COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
14e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 26 JANVIER 2018
N°2018/57
Rôle N° 17/06661
[B] [O]
C/
SA GRDF
CNIEG CAISSE NATIONALE DES INDUSTRIES ÉLECTRIQUES ET GAZIÊRES
ENEDIS
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE
Grosse délivrée
le :
à :
Me Michel LEDOUX, avocat au barreau de PARIS
Me Jean-claude PERIE, avocat au barreau de MARSEILLE
CAISSE NATIONALE DES INDUSTRIES ÉLECTRIQUES ET GAZIERES
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des BOUCHES DU RHONE en date du 30 Novembre 2010,enregistré au répertoire général
sous le n° 20800694.
APPELANT
Monsieur [B] [O], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Michel LEDOUX, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Patrick MOEHRING, avocat au barreau de PARIS
INTIMEES
SA GRDF venant aux droits de la SA GDF, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Jean-claude PERIE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Gaelle BALLOCCHI, avocat au barreau de MARSEILLE
CNIEG CAISSE NATIONALE DES INDUSTRIES ÉLECTRIQUES ET GAZIÊRES, demeurant [Adresse 3]
non comparant
ENEDIS, demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Jean-claude PERIE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Gaelle BALLOCCHI, avocat au barreau de MARSEILLE
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE, demeurant [Adresse 5]
non comparant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Septembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Pierre SAINTE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
M. Gérard FORET-DODELIN, Président
Madame Florence DELORD, Conseiller
Madame Marie-Pierre SAINTE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Nathalie ARNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2018 prorogé au 26 Janvier 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2018 prorogé au 26 Janvier 2018.
Signé par M. Gérard FORET-DODELIN, Président et Madame Nathalie ARNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
[B] [O] employé de la société EDF (devenue Enedis) et GDF en contrat à durée indéterminée depuis le 24 juin 1982 en qualité de ' Technicien d'intervention clientèle' a été victime d'un accident du travail le 20 octobre 2004 à la [Adresse 6] à [Localité 1] alors qu'il venait de procéder à une coupure pour non paiement. Monsieur [W], tiers à l' intervention l' a agressé physiquement.
Saisi d'une déclaration d'accident du travail, la CPAM a reconnu le caractère professionnel de l'accident.
Le 21 février 2007, la caisse lui a notifié un taux d'IPP de 22%.
Par jugement en date du 11 mai 2005, le Tribunal Correctionnel de Marseille a condamné l'agresseur à 6 mois d'emprisonnement pour violence sur une personne chargée de mission de service public suivie d'une incapacité n'excédant pas 8 jours.
Un procès verbal de non conciliation rejetant l'existence d'une faute inexcusable a été établi par la Commission Nationale des Accidents du Travail du régime spécial de sécurité sociale des industries électriques et gazières le 13 septembre 2007.
[B] [O] a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Bouche du Rhône le 28 janvier 2008 pour voir reconnaitre la faute inexcusable de l'employeur et se voir allouer la réparation des divers préjudices dont il invoquait l'existence.
Par jugement en date du 30 novembre 2010, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a déclaré recevable l'action de [B] [O] et dit qu'il n'est pas démontré que les sociétés ERDF et GRDF ait commis une prétendue faute inexcusable et débouté [B] [O] de l'intégralité de ses demandes.
[B] [O] a interjeté appel de cette décision le 4 avril 2017.
Par un arrêt du 18 mars 2015, la Cour a ordonné la radiation de l'instance.
Par requête accompagnée de ses conclusions déposées au greffe, [B] [O] a demandé le ré-enrôlement de la procédure ;
L'affaire à été ré-enrôlée et appelée à l'audience de plaidoirie du 14 septembre 2017.
Par ses dernières conclusions récapitulatives développées à l'audience de plaidoirie, [B] [O] sollicite l'infirmation du jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Bouches du Rhône du 30 novembre 2010.
A l'appui de ses prétentions, il expose que la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation est venue affirmer par un arrêt en date du 3 avril 2003 que 'le délai de prescription de l'action du salarié pour faute inexcusable de l'employeur ne peut commencer à courir qu'à compter de la reconnaissance du caractère professisonnel de l'accident ou de la maladie'. En l'espèce la rente a été notifiée le 21 février 2007 et le procès verbal de non conciliation a été dressé le 13 septembre 2007.
Ainsi la demande de reconnaissance de la faute inexcusable a nécessairement bien été invoquée dans le délai de la prescription biennale. L'action de [B] [O] est donc parfaitement recevable.
En outre, soutient que la faute inexcusable de l'employeur est à l'origine de l'accident du travail dont a été victime [B] [O].
En conséquence il demande, de fixer au maximum la majoration de la rente, dire que la majoration de la rente suivra automatiquement l'augmentation du taux d'IPP en cas d'aggravation de l'état de santé de [B] [O], dire et juger que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter du procès verbal de non conciliation, ordonner avant dire droit la mise en oeuvre d'une expertise médicale judiciaire, condamner solidairement les sociétés ERDF et GRDF à verser à [B] [O] une provision de 10000 euros à valoir sur la liquidation d e ses préjudices.
Enfin il sollicite la condamnation des sociétés ERDF et GRDF au paiement d'une somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ses denières conclusions développées à l'audience de plaidoirie le jeudi 14 septembre 2017 les sociétés ENEDIS (anciennement ERDF) et GRDF sollicitent par un appel incident qu'à titre principal il soit demandé à la Cour de réformer le jugement rendu par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale et de déclarer prescrite l'action engagée par [B] [O]. A titre subsidiaire dire et juger que la preuve de la faute inexcusable des sociétés ENEDIS et GRDF n'est pas rapportée.
A l'appui de ses prétentions elles exposent que la prescription de la faute inexcusable est de deux ans et qu'en l'espèce c'est la date de cessation du paiement des indemnités journalières qui doit être retenue comme point de départ de la prescription biennale dans la mesure ou il s'agit d'un accident du travail dont la nature professionnelle n'a jamais été contestée et qui, de ce fait, n'a donné lieu à aucune enquête de la part de l'organisme social.
En outre elles soutiennent que l'analyse des pièces versées aux débats révèle que l'agression a eu lieu au sein de la cité [Adresse 6] qui n'était pas considérée comme une zone à risque.
Par ailleurs de nombreuses mesures ont été mise en place par l'employeur aux fins de préserver ses salariés notamment dans le cadre des interventions auprès des clients.
En conséquence elles demandent a titre principal de réformer le jugement rendu par le Tribunal de Sécurité Sociale des Bouches-du-Rhône en ce qu'il a déclaré recevable le recours du salarié. A titre subsidiaire dire et juger que la preuve de la faute inexcusable des sociétés ENEDIS et GRDF n'est pas rapportée.
Enfin elles demandent de condamner [B] [O] reconventionnellement à payer aux sociétés ENEDIS et GRDF la somme globale de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Mais attendu que la Cour rappelle que la prescription en matière de faute inexcusable est de deux ans, elle court :
- soit de la cessation du travail (D461-5 du Code de la sécurité sociale)
- soit du jour de la clôture de l'enquête légale (L431-2 du Code de la sécurité sociale)
- soit du jour de la cessation du paiement des indemnités journalières (L431-2 du Code de la sécurité sociale)
- soit selon une jurisprudence constante du jour de la reconnaissance de l'origine profesionnelle de l'accident ou de la maladie.
Qu' en l'espèce, [B] [O] a été victime d'un accident du travail le 20 octobre 2004.
Que saisie d'une déclaration d'accident du travail , la CPAM a reconnu le caractère professionnel de l'accident.
Que la nature professionnelle de l'accident n'a jamais été contestée et qui de ce fait n'a donné lieu à aucune enquête de l'organisme social.
Que l'attribution ultérieure d'une rente par l'organisme social ne saurait donc constituer le point de départ de la prescription biennale dans la mesure où il ne s'agit pas de la reconnaissance de l'origine professisonnelle de l'accident mais des conséquences d'une reconnaissance préalable et antérieure.
Que dans la mesure où [B] [O] demande à ce qu'il soit reconnu qu' il a agi dans le délai de deux ans pour faire reconnaitre la faute inexcusable, il lui appartient de justifier de la date du jour de la reconnaissance de l'origine professionnelle de l'accident.
Qu' en conséquence la Cour constate que [B] [O] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe qu'il a agit dans le délai de deux ans.
Que le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il a reconnu recevable l'action de [B] [O] comme n'étant pas prescrite.
Que la procédure devant les juridictions de la sécurité sociale est gratuite et sans frais conformément aux dispositions de l'article R144-6 du Code de la sécurité sociale et qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur les dépens ;
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Bouches du Rhône du 30 novembre 2010 en ce qu'il a déclaré recevable l'action de [B] [O];
Et statuant à nouveau;
Déclare irrecevable l'action engagée par [B] [O] sur le fondement de la faute inexcusable de son employeur,
Dit qu'il n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT