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19/10/2017 | FRANCE | N°302

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0753, 19 octobre 2017, 302


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
3e Chambre B

ARRÊT AU FOND
DU 19 OCTOBRE 2017

No 2017/302

Rôle No 15/13960

SARL TOISON DOREE

C/

Antoine Z...
Renée X... épouse Y... Z...
Compagnie d'assurances GAN ASSURANCES
SAS [...]
SA AXA FRANCE IARD

Grosse délivrée
le :
à :
Me E. A...
Me W. B...
Me M. C...
Me P-Y D...

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 11 Juin 2015 enregistré au répertoire général sous le no 13/03959.

APPELANTE


SARL TOISON DOREE,
siège social [...]
représentée et plaidant par Me Emmanuelle A... de la SCP AZZE BOZZI etamp; ASSOCIES, avocate au barreau de MARSEILLE

INTIM...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
3e Chambre B

ARRÊT AU FOND
DU 19 OCTOBRE 2017

No 2017/302

Rôle No 15/13960

SARL TOISON DOREE

C/

Antoine Z...
Renée X... épouse Y... Z...
Compagnie d'assurances GAN ASSURANCES
SAS [...]
SA AXA FRANCE IARD

Grosse délivrée
le :
à :
Me E. A...
Me W. B...
Me M. C...
Me P-Y D...

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 11 Juin 2015 enregistré au répertoire général sous le no 13/03959.

APPELANTE

SARL TOISON DOREE,
siège social [...]
représentée et plaidant par Me Emmanuelle A... de la SCP AZZE BOZZI etamp; ASSOCIES, avocate au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur Antoine Z...
né le [...] à MARSEILLE (13000),
demeurant [...]
représenté et plaidant par Me Wilfrid B..., avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Marine FANDOS, avocate au barreau de MARSEILLE

Madame Renée X... épouse Y... Z...
née le [...] à marseille (13000),
demeurant [...]
représentée et plaidant par Me Wilfrid B..., avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Marine FANDOS, avocate au barreau de MARSEILLE

Compagnie d'assurances GAN ASSURANCES,
siège social [...]
représentée et plaidant par Me Marina C..., avocate au barreau de MARSEILLE, substituée par Me Nina E..., avocate au barreau de MARSEILLE

SAS [...]
prise en la personne de son représentant légal en exercice
siège social [...]
représentée par Me Pierre-F... D... de la SELARL BOULAN CHERFILS D..., avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me F... G..., avocat au barreau de MARSEILLE

SA AXA FRANCE IARD, en qualité d'assureur de la SAS [...]
prise en la personne de son représentant légal en exercice
siège social [...] - [...]
représentée par Me Pierre-F... D... de la SELARL BOULAN CHERFILS D..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me F... G..., avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Juillet 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Patricia H..., Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-François BANCAL, Président
Mame Patricia H..., Conseillère (rédactrice)
Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Octobre 2017.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Octobre 2017,

Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige :

Selon devis en date du 31 août 2007, Monsieur et Madame Z... ont confié à la société La Toison Dorée des travaux d'isolation dans leur habitation située [...] triolet 13008, au moyen d'un mélange de lin et de laine de mouton.
La société La Toison Dorée était assurée au titre de la responsabilité civile décennale auprès de la société AXA France jusqu'au 1er mars 2009 ;
elle a souscrit à compter du 28 février 2009 une police responsabilité civile décennale auprès de la société GAN Assurances.
Les travaux ont fait l'objet d'une réception sans réserve le 10 octobre 2007.

Monsieur et Madame Z... arguant de la présence de mites textiles, une mesure d'expertise a été ordonnée par le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille, par décision en date du 13 mai 2011 ;
l'expert, Monsieur H..., a clôturé son rapport le 6 novembre 2012.

Par actes d'huissier en date du 21 mars 2013, Monsieur et Madame Z... ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Marseille, la société La Toison Dorée, la société AXA France et la société GAN Assurances à l'effet d'obtenir réparation de leurs préjudices.

Par actes d'huissier en date des 17 juillet et 5 août 2013, la société GAN Assurances a appelé en cause la société [...] recherchée en tant que fournisseur du produit défectueux, ainsi que la société AXA France iard en tant qu'assureur de celle-ci.

Ces procédures ont été jointes par le juge de la mise en état.

Par décision en date du 11 juin 2015, le tribunal de grande instance de Marseille a :
- condamné in solidum la société La Toison Dorée et la société AXA France iard à payer à Monsieur et Madame Z... la somme de 13 100 € HT, au titre des travaux de reprise, majorée de la TVA applicable au jour du paiement, avec actualisation selon l'indice BT01 de la construction, avec pour indices de référence celui en vigueur le 6 novembre 2012 et celui en vigueur à la date du jugement,
- condamné la société La Toison Dorée à payer à Monsieur et Madame Z... :
la somme de 918,37 € au titre des dépenses effectuées en pure perte,
la somme de 12 000 € au titre du préjudice de jouissance,
- débouté Monsieur et Madame Z... de leurs demandes à l'encontre de la société [...] et de son assureur, ainsi qu'à l'encontre de la société GAN Assurances,
- débouté la société GAN Assurances de son appel en garantie à l'encontre de la société [...] et de son assureur,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné in solidum la société La Toison Dorée et la société AXA France iard à payer à Monsieur et Madame Z... la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens incluant les frais d'expertise judiciaire,
- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties,
- autorisé les avocats en ayant fait la demande à faire application de l'article 699 du code de procédure civile.

La société La Toison Dorée a interjeté appel à l'encontre de cette décision par déclaration reçue au greffe le 29 juillet 2015.

Par décision en date du 9 février 2016, le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité partielle de la déclaration d'appel à l'égard de la société AXA France, assureur de la société La Toison Dorée.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 16 juin 2017, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, la société La Toison Dorée demande à la cour au visa des articles 1134, 1147, 1792 et suivants du code civil :
- de dire que la concluante n'a pas mis en oeuvre les panneaux rigides qui sont à l'origine de l'infestation des mites,
- de dire que sa responsabilité ne peut en conséquence être engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- de dire qu'en fournissant à titre gratuit les panneaux litigieux, la responsabilité de la concluante ne peut être recherchée sur le fondement des vices cachés ou encore au titre d'un manquement à ses obligations contractuelles, en l'absence de toute faute démontrée à son encontre,
- de dire en conséquence que la responsabilité de la concluante n'est pas engagée et de réformer la décision déférée en toutes ses dispositions,
- dans l'hypothèse où la cour considérerait que la responsabilité de la concluante est engagée, de dire que la garantie de la société GAN Assurances lui est due au titre des dommages immatériels et de réformer la décision déférée sur ce point,
- en toute hypothèse, de réduire les indemnités sollicitées au titre du préjudice de jouissance par Monsieur et Madame Z... et de réformer le jugement en ce qu'il a condamné la concluante à leur payer la somme de 12 000 € de ce chef,
- de condamner toute partie succombante aux dépens, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement, ainsi qu'à payer à la concluante la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières écritures notifiées le 19 juin 2017, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, la société GAN Assurances demande à la cour :
- à titre principal, de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné in solidum la société La Toison Dorée et la société AXA France au paiement de la somme de 13 100 € HT au titre des dommages matériels et en ce qu'elle a débouté Monsieur et Madame Z... de leurs demandes à l'encontre de la concluante,
les désordres présentant un caractère décennal au sens de l'article 1792 du code civil,
la société La Toison Dorée étant assurée auprès de la société AXA France à la date d'ouverture du chantier et cette dernière ayant reconnu que les désordres matériels évoqués relevaient de la garantie décennale,
les garanties souscrites auprès de la concluante n'étant mobilisables que si le fait générateur est survenu durant la période de validité du contrat,
le chantier ayant été ouvert en septembre 2007 et les travaux ayant été achevés en octobre 2007, alors que le contrat souscrit auprès de la concluante n'a pris effet que le 28 février 2009,
subsidiairement, les époux Y... Z... subissant une infestation par mites textiles depuis le mois de janvier 2008 et leur première réclamation étant antérieure au 28 février 2009,
l'assuré ayant connaissance du fait dommageable à la date de souscription de la garantie,
en tout état de cause, les garanties souscrites auprès de la concluante ne couvrant que les dommages immatériels se rapportant aux dommages matériels garantis,
les dommages matériels affectant les travaux de l'assuré étant exclus de la garantie responsabilité civile souscrite,
la garantie de la concluante ne pouvant être mobilisée au titre des dommages matériels et immatériels,
seuls les dommages immatériels créant une perte financière étant garantis et tel n'étant pas le cas pour l'indemnisation du trouble de jouissance,
- à titre subsidiaire, si la cour retenait la garantie de la concluante,
de condamner in solidum la société Arnaud et son assureur à indemniser directement les époux Y... Z... à hauteur de 25% du préjudice subi ou à tout le moins, à relever et garantir la concluante à hauteur de 25% de toutes condamnations pouvant éventuellement être prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires,
de ramener le montant des indemnités sollicitées à de plus justes proportions et d'appliquer la franchise contractuelle de 10% prévue aux dispositions particulières du contrat,
- de condamner tout succombant ou celui contre qui l'action compètera le mieux à payer à la concluante la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement.

Par leurs dernières conclusions notifiées le 1er février 2016, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, la société [...] et la société AXA France iard en tant qu'assureur de celle-ci, demandent à la cour :
- de dire les appels incidents, l'appel en garantie visant à la condamnation des concluantes, infondés, "vu l'absence rapportée de fourniture du produit défectueux par la SAS [...]" et "vu l'absence rapportée de défectuosité du produit éventuellement fourni à la société Europe Laine et posé chez les époux Y... Z...",
- en conséquence, de les rejeter,
- de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions,
- de débouter la société La Toison Dorée de toutes ses demandes à l'encontre des concluantes comme injustifiées et infondées,
- de la condamner au paiement de la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement.

Au terme de leurs dernières écritures notifiées le 5 décembre 2015, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, Monsieur et Madame Z... ont formé appel incident et demandent à la cour au visa des articles 1134 et 1147 et suivants, 1792 et suivants, et "enfin suivant le cas" 1382, 1383 et 1384 du code civil :
- de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a reconnu la responsabilité de la société La Toison Dorée,
- en tant que de besoin, de dire que la société La Toison Dorée a engagé sa responsabilité contractuelle dans le cadre des travaux effectués au domicile des concluants,
- de faire droit à la demande d'ampliation et de réévaluation des préjudices subis par les concluants,
- de condamner solidairement la société La Toison Dorée et ses deux assureurs à payer aux concluants :
la somme de 13 100 € HT, soit 14 441 € TTC (TVA à 10%), au titre des divers travaux,
la somme de 15 000 € au titre des frais de déménagement pendant la période des travaux,
la somme de 918,37 € au titre des dépenses effectuées en pure perte,
la somme de 2000 € au titre de la destruction de divers vêtements,
la somme de 96 000 € au titre du trouble de jouissance subi depuis le début de l'année 2009 pour comptes arrêtés au mois de janvier 2016,
la somme de 1000 € mensuelle au titre du trouble de jouissance subi depuis le début de l'année 2016 jusqu'au prononcé du "jugement" à intervenir,
- de dire que le coût des travaux sera indexé en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction entre le mois de novembre 2012 et le jour du prononcé de la décision à intervenir,
- de condamner en tant que de besoin la société [...] et son assureur la société AXA France iard à payer aux concluants les mêmes sommes en qualité de fournisseur de la laine défectueuse,
- de condamner tous succombants au paiement de la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
La clôture de la procédure est en date du 20 juin 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En l'état du prononcé de la caducité partielle de la déclaration d'appel à l'égard de la société AXA France iard, assureur de la société La Toison Dorée, la cour n'est pas saisie des dispositions du jugement relatives à cet assureur.
Les demandes de Monsieur et Madame Z... à l'encontre de celui-ci sont en conséquences irrecevables.

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire et des pièces produites, les éléments suivants:
- Monsieur et Madame Z... ont confié à la société La Toison Dorée l'isolation des plafonds de leur maison par projection de laine de mouton et de lin (74 m²), ainsi que la fourniture et la pose de deux panneaux semi-rigides composés de lin, pour améliorer l'acoustique et l'isolation dans la cuisine et le salon ;
la société La Toison Dorée ne peut utilement soutenir à cet égard qu'elle n'aurait pas mis en oeuvre les panneaux semi-rigides, alors que les dits panneaux sont mentionnés sur le devis, la mention "gratuit" n'impliquant pas l'absence de pose, qu'elle n'a pas contesté cette pose mentionnée par Monsieur et Madame Z... dans un courrier de réclamation lui ayant été adressé le 31 août 2009 et ne l'a pas davantage contestée au cours de l'expertise, faisant au contraire état d'autres chantiers similaires conduits à la même période qui incluaient la pose de panneaux ;
au mois de juillet 2009, Monsieur et Madame Z... ont avisé la société La Toison Dorée de la présence de mites textiles partout dans la maison ;
cette société est intervenue pour déposer l'isolant laine et lin des combles et le remplacer par de la fibre de coton ; pour faire ces deux opérations, elle a indiqué à l'expert avoir utilisé le même ventilateur ;
elle n'a pas enlevé les panneaux placés en doublage sur les cloisons, Monsieur et Madame Z... indiquant dans le courrier susvisé daté du 31 août 2009, avoir traité eux-mêmes la cloison du salon, d'où sortaient des mites, avec un produit contre les mites fourni par celle-ci ;
- à la même époque que le chantier Y... Z..., la société La Toison Dorée a indiqué à l'expert avoir mené trois autres chantiers de maisons individuelles où elle a utilisé le même matériau et selon les mêmes modalités (vrac et panneaux semi-rigides), qui ont présenté le même phénomène d'infestation par des mites,
avoir enrayé ce phénomène dans deux des maisons, en enlevant le mélange laine-lin projeté dans les combles sans utiliser le même ventilateur et en enlevant également les panneaux semi-rigides placés en doublage ;
- l'expert a constaté que toutes les pièces de la maison sont concernées : il retient que ce sont les volumes fermés incontrôlables qui ont laissé se développer le parasite à partir du comble et des panneaux en doublage dans la cuisine et le salon ; que de là, la circulation est totale dans les volumes habités mais également dans les vides techniques en faux plafond, gaines, doublages et même interrupteurs et autres boîtiers ;
il estime que l'habilitabilité de la maison est très perturbée : un entretien quotidien est nécessaire, avec mise en place de pièges, de plaques anti-mites en faisant des fentes dans les doublages pour les insérer ;
- la laine de base est vendue avec la mention qu'elle a été lavée et a fait l'objet d'un traitement anti-mites, la fiche technique du produit utilisé pour ce traitement indiquant qu'à partir d'une température de sèche de 140o à 150o, il y a tendance à la sublimation du produit ;
lors de la fabrication des panneaux, le passage au four des plaques nécessite une température élevée qui est susceptible de neutraliser le produit insecticide ;
- la société Arnaud regroupe la laine provenant de différents éleveurs, la conditionne et la vend à des industriels dont la société Europe Laine ;
celle-ci a produit une facture en date du 13 septembre 2006 (no4508) établie à son adresse par la société Arnaud pour 10 balles 43 à 52 avec la référence HA18 ;
selon une facture datée du 15 septembre 2006, établie par la société Lainière du Bascaud à l'adresse de la société Arnaud, le lot 2786 F HA18 a fait l'objet d'un lavage, d'un traitement et d'une pulvérisation avec le produit KONSERVAN, avant d'être emballé en 59 balles ;
selon un rapport daté du 17 octobre 2006 établi par la société THOR, laboratoire textile, à l'adresse de la société Lainière du Bascaud, le lot susvisé a été contrôlé quant au dosage permethrine (composant du KONSERVAN) et le contrôle était conforme ;
le mélange laine-lin en vrac a été produit par la société Europe-Laine et vendu à la société La Toison Dorée, les panneaux ont été fabriqués par la société Naptural et vendus à cette dernière ;
dans le cadre de l'expertise, le représentant de la société La Toison Dorée qui est également celui de la société Europe Laine a indiqué à l'expert que pour les quatre maisons ayant présenté une infestation de mites, la laine provenait du même lot et avait été acquise auprès de la société Arnaud ;
- pour remédier aux désordres, l'expert a estimé qu'il est nécessaire de déposer les panneaux restés en place et les cloisons, de déposer l'isolant dans les combles, d'effectuer un traitement de désinsectisation, de remettre en oeuvre un isolant thermique, de reposer des doublages et cloisons plaques de plâtre, de faire des travaux de peinture ;
l'expert a également relevé que depuis la survenance de l'infestation, Monsieur et Madame Z... ont acheté des produits chimiques et des pièges.

La société La Toison Dorée ayant mis en oeuvre tant l'isolation des combles que les panneaux semi-rigides, l'infestation par les mites ayant affecté les combles et les panneaux, sans que l'expertise en ait établi le point de départ (combles ou panneaux) et l'importance du phénomène, apparu après réception des travaux, rendant la maison dans son ensemble impropre à sa destination, au sens de l'article 1792 du code civil, le tribunal a exactement retenu que les désordres engagent la responsabilité décennale de la société La Toison Dorée.
Elle est à ce titre, tenue de plein droit à réparation pour le tout.
La décision déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a retenu la responsabilité de la société La Toison Dorée.

L'évaluation du coût des travaux de reprise par le tribunal à la somme de 13 000 € HT, ainsi que la prise en compte des frais exposés en pure perte pour lutter contre les mites à hauteur de 918,37 €, ne font pas l'objet de contestation ;
la décision déférée sera en conséquence confirmée sur ce point, ainsi qu'en ce qui concerne la TVA applicable au travaux et les modalités de l'indexation.

Le tribunal a exactement écarté les demandes de Monsieur et Madame Z... au titre des frais induits par un déménagement pendant les travaux, l'expert judiciaire ne le prévoyant pas et aucune des pièces produites ne justifiant de la nécessité de quitter les lieux, qui ne se déduit pas de la nature des travaux, ni du fait qu'ils avaient déménagé lors de l'intervention de la société La Toison Dorée, dès lors qu'ils avaient alors fait procéder également à la réfection de leur cuisine et à l'aménagement du salon.
Il a également rejeté à juste titre leur demande au titre des vêtements qui auraient été détruits, aucun élément n'étant produit pour justifier de la réalité de cette destruction, que l'expert a certes retenue, mais sans indiquer sur la base de quels éléments.

En revanche, eu égard à l'importance de l'infestation, à sa durée au regard de la date de la première réclamation et de l'exécution provisoire attachée à la décision déférée, à la valeur locative de l'habitation de 1500 € par mois, il convient de fixer à la somme de 30 000 €, l'indemnisation du préjudice de jouissance de Monsieur et Madame Z... .
La décision déférée sera en conséquence infirmée de ce chef.

La société La Toison Dorée est mal fondée à soutenir que la société GAN Assurances doit la garantir de l'ensemble des préjudices immatériels subis par Monsieur et Madame Z... , étant relevé qu'elle ne recherche pas la société GAN Assurances au titre des dommages matériels.
En effet, les conditions générales du contrat souscrit par la société La Toison Dorée auprès de la société GAN Assurances, à effet du 28 février 2009, prévoient expressément au titre III article 6 §2 que la garantie des dommages immatériels s'applique aux dommages survenus pendant la période comprise entre la date d'effet du contrat et la date de résiliation du contrat, qui trouvent leur origine dans des travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la même période ;
le contrat n'est donc pas en base "réclamation" et ne peut s'appliquer en l'espèce, dès lors que les dommages trouvent leur origine dans des travaux réalisés en 2007, antérieurement à sa date de prise d'effet.

La décision déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a écarté la garantie de la société GAN Assurances qui était recherchée en première instance par Monsieur et Madame Z... uniquement ;
il y sera ajouté concernant la demande de la société La Toison Dorée formée dans le cadre de l'instance d'appel.

Le tribunal a enfin exactement rejeté les demandes formées à l'encontre de la société [...] et de son assureur.
En effet, s'il est établi que la société [...] fournit de la laine de mouton à la société Europe Laine, elle n'a aucunement reconnu avoir fourni la laine utilisée par la société La Toison Dorée dans l'habitation de Monsieur et Madame Z... et cette preuve ne peut résulter de la seule affirmation du dirigeant commun de la société Europe Laine et de la société La Toison Dorée ;
en outre, la société [...] justifie faire traiter la laine avec un produit anti-mites avant sa vente et l'expertise a mis en évidence que dans le cadre de la fabrication des panneaux semi-rigides, ce traitement était susceptible d'avoir vu ses effets neutralisés ;
il s'ensuit que la preuve d'une imputabilité des désordres à la laine fournie par la société [...] n'est pas rapportée.

La société La Toison Dorée succombant en ses prétentions, supportera les dépens de la présente instance et sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
il n'est pas inéquitable de la condamner sur ce fondement au paiement de la somme de 2000 € à Monsieur Antoine Z... et de Madame Renée X... épouse Z... .
L'équité ne justifie pas l'application de ce texte au profit des autres parties.

PAR CES MOTIFS :

La cour d'appel, statuant publiquement, contradictoirement, dans les limites de l'appel après caducité partielle à l'égard de la société AXA France iard, assureur de la société La Toison Dorée,

Déclare irrecevables les demandes de Monsieur Antoine Z... et Madame Renée X... épouse Z... à l'encontre de la société AXA France iard, assureur de la société La Toison Dorée.

Confirme la décision du tribunal de grande instance de Marseille en date du 11 juin 2015,
excepté en ce qui concerne l'évaluation du préjudice de jouissance.

Statuant à nouveau du chef infirmé et ajoutant à la décision,

Condamne la SARL La Toison Dorée à payer à Monsieur Antoine Z... et Madame Renée X... épouse Z... la somme de 30 000 € en réparation de leur préjudice de jouissance.

Déboute Monsieur Antoine Z... et Madame Renée X... épouse Z... du surplus de leurs demandes au titre du préjudice de jouissance.

Déboute la SARL La Toison Dorée de ses demandes à l'encontre de la SA GAN Assurances.

Condamne la SARL La Toison Dorée aux dépens de la présente instance, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement au profit des avocats en ayant fait la demande.

Condamne la SARL La Toison Dorée à payer à Monsieur Antoine Z... et Madame Renée X... épouse Z... la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit des autres parties.

Dit que le greffe adressera une copie du présent arrêt à l'expert, Monsieur Gilles H....

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0753
Numéro d'arrêt : 302
Date de la décision : 19/10/2017

Analyses

Engage sa responsabilité décennale la société qui a mis en oeuvre l'isolation des combles et posé des panneaux semi-rigides, tous deux infestés par les mites, l'infestation étant apparue après réception des travaux et rendant la maison dans son ensemble impropre à sa destination, au sens de l'article 1792 du code civil. Eu égard à l'importance de l'infestation, à sa durée au regard de la date de la première réclamation et à la valeur locative de l'habitation, les propriétaires des lieux infestés sont fondés à solliciter l'indemnisation d'un préjudice de jouissance. N'est pas fondée la demande de la société déclarée responsable de l'infestation visant à obtenir de son assureur la garantie des préjudices immatériels subis par les propriétaires, les dommages trouvant leur origine dans des travaux réalisés antérieurement à la date de prise d'effet du contrat d'assurance, qui n'est pas en base «réclamation».


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Marseille, 11 juin 2015


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2017-10-19;302 ?
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