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11/01/2018 | FRANCE | N°16/05310

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre b, 11 janvier 2018, 16/05310


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

3e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 11 JANVIER 2018



N° 2018/004













Rôle N° 16/05310







[L] [C]





C/



SA AXA FRANCE IARD







Grosse délivrée

le :

à :

Me J-R DRUJON D'ASTROS

Me P-Y IMPERATORE













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en

date du 18 Février 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 13/10050.





APPELANT



Monsieur [L] [C]

né le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 1]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représenté et plaidant par Me Jean-Rémy DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS B...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

3e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 11 JANVIER 2018

N° 2018/004

Rôle N° 16/05310

[L] [C]

C/

SA AXA FRANCE IARD

Grosse délivrée

le :

à :

Me J-R DRUJON D'ASTROS

Me P-Y IMPERATORE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 18 Février 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 13/10050.

APPELANT

Monsieur [L] [C]

né le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 1]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représenté et plaidant par Me Jean-Rémy DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS BALDO & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substitué par Me Constance DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS BALDO & ASSOCIES, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SA AXA FRANCE IARD

siège social [Adresse 2]

représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Antoine FAIN-ROBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 31 Octobre 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Jean-François BANCAL, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-François BANCAL, Président (rédacteur)

Mme Patricia TOURNIER, Conseillère

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2018,

Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige :

Pour son habitation située le [Adresse 3], [L] [C] a souscrit auprès de la S.A AXA FRANCE IARD un contrat d'assurance habitation.

A la suite de pluies exceptionnelles survenues le 15.6.2010 ayant provoqué des crues entraînant l'inondation de maison, événement objet d'un arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophes naturelles, il déclarait le sinistre à son assureur.

Après avoir missionné un expert, la compagnie proposait un règlement immédiat de 66933€ et un règlement différé, sur présentation de factures, de 29924,50€ , ce que [L] [C] acceptait le 14.5.2011.

Il percevait donc la somme de 66933€.

A la suite d'un nouvel épisode d'inondations et coulées de boue survenu le 5.11.2011, également objet d'un arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophes naturelles du 18.11.2011, d'une nouvelle déclaration de sinistre de [L] [C], la compagnie missionnait un expert, qui, dans son rapport de reconnaissance du 17.11.2011, évaluait à 50000€ le montant prévisionnel du sinistre, ajoutant que la prise en charge était conditionnée par la justification par l'assuré des remises en état et remplacement des biens intervenus suite au précédent sinistre du 15.6.2010.

Par virement du 22.11.2011, l'assureur adressait à [L] [C] un acompte de 10000€.

L'expert missionné par l'assuré évaluait le montant des dommages subis à 294285€.

Après avoir reçu des documents de son assuré et missionné un enquêteur privé, la compagnie notifiait un refus de garantie par lettre du 2.10.2012 , en invoquant une déchéance de garantie au motif que les pièces produites pour justifier de la remise en état et du remplacement des biens sinistrés n'avaient aucun caractère probant.

Par acte du 29.10.2013, [L] [C] faisait assigner la S.A. AXA FRANCE IARD devant le tribunal de grande instance de Draguignan aux fins d'être indemnisé du sinistre du 5.11.2011 et d'obtenir notamment la condamnation de la S.A. AXA FRANCE IARD à lui payer la somme de 294285€.

Par jugement du 18.2.2016, le tribunal de grande instance de Draguignan a :

- déclaré recevable la demande de [L] [C],

- considéré que [L] [C] ayant effectué une fausse déclaration devra rembourser à la S.A. AXA FRANCE IARD la somme indûment conservée sans cause de 66933€,

- rejeté 'la demande de déchéance de garantie' concernant le second sinistre,

- fixé à 50000€ l'indemnité due ,

après compensation,

- condamné [L] [C] à payer à la S.A. AXA FRANCE IARD 16933€ ,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- condamné [L] [C] aux dépens .

Le 23.3.2016, [L] [C] interjetait appel.

Vu les conclusions de [L] [C] avec bordereau de communication de pièces notifiées par le R.P.V.A. le 14.6.2016,

Vu les conclusions de la S.A. AXA FRANCE IARD avec bordereau de communication de pièces notifiées par le R.P.V.A. le 10.8.2016,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 17.10.2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la prescription biennale :

Aucune réclamation n'étant formulée par [L] [C] pour demander paiement d'une somme au titre du premier sinistre intervenu le 15.6.2010, c'est en vain que la S.A. AXA FRANCE IARD soulève une fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale pour agir, alors qu'il n'est pas contesté que l'action en indemnisation des conséquences dommageables du second sinistre du 4.11.2011 l'a été avant l'expiration du délai de 2 ans.

C'est donc avec raison que le premier juge a déclaré recevable l'action engagée par [L] [C].

Sur la déchéance de garantie afférente au sinistre du 5.11.2011 et la restitution de l'acompte:

En application de l'article 9 du Code de procédure civile : ' Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.'

Et l'article 1315 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10.2.2016 applicable au litige, énonce que :

' Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.'

Il appartient donc à l'assuré de rapporter d'une part, la preuve du sinistre qu'il invoque, d'autre part, d'établir que les garanties du contrat souscrit par lui doivent être mobilisées, alors que c'est à l'assureur qui dénie sa garantie de prouver que le contrat ne peut recevoir application faute pour l'assuré de remplir les conditions contractuelles.

Et la déchéance de garantie, sanction contractuelle qui doit figurer dans le contrat d'assurance, prive l'assuré, qu'il soit ou non de bonne foi, de son droit à garantie.

En page 48 des conditions générales du contrat d'assurance, dont l'assuré ne conteste pas l'application, figure une clause de déchéance de garantie ainsi libellée : «Si, de mauvaise foi, vous faites de fausses déclarations sur la nature, les causes, les circonstances ou les conséquences d'un sinistre, vous êtes entièrement déchu de tout droit à garantie pour ce sinistre».

En premier lieu, compte tenu des textes précités et des dispositions de l'article 146 alinéa 2 du code de procédure civile qui énonce qu''en aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve', de l'obligation pesant sur l'assuré de rapporter la preuve du sinistre, de son ancienneté, il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise judiciaire, comme il le demande pourtant en appel.

C'est à juste titre que le premier juge a précisé que [L] [C] avait faussement indiqué avoir affecté à la remise en état de l'immeuble l'indemnité de 66'933 € reçue pour le premier sinistre, qu'il n'était pas en mesure de démontrer le paiement de « situations de travaux» nommées devis, sur lesquels ne figurait aucune signature précédée d'une mention d'accord, alors qu'il lui appartenait de démontrer l'emploi conforme des fonds reçus.

En outre, l'allégation de paiements en espèces effectués entre les mains de l'entrepreneur [O] [V] qui exercerait à l'enseigne Artirenov, pour des travaux de remise en état effectués à la suite du premier sinistre, n'est nullement confortée par les documents produits et par les recherches de l'enquêteur privé missionné par l'assureur.

La production de photocopies d'extraits d'un compte bancaire où figure des retraits d'espèces ne permet nullement de déterminer l'affectation de ces espèces.

Aucun reçu ou facture mentionnant les dates et montants des règlements effectués n'est produit.

Et il est permis de s'interroger sur la sincérité de l'artisan [O] [V], qui , lors des recherches de l'enquêteur privé, a d'abord refusé de le recevoir seul , puis, a laissé [L] [C] et M. [W], son expert, répondre à sa place, et ce dernier établir « sous la dictée», une « attestation » concernant des paiements en « liquide » de « 4 situations de travaux », dont le montant total est d'ailleurs inférieur à l'indemnité perçue.

Contrairement aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, ce dernier document n'a donc pas été établi par l'artisan et comporte, à côté de la signature de [O] [V], celle de Monsieur [W].

En outre, pour justifier les paiements en 'liquide' allégués, [L] [C] a seulement affirmé à l'enquêteur privé que l'artisan n'aurait pas de compte en banque, sans pour autant verser la moindre pièce à ce sujet.

Ainsi , n 'établissant pas qu'au jour du second sinistre, il avait déjà fait procéder à des travaux de remise en état de son immeuble dans les conditions qu'il décrit, [L] [C] a fait de fausses déclarations sur les conséquences du sinistre, qui aurait, selon lui, affecté un immeuble déjà remis en état.

Pour ce sinistre du 5.11.2011, il est donc déchu de tout droit à garantie et doit être condamné à restituer à l'assureur l'acompte perçu de 10 000€.

Le jugement déféré doit donc être partiellement confirmé, puisque c'est à tort que le premier juge a débouté l'assureur de sa demande visant à faire application de la clause contractuelle de déchéance de garantie et opéré une confusion avec la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle, le litige ne portant pas ici sur la formation du contrat mais sur son exécution.

Sur la restitution de l'indu afférente au sinistre du 15/6/2010 :

Alors qu'il ne justifie pas avoir, conformément aux dispositions de l'article L 121-17 du code des assurances, affecté l'indemnité d'assurance perçue à la remise en état effective de l'immeuble sinistré, que le paiement de l'indemnité de 66933€ est donc indu, c'est avec raison que le premier juge a estimé que [L] [C] devait, en application de l'article 1235 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10.2.2016 applicable au litige, restituer ladite somme à la S.A. AXA FRANCE IARD.

Enfin, il doit être relevé que [L] [C] ne maintenant plus devant la cour sa demande d'indemnisation formulée à hauteur de 2000€, le jugement déféré doit également être confirmé en ce que le premier juge l'a débouté de cette réclamation.

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile :

Succombant, [L] [C] supportera les dépens.

L'équité et la situation économique de la partie condamnée ne commandent nullement d'allouer à la S.A. AXA FRANCE IARD la moindre somme au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR :

Statuant publiquement,

Contradictoirement,

CONFIRME partiellement le jugement déféré en ce que le premier juge a :

rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale pour agir soulevée par la S.A. AXA FRANCE IARD,

considéré que [L] [C] ayant effectué une fausse déclaration devra rembourser à la S.A. AXA FRANCE IARD la somme indûment conservée de 66933€,

débouté [L] [C] de sa demande de dommages et intérêts formée à hauteur de 2000€ ,

débouté les parties de leurs demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné [L] [C] aux dépens,

LE REFORME pour le surplus,

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

CONSTATE la déchéance de garantie,

DEBOUTE [L] [C] de ses demandes d'expertise et d'indemnisation,

CONDAMNE [L] [C] à payer à la S.A. AXA FRANCE IARD 76933€,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes, notamment d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE [L] [C] aux dépens d'appel et en ordonne la distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/05310
Date de la décision : 11/01/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3B, arrêt n°16/05310 : Prononce la jonction entre plusieurs instances


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-11;16.05310 ?
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