COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 08 FEVRIER 2018
N° 2018/40
Rôle N° 13/10621
[Y] [F]
Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX - SPA
C/
SELAS [O] SOCIETE D'AVOCATS
SARL ETUDES ET DEVELOPPEMENT IMMOBILIERS
Grosse délivrée
le :
à :
Me Rachel COURT-MENIGOZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE,
avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Me Isabelle FICI,
avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge commissaire de CANNES en date du 14 Mai 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2012/01632.
APPELANTS ET INTIMES
Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX - SPA - Association soumise à la loi du 1er juillet 1901
dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège,
représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée par Me Marc BOISSEAU, avocat au barreau de PARIS, plaidant
Maître [Y] [F]
ès qualités de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la SARL ETUDE DEVELOPPEMENT IMMOBILIER
et intervenant volontaire en qualité de liquidateur judiciaire
né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 1]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2].
représenté par Me Rachel COURT-MENIGOZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEES
SELAS [O] SOCIETE D'AVOCATS,
dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège,
représentée par Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
SARL ETUDES ET DEVELOPPEMENT IMMOBILIERS
dont le siège social est [Adresse 4], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
représentée par Me Isabelle FICI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assistée par Me Pascal NEVEU de la SELARL NEVEU- CHARLES & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE substituée par Me Matthieu BOTTIN, avocat au barreau de NICE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 13 Décembre 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Anne CHALBOS, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
M. Bernard MESSIAS, Président de chambre
Madame Catherine DURAND, Conseiller
Madame Anne CHALBOS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Février 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Février 2018,
Signé par M. Bernard MESSIAS, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
La Société protectrice des animaux (SPA) a confié à la SARL Études et développement immobiliers (EDIM) suivant contrat du 26 décembre 2006 la construction espace animalier comportant un refuge à [Localité 2] pour un prix de 2740000 € TTC, complété suivant devis du 18 septembre 2007 par la construction d'une fourrière sur le même site pour un prix de 837200 € TTC, puis par contrat du 9 juin 2008, la construction d'un refuge à [Localité 3] sur Oise pour un prix de 3400000 € TTC.
La SARL EDIM a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Cannes du 13 janvier 2009, Maître [Y] [F] étant désigné en qualité de mandataire judiciaire.
Elle a bénéficié d'un plan de redressement arrêté par jugement du 4 mai 2010.
Par jugement du 10 mars 2015 le tribunal de commerce de Cannes a prononcé la résolution du plan et ouvert une procédure de liquidation judiciaire, désignant Maître [F] en qualité de liquidateur.
Ce jugement a été réformé par arrêt de cette cour en date du 30 juin 2016, de sorte que la société EDIM se trouve toujours actuellement en cours d'exécution du plan de redressement.
À la suite de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, la SPA a déclaré le 2 avril 2009, par l'intermédiaire de ses conseils, membres de la société [O], une créance chirographaire échue d'un montant de 3 512 884 € au titre de trop versés et diverses pénalités et indemnités.
Après notification par l'administrateur de la résiliation des contrats la liant à la société EDIM par LRAR du 19 mai 2009, elle a procédé à une déclaration de créance complémentaire le 16 juin 2009 portant le montant total de sa créance à 4 220 174,22 €.
Par courrier du 11 mai 2011, le mandataire judiciaire a informé la SPA de la contestation de sa créance par la SARL EDIM au motif que 'la SPA n'a pas réglé les situations dues à la société EDIM contraignant l'administrateur judiciaire à résilier le marché. La société EDIM est donc créancière du préjudice qui en résulte'. Il indiquait qu'il proposerait le rejet de la créance.
Par ordonnance rendue le 14 mai 2013, le juge commissaire saisi de la contestation a déclaré irrecevable la déclaration de créance de la SPA au motif du défaut de réponse du créancier à l'avis de contestation du mandataire judiciaire.
Maître [Y] [F] agissant en qualité de mandataire et de commissaire à l'exécution du plan de la SARL EDIM a interjeté appel de cette ordonnance le 22 mai 2013.
L'association SPA a également interjeté appel le 27 mai 2013.
La SPA a assigné la société [O] en intervention forcée par acte du 7 mars 2016.
La société EDIM a contesté la recevabilité des appels formés par Maître [F] et la SPA et par ordonnance du 7 juillet 2016 confirmée par arrêt de la cour rendu le 2 février 2017 sur déféré, le conseiller de la mise en état a débouté la société EDIM de son incident et déclaré Maître [F] ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL EDIM et l'association SPA recevables en leurs appels respectifs.
La société EDIM a ensuite contesté la recevabilité de l'assignation en intervention forcée délivrée par la SPA à l'encontre de la société [O] en date du 7 mars 2016 et par ordonnance du 27 avril 2017, le conseiller de la mise en état s'est déclaré incompétent pour statuer sur cet incident.
La société EDIM n'a cependant pas saisi la cour de cet incident.
Par conclusions déposées et notifiées le 20 septembre 2017, Maître [F] agissant en qualité de mandataire judiciaire de la société EDIM demande à la cour de :
- le recevoir ès qualités en son appel et l'y dire bien fondé,
- infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
- admettre la créance déclarée par la SPA au passif de la société EDIM à titre chirographaire échu pour la somme de 4 220 174,22 €.
Il soutient à cet effet que :
- le juge commissaire n'a pas le pouvoir de déclarer une créance irrecevable, il ne peut que prononcer l'admission, le rejet ou constater qu'une instance est en cours ou se déclarer incompétent, donc l'ordonnance doit être réformée comme n'étant pas fondée en droit,
- un nouveau motif de contestation a été élevé devant le juge commissaire par la société EDIM qui a demandé à titre subsidiaire un sursis à statuer jusqu'à ce que les deux instances pendantes devant le tribunal de grande instance de Grasse aient été tranchées, sortant ainsi du cadre déterminé par la lettre de contestation du mandataire,
- les observations émises par EDIM ne constituent pas un motif de contestation sérieux de la créance, EDIM se contentant d'invoquer une créance sans préciser le montant qui lui serait dû, et sans contester le montant déclaré,
- la procédure devant le tribunal de grande instance de Grasse est étrangère à la créance déclarée par la SPA, il n'y a pas de connexité pouvant fonder une éventuelle compensation,
- il n'y a pas d'incidence de l'absence de réponse du créancier dans les 30 jours de la réception de l'avis de contestation puisque d'une part le créancier ne contestait pas la position du mandataire judiciaire mais la partageait, tous deux sollicitant l'admission de la créance, d'autre part le créancier a été convoqué à l'audience du juge commissaire et a, dans le cadre du contradictoire, répondu au motif initial de contestation ainsi qu'au nouveau motif formulé par la société débitrice.
Par conclusions déposées et notifiées le 8 décembre 2017, l'association SPA demande à la cour de :
- déclarer irrecevables les prétentions et les conclusions déposées par la société EDIM sur le fondement des articles 1355 du code civil et 480 du code de procédure civile en ce qu'elles remettent en cause l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 2 février 2017, signifié les 27 et 28 février 2017, aujourd'hui définitif,
- débouter la société EDIM en ce qu'elle demande à la cour de déclarer la créance de la SPA aux termes de la déclaration du 16 juin 2009 inopposable à la procédure collective pour les motifs sus-énoncés et notamment en application de l'article R622-21 du code de commerce,
- débouter la société EDIM de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Vu l'article L624-2 du code de commerce,
- ordonner le sursis à statuer sur le montant de la créance de la SPA à fixer au passif de la société EDIM,
- condamner la société EDIM au paiement d'une somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens, distraits au profit de la SELARL Lexavoué Aix-en-Provence.
Elle soutient que les chantiers confiés à la société EDIM, pour lesquels elle avait effectué des versements indus eu égard à l'état d'avancement des travaux, ont été abandonnés début 2009 et présentent d'innombrables inexécutions et malfaçons. Elle précise avoir saisi le tribunal de grande instance de Grasse qui par jugement du 3 septembre 2013 a désigné un expert, lequel a déposé son rapport le 28 mai 2015.
Elle demande à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de cette instance, dans le cadre de laquelle elle sollicite la fixation de sa créance à hauteur de 6 320 907,75 €.
Elle conteste la tardiveté de la déclaration de créance du 16 juin 2009 effectuée conformément aux dispositions des articles L622-13 et R622-21, consécutivement à la notification par l'administrateur de la résiliation des contrats.
Par conclusions déposées et notifiées le 28 novembre 2017, la société EDIM demande à la cour, vu les articles L622-24, L622-26, L622-27, R624-1 du code de commerce de :
- à titre principal, constater que la déclaration de créance du 16 juin 2009 qui se substitue à celle du 2 avril 2009 a été adressée au mandataire judiciaire en dehors du délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au BODACC, déclarer la créance déclarée par la SPA dans la déclaration de créance du 16 juin 2009 inopposable à la procédure collective,
- à titre subsidiaire, dire et juger que Maître [F] avait proposé dans le courrier de contestation le rejet des créances déclarées par la SPA, dire et juger que la SPA n'a pas répondu au courrier de contestation de créance dans le délai de 30 jours qui lui était imparti, par conséquent, rejeter la créance de la SPA déclarée à hauteur de 4 220 174,22 €,
- à titre infiniment subsidiaire, surseoir à statuer dans l'attente des procédures en cours devant le tribunal de grande instance de Grasse,
- en tout état de cause, condamner in solidum la SPA et Maître [F] à la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle souligne que la lettre de contestation adressée par le mandataire le 16 mai 2011 et reçue par le créancier le 23 mai 2011 comporte les mentions obligatoires requises par l'article R624-1 alinéa 2 du code de commerce et exprime sans ambiguïté la proposition de rejet de la créance de 4 220 174,22 € et reproche à Maître [F], qui partageait ainsi sans réserve la position de la société débitrice, d'avoir fait volte face devant le juge commissaire en prenant fait et cause pour la SPA, proposant l'admission de la créance alors même que ce créancier n'avait pas répondu à la contestation dans le délai de 30 jours qui lui était imparti, s'affranchissant ainsi de manière fautive de sa mission légale de défense de l'intérêt collectif des créanciers.
Sur la demande de sursis à statuer, elle précise que plusieurs procédures sont actuellement pendantes devant le tribunal de grande instance de Grasse :
- une procédure initiée par la Société générale qui sollicite, en présence de la société EDIM, la condamnation de la SPA à la suite de la cession de créances que détenait la société EDIM à l'encontre de l'association,
- une procédure initiée par la société EDIM à l'encontre de la SPA pour obtenir paiement d'une somme de 466273 € représentant les bénéfices qui n'ont pu être retirés du marché à la suite de la résiliation du contrat par la SPA,
- une procédure initiée par la SPA pour réclamer l'indemnisation du préjudice allégué dans le cadre de l'opération de construction des refuges.
Par conclusions déposées et notifiées le 3 juin 2016, la SELAS [O] demande à la cour, dans le cas où les appels seraient déclarés recevables, de statuer ce que de droit sur les demandes formulées par la SPA et de laisser les dépens de la mise en cause de la société [O] à la charge de la SPA.
Elle soutient principalement que Maître [F] a adressé l'avis de contestation à la société [O] le 16 mai 2011 alors que cette société s'était vue décharger du dossier par Maître [W], administrateur provisoire de la SPA qui avait transmis le dossier à Maître [N], que la lettre du mandataire est nulle car elle ne mentionne aucun des avocats signataires de la déclaration de créance, que cette lettre ne comporte pas une contestation de la créance puisqu'elle invoque une compensation, donc une reconnaissance implicite de la créance déclarée.
La procédure a été clôturée le 13 décembre 2017.
MOTIFS :
Sur la demande de la SPA tendant à faire déclarer irrecevables les conclusions de la société EDIM au regard de l'arrêt définitif du 2 février 2017 :
La société EDIM a déposé et notifié le 5 septembre 2017 des conclusions tendant à faire 'réformer l'ordonnance attaquée dans toutes ses dispositions' et déclarer irrecevables les appels formés par Maître [Y] [F] ès qualités et par la SPA.
Le dispositif de ces conclusions reprend mots pour mots celui des conclusions déposées le 21 juillet 2016 par la société EDIM devant cette même cour statuant sur le déféré de l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 7 juillet 2016.
La réitération de ces conclusions, alors que la cour avait débouté la société EDIM de son incident d'irrecevabilité des appels par arrêt du 2 février 2017, relevait d'une erreur matérielle de la société EDIM qui a déposé et notifié de nouvelles conclusions le 28 novembre 2017 rectifiant cette erreur et ne mentionnant plus l'irrecevabilité des appels.
La fin de non-recevoir soulevée par la SPA concerne les conclusions notifiées par la société EDIM le 5 septembre 2017, réputées abandonnées du fait de la notification de conclusions récapitulatives et rectificatives le 28 novembre 2017. Elle est donc sans objet.
Sur le pouvoir du juge commissaire de déclarer irrecevable une déclaration de créance :
Aux termes de l'article L624-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la présente instance soit celle antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2014-326 du 12 mars 2014, au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge commissaire décide de l'admission ou du rejet des créances ou constate soit qu'une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence.
Ce texte ne limite aucunement les causes de rejet de la créance, qui peuvent résulter d'un motif de fond mais également de l'irrégularité ou de l'irrecevabilité de la déclaration de créance.
La décision du juge commissaire déclarant irrecevable la déclaration de créance de la SPA est une décision implicite de rejet, conforme aux dispositions de l'article précité, l'ordonnance ne pouvant être réformée sur le motif tiré d'un prétendu excès de pouvoir du juge commissaire.
Sur la tardiveté de la déclaration de créance du 16 juin 2009 :
Le jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la société EDIM a été publié au BODACC du 3 février 2009.
La SPA a procédé à une déclaration de créance le 2 avril 2009, soit dans le délai de deux mois imparti par l'article R622-24 du code de commerce.
Par LRAR du 19 mai 2009, Maître [A], administrateur judiciaire de la société EDIM, a notifié à la SPA, au visa de l'article L622-13 du code de commerce, la résiliation des contrats passés entre elle et la société EDIM concernant l'espace animalier de [Adresse 5] à [Localité 2] et le chenil avec bâtiments de service à [Localité 4], invitant le créancier à adresser à Maître [F], mandataire judiciaire, sa déclaration de créance au titre des sommes qui pourraient résulter de la rupture des contrats conformément aux dispositions de l'article R622-21 du code de commerce.
Aux termes de ce texte, les cocontractants mentionnés aux articles L622-13 et L622-14 bénéficient d'un délai d'un mois à compter de la date de la résiliation de plein droit ou de la notification de la décision prononçant la résiliation pour déclarer au passif la créance résultant de cette résiliation.
La SPA a procédé à une déclaration de créance complétive le 16 juin 2009, soit dans le délai d'un mois à compter de la notification par Maître [A] de la résiliation des contrats.
La déclaration complémentaire du 16 juin 2009 est en conséquence recevable, quel que soit le motif de la résiliation notifiée par l'administrateur, dès lors qu'il n'est pas contesté que les nouveaux montants déclarés résultent de cette résiliation.
Sur le défaut de réponse du créancier dans les 30 jours de la réception de l'avis de contestation :
La SPA a adressé ses déclarations de créances par l'intermédiaire d'un mandataire, la société d'avocats [O], agissant par Maîtres [Z] et [D], signataires de la première déclaration, et par Maître [D] et [S], signataires de la seconde.
Par LRAR adressée à '[O] avocats' et reçue le 23 mai 2011, Maître [F] a informé la SPA de ce que sa créance était contestée pour le motif suivant : 'Le dirigeant conteste cette créance au motif que la SPA n'a pas réglé les situations dues à la société EDIM contraignant l'administrateur judiciaire à résilier le marché. La société EDIM est donc créancière du préjudice qui en résulte', le mandataire précisant proposer au juge commissaire le rejet de la créance pour le montant de 4220174,22 € et invitant le créancier à faire part de ses explications.
Ce courrier rappelait les dispositions de l'article L622-27 du code de commerce aux termes desquelles s'il y a discussion sur tout ou partie d'une créance autre que celles mentionnées à l'article L625-1, le mandataire judiciaire en avise le créancier intéressé en l'invitant à faire connaître ses explications. Le défaut de réponse dans le délai de trente jours à compter de la réception de la lettre interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire.
Entre temps la SPA a été placée sous administration provisoire de Maître [C] [W], et a déchargé le cabinet [O] de son mandat.
Le nouvel avocat de la SPA, Maître [N], auquel Maître [F] a adressé le 22 novembre 2011 une copie de l'avis de contestation du 16 mai 2011, a répondu à cet avis par courrier du 21 décembre 2011, soit 7 mois après sa réception par le cabinet [O].
C'est à juste titre que la société [O] soutient que tel qu'adressé par Maître [F], le courrier de contestation n'a pas pu faire courir le délai de l'article L622-27 du code de commerce.
En effet, si l'avis de contestation peut être adressé soit au créancier lui-même, soit au mandataire qui a déclaré la créance pour son compte, Maître [F] a adressé en l'espèce son avis de contestation à '[O] avocats' sans mention du nom de l'un des avocats signataires des déclarations de créances, alors que ces déclarations de créances mentionnaient expressément qu'elles étaient effectuées par le ministère de Maître [G] [Z] et de Maître [P] [D], avocats au barreau des Hauts-de-Seine.
Cet avis de contestation ne comporte en outre aucune référence du cabinet [O] ni même le nom du créancier déclarant, qui n'apparaît que dans le corps du courrier, dans l'énoncé du motif de contestation, sous le seul sigle SPA.
En l'absence de désignation précise du destinataire de l'avis, il ne peut être considéré que la SPA a effectivement reçu le courrier de contestation du mandataire.
D'autre part, ainsi que l'a relevé la cour dans son arrêt du 2 février 2017, le courrier de Maître [F] du 16 mai 2011 ne comporte pas à proprement parler la contestation de la créance déclarée mais l'allégation d'une créance réciproque qui serait née de la résiliation du contrat par l'administrateur.
Dans ces conditions, le délai prévu à l'article L622-27 n'a pas couru.
En tout état de cause, le mandataire judiciaire n'ayant pas maintenu sa proposition de rejet devant le juge commissaire mais ayant au contraire sollicité l'admission de la créance ainsi qu'il résulte des termes de l'ordonnance dont appel, la SPA est recevable à contester la décision du juge commissaire dans le cadre de l'appel en application de l'article L624-3 a contrario du code de commerce, ainsi que l'a jugé cette cour dans son arrêt du 2 février 2017.
Le moyen tiré du défaut de réponse du créancier dans le délai de 30 jours sera en conséquence écarté, l'ordonnance étant infirmée sur ce point.
Sur la demande de sursis à statuer :
La créance déclarée par la SPA est constituée de trop versés par rapport à l'état d'avancement des chantiers, de facturations indues au titre de travaux supplémentaires, de pénalités de retard, d'indemnités versées à la Ville de Mougins en raison de la défaillance de la société EDIM, d'indemnisation de préjudices résultant d'inexécutions, d'indemnités contractuelles de résiliation des contrats.
La SPA verse aux débats le rapport déposé le 28 mai 2015 par Monsieur [W] [C], expert désigné par décision du tribunal de grande instance de Grasse du 3 septembre 2013 avec mission notamment de décrire et chiffrer les travaux exécutés par la société EDIM en fonction du prix du marché de travaux, dire si les appels de fonds ou situations adressés par la société EDIM à la SPA étaient justifiés en fonction de l'avancement des travaux, vérifier la réalité des désordres et réclamations invoqués par la SPA, préciser la cause et la nature des désordres, fournir tous éléments permettant à la juridiction éventuellement saisie de se prononcer sur les responsabilités, donner son avis sur les moyens et travaux nécessaires pour remédier aux désordres, recueillir les éléments relatifs aux préjudices allégués, proposer un compte entre la SPA et la société EDIM.
La SPA produit par ailleurs les conclusions signifiées le 28 septembre 2017 contre la société EDIM devant le tribunal de grande instance de Grasse sur la base de ce rapport, aux termes desquelles elle sollicite la fixation de sa créance au passif de la société EDIM à la somme de 6320907,75 €.
S'il est constant que cette instance ne constitue pas une instance en cours au sens de l'article L624-2 du code de commerce en ce qu'elle a été engagée postérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire de la société EDIM, les moyens développés dans le cadre de cette instance sur les inexécutions contractuelles reprochées à la société EDIM et la nécessité du recours à une mesure d'expertise démontrent que la fixation de la créance alléguée par la SPA et contestée par la société EDIM excède les pouvoirs du juge commissaire.
La demande de sursis à statuer jusqu'à l'issue de cette procédure est en conséquence justifiée.
S'agissant des autres instances en cours évoquées par la société EDIM, à savoir une procédure initiée par la Société générale qui sollicite la condamnation de la SPA et de la société EDIM à la suite de la cession de créances que détenait la société EDIM à l'encontre de l'association et une procédure initiée par la société EDIM à l'encontre de la SPA pour obtenir paiement d'une somme de 466273 € représentant les bénéfices qui n'ont pu être retirés du marché à la suite de la résiliation du contrat par la SPA, il n'est pas justifié de l'état de ces procédures et de leur possible incidence sur la fixation de la créance de la SPA, de sorte qu'il n'y a pas lieu à sursis à statuer à cet égard.
En l'état du sursis prononcé, les dépens seront réservés ainsi que les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Constate que la demande de la SPA, tendant à faire déclarer irrecevables les prétentions et conclusions déposées par la société EDIM en ce qu'elles remettent en cause l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 2 février 2017, est devenue sans objet, en l'état des conclusions récapitulatives et rectificatives déposées et notifiées le 28 novembre 2017 par la société EDIM,
Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
Déclare recevable et non tardive la déclaration de créance effectuée par la SPA le 16 juin 2009 en application des dispositions de l'article R621-21 du code de commerce,
Dit que l'avis de contestation adressé par Maître [F] le 16 mai 2011 n'a pas fait courir le délai de 30 jours prévu à l'article L622-27 du code de commerce à l'encontre de la SPA,
Sursoit à statuer sur l'admission de la créance déclarée par la SPA jusqu'à l'issue de la procédure actuellement pendante devant la 2ème chambre du tribunal de grande instance de Grasse sous le n° RG 13/02247,
Ordonne le retrait du rôle de l'affaire et dit qu'elle sera rétablie au rôle sur la demande de la partie la plus diligente après expiration des causes du sursis,
Réserve les dépens et indemnités pour frais irrépétibles.
Le greffier Le président