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01/02/2018 | FRANCE | N°16/16708

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 01 février 2018, 16/16708


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 01 FEVRIER 2018



N° 2018/ 045













Rôle N° 16/16708







[U] [S] veuve [Z]

[V] [Z] épouse [E]

[B] [Z] épouse [F]





C/



[Q] [C]

ONIAM

CPAM DU VAR

Organisme BCAC





















Grosse délivrée

le :

à :

Me Philippe CAMPS



SELARL CARLINI





SCP JOURDAN















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 30 Juin 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 13/11351.





APPELANTES



Madame [U] [S] veuve [Z]

née le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 1] de nationalité Française,

...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 01 FEVRIER 2018

N° 2018/ 045

Rôle N° 16/16708

[U] [S] veuve [Z]

[V] [Z] épouse [E]

[B] [Z] épouse [F]

C/

[Q] [C]

ONIAM

CPAM DU VAR

Organisme BCAC

Grosse délivrée

le :

à :

Me Philippe CAMPS

SELARL CARLINI

SCP JOURDAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 30 Juin 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 13/11351.

APPELANTES

Madame [U] [S] veuve [Z]

née le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 1] de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Philippe CAMPS, avocat au barreau de TOULON

Madame [V] [Z] épouse [E]

née le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 2] de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Philippe CAMPS, avocat au barreau de TOULON

Madame [B] [Z] épouse [F]

née le [Date naissance 2] 1983 à [Localité 2] de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Philippe CAMPS, avocat au barreau de TOULON

INTIMES

Monsieur [Q] [C],

domicilié [Adresse 4]

représenté par Me Philippe CARLINI de la SELARL CARLINI ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

ONIAM,

dont le siège social est : [Adresse 5]

représentée par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Patrick DE LA GRANGE de la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

CPAM DU VAR

dont le siège social est : [Adresse 6]

défaillante

Organisme BCAC

dont le siège social est [Adresse 7]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Décembre 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Anne VELLA, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier GOURSAUD, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvaine MENGUY.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Février 2018

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Février 2018,

Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE

M. [C] [A] [Z], alors âgé de 59 ans était suivi pour une hypertension artérielle depuis une quinzaine d'années lorsque le 29 septembre 2010, il a subi une intervention chirurgicale à l'hôpital [Établissement 1] à [Localité 3], réalisée par le docteur [C], aux fins d'ablation de la zone responsable d'une fibrillation auriculaire diagnostiquée par son cardiologue à la faveur d'un test d'effort. Le [Date décès 1] 2010, M. [C] [Z] est décédé d'une dégradation hémodynamique.

Par ordonnance du 12 janvier 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulon a désigné le docteur [P] en qualité d'expert. Il a déposé son rapport le 7 août 2012.

Par actes des 1er et 2 juillet 2013, Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F], tant en son nom propre qu'en sa qualité de représentante légale de son fils mineur [O], né le [Date naissance 3] 2010, ont fait assigner le docteur [C] et l'Oniam devant le tribunal de grande instance de Marseille, pour obtenir réparation du préjudice subi par le défunt et par sa famille et ce, en présence de la Cpam du Var et du BCAC.

Par ordonnance du 3 novembre 2014, le juge de la mise en état a ordonné un complément d'expertise au contradictoire de l'Oniam.

Selon jugement du 30 juin 2016, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal a :

- mis hors de cause le docteur [C] ;

- condamné l'Oniam à payer à Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F], en son nom personnel, la somme de 15'000€ en réparation du préjudice subi par M. [C] [Z] au titre des souffrances endurées, sous déduction des provisions éventuellement déjà versées ;

- condamné l'Oniam à payer à Mme [U] [S] épouse [Z], la somme de 25'000€ en réparation de son préjudice d'affection sous déduction des provisions éventuellement déjà versées ;

- condamné l'Oniam à payer à Mme [V] [Z] épouse [E] et à Mme [B] [Z] épouse [F], en son nom personnel, la somme de 15'000€ à chacune, en réparation de leur préjudice d'affection sous déduction des provisions éventuellement déjà versées ;

- débouté Mme [B] [Z] épouse [F] en sa qualité de représentante légale de son fils mineur [O] de sa demande au titre du préjudice d'affection ;

- débouté Mme [U] [S] épouse [Z] de sa demande au titre du préjudice économique ;

- débouté Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F] de leur demande au titre des frais d'expertise ;

- débouté la Cpam du Var de toutes ses demandes ;

- condamné l'Oniam aux entiers dépens ;

- condamné l'Oniam à payer à Mme [V] [Z] épouse [E] et à Mme [B] [Z] épouse [F], en son nom personnel ensemble une somme de 2000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum Mme [V] [Z] épouse [E] et à Mme [B] [Z] épouse [F], en son nom personnel à payer au docteur [C] une somme de 1000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à condamner l'Oniam à supporter les frais huissiers pour l'exécution forcée du présent jugement.

Le tribunal a relevé qu'il était établi par l'expert et non discuté par les parties que la fistule auriculo-oesophagienne est responsable du décès de M. [C] [Z], l'expert indiquant que le docteur [C] a réalisé plusieurs tirs afin d'encercler les veines pulmonaires et que ces tirs ont entraîné un échauffement des tissus et de la paroi 'sophagienne, laquelle a ensuite présenté un 'dème et une réaction inflammatoire, occasionnant une lésion avec escarre tissulaire avant de générer une fistule entre l'oreillette et la lumière 'sophagienne. Il n'a caractérisé aucune maladresse dans la conduite de l'intervention du docteur [C] qui n'a pas manqué de précision dans son geste technique et plus particulièrement dans la trajectoire des tirs. Il n'a pas plus retenu de manquement de ce chirurgien au titre du suivi post-opératoire et encore au titre de l'obligation d'information. Il en a conclu que M. [C] [Z] est décédé des suites d'un accident médical non fautif ouvrant droit à l'indemnisation de ses ayants droits au titre de la solidarité nationale et le docteur [C] a été mis hors de cause.

Il a évalué à 15'000€ le montant des souffrances endurées par M. [C] [Z] dans le mois qui s'est écoulé entre l'opération et son décès. Il a indemnisé les préjudices d'affection de Mme [Z], épouse du défunt vivant avec lui au moment de son décès ainsi que celui de ses deux filles âgées de 27 et 30 ans qui ne vivaient plus au domicile familial. En revanche, il a débouté Mme [B] [Z] en sa qualité de représentante légale de son fils [O], l'enfant n'étant pas encore né au moment du décès de son grand-père.

Mme [U] [Z] a été déboutée de sa demande d'indemnisation de son préjudice économique en raison de l'absence totale de pièce venant justifier sa prétention financière.

La Cpam du Var a été déboutée de ses demandes indemnitaires, l'Oniam ne pouvant être condamné à rembourser une créance d'un organisme social.

Par déclaration du 12 septembre 2016, dont la régularité et la recevabilité, ne sont pas contestées, Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F] ont relevé appel partiel de ce jugement, limité à l'indemnisation du préjudice économique subi par Mme [U] [Z] à la suite du décès de son époux.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon leurs conclusions du 8 décembre 2016, Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F] demandent à la cour de :

' confirmer la mise hors de cause du docteur [C] ;

' dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à son profit ;

' juger qu'à la suite du décès de M. [C] [Z], son conjoint survivant subit un préjudice économique important ;

' juger que la part d'autoconsommation du défunt doit être fixée à 30 % dès lors qu'il assumait l'intégralité des charges du ménage ;

' juger que le principe de l'indemnisation n'étant pas discuté, Mme [U] [Z] doit bénéficier d'une réparation intégrale sans perte ni profit ;

' condamner l'Oniam à lui régler au titre du préjudice économique la somme de 310'838,88€ ;

' condamner l'Oniam à lui payer la somme de 2500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ;

' juger, en tant que de besoin, qu'en cas d'exécution forcée de la décision à intervenir la partie perdante sera débitrice des frais de recouvrement au titre de l'article 10 et des dépens des huissiers ;

' condamner aux entiers dépens, distraits au profit de son conseil.

Mme [U] [Z] expose qu'au moment du décès de son époux, le revenu de la famille était composé des salaires de M. [C] [Z] pour 45'583€ et des siens pour 3622€ soit un total de 49'205€. La part d'autoconsommation de l'époux doit être fixée à 30 % et donc un solde disponible de 34'443,50€. Elle a cessé toute activité à la fin du mois de juillet 2010. Immédiatement après le décès de son époux, elle a perçu la pension de réversion militaire en novembre 2010 pour un montant mensuel de 754,61€. À compter de 2011 la pension de réversion annuelle s'est élevée à la somme de 9182,04€. En 2016 ses revenus annuels s'élèvent à 18'372€ et elle subit une perte annuelle de 16'071,50€ qui sera capitalisée pour le futur en fonction d'un euro de rente issu de la Gazette du palais 2016 pour une femme âgée de 59 ans et donc la somme de 310'838,88€.

Par conclusions du 2 février 2017, l'Oniam demande à la cour, de :

' constater qu'il ne conteste pas son obligation indemnitaire à l'égard des consorts [Z] ;

' constater que les dispositions du jugement entrepris portant sur l'indemnisation du préjudice d'affection de Mme [U] [Z] et de [O] [Z] ne font l'objet d'aucune contestation et confirmer le jugement sur ce point ;

' le réformer sur les autres postes de préjudice ;

' rejeter, à titre principal, la demande de Mme [U] [Z] au titre de son préjudice économique et à titre subsidiaire, juger que la perte de revenus ne peut excéder 14'324,51€ ;

' juger que l'indemnisation des souffrances endurées de M. [C] [Z] ne peut excéder 1000€ ;

' juger que le préjudice d'affection de Mme [B] [Z] et de Mme [V] [Z] ne peut excéder 6500€ chacune ;

' rejeter toutes autres demandes.

À titre principal, il soutient que le revenu annuel de référence du foyer ne peut être apprécié. À titre subsidiaire, il demande à la cour de fixer à 40% le montant de la part de consommation du défunt, les membres composant le foyer se limitant à M. [C] [Z] et à Mme [U] [Z] soit un revenu moyen du couple s'élevant à 29'270,40€ (48'784€ x 60%). Il ajoute que M. [C] [Z] devait partir à la retraite à 60 ans le 1er juillet 2011 et que la perte de revenus doit s'apprécier sur une première période du 20 octobre 2010 au 30 juin 2011 et donc sur 254 jours soit la somme de 20'386 99€. Après cette date Mme [U] [Z] a perçu une pension de réversion pour un montant de 6062,48€ qui vient s'imputer, de telle sorte que cette perte s'établit à la somme annuelle de 14'324,51€.

À compter du 1er juillet 2011, date supposée du départ à la retraite de M. [C] [Z], il convient d'évaluer la perte de revenus en fonction de la pension de retraite qui diffère des revenus salariaux dont il bénéficiait jusqu'alors. Or Mme [U] [Z] ne produit aucun élément de nature à renseigner la juridiction, sa perte ne peut être appréciée et il lui appartient de produire une projection des droits à la retraite établie par la caisse de retraite. Par ailleurs il conviendra de capitaliser les pertes subies par l'épouse en fonction de l'âge de M. [C] [Z] et non en fonction de l'âge de la requérante.

Par conclusions du 2 février 2017, le docteur [C] demande à la cour de :

' confirmer le jugement qui l'a mis hors de cause, aucune demande n'étant dirigée contre lui en cause d'appel.

La Cpam du Var, assignée par Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F] le 13 décembre 2016, par acte d'huissier délivré à personne habilitée, n'a pas constitué avocat. Par courrier du 9 janvier 2017 adressé au greffe de la cour d'appel, elle a indiqué qu'elle n'avait pas de créance à faire valoir.

Le BCAC, assigné par Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F] le 7 février 2017, par acte d'huissier délivré à personne habilitée, n'a pas constitué avocat.

L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les souffrances endurées

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime entre l'intervention du 29 septembre 2010 et son décès survenu le [Date décès 1] 2010, soit en l'espèce pendant trois semaines. L'expert judiciaire n'a pas eu pour mission d'évaluer ce poste de préjudice. Il écrit néanmoins, dans son rapport qu'après l'intervention, M. [Z] a présenté des troubles de la déglutition en rapport avec l'intubation et un état fébrile lié à la présence d'un 'hématome de la région du scarpa... cet hématome était très important, très douloureux et s'élargissait sur toute la cuisse principalement à gauche et à droite il y avait un hématome moins important' traité par compression des zones ponctionnées. L'expert ajoute que le 14 octobre 2010, M. [Z] a présenté 'une fièvre et un AVC' (accident vasculaire cérébral) qui a justifié son hospitalisation puis son transfert vers un autre établissement en raison de l'aggravation de son état. Il présentait alors des troubles neurologiques et il a été pris en charge dans le service de réanimation cardiaque. L'expert précise enfin que M. [Z] a souffert pendant cette période d'une asthénie très invalidante.

L'ensemble de ces données, qui ne sont pas contestées par l'Oniam, justifie l'indemnisation de ce poste de préjudice, en considérant la durée pendant laquelle les souffrances à la fois physiques et morales ont affecté M. [Z], à hauteur de la somme de 10.000€.

Sur le préjudice d'affection de Mme [B] [Z] et de Mme [V] [Z]

Le montant de 25.000€ alloué par le premier juge à Mme [U] [Z] ne fait l'objet d'aucune contestation d'un côté ou de l'autre de la barre.

La cour confirme le montant de 15.000€ alloué à Mme [V] [Z] épouse [E] et à Mme [B] [Z] épouse [F], en leur nom personnel au titre de ce poste de préjudice évalué pour chacune des deux filles de M. [Z], âgées respectivement de 27 et de 30 ans au moment du décès de leur père et qui ne vivaient plus au foyer parental.

Sur le préjudice économique de Mme [U] [Z]

Le principe du droit de Mme [U] à obtenir l'indemnisation de son préjudice économique n'est pas discuté ni discutable. Il ressort des éléments du dossier qu'au moment du décès de M. [Z], le foyer n'était composé que de son épouse et de lui-même et que les ressources du couple étaient essentiellement composées des revenus de M. [Z], ceux de Mme [U] [Z] étant limités à environ 3.600€ annuels.

La part conservé par le mari pour les besoins personnels doit être fixée à 30%, la part revenant au conjoint étant de 70% pour les frais incompressibles et ses besoins personnels ; Mme [Z] n'ayant que de faibles revenus propres et devant assumer des charges liées au train de vie du couple du vivant de M. [Z], notamment l'entretien d'une maison, qui est leur propriété et le domicile conjugal.

L'évaluation de ce poste doit intervenir au jour où la cour statue mais en fonction des éléments connus et de la situation professionnelle de M. [Z] au moment du décès. Ce principe s'oppose à ce qu'elle s'opère, comme le sollicite l'Oniam, sur une première période allant du décès à la date prévisible d'accession à la retraite de M. [Z] l'année suivant son décès, puis une seconde période au cours de laquelle les revenus devraient être calculés selon le montant projeté de la retraite du défunt. La proche accession de M. [Z] à la retraite ne saurait entrer en ligne de compte dans cette évaluation, sauf à élargir la méthode quel que soit l'âge du défunt au moment de son décès.

En revanche, c'est à juste titre que l'Oniam soutient que la capitalisation des sommes revenant à Mme [U] [Z], doit intervenir en fonction non pas de l'âge de Mme [Z], mais de celui qu'aurait eu M. [Z] à la liquidation, celui-ci, de sexe masculin ayant l'espérance de vie la plus faible. Enfin l'évaluation du dommage interviendra en fonction du barème de capitalisation publié à la Gazette du palais du 26 avril 2016, taux d'intérêt 1,04%, qui apparaît le plus approprié, eu égard aux données démographiques et économiques actuelles, et dont Mme [U] [Z] demande l'application.

Alors que M. [Z] est décédé en fin d'année 2010, l'avis d'imposition sur les revenus au titre de cette année mentionne qu'il percevait un salaire net imposable de 34.101€ et des pensions et retraites imposables de 16.547€ soit au total la somme de 50.648€ alors que Mme [Z] percevait un revenu net imposable de 3.622€, soit au total un revenu net imposable du couple de 54.270€. Toutefois Mme [U] [Z] demande à la cour de retenir pour le calcul de ce poste un revenu annuel de M. [Z] de 45.583€, ce qui fait au total un revenu du foyer de 49.205€ (45.583€ + 3622€). Sur cette base, après calcul de la part d'autoconsommation de M. [Z] à hauteur de 30% (14.761,50€), la perte annuelle du foyer et donc celle de Mme [Z], en l'espèce, s'établit à 34.443,50€.

Sur cette somme viennent s'imputer les différentes pensions de reversion que Mme [Z] a perçues et ce dont elle justifie à savoir :

- en novembre et décembre 2010 la pension de reversion pour un montant mensuel de 754,61€,

- en 2011 la pension de reversion militaire de 9.182,04€,

- à compter de 2012 et 2013

' la pension de reversion militaire de 9751€

' la pension civile versée par la Carsat du sud est : 2.624€

' de B2V gestion la somme annuelle de 1962€

' la CDC Les Mines : 352€,

soit un total annuel de 14.689€,

- 2014 : 19.796€

- 2015 : 18.406€

- 2016 : 18.372€.

Pour la période échue du 1er novembre 2010 au prononcé du présent arrêt la perte économique s'établit de la façon suivante, après imputation des pensions de reversion :

- du 1er novembre au 31 décembre 2010 : 34.443,50€/12 mois : 2870,30€ par mois dont il convient de retrancher la pension de reversion servie par mois sur ces deux mois, soit 2.115,69€ (2870,30€ - 754,61€) x deux mois = 4.231,38€,

- en 2011, la somme de 25.261,46€ (34.443,50€ - 9.182,04€),

- en 2012, et 2013 celle de 39.509€ (34.443,50€ - 14.689€ = 19.754,50€ x 2 ans)

- en 2014, celle de 14.647,50€ (34.443,50€ - 19.796€)

- en 2015, celle de 16.037,50€ (34.443,50€ - 18.406€)

- en 2016, celle de 16.071,50€ (34.443,50€ - 18.372€)

- en 2017 (dernier avis d'imposition connu à ce jour) celle de 16.071,50 € (34.443,50€-18.372,00€)

et au total la somme de 131.829,84€.

Pour la période future, la perte économique annuelle de Mme [Z] étant de 16.071,50€ en considérant le dernier avis d'imposition connu à ce jour sur les revenus 2016 (34.443,50€ -18.372€), en fonction d'un euro de rente viagère de 15,118, issu du barème de capitalisation de la Gazette du Palais 2016, pour un homme né le [Date naissance 4] 1951, soit 66 ans à la liquidation au jour du prononcé du présent arrêt le 1er février 2018, la somme de 242.968,93€ (16.071,50€ x 15,118)

Et au total la somme de 374.798,77€ (131.829,84€ + 242.968,93€), ramenée à 310.838,88€ pour rester dans les limites de la somme sollicitée par Mme [Z].

Sur l'article 10

Les requérantes ne précisent pas sur la base de quel décret elles demandent l'application de l'imputation des frais de recouvrement et d'encaissement au débiteur de l'obligation. Si elles se fondent sur l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 n° 96/1080, elles ne peuvent qu'être déboutées, cet article du décret ayant été abrogé par le décret n° 2016-230 du 26 février 2016. Si elles se fondent sur l'article A 444-32 de l'arrêté du 26 février 2016 fixant les tarifs réglementés des huissiers de justice en matière civile et commerciale, elles seront également déboutées puisqu'elles ne peuvent exiger, en cas de recours à l'exécution forcée pour obtenir paiement des sommes allouées, que les frais de recouvrement et d'encaissement visés à l'article A 444-32 de l'arrêté du 26 février 2016 fixant les tarifs réglementés des huissiers de justice en matière civile et commerciale soient supportés par les débiteurs, ce texte les mettant à la charge du créancier. Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués aux ayants droit de M. [Z] doivent être confirmées.

L'Oniam qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenu à indemnisation supportera la charge des entiers dépens d'appel.

L'équité commande d'allouer à Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F], une indemnité de 1500€ au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Confirme le jugement,

hormis sur le montant de l'indemnisation des souffrances endurées, et des sommes revenant à Mme [U] [Z] au titre de son préjudice économique,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Fixe le montant du poste des souffrances endurées par M. [Z] à la somme de 10.000€ ;

- Condamne l'Oniam à payer à payer à Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F] la somme de 10.000€ au titre des souffrances endurées, provision à déduire, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du 30 juin 2016 ;

- Fixe le préjudice économique de Mme [U] [S] épouse [Z] à la somme de 310.838,88€ ;

- Condamne l'Oniam à payer à Mme [U] [S] épouse [Z] la somme de 310.838,88€, provision à déduire, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt le 1er février 2018 ;

- Condamne l'Oniam à payer à Mme [U] [S] épouse [Z], Mme [V] [Z] épouse [E] et Mme [B] [Z] épouse [F] la somme de 1500€ au titre de leurs propres frais irrépétibles exposés en appel ;

- Condamne l'Oniam aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 16/16708
Date de la décision : 01/02/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°16/16708 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-01;16.16708 ?
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