ci-après, soit à déplacer le portail et le portillon afin que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas puisse accéder au parking aménagé sous la rampe d'accès à l'immeuble, soit à remettre au syndic de la copropriété cinq (et non pas dix) télécommandes destinées à permettre l'ouverture du portail pour le passage des véhicules des fournisseurs ou prestataires de services et leur stationnement sur le parking aménagé à cet effet.

3-les demandes indemnitaires du syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas, ainsi que de M. [H] et de M. [N] :

Le fait pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park d'avoir mis fin à une tolérance de passage par le chemin de la Vigie, alors que les copropriétaires de l'immeuble les Pergolas ne disposent d'aucune servitude de passage conventionnelle et qu'il n'est pas établi en quoi l'entrée piétonne de l'immeuble par l'avenue de France constituerait un accès insuffisant, n'est pas en soi constitutif d'une faute de nature à entraîner de sa responsabilité sur un fondement quasi délictuel ; le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les pergolas, qui invoque l'existence d'un préjudice subi collectivement par l'ensemble des copropriétaires, ne peut dès lors qu'être débouté de sa demande en paiement de la somme de 500 000 € à titre de dommages et intérêts.

Pour solliciter le paiement de la même somme de 500 000 € à titre de dommages et intérêts, M. [H], qui a mis en vente auprès de diverses agences immobilières l'appartement de type T 3 dont il est propriétaire, au prix de 1 380 000 €, fait valoir que plusieurs acquéreurs potentiels se sont désistés compte tenu du procès en cours et de l'impossibilité de pouvoir accéder à la résidence par son entrée principale (sic) par le chemin de la Vigie ; là encore, aucune faute de nature délictuelle ne peut être reprochée au syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas pour avoir mis fin à une simple tolérance de passage.

Pour les mêmes raisons, M. [N] ne saurait imputer à faute au syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas le retard apporté à la vente de son propre appartement, régularisée par acte notarié du 19 février 2016, ni le trouble de jouissance subi par l'acquéreur à défaut de rétablissement de l'accès au chemin de la Vigie, évalué à la somme de 30 000 € et objet d'une convention de séquestre insérée dans l'acte.

4-les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Au regard de la solution apportée au règlement du litige, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park doit être condamné aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas la somme accessoire de 3000 € au titre des frais non taxables que celui-ci a dû exposer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; il n'y a pas lieu, en revanche, de faire application de ce texte au profit de M. [H] et de M. [N].

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Déclare irrecevable la demande d'expertise, formulée pour la première fois en cause d'appel,

Au fond, infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Dit que l'immeuble en copropriété « les Pergolas », édifié à [Localité 1], ne dispose pas d'un accès suffisant à la voie publique au sens de l'article 682 du code civil pour sa desserte par véhicules,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park soit à déplacer le portail et le portillon télécommandés mis en place à l'entrée du chemin de la Vigie afin que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas puisse accéder au parking aménagé sous la rampe d'accès à l'immeuble par l'avenue de France, soit à remettre au syndic de la copropriété cinq télécommandes destinées à permettre l'ouverture du portail pour le passage des véhicules des fournisseurs ou prestataires de services et leur stationnement sur le parking aménagé à cet effet,

Dit que le déplacement du portail et du portillon devra intervenir dans le délai de quatre mois suivant la signification du présent arrêt sous peine d'une astreinte de 200 € par jour de retard pendant le délai de quatre mois passé lequel il sera à nouveau statué et que la remise des télécommandes devra quant à elle intervenir dans le délai de quinze jours suivant la signification du présent arrêt sous peine également d'une astreinte de 200 € par jour de retard pendant le même délai de quatre mois à l'issue duquel il sera à nouveau statué,

Dit que, selon l'option choisie, le coût des travaux de déplacement du portail ou le coût des télécommandes seront remboursés, sur facture, par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas au syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park,

Déboute le syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas, ainsi que de M. [H] et de M. [N] de leurs demandes indemnitaires,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le country Park aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble les Pergolas la somme accessoire de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu de faire application de ce texte au profit de M. [H] et de M. [N],

Dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 16/12753
Date de la décision : 22/02/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°16/12753 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-22;16.12753 ?
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