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16/11/2017 | FRANCE | N°15/22465

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 16 novembre 2017, 15/22465


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 16 NOVEMBRE 2017

Hg

N° 2017/ 831













Rôle N° 15/22465







Syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Adresse 1]





C/



[M] [S]





















Grosse délivrée

le :

à :



SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE



Me Vincent PENARD









>
Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 23 Novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 12/06083.





APPELANTE



Syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Adresse 1] dont le siège social est [Adresse 2], représenté par son Syndic en exercice, la SAS CAB...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 16 NOVEMBRE 2017

Hg

N° 2017/ 831

Rôle N° 15/22465

Syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Adresse 1]

C/

[M] [S]

Grosse délivrée

le :

à :

SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE

Me Vincent PENARD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 23 Novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 12/06083.

APPELANTE

Syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Adresse 1] dont le siège social est [Adresse 2], représenté par son Syndic en exercice, la SAS CABINET FONCIA GECOVAR, dont le siège social est sis [Adresse 3], elle-même prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représenté par la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Monique BOCCARA-SOUTTER, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMEE

Madame [M] [S]

demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Vincent PENARD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Joanne REINA de la SELARL PLANTAVIN - REINA, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 26 Septembre 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller

Monsieur Luc BRIAND, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Novembre 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Novembre 2017,

Signé par Madame Hélène GIAMI, Conseiller et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCÉDURE ' MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES

[M] [S] est propriétaire des lots 31 et 26 au sein de la copropriété [Adresse 1], commune de [Localité 1], en vertu d'un acte notarié du 23 octobre 1993.

Elle a fait état de désordres d'infiltrations et d'humidité tant dans les parties communes que dans les parties privatives de l'immeuble dès 1994.

A la suite de procédures introduites par le syndicat des copropriétaires et par plusieurs copropriétaires dont [M] [S], à l'encontre des constructeurs de l'immeuble et de leurs assureurs, le tribunal de grande instance de Toulon, selon jugement du 22 septembre 2003, a déclaré entièrement responsables des désordres affectant les logements et parties communes, le promoteur vendeur et le constructeur, au vu des rapports d'expertise judiciaire déposés par monsieur [T] en date des 13 juillet 1995, 13 février 1997 et 15 janvier 1998 ; il les a condamné in solidum avec l'assureur décennal à payer au syndicat des copropriétaires et aux copropriétaires diverses sommes au titre des travaux et des préjudices immatériels, chiffrés respectivement pour le lot [S] à 25.304,02 euros et 13.478,46 euros.

Le 17 juillet 2009, [M] [S] faisait une déclaration de sinistre auprès de son assureur, suite à des infiltrations ; le 24 février 2010, elle déclarait des sinistres complémentaires consistant en des microfissures et enfoncement progressif d'un carreau ; le 2 avril 2010, l'assureur informait l'intéressée de sa non garantie, les désordres provenant de l'humidité remontant dans les cloisons de son logement ; le 17 juillet 2010, [M] [S] faisait procéder à un constat d'huissier concernant les problèmes d'humidité et microfissures de son appartement.

Selon ordonnance de référé du 19 novembre 2010, une expertise confiée à monsieur [Z] était ordonnée afin de rechercher notamment si les désordres sont nouveaux par rapport à l'expertise [T] ou s'il s'agit d'une aggravation des désordres précédemment dénoncés.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 28 février 2012.

Par exploit du 30 novembre 2012, [M] [S] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Toulon le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 1] afin d'obtenir l'homologation du rapport d'expertise judiciaire et la condamnation du syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 34 040,21 euros déduction faite des provisions allouées en référé, au titre des travaux de reprise, honoraires de maîtrise d''uvre, préjudice locatif, préjudice de jouissance, préjudice moral, outre indemnités accessoires et dépens.

Le tribunal, par jugement du 23 novembre 2015, a notamment :

- dit que les désordres constitués par les infiltrations, remontées d'humidité et dégradations consécutives constatés par [M] [S] dans son logement depuis 2009 sont distincts de ceux ayant fait l'objet d'une décision de condamnation rendue par le tribunal de grande instance de Toulon le 22 septembre 2003

- rejeté en conséquence les exceptions d'irrecevabilité soulevées par le syndicat des copropriétaires

- dit recevable l'action en réparation de [M] [S]

- dit que ces désordres ont pour origine un vice de construction par l'absence de drainage des eaux pluviales dans les parties communes

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à payer à [M] [S] les sommes suivantes,

* 17 973,55 euros TTC au titre des frais de reprise

* 2900 euros TTC au titre des honoraires de maîtrise d''uvre

* 10 666,66 euros au titre du préjudice locatif

* 3000 euros au titre du préjudice de jouissance

- dit que [M] [S] ne participera pas aux condamnations, droits et honoraires de la première instance en application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à payer à [M] [S] la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire

- ordonné l'exécution provisoire

- rejeté toutes autres demandes.

Le syndicat des copropriétaires résidence [Adresse 1] a régulièrement relevé appel, le 21 décembre 2015, de ce jugement en vue de sa réformation.

Il demande à la cour, selon conclusions déposées le 8 septembre 2017 de :

réformer la décision rendue par le tribunal de grande instance de Toulon en date du 23 novembre 2015 et statuant à nouveau

A titre principal

- déclarer l'action de [M] [S] irrecevable du fait de la prescription de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 concernant la réparation des désordres remontées d'humidité et dégradations du bas des cloisons, défaut de ventilation, humidité suite à inondations, ces désordres ne pouvant être considérés comme nouveaux puisque l'expert [Z] a formellement daté l'apparition des désordres et l'identification de leurs causes dès 1995

- dire et juger l'action de [M] [S] irrecevable compte tenu de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 22 septembre 2003 et du principe de la concentration des moyens

A titre subsidiaire

- dire et juger l'action de [M] [S] mal fondée, l'intéressée ayant contribué par son comportement à la réalisation du dommage invoqué (appartement inhabité huit mois par an, absence d'aération, absence de climatisation, absence de deshumidification, contrairement aux voisins du rez-de-chaussée souffrant des mêmes désordres)

- dire et juger l'action de [M] [S] mal fondée du fait qu'elle a perçu directement les fonds nécessaires à la réalisation des travaux de reprise, qu'elle a mandaté son propre sapiteur [R] [A] et ses propres entreprises pour faire réaliser lesdits travaux de reprise et ce, sous son entière responsabilité exclusive de celle du syndicat des copropriétaires

A titre plus subsidiaire

- débouter [M] [S] de sa demande de faire supporter par le syndicat des copropriétaires les travaux de reprise du scellement du ballon d'eau chaude pour un coût de 100 euros TTC qui ne relèvent ni d'un vice de construction, ni d'un défaut d'entretien des parties communes

- la débouter de sa demande de prise en charge par le syndicat des copropriétaires des travaux de reprise des éléments de placoplâtre à hauteur de 3800 euros, résultant essentiellement de la vétusté, d'un défaut de pose et d'un matériau totalement inadapté

- la débouter de sa demande de prise en charge par le syndicat des copropriétaires des travaux de reprise des traces d'humidité au plafond de la chambre Nord à hauteur de 600 euros, dont la cause est étrangère à un vice de construction ou à un défaut d'entretien des parties communes

Vu les demandes nouvelles de [M] [S]

- débouter [M] [S] de sa demande de condamnation à des travaux supplémentaires, par rapport à ceux objets de l'expertise contradictoire

- la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour troubles de jouissance, étrangers à ceux appréciés dans le rapport d'expertise

- la débouter de toute condamnation au titre de son préjudice moral, lequel est dubitatif, futur ou sans lien de causalité

A titre infiniment subsidiaire

Vu l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965

- juger qu'en cas de condamnation du syndicat des copropriétaires, [M] [S] sera dispensée de la participation aux dépenses communes du syndicat des copropriétaires, pour les seuls frais de procédure, l'intéressée devant participer à toutes autres dépenses selon ses tantièmes

En toutes circonstances

- débouter [M] [S] de l'ensemble de ses autres demandes notamment indemnitaires

- la condamner à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 1] la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- la condamner aux entiers dépens.

Formant appel incident, [M] [S] sollicite de voir, selon conclusions déposées par RPVA le 2 août 2017 :

Vu l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulon en date du 23 novembre 2015 en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires à payer à [M] [S] les sommes suivantes 

* 17 973,55 euros TTC au titre des travaux de reprise

* 2900 euros au titre des honoraires de maîtrise d''uvre

* 2500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile concernant la procédure de première instance

et, en ce qu'il a dit que [M] [S] ne participera pas aux condamnations, frais, droits et honoraires de la présente instance en application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965

En conséquence

- dire et juger recevable et bien fondée l'action de [M] [S], celle-ci ne se heurtant pas à l'autorité de chose jugée issue du jugement du 22 novembre 2003

- dire et juger que l'action de [M] [S] n'est pas atteinte de prescription en l'état de nouveaux désordres apparus en 2009

- dire et juger que le syndicat des copropriétaires a fait réaliser les travaux de reprise s'élevant à la somme de 25 304,02 euros représentant le montant des travaux de reprise évalués par l'expert judiciaire (soit 165.983,47 francs) sur la base du rapport [T]

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] de l'ensemble de ses demandes

- dire et juger que le syndicat des copropriétaires est responsable de plein droit des désordres affectant l'appartement [S] et trouvant leur origine dans les parties communes

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à la somme de 29 040,21 euros, déduction faite de la provision allouée à [M] [S] par ordonnance de référé du 19 novembre 2010, selon le détail ci-après,

* 17.973,55 euros (travaux de reprise)

* 2.900 euros TTC (honoraires maîtrise d''uvre)

* 10.666,66 euros (préjudice locatif)

- en tout état de cause, condamner le syndicat des copropriétaires à effectuer les travaux de reprise relatifs à la mise en place d'un système de drainage tels que décrits par l'expert judiciaire en pages 12 et 19 de son rapport d'expertise poste C et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt

- condamner le syndicat des copropriétaires à régler à [M] [S] la somme de 16.373,50 euros TTC (17 973,55 - 4500 + 2900)

- dire et juger que [M] [S] ne participera pas aux condamnations, frais, droits et honoraires de la présente instance en application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965

- actualiser les sommes visées aux termes du rapport d'expertise [Z] en fonction de la variation de l'indice BT 01 entre le 28 février 2012, date du dépôt du rapport d'expertise et le jour de l'arrêt à intervenir, avec intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2012 avec anatocisme

- réformer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulon le 23 novembre 2015 en ce qu'il a accordé la somme forfaitaire de 3000 euros au titre du préjudice de jouissance et a rejeté l'indemnisation sollicitée au titre du préjudice moral

En conséquence

- condamner le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] au paiement des sommes de 15  000 euros au titre du préjudice de jouissance et de 10  000 euros au titre du préjudice moral

En tout état de cause,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires à verser à [M] [S] la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner le syndicat des copropriétaires à régler à [M] [S] la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel

- condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens.

Le syndicat des copropriétaires résidence [Adresse 1] a déposé et notifié par RPVA le 11 septembre 2017 une nouvelle pièce ainsi que de nouvelles conclusions aux termes desquelles il maintient ses demandes.

[M] [S] a déposé et notifié par RPVA le 11 septembre 2017 des conclusions pour solliciter :

A titre liminaire,

vu les articles 15 et 135 du code de procédure civile

vu les conclusions récapitulatives du syndicat des copropriétaires notifiées le 11 septembre à 16h32

le rejet des conclusions du syndicat des copropriétaires notifiées le 11 septembre 2017 à 16h32, soit la veille de la clôture, comme étant tardives

Au fond,

le maintien de ses demandes.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 12 septembre 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 Sur la recevabilité des conclusions du 11 septembre 2017 et de la pièce numéro 12 du syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 1]

En vertu de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 1] a versé aux débats le 11 septembre 2017 une nouvelle pièce constituée d'une attestation ; il s'en prévaut dans ses dernières conclusions déposées le même jour.

[M] [S] n'a pas disposé d'un temps suffisant pour pouvoir répliquer, compte tenu des nombreux éléments nouveaux figurant dans cette attestation de près de quatre pages datée du 6 septembre 2017 faisant référence à des événements remontant pour certains à l'année d'acquisition du bien litigieux en 1993 ou encore à l'année 2003 et ce, d'autant plus qu'elle ne réside pas sur place.

En considération de ces circonstances particulières, les conclusions et la pièce numéro 12 signifiées le 11 septembre 2017 à 16h32, veille de la clôture de la procédure, elle-même prévue depuis le 11 mai 2017, sont irrecevables.

2 Sur les fins de non-recevoir

2-1 Sur la prescription

En vertu de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 invoqué par [M] [S] à l'appui de ses demandes, le syndicat des copropriétaires est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

Selon l'article 42 qui suit, les actions personnelles nées de l'application de la présente loi entre des copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de 10 ans.

Il est de droit que les actions en responsabilité contre le syndicat fondées sur l'article 14 font partie des actions personnelles susvisées.

Il s'ensuit que la responsabilité du syndicat ne peut plus être recherchée par les copropriétaires après écoulement d'un délai de 10 ans à compter de la survenance des faits qui sont la cause génératrice de l'action.

Il est également de droit que le point de départ de l'action est le jour de l'apparition des désordres dans le lot privatif lorsque le copropriétaire met en cause la responsabilité du syndicat pour vice de construction ; le point de départ peut être différé à compter du jour où le copropriétaire connaît la cause des désordres qu'il subit et où il dispose des éléments lui permettant de savoir que la responsabilité du syndicat est engagée.

Ce délai court, même si les désordres se sont perpétués dans le temps.

En l'espèce, l'expert judiciaire [Z] a relevé dans son rapport du 28 février 2012 la présence de plusieurs désordres affectant l'appartement de [M] [S] :

- remontées d'humidité et dégradations des bas des cloisons (désordre 2-1)

- humidité, conséquence des inondations de 1997 et de 2010 (désordre 2-2)

- désordres par fissuration (désordre 2-3)

- désordres des revêtements muraux par défaut de ventilation (désordre 2-4)

- descellement du cumulus d'eau chaude (désordre 2-5)

- traces d'humidité en plafond de la chambre Nord (désordre 2-6)

- trois carreaux de carrelage cassés (désordre 2-7).

S'agissant des remontées d'humidité et dégradations des bas de cloisons (désordre 2-1), l'expert judiciaire indique que le dommage n'est pas nouveau car il a été répertorié par l'expert [T] qui l'a constaté le 15 janvier 1998 au pied des murs et cloisons de l'ensemble de l'appartement et qui l'avait déjà constaté dans la limite de la seule chambre Est dans son rapport du 13 juillet 1995, au contradictoire de [M] [S].

Selon l'expert [T], pour remédier à ces remontées d'humidité, des travaux de drainage à l'extérieur et de réfection du dallage extérieur étaient nécessaires, outre la reprise des carrelages et peinture du logement et réalisation d'une ventilation statique.

À la date du 15 janvier 1998, [M] [S] ne pouvait donc ignorer la cause des désordres subis dans l'ensemble de son appartement et disposait des éléments lui permettant de rechercher la responsabilité du syndicat des copropriétaires.

Son action diligentée le 30 novembre 2012 à l'encontre du syndicat des copropriétaires en responsabilité se trouve donc prescrite en ce qui concerne les désordres de remontées d'humidité et dégradations du bas des cloisons.

S'agissant du désordre d'humidité, conséquence des inondations de 1997 et de 2010 (désordre 2-2), l'expert [Z] relève que le logement a fait l'objet de deux inondations en 1997 et en 2010.

La première inondation de 1997 a été portée à la connaissance de l'expert [T] par lettre du 21 juillet 1997 de [M] [S] ; l'intéressée indique dans son courrier avoir constaté l'inondation du sol de la chambre Nord, de la cuisine et du salon ; elle précise « qu'il ne s'agit pas d'un dégât des eaux habituel mais d'un problème résultant d'une fuite sur canalisation encastrée intéressant les parties communes » ; elle mentionne que son appartement présente de l'humidité, des taches et une odeur nauséabonde, ainsi qu'une remontée d'eau très visible localisée sous l'évier le 19 juillet ; le 14 août suivant, l'expert [T] a constaté la réalité des désordres ; au vu de ces éléments, [M] [S] disposait des éléments lui permettant de rechercher la responsabilité du syndicat des copropriétaires, de sorte que son action diligentée le 30 novembre 2012 à l'encontre du syndicat des copropriétaires en responsabilité se trouve prescrite en ce qui concerne les désordres liés à l'inondation de 1997.

La seconde inondation de 2010 mentionnée dans le rapport d'expertise [Z] a entraîné la pénétration d'eau sous le carrelage intérieur, générant de l'humidité dans le logement ; l'action diligentée le 30 novembre 2012, dans le délai de 10 ans n'est pas prescrite.

S'agissant des désordres par défaut de ventilation (2-4), l'expert [Z] indique dans son rapport que ces derniers ont été constatés par l'expert [T] dans son rapport du 13 juillet 1995, lequel mentionne que la totalité des murs et cloisons est polluée par des moisissures, que ces moisissures proviennent de condensation et que la condensation résulte d'un important défaut de ventilation de l'intérieur du logement ; l'expert [Z] date l'apparition de ces désordres de l'année 1995 et préconise l'assèchement des murs et cloisons avec une bonne ventilation pour faire cesser ces désordres ; ceux-ci étaient donc connus ainsi que leur cause depuis 1995 par [M] [S] présente aux opérations d'expertise de monsieur [T] ; le point de départ du délai de prescription se situe donc en 1995 au moment de l'apparition des vices de construction qui sont la cause génératrice de l'action ; ce dont il résulte que l'action est prescrite du chef des désordres par défaut de ventilation.

S'agissant par ailleurs des désordres par fissuration (désordre 2-3) et des trois carreaux de carrelage cassés (désordre 2-7), c'est à tort que le syndicat des copropriétaires soulève la prescription dans le corps de ses conclusions ; il ressort en effet de l'expertise judiciaire [Z] que ces désordres n'existaient pas lors des opérations d'expertise initiale de monsieur [T] ; la date d'apparition est indéterminée selon monsieur [Z] ; le syndicat des copropriétaires qui soulève la prescription ne fournit lui-même aucun élément sur la date d'apparition de ces désordres ; le moyen tiré de la prescription est inopérant.

S'agissant enfin du surplus des désordres, consistant dans le descellement du cumulus d'eau chaude (désordre 2-5) et les traces d'humidité en plafond de la chambre Nord (désordre 2-6), il convient de constater que le syndicat des copropriétaires ne soulève pas la prescription.

2-2 Sur l'autorité de la chose jugée

En application de l'article 1351 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, qu'elle soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité.

En l'espèce, aux termes du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulon le 22 septembre 2003, le syndicat des copropriétaires et plusieurs copropriétaires dont [M] [S] ont obtenu la condamnation du promoteur vendeur et du constructeur au paiement de diverses sommes correspondant au montant des travaux de reprise et préjudices consécutifs ; le syndicat des copropriétaires et [M] [S] étaient demandeurs dans cette procédure ; [M] [S] n'a pas présenté de demande contre le syndicat des copropriétaires dans le cadre de cette procédure qui l'opposait aux côtés du syndicat des copropriétaires au promoteur et au constructeur de l'ensemble immobilier, sur le fondement de la garantie décennale.

L'assignation délivrée le 30 novembre 2012 par [M] [S] à l'encontre du syndicat des copropriétaires est une procédure qui ne concerne pas les mêmes parties et qui est fondée sur l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 relative à la copropriété.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il écarte la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 22 septembre 2003.

2-3 Sur le principe de la concentration des moyens

Il est de droit que le demandeur doit présenter dans la même instance l'ensemble des moyens de nature à fonder sa demande ; il en résulte qu'un demandeur ne peut invoquer dans une instance postérieure un fondement juridique qu'il s'était abstenu de soulever en temps utile.

En l'espèce, [M] [S] n'a pas agi contre le syndicat des copropriétaires au cours de l'instance ayant abouti au jugement en date du 22 septembre 2003, mais à ses côtés pour demander la condamnation du promoteur et du constructeur au titre de leur garantie décennale.

Le jugement sera par suite confirmé en ce qu'il écarte la fin de non-recevoir tirée d'une atteinte au principe de la concentration des moyens.

3 Sur les responsabilités

L'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes ; il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

Cette responsabilité de plein droit concerne uniquement les dommages ayant leur origine dans les parties communes.

Le syndicat peut être exonéré de sa responsabilité s'il rapporte la preuve d'une faute de la victime.

En l'espèce, [M] [S] recherche la responsabilité du syndicat des copropriétaires sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965.

Au regard de la prescription partiellement retenue, doivent être examinés les désordres suivants :

- descellement du ballon d'eau chaude

- traces d'humidité en plafond de la chambre Nord

- désordres d'humidité découlant de l'inondation du 15 juin 2010

- fissuration des placoplâtres

- carreaux cassés.

3-1 Sur la responsabilité au titre du descellement du ballon d'eau chaude et des traces d'humidité en plafond de la chambre Nord

Pour faire échec aux demandes, le syndicat des copropriétaires estime que ces désordres lui sont étrangers.

En ce qui concerne le ballon d'eau chaude situé dans la salle de bain de [M] [S], l'expert [Z] relève que ce ballon est descellé et qu'il doit être accroché convenablement ; il chiffre l'intervention à 100 euros TTC ; ce dommage ne trouve pas son origine dans les parties communes ; c'est donc à bon droit que le syndicat des copropriétaires conclut à son absence de responsabilité ; le jugement sera réformé de ce chef.

En ce qui concerne les traces d'humidité en plafond de la chambre Nord, l'expert [Z] relève que ce désordre provient d'un incident « dans et depuis le logement supérieur » ; cet élément n'est pas contredit ; ce dommage ne trouve pas son origine dans les parties communes ; c'est donc également à bon droit que le syndicat des copropriétaires conclut à son absence de responsabilité ; le jugement sera réformé de ce chef.

3-2 Sur la responsabilité au titre des désordres d'humidité découlant de l'inondation du 15 juin 2010, des fissurations et des carreaux cassés

Pour être exonéré de toute responsabilité, le syndicat des copropriétaires invoque les fautes commises par [M] [S] ; il lui reproche d'une part un défaut d'entretien et d'usage conforme de son appartement ; il lui reproche d'autre part de ne pas avoir utilisé, comme il convenait, les fonds issus des indemnisations obtenues en justice en vue d'entreprendre les travaux de reprise.

Sur ces différents points, il est établi qu'à la suite du dépôt du rapport d'expertise judiciaire de monsieur [T] désigné en référé selon ordonnance du 25 octobre 1994, une provision égale au montant des travaux a été allouée par ordonnance de référé du 5 décembre 1995 ; monsieur [T] a été désigné en qualité de consultant pour contrôler la bonne fin des travaux et a déposé à cet effet un rapport le 15 janvier 1998, au contradictoire de [M] [S].

Il relève que le maître d''uvre de la copropriété lui signale par courrier du 3 avril 1997 que l'ensemble des travaux sont achevés à l'exception du ré-agencement du jardin de mademoiselle [S] endommagé par les travaux de drainage ; lors de sa visite de l'appartement [S], monsieur [T] constate cependant que les ventilations basses ne sont pas posées, que le seuil de la porte d'entrée est à reprendre, que deux carreaux sont à changer, que le seuil portillon doit être démoli pour permettre l'évacuation des eaux de la cour vers le drainage, que les percements du mur de clôture pour l'évacuation des eaux de la cour vers le drain doivent être faits et que les joints étanches sont à poser sur les panneaux d'isolation extérieure.

En conclusion de son rapport, monsieur [T] indique que la copropriété doit demander à son maître d''uvre de terminer ou parfaire les travaux.

Monsieur [T], saisi par ailleurs suivant lettre du 21 juillet 1997 de [M] [S] d'un désordre lié à l'inondation des lieux, a constaté le 14 août suivant les traces d'humidité et décollement de plinthes résultant de cette inondation ; [M] [S] dénonçait elle-même comme étant à l'origine de cette inondation une fuite sur canalisation encastrée intéressant les parties communes.

Ainsi à la date du 15 janvier 1998, [M] [S] avait dénoncé elle-même comme étant à l'origine de l'inondation de son appartement intervenue en 1997, une fuite sur canalisation encastrée intéressant les parties communes et ne pouvait ignorer :

- qu'il n'avait pas été remédié aux causes des désordres d'humidité et d'inondations, en l'état de l'inachèvement des travaux de reprise de drainage, de ventilation, d'évacuation des eaux et d'étanchéité

- que des carreaux étaient toujours défectueux.

Pour autant, ainsi que le soutient le syndicat des copropriétaires, elle ne justifie d'aucune démarche tendant à la réalisation des travaux, soit en y procédant elle-même, soit en diligentant toute procédure afin d'obtenir leur achèvement et la réparation de la fuite dénoncée le 21 juillet 1997.

Elle conteste d'ailleurs avoir reçu une quelconque indemnité provisionnelle et avoir fait réaliser des travaux, faisant valoir au contraire que seul l'administrateur de la copropriété a perçu les fonds destinés aux travaux de reprise.

Elle a attendu finalement le 17 juillet 2009 pour faire une déclaration de sinistre et le 24 février 2010, pour déclarer un sinistre complémentaire auprès de son assureur habitation, lequel a d'ailleurs refusé sa garantie, motif pris de ce que les désordres proviennent de l'humidité remontant dans les cloisons de son logement.

Par son absence de diligences, [M] [S] se trouve directement à l'origine des désordres suivants constatés par l'expert [Z] :

- désordres d'humidité découlant de l'inondation du 15 juin 2010

- fissurations des placoplâtres

- carreaux cassés.

En effet, l'inondation de 2010 est liée selon l'expert judiciaire à un défaut d'étanchéité, à un défaut de protection de la barrière étanchée et à un défaut de drainage ; les fissurations des placoplâtres sont liées à l'humidité intérieure du logement et à la vétusté du matériau ; les carreaux de carrelage cassés sont la conséquence des désordres par inondation.

En considération de l'ensemble de ces éléments, les trois désordres qui précèdent auraient pu être évités si [M] [S] avait veillé à ce que les travaux de reprise soient correctement réalisés ou si elle avait dûment sollicité leur achèvement, comme le lui permettait le rapport d'expertise de monsieur [T] du 15 janvier 1998 ; ceci se trouve corroboré par les attestations de copropriétaires versées aux débats par l'appelant, faisant ressortir que les propriétaires du rez de chaussée ayant subi les mêmes désordres d'humidité ont réglé les problèmes d'insalubrité à la suite des travaux effectués.

Par conséquent, la responsabilité du syndicat des copropriétaires doit être écartée sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 et le jugement réformé en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires au paiement des sommes de 17 973,55 euros au titre des frais de reprise, 2900 euros au titre des honoraires de maîtrise d''uvre, 10 666,66 euros au titre du préjudice locatif et 3000 euros au titre du préjudice de jouissance.

De même, [M] [S] sera déboutée de sa demande de condamnation à la réalisation de travaux sous astreinte et de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts, outre demandes subséquentes d'actualisation et d'intérêts avec anatocisme.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'indemnisation du préjudice moral invoqué par [M] [S].

4 Sur la demande de dispense de participation aux frais et dépenses communes

Au regard de l'absence de responsabilité du syndicat des copropriétaires ou de la prescription retenue au titre de certains désordres, le jugement sera réformé en ce qu'il dit que [M] [S] ne participera pas aux condamnations, frais, droits et honoraires de la présente instance en application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

5 Sur les frais irrépétibles et les dépens

Succombant en cause d'appel, [M] [S] doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires résidence [Adresse 1] la somme de 4000 euros au titre des frais non taxables que celui-ci a dû exposer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; [M] [S] sera déboutée de sa demande de confirmation du jugement au titre de l'article 700 précité.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit et juge irrecevables les conclusions et la pièce numéro 12 notifiées et déposées le 11 septembre 2017 par le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 1],

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Toulon du 23 novembre 2015, sauf en ce qu'il a :

- rejeté les fins de non-recevoir tirées de l'autorité de chose jugée et de la concentration des moyens

- rejeté la prescription soulevée par le syndicat des copropriétaires au titre du désordre humidité par suite de l'inondation du 15 juin 2010, des désordres par fissuration, des désordres consistant en trois carreaux cassés, du descellement du ballon d'eau chaude et des traces d'humidité en plafond

- dit en conséquence recevable l'action en réparation de [M] [S] au titre des désordres sus- énoncés

- rejeté la demande de dommages-intérêts de [M] [S] au titre de son préjudice moral,

Statuant à nouveau,

Déclare prescrite l'action de [M] [S] diligentée le 30 novembre 2012 à l'encontre du syndicat des copropriétaires en ce qui concerne les désordres de remontées d'humidité et dégradations du bas des cloisons, les désordres par défaut de ventilation et le désordre d'humidité résultant de l'inondation de 1997,

Dit et juge irrecevables en conséquence les demandes de [M] [S] au titre des désordres de remontées d'humidité et dégradations du bas des cloisons, des désordres par défaut de ventilation et du désordre d'humidité résultant de l'inondation de 1997,

Dit et juge l'action de [M] [S] mal fondée pour le surplus des désordres,

Déboute [M] [S] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires et de réalisation de travaux, ainsi que de ses demandes subséquentes d'actualisation et d'intérêts avec anatocisme,

Déboute [M] [S] de sa demande de dispense de participation aux condamnations, frais, droits et honoraires d'instance,

Condamne [M] [S] à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 1] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires,

Dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 15/22465
Date de la décision : 16/11/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°15/22465 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-16;15.22465 ?
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