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07/09/2017 | FRANCE | N°16/06626

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 07 septembre 2017, 16/06626


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 07 SEPTEMBRE 2017



N° 2017/ 322













Rôle N° 16/06626







[R] [E] [T]

SA LA MEDICALE





C/



[V] [C]

SA [Établissement 1]

CPAM DES [Localité 1]





















Grosse délivrée

le :

à :

SCP F. ROSENFELD



Me Gilles ALLIGIER



SELARL ABEIL

LE















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 25 Février 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/00015.





APPELANTS



Monsieur [R] [E] [T]

demeurant [Adresse 1]



SA LA MEDICALE,

dont le siège social est [Adresse 2]

représen...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 07 SEPTEMBRE 2017

N° 2017/ 322

Rôle N° 16/06626

[R] [E] [T]

SA LA MEDICALE

C/

[V] [C]

SA [Établissement 1]

CPAM DES [Localité 1]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP F. ROSENFELD

Me Gilles ALLIGIER

SELARL ABEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 25 Février 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/00015.

APPELANTS

Monsieur [R] [E] [T]

demeurant [Adresse 1]

SA LA MEDICALE,

dont le siège social est [Adresse 2]

représentés par Me François ROSENFELD de la SCP F. ROSENFELD- G. ROSENFELD & V. ROSENFELD, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Caroline BORRIONE avocat au barreau de MARSEILLE.

INTIMEES

Madame [V] [C]

née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Gaétan BALLESTRA avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Stéphanie ESQUER avocat au barreau de MARSEILLE, Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SA [Établissement 1],

dont le siège social est : [Adresse 4]

représentée par Me Bruno ZANDOTTI de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Aziza ABOU EL HAJA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

CPAM DES [Localité 1]

dont le siège social est : [Adresse 5]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mai 2017 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Olivier GOURSAUD, Président, et Madame Anne VELLA, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Anne VELLA, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier GOURSAUD, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Sylvaine MENGUY.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Septembre 2017.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Septembre 2017.

Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé des faits et procédure

Le 2 octobre 2009, Mme [V] [C] a été hospitalisée à la clinique [Établissement 1] en vue d'une intervention chirurgicale sous anesthésie générale pour l'extraction d'une dent de sagesse inférieure droite, réalisée par le docteur [R] [T], stomatologue.

Se plaignant, notamment, de la persistance après l'opération d'une paralysie de l'hémilangue droite, malgré la prescription d'un traitement médicamenteux, et après consultation d'un chirurgien-dentiste en janvier 2010 et d'un neurologue, Mme [C] a saisi le juge des référés, qui par ordonnance du 11 juin 2012 a désigné le docteur [K] en qualité d'expert. Il a déposé son rapport le 10 mai 2013.

Par actes des 4 et 5 décembre 2013, Mme [C] a fait assigner le docteur [T], son assureur, la société la Médicale de France assurances et la clinique [Établissement 1] devant le tribunal de grande instance de Marseille et ce, en présence de la Cpam des [Localité 1], pour voir statuer sur la responsabilité du docteur [T] au titre de manquements à ses obligations d'information préalable et post opératoire et responsabilité du praticien, engagée pour faute technique, outre à l'égard de la clinique à un manquement à l'obligation de conservation des données médicales mais aussi pour violation du secret médical.

Selon jugement rendu le 25 février 2016, le tribunal a :

- condamné in solidum le docteur [T] et La Médicale à verser à Mme [C] la somme de 1000€ en réparation de son préjudice moral consécutif au manquement du médecin à son devoir d'information préalable ;

- condamné la clinique [Établissement 1] à les relever et garantir de cette condamnation à hauteur de 50 % ;

- débouté Mme [C] de sa demande de condamnation au titre du manquement à l'obligation d'information post opératoire ;

- debouté Mme [C] de ses demandes dirigées à l'encontre de la clinique [Établissement 1] ;

- condamné in solidum le docteur [T] et La Médicale à verser à Mme [C] la somme de 14'385€ en réparation de son préjudice corporel ;

- débouté Mme [C] de ses demandes d'indemnisation au titre des préjudices d'agrément et sexuel ;

- condamné in solidum le docteur [T] et La Médicale à payer à la Cpam des [Localité 1] la somme de 493,87€ au titre des débours exposés, avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;

- dit n'y avoir lieu de réserver les droits de la Cpam des [Localité 1] ;

- condamné in solidum le docteur [T] et La Médicale à verser à Mme [C] la somme de 2.500€ au titre des frais irrépétibles exposés ;

- débouté la clinique [Établissement 1] de sa demande sur le même fondement ;

- condamné in solidum le docteur [T] et La Médicale à verser à la Cpam des [Localité 1] la somme de 164,62€ au titre de l'indemnité forfaitaire due en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

- condamné in solidum le docteur [T] et La Médicale aux entiers dépens avec distraction,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Il s'avère que le dossier médical de la patiente a été égaré. Le tribunal a considéré que le docteur [T] n'était pas en mesure de produire le document écrit attestant de la parfaite information de sa patiente préalable à l'opération, et ce d'autant que Mme [C] conteste avoir signé un tel document, et il a retenu un manquement imputable au praticien en précisant qu'il n'était pas nécessaire de caractériser la perte de chance subie par la patiente et que ce manquement justifiait l'allocation d'une somme de 1.000€.

Il a estimé que les éléments du dossier ne permettaient pas de retenir un défaut d'information post opératoire, de telle sorte que Mme [C] a été déboutée de ce chef de demande.

Sur la responsabilité du docteur [T] à raison des soins prodigués, après avoir rappelé que le dommage dont Mme [C] souffre, est lié à une lésion du nerf lingual localisé à proximité de l'os mandibulaire, le tribunal a relevé que l'expert a indiqué que les soins ont été consciencieux attentifs et conformes aux données acquises de la science, mais qu'elle soutient à juste titre que lorsque la réalisation de l'extraction n'implique pas l'atteinte du nerf lingual et qu'il n'est pas établi que les trajets de ce nerf présentent une anomalie, la responsabilité du praticien est engagée.

Il a procédé à l'indemnisation du préjudice de la victime de la façon suivante :

- dépenses de santé actuelles : 156, 72€

- dépenses de santé futures : 337,15€

- dépenses de santé restées à la charge de Mme [C] : 300€

- déficit fonctionnel temporaire au taux de 25 % : 1755€

- souffrances endurées 2/7 : 4000€

- déficit fonctionnel permanent 7 % : 8050€

- préjudice d'agrément : rejet

- préjudice sexuel : rejet.

Il a relevé que la clinique [Établissement 1] reconnaît avoir égaré le dossier de Mme [C], mais que devant l'impossibilité de déterminer l'identité de la personne ayant détourné le dossier, la requérante devait être déboutée de sa demande formée à l'encontre de la clinique au titre de son obligation de conservation des données médicales et de la violation du secret médical.

Il a condamné la clinique [Établissement 1] à relever et garantir le docteur [T] et son assureur, de la condamnation prononcée à leur encontre pour non-respect de l'information préalable, à hauteur de 50 %, la perte du dossier médical, ayant mis le praticien dans l'impossibilité d'établir qu'il aurait fait signer à sa patiente un consentement éclairé.

Par déclaration d'appel du 11 avril 2700, dont la régularité et la recevabilité, ne sont pas contestées le docteur [T] et La Médicale ont relevé appel général de ce jugement.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon leurs conclusions du 18 octobre 2016, le docteur [T] et La Médicale demandent à la cour de:

' réformer le jugement qui a retenu une faute technique à l'encontre du docteur [T] lors de l'acte chirurgical du 2 octobre 2009 ;

' le réformer en ce qu'il a retenu que le docteur [T] n'avait pas souscrit à son obligation d'information préalable ;

' le confirmer en ce qu'il a jugé que le docteur [T] avait respecté son obligation d'information post opératoire ;

' l'infirmer en ce qu'il a condamné le docteur [T] et La Médicale à verser à Mme [C] une somme de 2500€ au titre des frais exposés ;

à titre principal :

' juger que le docteur [T] n'a pas commis de faute technique susceptible d'engager sa responsabilité contractuelle ;

' juger qu'il a souscrit à son obligation d'information préalable et post opératoire ;

' débouter Mme [C] de toutes ses revendications indemnitaires les visant ;

à titre subsidiaire si une faute technique devait être retenue :

' juger que seule la Cpam a droit au remboursement des dépenses de santé dont le montant s'élève à 493,87€ ;

' juger que le droit à indemnisation de Mme [C] peut être calculé de la façon suivante :

- déficit fonctionnel temporaire : 2035€

- souffrances endurées : 2500€

- déficit fonctionnel permanent : 7500€

- préjudice d'agrément : rejet

- préjudice sexuel : rejet

si un défaut d'information préalable devait être retenu :

' juger qu'il n'existait en l'espèce aucune alternative thérapeutique à l'extraction dentaire litigieuse ;

' juger en conséquence que Mme [C] ne pourrait se prévaloir d'aucune perte de chance de renoncer à l'intervention litigieuse ;

' juger que la réparation de ce préjudice doit être limitée à la réparation du préjudice moral autonome cantonnée à 1000€ ;

' condamner la clinique [Établissement 1] à les relever de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre au titre du défaut d'information à hauteur de 50 % ;

à titre très subsidiaire, s'il était retenu que le défaut d'information préalable procède d'une perte de chance de se soustraire à l'intervention litigieuse, de :

' juger que le taux de perte de chance ne saurait excéder 5 % ;

' appliquer ce taux de perte de chance aux postes de préjudice à l'exclusion des préjudices d'agrément et sexuel ;

' condamner la clinique [Établissement 1] à les relever et garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre au titre d'un défaut d'information à hauteur de 50%,

en tout état de cause

' condamner Mme [C] à leur verser la somme de 2500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, distraits au profit de leur conseil.

Ils soutiennent que la responsabilité du docteur [T] dans le geste chirurgical qu'il a accompli, n'est pas engagée puisque l'expert a conclu que les soins dispensés ont été consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science, et que la lésion d'un nerf lingual à la suite de l'extraction d'une dent de sagesse ne constitue pas en soi une maladresse. Le docteur [T] a assumé le suivi postopératoire jusqu'à ce que la patiente s'en remette à un autre praticien. Les préjudices subis par Mme [C] découlent indéniablement d'un accident médical non fautif. Cette responsabilité ne peut être retenue au motif d'une anomalie préexistante du nerf lingual. Ce n'est qu'à titre subsidiaire qu'ils présentent une offre d'indemnisation du dommage corporel.

Ils contestent tout manquement à l'obligation d'information préalable. Il existait bien une indication à extraire la dent dont il s'agit, si bien que le docteur [T] n'était pas tenu à une obligation d'information renforcée. Ils soutiennent que l'atteinte du nerf lingual chez une jeune patiente constitue un risque d'une immense faiblesse. Or les risques exceptionnels ne doivent faire l'objet d'une information que lorsqu'ils sont également graves. En l'espèce l'atteinte du nerf lingual ne constitue pas un risque grave.

En tout état de cause, si un tel manquement devait être retenu, il n'y a pas de préjudice en lien avec le prétendu défaut d'information, une perte de chance étant inexistante puisque Mme [C] n'était pas en position de refuser l'extraction dentaire qu'elle demandait elle-même. Elle n'était pas en mesure de renoncer à cette intervention. Si toutefois une perte de chance devait être retenue, elle ne pourrait excéder 5 %. Dans cette hypothèse, la clinique [Établissement 1] responsable de la perte du document écrit de consentement éclairé, devra les relever et les garantir à hauteur de 50 %.

Ils font valoir que le cumul de l'indemnisation d'un préjudice autonome et d'un préjudice né d'une perte de chance est impossible. Le contraire aboutirait à une double indemnisation. À titre subsidiaire, la clinique [Établissement 1] devra les relever et les garantir à hauteur de 50 % du montant du préjudice alloué, au titre de la perte du formulaire de consentement éclairé.

Il n'y a pas de manquement à l'obligation d'information post opératoire.

Par conclusions du 2 septembre 2016, Mme [C] demande à la cour :

à titre principal, de :

' confirmer le jugement qui a retenu que le docteur [T] avait manqué à son obligation d'information préalable ;

' le condamner in solidum avec son assureur à lui régler la somme de 5000€ au titre de son préjudice moral correspondant à l'état d'ignorance qui lui a été imposé ;

' réformer le jugement qui a rejeté le manquement à l'obligation d'information post-opératoire ;

' juger que le docteur [T] a manqué à son obligation d'information post-opératoire et en conséquence le condamner in solidum avec son assureur à lui payer la somme de 5000€ au titre de son préjudice moral correspondant à l'état d'ignorance qu'il lui a été imposé ;

' réformer le jugement qui a rejeté la violation du secret médical de la clinique [Établissement 1] ;

' juger qu'elle a manqué à son obligation de conservation des données médicales en communiquant l'original du dossier sans qu'il s'agisse de copies et la condamner en conséquence au paiement de la somme de 15'000€ pour avoir failli à son obligation de conservation des données médicales ;

' juger que la clinique [Établissement 1] a violé le secret médical dont Mme [C] bénéficie en permettant à un tiers de consulter le dossier médical, et la condamner en conséquence au paiement de la somme de 30'000€ pour violation du secret médical ;

' constater l'existence d'une relation certaine entre l'opération chirurgicale et la complication qu'elle a présentée ;

' constater que l'extraction de la dent de sagesse n'impliquait pas les dommages qu'elle a subis ;

' constater que le docteur [T] est défaillant dans la démonstration qui lui incombe de ce que le nerf lingual présentait une anomalie rendant son atteinte inévitable ;

' en conséquence confirmer le jugement sur ce point ;

' juger que la responsabilité du docteur [T] est engagée, la recevoir en ses demandes et procéder à la liquidation de son préjudice en lui allouant la somme de 30.810€ correspondant aux postes suivants :

- assistance à expertise : 300€

- déficit fonctionnel temporaire total et partiel : 7510€

- souffrances endurées : 4000€

- déficit fonctionnel permanent : 9000€

- préjudice sexuel : 10'000€.

à titre subsidiaire

' constater que le docteur [T] a manqué à son obligation d'information ce qui a entraîné pour elle une perte de chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé, et le condamner in solidum avec son assureur à la somme de 30.502€ correspondant à 90 % de son préjudice corporel ;

en tout état de cause,

' les condamner à lui verser la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'expertise et avec distraction.

Elle soutient qu'elle n'a jamais signé aucun document attestant que des informations sur les risques de l'intervention auraient été portées à sa connaissance. Elle n'a jamais été informée notamment du risque d'atteinte du nerf lingual. Le docteur [T] n'apporte pas la preuve qu'il l'aurait informée des risques et qu'elle les aurait acceptés. Elle fait valoir que l'extraction de la dent de sagesse n'était ni nécessaire ni indispensable. Cette dent ne lui occasionnait aucune douleur pathologique. Cette opération chirurgicale avait donc une visée préventive. Elle estime que son préjudice est évalué à la somme de 5000€.

Elle maintient que le docteur [T] a engagé sa responsabilité au titre d'une absence d'information post-opératoire puisqu'il ne l'a jamais informée de l'atteinte du nerf lingual ce qui a eu une incidence, puisque deux ans se sont écoulés avant qu'un diagnostic soit posé par d'autres praticiens.

Elle demande la condamnation de la clinique [Établissement 1] au paiement d'une somme de 30'000€ à titre de dommages-intérêts pour violation du secret médical, outre la somme de 15'000€ pour ne pas avoir respecté son obligation de conservation des données médicales, le dossier ayant été communiqué sans qu'il s'agisse de copies.

Elle soutient que la responsabilité du docteur [T] est engagée au titre d'une faute technique dans l'exécution de l'acte chirurgical, l'atteinte du nerf lingual ne pouvant constituer un accident médical non fautif.

Au titre de l'indemnisation des préjudices, elle maintient qu'elle a subi un préjudice sexuel dans le cadre de sa vie intime, puisqu'elle souffre d'une absence sensitivo sensorielle d'une partie de la bouche ayant une incidence sur le baiser.

À titre subsidiaire, si une perte de chance, devait être retenue par la cour, elle correspondrait à 90 % du montant de son préjudice corporel.

Dans ses conclusions du 13 juillet 2016, la clinique [Établissement 1] demande à la cour de :

' confirmer le jugement qui a débouté Mme [C] de toutes ses demandes formulées à son encontre ;

' juger que Mme [C] ne subit aucun préjudice en raison d'une éventuelle perte de son dossier médical ;

' juger qu'elle n'a pas violé son obligation de secret médical, le dossier médical ayant été mis à disposition de son médecin dans le cadre de l'intervention qu'il avait réalisée ;

' infirmer le jugement qui l'a condamné à relever le docteur [T] à hauteur de 50 % de sa condamnation au titre du défaut d'information ayant entraîné un préjudice moral pour la patiente ;

' débouter le docteur [T] de toutes ses demandes à l'encontre de la clinique [Établissement 1] de le relever garantir à hauteur de 50 % ;

à titre subsidiaire,

' juger qu'elle ne pourra relever et garantir le docteur [T] qu'à hauteur de 20 % de la somme à laquelle il pourrait être condamné au titre d'un défaut d'information, en raison du fait que seule une perte de chance d'avoir pu prouver cette information ne pourrait être mise à sa charge ;

' débouter Mme [C] et le docteur [T] de leurs demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et les condamner solidairement au paiement d'une somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de son conseil.

Elle fait valoir que si Mme [C] entend engager sa responsabilité en se fondant sur la violation du secret médical et sur un manquement à l'obligation de conservation des données médicales, elle devra prouver l'existence d'une faute imputable à la clinique, ainsi qu'un préjudice qu'elle aurait subi en lien de causalité direct et certain avec cette faute. Elle ajoute que si une faute devait être retenue à l'encontre du docteur [T] qui exerce à titre libéral dans la clinique, elle ne pourrait être tenue à indemniser les conséquences dommageables subies par la victime.

Sur la violation du secret médical, elle estime que Mme [C] ne rapporte pas la preuve que le dossier médical aurait été transmis par ses soins au médecin conseil du docteur [T] ou encore à un tiers. Le docteur [T] qui avait la charge de l'intervention ne peut être considéré comme un tiers et il a pu avoir accès au dossier médical sans que la responsabilité de l'établissement de soins puisse être engagée. Si ce dossier médical a été transmis à un tiers, ce ne peut être que par le docteur [T], seul à être mis en cause au stade de la procédure de référé. Or il est constant que le praticien a le droit de prendre connaissance de ce dossier médical pour se défendre dans le cas d'une procédure initiée à son encontre.

Sur le manquement à l'obligation de conservation des données médicales, elle soutient que Mme [C] ne rapporte nullement l'existence d'un préjudice lié à la perte de ce dossier puisque l'expert a pu retracer l'intégralité de la prise en charge.

Pour qu'elle puisse relever et garantir le docteur [T] d'un manquement à l'obligation d'information il faudra avant toute chose que ce patricien démontre que ce consentement éclairé était présent dans le dossier médical égaré et qu'il a donc perdu une chance de le communiquer. Il lui appartenait de conserver un exemplaire de ce consentement dans son propre dossier médical. Qui plus est le docteur [T] ne démontre pas que c'est la clinique qui a égaré ce dossier.

À titre subsidiaire et dans l'hypothèse ou elle serait condamnée à relever et garantir le docteur [T] au titre du défaut d'information dont il est débiteur, la garantie ne pourrait intervenir qu'en raison d'une hypothétique perte de chance d'avoir pu prouver l'effectivité de l'information fournie et dans une proportion qui ne pourrait être supérieure à 20 % de la somme à laquelle le docteur [T] pourrait être condamné au paiement.

La Cpam des [Localité 1] assigné par le docteur [T] et par La Médicale, par acte d'huissier du 5 mai 2017 délivré à personne habilitée, n'a pas constitué avocat.

Par courrier du 29 septembre 2016, elle a fait connaître ses débours pour un montant de 849,94€ correspondant à 591,22€ au titre des prestations en nature, et 258,72€ pour les indemnités journalières versées du 16 juin 2015 au 21 juin 2015 au titre d'un accident du 15 juin 2015.

L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la faute technique du docteur [T]

En vertu de l'article L 1142-1 I du code de la santé publique le professionnel de santé n'est responsable des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute de sa part. Deux types de fautes sont invoquées par Mme [C] : un manquement par le docteur [T] à son obligation de soins par maladresse du geste et par défaillance dans le suivi et un défaut d'information.

L'expert indique dans le corps de son rapport que 'l'intervention chirurgicale n'a pas posé de problème particulier' et que 'le compte rendu opératoire fait mention d'une protection sur la zone correspondant au nerf lingual inférieur'. A la question de savoir comment le nerf lingual a pu être lésé au cours de ce geste chirurgical, l'expert précise que 'le nerf lingual est une branche du nerf mandibulaire qui sort du crâne et descend en direction de la langue en passant sous le muscle stylo-glosse (un des muscles de la langue) puis en dehors du canal salivaire de la glande sous-maxillaire (canal de Warthon) puis rebique vers la pointe de la langue.' L'expert ajoute qu'il 'est donc vulnérable à proximité de l'os mandibulaire dans sa partie postérieure' et doit être 'normalement protégé lors d'une extraction dentaire dans cette zone par une spatule.'

Il explique que la lésion du nerf peut se produire de plusieurs façons :

- section du nerf par un objet tranchant avec effraction de la muqueuse en bouche et pénétration d'un élément tranchant en direction du nerf qui est sectionné. En l'absence de réparation immédiate, il y a dégénérescence complète du nerf.

- traumatisme violent sur le nerf, formation ou non d'un hématome compressif qui peut provoquer une dégénérescence de ce nerf,

- spasme d'un vaisseau qui nourrit le nerf

- compression du nerf par l'écarteur, avec un effet réversible

- l'aléa thérapeutique.

Le docteur [K] a conclu que le diagnostic et les soins prodigués par le docteur [T] ont été consciencieux, attentifs, conformes aux données acquises de la science d'après les déclarations et le compte rendu opératoire. Aucune imprudence ou inattention n'a été révélée dans le dossier qui m'a été présenté et sur interrogatoire du praticien et de la patiente. Le matériel utilisé ne me semble pas avoir été défectueux. La patiente a présenté une paralysie irréversible du nerf lingual droit qui s'est produit au décours de cette intervention. Il n'a pas été possible de retrouver une imprudence ou une erreur effectuée par le praticien en l'état actuel du dossier en ma possession.... il existe une relation certaine entre l'opération chirurgicale et la complication qu'a présenté la patiente.'

Toutefois, l'atteinte par un chirurgien à un organe ou une partie du corps du patient que son intervention n'impliquait pas, est fautive, en l'absence de preuve qui lui incombe, d'une anomalie rendant l'atteinte inévitable ou de la survenance d'un risque inhérent à cette intervention qui, ne pouvant être maîtrisé, relèverait de l'aléa thérapeutique.

En conséquence, le docteur [T] qui a commis une maladresse entraînant la lésion d'un organe voisin, en l'espèce, du nerf lingual est responsable sur le terrain de la faute sauf pour lui à prouver une cause d'exonération tenant au caractère inévitable de l'atteinte ou au fait que cette lésion était un risque inhérent à l'intervention, dont les conséquences pourront alors éventuellement être prises en charge au titre de la solidarité nationale. Mais, le docteur [T] qui se cantonne à demander à la cour de valider les conclusions du docteur [K], ne développe aucune des causes exonératoires précitées.

Sa responsabilité est donc engagée et il doit réparer l'intégralité des conséquences dommageables dont souffre Mme [C].

Sur le préjudice corporel

Le docteur [K] indique que Mme [C] présente une perte de sensibilité de l'hémi-langue droite et des troubles de la perception du goût des aliments.

Il conclut à :

- déficit fonctionnel temporaire total du 2 octobre 2009 au 16 octobre 2009

- déficit fonctionnel temporaire partiel du 17 octobre 2009 au 2 octobre 2010, - consolidation au 2 octobre 2010

- souffrances endurées de 2/7

- un déficit fonctionnel permanent de 5%

- un préjudice d'agrément lié à la gêne pour l'alimentation avec troubles du goût

- un préjudice sexuel évoqué par la patiente.

Son rapport constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime, née le [Date naissance 1] 1975, de son activité de déléguée médicale, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Préjudices patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles Sans objet

Ce poste est constitué des frais médicaux et pharmaceutiques, frais de transport, massages, appareillage pris en charge par la Cpam. Toutefois si la Cpam des [Localité 1] a transmis à la cour un relevé de ses débours, il s'avère qu'ils correspondent à des prestations servies au titre d'un accident qui s'est produit le 15 juin 2015, et dont le lien avec le dommage qui intéresse le présent litige n'est nullement établi.

- Frais divers300€

Ils sont représentés par les honoraires d'assistance à expertise par le médecin conseil. Ces dépenses supportées par la victime, nées directement et exclusivement de l'accident, sont par la même indemnisables. Mme [C] verse aux débats la facture du 300€ qui n'est discutée par le docteur [T] et La Medicale ni dans son principe ni dans son montant.

- Perte de gains professionnels actuels Sans objet

La Cpam des [Localité 1] fait état d'une somme de 258,72€ versée à Mme [C] pour des indemnités journalières du 16 juin 2015 au 21 juin 2015 qui ne peuvent être rattachées au dommage dont la cour est saisi.

Préjudices extra-patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire2870€

Ce poste inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l'existence et le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel pendant l'incapacité temporaire.

L'expert a retenu un déficit fonctionnel temporaire total de 15 jours ainsi qu'un déficit fonctionnel temporaire partiel de 351 jours, sans pour autant en fixer le taux. Mme [C] demande à la cour de le fixer à 75%. Il est justifié par la production du certificat médical du docteur [Y] que Mme [C] a présenté pendant cette période, une impression de grosse langue, des traces de morsures sur la langue, liées à une perte d'insensibilité, des sensations de picotement du côté droit, une sensation de langue brûlée et une agueusie. Cet ensemble d'élément conduit à valider le taux de 25% retenu par le premier juge.

Il doit être réparé sur la base d'environ 810€ par mois, eu égard à la nature des troubles et de la gêne subie soit :

- déficit fonctionnel temporaire total de 15 jours : 405€

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25% de 351 jours : 2.369,25€

et au total la somme de 2.774,25€ arrondie à 2.780€.

- Souffrances endurées4.000€

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison de la perte complète de la sensibilité de l'hémi-langue droite entraînant des lésions de morsures, des sensations de brûlures de l'hémi-langue du côté droit et des troubles de la sensibilité avec fourmillements sur toute la zone de l'hémi-langue droite ; évalué à 2 /7 par l'expert, il justifie l'octroi d'une indemnité de 4.000€.

permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent8050€

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte anatomo-physiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence personnelles, familiales et sociales.

Il est caractérisé par une perte de sensibilité de l'hémi-langue droite et des troubles de la perception du goût des aliments, ce qui conduit à un taux de 5% justifiant une indemnité de 8.050€ arbitrée par le premier juge, pour une femme âgée de 35 ans révolus à la consolidation.

- Préjudice sexuel3000€

Ce poste comprend divers types de préjudices touchant à la sphère sexuelle et notamment celui lié à l'acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l'accomplissement de l'acte sexuel.

Le docteur [K] a retenu dans son rapport que ce préjudice a été évoqué par Mme [C] au cours des opérations. Il correspond en l'occurrence à une absence sensitivo sensorielle de l'hémi langue qui a une incidence sur le baiser amoureux et de façon plus générale sur la vie intime de la requérante.

Il sera intégralement réparé par l'octroi d'une indemnité de 3.000€.

Le préjudice corporel global subi par Mme [C] s'établit ainsi à la somme de 18.220€ lui revenant qui, en application de l'article 1153-1 du code civil, porte intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 25 février 2016 à hauteur de 14.385€ et du prononcé du présent arrêt soit le 7 septembre 2017 à hauteur de 3.835€.

Mme [C] étant intégralement indemnisée des préjudices qu'elle a subis, l'examen d'un éventuel manquement au devoir d'information du chirurgien, qui se traduit par l'allocation de sommes correspondant à la fraction de son préjudice, est sans objet.

En revanche, et en vertu de l'article 16-3 du code civil, le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n'est pas à même de consentir. Ce préjudice d'impréparation est autonome de l'obligation d'information.

Il ressort des éléments versés en procédure que le docteur [T] est dans l'impossibilité de fournir aux débats le document par lequel Mme [C] a expressément consenti de manière éclairée à l'intervention chirurgicale qui a été pratiquée le 2 octobre 2009. Dans le cours des opérations d'expertise, le docteur [T] a indiqué au docteur [K] que le dossier médical a été sorti par la clinique, à sa demande, pour que le représentant de son assurance en responsabilité professionnelle puisse le consulter. Ce dossier aurait été égaré. L'expert écrit dans son rapport que 'lorsque le dossier a été demandé pour l'expertise, une partie de ce dernier manquait, notamment le consentement éclairé signé par la patiente' document qui y figurait selon le praticien. Il ressort de cette relation et de son libellé que le dossier a bien été transmis au docteur [T] par la clinique dans le cadre de sa défense, et qu'une 'partie du dossier médical' a été communiqué à l'expert. Dans une réponse apportée à un dire l'expert a précisé que 'la partie manquante du dossier médial concerne le consentement de la patiente' ce qui signifie que le docteur [K] a disposé de toutes les pièces médicales de nature à répondre à la mission qui lui a été confiée par la juridiction des référés. Il convient en conséquence de constater que le docteur [T], à qui il incombe de rapporter la preuve de ce que l'obligation d'information a bien été prodiguée, n'est pas en mesure de le faire et a manqué à son devoir d'information.

Le manquement du docteur [T] à son devoir d'information a occasionné à Mme [C] un préjudice moral autonome qui, au regard des principes du respect de la dignité la personne humaine et d'intégrité du corps humain, ne peut être laissé sans réparation et qu'il convient d'évaluer, eu égard aux circonstances de la cause, à la somme de 1000€.

Le docteur [T] doit en conséquence être condamné à lui verser cette somme en application des articles 16, 16-3 alinéa 2 et 1382 du code civil, qui portera intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt.

Sur le défaut d'information post opératoire

Le docteur [K], expert judiciaire, écrit dans son rapport que le traitement prescrit par le docteur [T] à la suite de l'intervention, par vitaminothérapie et corticoïde correspond à l'attitude thérapeutique attendue dans l'hypothèse d'une suspicion de lésion du nerf en post-opératoire.

Selon les éléments contenus dans le rapport et dans les pièces communiquées par les parties, le docteur [T] a reçu Mme [C] le 7 octobre 2009 à la demande de cette dernière en raison de la persistance de troubles de la sensibilité et du goût, puis le 10 octobre 2010, pour l'ablation des fils et enfin le 21 octobre 2009 en raison des troubles de la sensibilité et du goût dont se plaignait la patiente. Par la suite, Mme [C], qui n'est plus retournée voir le docteur [T], a décidé de consulter d'autres praticiens, à savoir le docteur [R], le 16 novembre 2009, puis le docteur [Y] en janvier et novembre 2010, tous deux étant chrirugiens dentistes. Enfin en novembre 2011 elle a consulté le docteur [Q], neurologue qui a posé le diagnostic de 'probable atteinte du nerf lingual'.

Il s'ensuit que malgré les consultations auprès du docteur [T] mais aussi auprès de deux autres chirurgiens dentistes, le diagnostic d'atteinte du nerf lingual n'a été posé que deux années après l'intervention et par un neurologue.

Dès lors, aucun élément ne permet de caractériser un manquement à son obligation d'information post-opératoire et imputable au docteur [T] de telle sorte que Mme [C] est déboutée de ce chef de demande.

Sur la responsabilité de la clinique

L'article L.1110-4 du code de la santé publique énonce que toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant. Ce texte prévoit in fine des sanctions pénales pour le contrevenant.

Sur le fondement de ces dispositions, Mme [C] demande à la cour de condamner la clinique [Établissement 1] à lui verser, pour la communication du dossier en original et sa perte, la somme de 15.000€ et pour la violation du secret médical la somme de 30.000€. En l'absence de sanction civile posée par le texte précité, cette demande s'analyse autour de la triple démonstration de la faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité les unissant.

En l'espèce et si la clinique [Établissement 1] reconnaît ne plus être en possession du dossier médical et qu'elle ne peut contester avoir failli à l'obligation de le conserver, Mme [C] ne démontre pas la réalité de son préjudice lié cette perte puisqu'en effet le docteur [K], expert a disposé de l'ensemble des éléments pour poser une conclusion sur l'éventuelle responsabilité du docteur [T], qui au demeurant en sa qualité de mis en cause au titre de sa responsabilité civile professionnelle était en droit de solliciter, dans le cadre de l'expertise ordonnée, la transmission de ce dossier à son médecin conseil et à celui de son assureur.

Mme [C] ne rapporte pas plus la preuve que le secret médical aurait été violé et que ce dossier serait à ce jour détenu par un tiers qui en aurait fait un usage dommageable à son endroit.

En conséquence, Mme [C] est déboutée de ces demandes en paiement dirigées contre la clinique.

Soutenant qu'en raison de la perte du dossier, ils ne sont pas en mesure d'établir que le chirurgien a bien recueilli le consentement éclairé de Mme [C], le docteur [T] et La Medicale demandent à la cour de condamner la clinique [Établissement 1] à les relever et les garantir des condamnations prononcées à leur encontre au titre du défaut d'information. Toutefois, s'il est acquis aux débats que la clinique [Établissement 1] admet qu'elle a égaré ce dossier en le transmettant dans sa version originale à l'assureur du docteur [T], il ressort de la réponse du docteur [K] au dire du conseil de Mme [C], que ce dossier contenait tous les éléments médicaux hormis le formulaire de consentement éclairé de la patiente, et alors que l'expert ajoute que 'tous les consentements signés par les patients sont réalisés en double exemplaire (un exemplaire pour le praticien et un exemplaire pour le patient)' et que 'lors de l'entrée de la patiente en clinique, le secrétariat copie ce consentement qui figurera dans le dossier (ce qui crée un nouvel exemplaire de ce document'. Ainsi la perte du dossier médical par la clinique ne devait pas constituer pour docteur [T] un obstacle à sa production, de telle sorte qu'avec La Medicale ils sont déboutés de leur demande de ce chef.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime doivent être confirmées.

Le docteur [T] et la SA Médicale de France qui succombent partiellement dans leurs prétentions et qui sont tenus à indemnisation, supporteront la charge des entiers dépens d'appel.

Aucune considération tenant à l'équité ne justifie d'accorder au docteur [T] et la SA Médicale de France le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à Mme [C] une indemnité de 1800€ et à la clinique [Établissement 1] la somme de 1200€ au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Confirme le jugement,

hormis sur la condamnation de la clinique [Établissement 1] à relever et garantir le docteur [T] à 50% de la condamnation prononcée contre lui en réparation du préjudice d'impréparation et sur l'indemnisation du préjudice corporel global de Mme [C],

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Déboute le docteur [T] et son assureur la SA Médicale de France de sa demande tendant à être relevés et garantis par la clinique [Établissement 1] de la condamnation prononcée in solidum à leur encontre en réparation du préjudice d'impréparation de Mme [C] ;

- Condamne in solidum le docteur [T] et la SA Médicale de France à verser à Mme [C] les sommes de :

* 18.220€ avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 25 février 2016 à hauteur de 14.385€ et du prononcé du présent arrêt soit le 7 septembre 2017 à hauteur de 3.835€,

* 1800€ au titre des frais exposés en appel,

- Condamne in solidum le docteur [T] et la SA Médicale de France à verser à verser à la clinique [Établissement 1] la somme de 1200€ en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés devant la cour ;

- Condamne in solidum le docteur [T] et la SA Médicale de France aux dépens d'appel, distraits dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 16/06626
Date de la décision : 07/09/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°16/06626 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-09-07;16.06626 ?
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