COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 08 SEPTEMBRE 2017
N° 2017/405
Rôle N° 15/01975
[U] [L]
C/
GENERALI FRANCE ASSURANCES
Grosse délivrée
le :
à :
Me Jean-louis BOISNEAULT, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Audrey BELMONT, avocat au barreau de PARIS
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section E - en date du 22 Janvier 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/2433.
APPELANT
Monsieur [U] [L], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Jean-louis BOISNEAULT, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
GENERALI FRANCE ASSURANCES, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Audrey BELMONT, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Antoine SAPPIN, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Juin 2017 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président
Mme Nathalie FRENOY, Conseiller
Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2017.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2017.
Signé par Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président et Mme Pascale ROCK, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*-*-*-*-*
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 22 décembre 2015 qui:
- dit que le licenciement de Monsieur [L] repose bien sur une faute grave,
- déboute Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes,
- déboute la société GENERALI de sa demande reconventionnelle sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne Monsieur [L] aux dépens.
Vu l'appel régulièrement interjeté contre ce jugement par Monsieur [L] suivant lettre recommandée expédiée le 3 février 2015.
Vu ses dernières conclusions déposées et soutenues à l'audience, demandant à la cour:
- d'infirmer le jugement entrepris,
- de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
- de condamner la société GENERALI à lui payer les sommes suivantes:
* 90 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 21 250 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
* 2 129,50 euros au titre des congés payés afférents,
* 47 812 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
* 4 000 euros à titre de solde de commission sur portefeuille,
* 400 euros au titre des congés payés afférents,
* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,
* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,
* 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner la société GENERALI aux dépens.
Vu les dernières écritures de la SA GENERALI VIEdéposées et soutenues à l'audience, tendant à ce que la cour:
- confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- à titre subsidiaire, apprécie le préjudice allégué dans de plus justes proportions,
- en tout état de cause déboute Monsieur [L] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et au titre du préjudice moral,
- condamne Monsieur [L] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
MOTIFS
Attendu que Monsieur [L], après avoir commencé à travailler avec la société GENERALI en tant qu'agent indépendant à compter du 1er août 2000, a été embauché par cette dernière en tant que stagiaire du réseau commercial le 1er octobre 2000;
Que dans le dernier état de la relation contractuelle et depuis le 1er décembre 2007, Monsieur [L] occupait les fonctions d'inspecteur principal moyennant une rémunération mensuelle moyenne brute de 8 368,78 euros; que pour l'exercice de ces fonctions qui consistaient à former et à accompagner sur le terrain une équipe de commerciaux, il bénéficiait d'un véhicule de fonction et d'une carte de carburant;
Que par courrier du 24 avril 2013, l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave pour avoir utilisé de manière abusive, tout au long de l'exercice 2012, sa carte de carburant en alimentant un autre véhicule que son véhicule de fonction et effectué de fausses déclarations du nombre de kilomètres réalisé à chaque approvisionnement en carburant sur l'année 2012;
Que c'est dans ces conditions que Monsieur [L] a saisi, par requête reçue au greffe le 6 juin 2013, le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de contestation du bien-fondé du licenciement, d'indemnisation subséquente et de rappel de commissions;
Qu'il fait grief à cette juridiction de l'avoir débouté de l'ensemble de ses demandes;
Attendu qu'à l'appui de son appel, il fait valoir en premier lieu que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse faute pour l'employeur d'avoir respecté les dispositions relatives à la procédure conventionnelle de licenciement telles que prévues par l'article 66 de la convention collective nationale de l'assurance;
Qu'il prétend ainsi ne pas avoir été informé dans la lettre de convocation à la séance du conseil de discipline que le dossier complet de l'affaire devait être tenu à sa disposition au moins 48 heures avant la réunion du conseil et indique par ailleurs ne pas avoir reçu un exemplaire du procès-verbal établi par le conseil de discipline;
Que sur ce dernier point, il résulte de l'article 66 de la convention collective nationale de l'inspection d'assurances qu'en cas de licenciement pour faute ou insuffisance professionnelle d'un inspecteur confirmé dans ses fonctions qui a demandé la réunion du conseil mentionné dans cette disposition, le procès-verbal établi à l'issue de la réunion qui relate notamment les faits reprochés à l'inspecteur et consigne l'avis de chacun des membres ayant participé à la réunion du conseil, doit être transmis au salarié, émargé par les membres du conseil; que l'employeur ne prend sa décision qu'après avoir pris connaissance des avis exprimés au conseil et communique celle-ci à ses membres en même temps qu'à l'intéressé; que cette exigence constitue une garantie de fond dont la violation prive le licenciement de cause réelle et sérieuse;
Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que le procès-verbal établi à la suite de la réunion du conseil de discipline du 17 avril 2013 n'a pas été adressé à Monsieur [L] qui n'en a eu connaissance que devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes;
Que pour se défendre, l'employeur fait remarquer qu'il a reproduit dans la lettre de licenciement qui est postérieure de 7 jours à la réunion du conseil de discipline, les avis de ses membres et a indiqué qu'il avait pris sa décision en prenant en compte ces avis et estime donc avoir parfaitement respecté la procédure conventionnelle;
Que toutefois, la simple mention suivante contenue dans la lettre de licenciement; ' A l'issue du conseil, trois de ses membres se sont prononcés pour une mise à pied et trois autres pour un licenciement pour faute. Après réflexion, pris en compte les différents avis exprimés au cours du conseil et compte tenu de l'ensemble des éléments rappelés ci-dessus, j'ai décidé de vous licencier considérant que les faits reprochés sont constitutifs d'une faute grave.', ne saurait se substituer à la communication de l'intégralité du procès-verbal établi à l'issue de la réunion du comité de discipline dans le corps duquel figure non seulement la teneur de chacun des avis exprimés mais également les noms de leurs auteurs et une motivation succinct préalable à leurs avis après un compte rendu détaillé des échanges intervenus, points qui devaient être portés également à la connaissance de Monsieur [L];
Que sur la base de ce seul moyen, il y a lieu de constater que le licenciement entrepris est dépourvu de cause réelle et sérieuse;
Que le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef;
Attendu que par application de l'article L 1235-3 du code du travail, au regard de son âge, de sa qualification, de sa rémunération, de son ancienneté, des circonstances de la rupture ainsi que de tous autres éléments de préjudice soumis à appréciation tels que sa situation de chômage ou d'emploi postérieurement à la rupture, ici non précisée, il convient d'allouer à Monsieur [L] la somme de 51 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
Attendu que Monsieur [L] a également droit à une indemnité compensatrice de préavis et à une indemnité conventionnelle dont les chiffrages sont discutés en leur principe mais nullement en leurs montants par l'employeur et qui correspondent par ailleurs à ses droits;
Que l'employeur sera donc condamné à lui payer les sommes de 21 250 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 2 129,50 euros au titre des congés payés afférents et de 48 812 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement;
Qu'il sera en revanche débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et en réparation du préjudice moral qui ne sont nullement explicitées et justifiées;
Qu'il sera également débouté de sa demande présentée au titre du solde de commission sur portefeuille qui n'est pas non plus explicitée;
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Attendu que les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront infirmées;
Attendu qu'il est équitable de condamner l'employeur à payer à Monsieur [L] la somme de 2 000 euros au titre des frais qu'il a exposés que ce soit au titre de la première instance que de l'appel non compris dans les dépens;
Attendu que les dépens de première instance et d'appel seront à la charge de la SA GENERALI VIE, partie succombante par application de l'article 696 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Infirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions qui déboutent Monsieur [L] de ses demandes au titre du solde de portefeuille, des dommage et intérêts pour licenciement vexatoire et en réparation du préjudice moral,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant:
Dit que le licenciement de Monsieur [L] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne la SA GENERALI VIE à payer à Monsieur [L] les sommes suivantes:
* 51 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 21 250 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
* 2 129,50 euros au titre des congés payés afférents,
* 47 812 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
* 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile que ce soit au titre de la première instance que de l'appel,
Condamne la SA GENERALI VIE aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT