COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
14e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 08 NOVEMBRE 2017
N°2017/1647
Rôle N° 16/23232
[C] [V]
OBJECTIF INTERIM VAR
C/
URSSAF DU VAR
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE
Grosse délivrée le :
à :
Me Nathalie ALBO, avocat au barreau de MARSEILLE
URSSAF DU VAR
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du VAR en date
du 18 Novembre 2016,enregistré au répertoire général sous le n° 21401525.
APPELANTS
Monsieur [V] [C], liquidateur de la société OBJECTIF INTERIM VAR, demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Nathalie ALBO, avocat au barreau de MARSEILLE
OBJECTIF INTERIM VAR représentée par son liquidateur M. [C] [V], demeurant Chez M. [T] [M] - [Adresse 2]
représentée par Me Nathalie ALBO, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
URSSAF DU VAR, demeurant [Adresse 3]
représenté par Mme [D] [F] (Inspectrice du contentieux) en vertu d'un pouvoir spécial
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE, demeurant [Adresse 4]
non comparant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 27 Septembre 2017 en audience publique devant la Cour composée de :
M. Gérard FORET-DODELIN, Président
Madame Florence DELORD, Conseiller
Madame Marie-Pierre SAINTE, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Novembre 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Novembre 2017
Signé par M. Gérard FORET-DODELIN, Président et Madame Nathalie ARNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Sarl Objectif Intérim a fait appel du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du Var du 18 novembre 2016 qui, après avoir mis hors de cause son assureur-garantie financière, M.[U], de la compagnie Assurances Courtage et condamné l'Urssaf à payer à celui-ci la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a débouté la Sarl Objectif Intérim de ses contestations du redressement opéré par l'Urssaf courant juillet 2013 et l'a condamnée à payer à l'Urssaf la somme de 970556 euros, outre 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions développées à l'audience de plaidoirie du 27 septembre 2017, elle a demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de déclarer infondés les rappels de cotisations et majorations de retard et de condamner l'URSSAF à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions développées à l'audience, l'URSSAF a demandé à la Cour de confirmer le jugement, de débouter l'appelante de ses demandes et de la condamner à lui payer les sommes des deux mises en demeure des 14 octobre et 20 décembre 2013 soit :
1)- pour l'établissement de [Localité 1]: 888796 + 81760 = 970556 euros
2)- pour l'établissement de [Localité 2]: 288569 + 27534 = 316102 euros
et enfin la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La MNC a été avisée de l'appel.
MOTIFS DE LA DECISION
Par le jugement déféré à la Cour, le tribunal a ordonné la jonction des deux recours mais n'a statué que sur un seul, puisqu'il a condamné la société Objectif Intérim à payer à l'Urssaf la somme de 970556 euros, qui ne concerne que l'établissement de Fréjus.
Devant la Cour, l'Urssaf demande la confirmation du jugement mais fait porter ses demandes de condamnation sur les deux établissements (cf.supra).
L'appelante ayant évoqué la situation de l'établissement de Toulon dans ses conclusions et pendant sa plaidoirie, la Cour considère que la question de l'omission de statuer commise par le tribunal est dans les débats et qu'il convient de statuer sur les deux mises en demeure afférentes aux deux établissements.
********
Il est constant que la société Objectif Intérim Var dont le siège social était à [Localité 3], a été immatriculée en tant qu'employeur de personnel salarié à compter du 1er juillet 2011, pour deux agences situées à [Localité 2] et à [Localité 1], qu'elle a été dissoute par une décision de l'assemblée générale extraordinaire des associés du 4 février 2012, puis mise en sommeil à la date du 31 décembre 2012.
Ses fonds de commerce ont été vendus à la société Actual Toulon 83 avec effet au 31 décembre 2012, par acte du 4 février 2013.
A cette date, les archives comptables ont été transférées au siège de la société Objectif Intérim TP, situé à [Adresse 5].
Un incendie a détruit le bâtiment le 19 février 2013 (pièce 6).
Par sa lettre d'observation du 9 juillet 2013, l'Urssaf qui avait procédé à un contrôle de la société courant juillet 2013, a notifié plusieurs chefs de redressement concernant le personnel permanent et le personnel intérimaire.
Le liquidateur amiable, M.[V], a accepté le rappel de cotisations concernant le personnel permanent des établissements de [Localité 2] et de [Localité 1], (1613 et 1935 euros) mais a contesté les rappels de cotisations concernant le personnel intérimaire de ces deux établissements (3016102 et 970556 euros).
Le 26 février 2014, la commission de recours amiable a confirmé le redressement pour les montants figurant dans les deux mises en demeure adressées par l'Urssaf pour les deux établissements.
La société Objectif Intérim Var, en la personne de son liquidateur, a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Toulon de deux requêtes pour contester les deux décisions de cette commission.
Ce rappel chronologique conduit la Cour à considérer que la société Objectif Intérim Var a eu une activité effective par l'emploi de personnel intérimaire du 9 juillet 2011 au 31 décembre 2012.
L'absence de comptabilité causée par la destruction des pièces comptable a conduit l'Urssaf à procéder à une taxation forfaitaire en application de l'article R242-5 du code de la sécurité sociale.
Pour justifier de sa contestation, la société contrôlée a invoqué le caractère excessif du redressement.
Il convient de rappeler que, dans cette hypothèse, c'est à la société contrôlée d'en rapporter la preuve.
Concernant son activité de placement, un mail adressé par son expert comptable aux inspecteurs de l'Urssaf, le 13 juin 2013, celui-ci n'en conteste pas le principe mais se déclare dans l'impossibilité de retrouver les factures.
Par ce même document du 13 juin 2013, l'expert comptable qui avait à sa disposition les déclarations de TVA pour 2011 et pour 2012, a réussi à reconstituer les encaissements de 2011 et 2012, à les évaluer à 6 900 000 euros HT, en notant, pour 2011, beaucoup d'intérim et peu de placement, et en 2012, beaucoup de placement et peu d'intérim; et, pour les deux années, aucune preuve de paiement de frais directs.
La pièce 10 de l'appelante est un récapitulatif de la liste du personnel intérimaire des deux établissements pour la période (août 2011 à décembre 2012) qui mentionne les « réductions Fillon » appliquées mois par mois.
L'origine de ce document établi sur papier libre n'a pas été précisée.
La Cour doit considérer qu'il ne revêt aucun caractère officiel et qu'il n'a aucune valeur probante.
L'Urssaf, qui a été destinataire de ces pièces, a travaillé uniquement sur l'estimation de l'expert comptable en dégageant deux tableaux pour distinguer les établissements de [Localité 2] et de [Localité 1].
Toutefois, l'Urssaf a étendu son calcul sur les mois de janvier et de février 2013, sans raison puisque la société qui était en sommeil avait été vendue le 31 décembre 2012: la Cour ne tiendra pas compte des sommes réclamées au titre de 2013.
Le dossier révèle que la CARSAT n'a pas été destinataire des DADS 2011 et 2012.
Pour le surplus, la Cour constate que les contestations de la société Objectif Intérim ne portaient pas sur les modalités du calcul de l'Urssaf.
Sa contestation concernant l'activité de « placement », qu'elle évalue à 20%, ne repose sur aucune pièce probante.
Celle qui concerne les frais professionnels est infondée puisque les éléments dont disposait l'Urssaf ne permettaient pas de contrôler si ces éventuels frais auraient été justifiés au regard des contrats de mission et des lieux des chantiers des intérimaires.
Concernant enfin la question des « réductions Fillon », le même raisonnement doit être appliqué puisque ces réductions se calculent salarié par salarié en fonction de ses heures et de son salaire.
En conséquence, le redressement est validé, successivement pour 2011 et 2012:
1)- pour celui de [Localité 1], pour les sommes de 119429 + 691651 euros = 811080 euros;
2)- pour l'établissement de [Localité 2], pour les sommes de 34436 + 227598 = soit 262034 euros.
Le calcul des majorations de retard à appliquer à ces montants sera opéré par l'Urssaf.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant par arrêt contradictoire,
Constate que le tribunal a omis de statuer sur l'un des deux recours qui lui étaient soumis et qu'il convient de réparer cette omission,
Confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du Var du 18 novembre 2016 en ce qu'il a mis hors de cause M.[U], appelé en cause en sa qualité d'assureur au titre de la « garantie financière » souscrite auprès de la compagnie Assurances Courtage, a condamné l'Urssaf à payer à celui-ci la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné la Sarl Objectif Intérim Var à payer à l'Urssaf la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
L'infirme pour le surplus,
Et statuant à nouveau:
Condamne la Sarl Objectif Intérim Var à payer à l'Urssaf:
1)- au titre de la mise en demeure du 14 octobre 2013 (établissement de [Localité 1]), la somme de 811080 euros pour les années 2011 et 2012,
2)- au titre de la mise en demeure du 20 décembre 2013 (établissement de [Localité 2]), la somme de 262034 euros pour les années 2011 et 2012,
Dit que l'Urssaf procèdera au calcul des majorations de retard applicables à ces sommes et qu'elle en notifiera le montant à l'appelante,
Déboute l'appelante de ses demandes,
La dispense de payer le droit prévu par l'article R144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale,
Condamne la Sarl Objectif Intérim Var à payer à l'Urssaf la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT