COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION
DU 08 JUIN 2017
jlp
N° 2017/ 489
Rôle N° 14/06242
Association [Adresse 1]
C/
[T] [W]
[Q] [Q]
[Z] [D]
SARL LES PARCS DU CAP BENAT
Grosse délivrée
le :
à :
SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE
SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt n° 1200 FS-D rendu par la Cour de Cassation en date du 23 octobre 2013, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 22 rendu le 23 janvier 2012 par la 4ème Chambre B de la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE, enregistré au répertoire général sous le n°10/12385 , sur appel d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON du 15 juin 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 07/02559.
DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION
Association [Adresse 1] (ASSOCIATION SYNDICALE DES PROPRIETAIRES [Adresse 1]), prise en la personne de son Président en exercice , dont le siège social est [Adresse 2]
représentée par la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Aurélia DESVEAUX, avocat au barreau du VAL DE MARNE, plaidant
DEFENDEURS SUR RENVOI DE CASSATION
Monsieur [Q] [Q]
demeurant [Adresse 3]
représenté par la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Alain VIDAL-NAQUET de la SCP A VIDAL-NAQUET AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
Monsieur [Z] [D]
demeurant [Adresse 4]
représenté par la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Alain VIDAL-NAQUET de la SCP A VIDAL-NAQUET AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
SARL LES PARCS DU CAP BENAT, pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, dont le siège social est [Adresse 5]
représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Lauriane COUTELIER de l'ASSOCIATION COUTELIER L COUTELIER F., avocat au barreau de TOULON, plaidant
Monsieur [T] [W]
demeurant [Adresse 6]
non comparant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Avril 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Madame Hélène GIAMI, Conseiller
Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2017
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2017,
Signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :
Un arrêté du préfet du Var en date du 8 octobre 1953, modifié par divers arrêtés ultérieurs, les derniers en date des 20 juillet 1966 et 6 mars 1986, a approuvé la création d'un projet de lotissement sur un domaine d'environ 140 hectares situé à [Localité 1] (Var), appartenant à la société anonyme artistique [Adresse 7] ; il était prévu la création de 246 lots numérotés desservis par un réseau routier et le maintien d'espaces libres sur une trentaine d'hectares.
Le cahier des charges du lotissement établi le 3 octobre 1953, déposé au rang des minutes de Me [R], notaire à [Localité 2], dispose à cet égard des espaces libres ont été réservés le long des voies qui sont des lieux de point de vue successifs, au point le plus haut du lotissement, en bordure de mer, où toute parcelle était plus difficilement aménageable, ou constructible, et lorsque la petite superficie des lots prive leurs propriétaires d'un dégagement individuel et que les espaces libres représentent approximativement le quart de la superficie du lotissement.
La société artistique [Adresse 7] n'ayant pu achever la réalisation du lotissement, des poursuites sur saisie immobilière ont été engagées à son encontre et par un jugement du tribunal de grande instance de Toulon en date du 14 novembre 1972, [T] [W] a été déclaré adjudicataire, en un lot unique, d'un ensemble de parcelles dépendant du lotissement, dont les parcelles F [Cadastre 1], F [Cadastre 2] et F [Cadastre 3], d'une superficie totale de 17 ha 9 a 92 ca, correspondant à des parcelles non numérotées, inconstructibles et en nature d'espaces verts.
Le jugement d'adjudication ainsi rendu le 14 novembre 1972 disposait notamment, page 3, qu'aucune des parcelles cadastrales incluses dans le lot unique d'adjudication n'est actuellement constructible aux termes d'une lettre de l'administration de l'urbanisme en date du 13 juin 1972, confirmant diverses lettres antérieures et des certificats délivrés courant mai 1972 et que la majeure partie de la superficie cadastrale vendue est constituée d'espaces verts du lotissement approuvé.
À la suite du remaniement du cadastre en 1983, les trois parcelles considérées sont désormais cadastrées sous les références BI [Cadastre 4], BI [Cadastre 5], BI [Cadastre 6], BI [Cadastre 7], BK [Cadastre 8], BK [Cadastre 9], BL [Cadastre 10], BM [Cadastre 11] et BN [Cadastre 4].
La liquidation des biens de M. [W] a été prononcée par un jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 23 septembre 1976.
Par exploit du 20 mars 2001, un commandement aux fins de saisie immobilière a été délivré, à la requête du trésorier du Lavandou, à l'encontre de M. [W] et de son liquidateur, M. [P], mais à l'audience de la chambre des criées du 26 octobre 2006, aucune des parcelles, visées dans le commandement, n'a été vendue.
M. [W], redevenu in bonis à la suite d'un jugement rendu le 21 mai 2007 par le tribunal de commerce de Paris clôturant la liquidation pour extinction du passif, a, suivant un acte reçu le 17 août 2007 par Me [J], notaire à Nîmes, avec la participation de Me [G], notaire à [Localité 3], vendu à la SARL les Parcs du Cap Bénat les parcelles, dont il était resté propriétaire.
Entre-temps, par acte d'huissier de justice du 18 avril 2007, l'association syndicale des propriétaires [Adresse 7] (l'association syndicale) a fait assigner M. [W] et son liquidateur, M. [P], devant le tribunal de grande instance de Toulon en vue d'obtenir que l'ensemble des espaces verts, parties communes du lotissement, lui soit dévolu ; en l'état de la revente des parcelles à la société les Parcs du Cap Bénat, l'association syndicale a, par exploit du 17 août 2007, assigné en intervention forcée cette société ; [Z] [D] et [Q] [Q], tous deux co-lotis, sont intervenus volontairement à l'instance.
Par jugement du 15 juin 2010, le tribunal de Grande instance de Toulon a déclaré irrecevable l'action de l'association syndicale et de MM. [D] et [Q] et les a condamnés in solidum à payer à la société les Parcs du Cap Bénat et à M. [W] les sommes de 2000 €, chacun, à titre de dommages et intérêts et de 1500 €, chacun, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le premier juge a notamment considéré que l'association syndicale était dépourvue de qualité à agir, à défaut d'avoir mis ses statuts en conformité avec les dispositions l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 complété par le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006, et que la question de la propriété des espaces verts, tels que définis au cahier des charges du lotissement, avait été tranché par un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 5 décembre 1996 et un jugement de la chambre des criées du tribunal de grande instance de Toulon du 25 octobre 2001, ayant autorité de la chose jugée.
Sur l'appel formé par l'association syndicale et MM. [D] et [Q], la cour d'appel d'Aix-en-Provence (4ème chambre B) a, par arrêt du 23 janvier 2012, infirmé le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, a :
'mis hors de cause M. [P],
'rejeté les exceptions de procédure et les fins de non-recevoir soulevées par M. [W] et la société les Parcs du Cap Bénat,
'prononcé la nullité de la vente conclue entre M. [W] et la société les Parcs du Cap Bénat selon acte reçu le 11 juin 2007 par Me [J], notaire à [Localité 4], avec la participation de Me [G], notaire à [Localité 3], publié le 30 juillet 2007 au 2ème bureau des hypothèques [Localité 5], volume 2007 P n° 7070, ladite vente portant sur les biens suivants :
A [Localité 1] (83 250), dans le lotissement dénommé « domaine [Adresse 7] », plusieurs parcelles de terrain à usage d'espaces verts, cadastrées :
' section BI n° [Cadastre 4] lieu-dit Cap Bénat pour 46 a 44 ca,
' section BK n° [Cadastre 8] lieu-dit Cap Bénat pour 2 ha 96 a 76 ca,
' section BK n° [Cadastre 9] lieu-dit [Localité 6] pour 5 ha 16 a 76 ca,
' section BL n° [Cadastre 10] lieu-dit [Localité 6] pour 88 a 82 ca,
' section BM n° [Cadastre 11] lieu-dit [Localité 6] pour 4 ha 51 a 65 ca,
' section BN n° [Cadastre 4] lieu-dit [Localité 6] pour 53 a 02 ca,
' section BI n° [Cadastre 6] lieu-dit [Localité 6] pour 18 a,
' section BI n° [Cadastre 5] lieu-dit [Localité 6] pour 02 a 21 ca,
' section BI n° [Cadastre 7] lieu-dit [Localité 6] pour 01 a 11 ca,
'ordonné à M. [W] de céder à l'association syndicale autorisée des propriétaires [Adresse 7], pour le prix symbolique de un euro, la propriété des parcelles suivantes :
A [Localité 1], dans le lotissement dénommé « [Adresse 7] », plusieurs parcelles de terrain à usage d'espaces verts, cadastrées :
' section BI n° [Cadastre 4] lieu-dit [Localité 6] pour 46 a 44 ca,
' section BK n° [Cadastre 8] lieu-dit [Localité 6] pour 2 ha 96 a 76 ca,
' section BK n° [Cadastre 9] lieu-dit [Localité 6] pour 5 ha 16 a 76 ca,
' section BL n° [Cadastre 10] lieu-dit [Localité 6] pour 88 a 82 ca,
' section BM n° [Cadastre 11] lieu-dit [Localité 6] pour 4 ha 51 a 65 ca,
' section BN n° [Cadastre 4] lieu-dit [Localité 6] pour 53 a 02 ca,
' section BI n° [Cadastre 6] lieu-dit [Localité 6] pour 18 a,
' section BI n° [Cadastre 5] lieu-dit [Localité 6] pour 02 a 21 ca,
' section BI n° [Cadastre 7] lieu-dit [Localité 6] pour 01 a 11 ca,
'dit que cette cession aura lieu aux frais avancés de M. [W],
'dit qu'à défaut de réalisation de la cession susvisée par acte notarié dans le délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt, celui-ci vaudra titre de cession et sera publié comme tel à la conservation des hypothèques, aux frais exclusifs de M. [W],
'dit n'y avoir lieu de prononcer une astreinte,
'débouté l'association syndicale de ses demandes de dommages et intérêts à l'encontre de M. [W] et de la société les Parcs du Cap Bénat,
'débouté M. [W] et la société les Parcs du Cap Bénat de ces demandes,
'condamné in solidum M. [W] et la société les Parcs du Cap Bénat à payer la somme de 6000 € à l'association syndicale sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
'rejeté les demandes des autres parties.
Cet arrêt a été cassé et annulé dans toutes ses dispositions par un arrêt de la Cour de cassation (3ème chambre civile) en date du 23 octobre 2013, aux motifs suivants :
Sur le moyen unique qui est recevable :
Vu l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 544 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 janvier 2012), que, le 18 avril 2007, l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1] (l'[Adresse 1]) a assigné M. [W] pour obtenir le transfert de la propriété des parcelles inconstructibles de ce lotissement dont il était devenu propriétaire par jugement d'adjudication du 14 novembre 1972 ; que, le 17 août 2007, elle a assigné la société Les Parcs du cap Bénat à laquelle M. [W] avait vendu ces parcelles, par acte notarié du 11 juin 2007 ; qu'après jonction de ces deux procédures, l'[Adresse 1] a demandé, à titre subsidiaire, l'annulation de cette vente ; que MM. [D] et [Q], propriétaires de lots dépendant de ce lotissement, sont intervenus volontairement pour soutenir les demandes de l'[Adresse 1] ;
Attendu que pour annuler l'acte de vente du 11 juin 2007 de plusieurs parcelles à usage d'espaces verts consentie par M. [W] à la société [Adresse 7] et lui ordonner de les céder, à ses frais exclusifs et pour un euro symbolique, à l'[Adresse 1], l'arrêt retient que, par arrêté du 6 mars 1986, le commissaire de la République du Var avait, au visa de l'article L. 315-3 du code de l'urbanisme, autorisé la modification du cahier des charges du lotissement par laquelle il était « entendu que par le terme espaces libres il faut lire espaces verts inconstructibles. Le lotisseur s'engage à céder ces espaces libres au syndicat », que les parcelles cédées par M. [W] faisaient partie des espaces libres de ce lotissement, que le cahier des charges, qui prévoyait que leur propriété était dévolue à l'association syndicale, s'imposait au lotisseur et aux acquéreurs et que ces parcelles étaient hors commerce et ne pouvaient être cédées à une autre personne ;
Qu'en statuant ainsi, alors que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Désignée comme juridiction de renvoi, autrement composée, cette cour (4ème chambre A) a été saisie par l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1] par déclaration reçue le 27 mars 2014 au greffe.
Celle-ci demande à la cour (conclusions déposées le 6 mars 2017 par le RPVA) de :
Vu les articles 1134 et 1135 code civil,
Vu l'article 1615 du code civil,
(')
'infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Toulon en date du 15 juin 2010 en ce qu'il a déclaré son action irrecevable,
'dire et juger qu'elle a justifié de sa capacité d'ester en justice et des pouvoirs de son représentant légal,
'dire et juger que le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée et du principe de la concentration des moyens n'a pas lieu de s'appliquer en l'espèce,
'dire et juger que sa demande visant le transfert de la propriété des espaces verts à son profit n'est pas prescrite,
'dire et juger que son objet social s'étend à l'administration et la gestion des espaces libres et équipements communs,
'dire et juger que les parcelles constituent bien des espaces libres du lotissement approuvé,
'dire et juger nulle la vente intervenue par acte authentique du 11 juin 2007 dressé en l'étude de Me [E] [J], membre de la SCP [J], [H] et [F], notaires à [Localité 4],
'dire et juger que l'article 5 du cahier des charges de 1953, indiquant que le syndicat se voit attribuer la propriété des voirie et espaces libres, constitue une obligation de nature contractuelle,
'dire et juger que M. [W] a été, par l'effet du jugement d'adjudication du 14 novembre 1972, subrogé dans les droits et obligations du lotisseur, la société artistique [Adresse 7],
'dire et juger que le respect du cahier des charges est un commandement impératif justifiant le dessaisissement de M. [W] des parcelles légalement acquises,
'ordonner à M. [W] à régulariser la cession de la propriété des parcelles suivantes sises à [Localité 1] :
' BI [Cadastre 4] pour 46 a 46 ca
' BK [Cadastre 8] pour 2 ha 96 a 76 ca
' BI [Cadastre 6] pour 18 ares 00 ca
' BI [Cadastre 5] pour 2 a 21 ca
' BI [Cadastre 7] pour 1 a 11 ca
' BK [Cadastre 9] pour 5 ha 16 a 76 ca
' BL [Cadastre 10] pour 88 a 82 ca
' BM [Cadastre 11] pour 4 ha 51 a 65 ca
' BN [Cadastre 4] pour 53 a 20 ca
'dire et juger que cette cession doit avoir lieu à titre gratuit dès lors que la propriété des espaces libres du lotissement doit être considérée comme l'accessoire destiné à l'usage perpétuel des lots vendus au service desquels elle est affectée,
'dire et juger qu'à défaut de régularisation dans les 3 mois suivant la signification de la décision à venir, l'arrêt vaudra cession gratuite par la société les Parcs du Cap Bénat des parcelles de terrain ci-dessus définies et que cet arrêt sera transcrit comme tel à la conservation des hypothèques [Localité 5], 2ème bureau par la partie la plus diligente aux entiers frais de la société [Adresse 7], y inclus les droits et honoraires de mutation et les frais de publication,
'condamner solidairement M. [W] et la société [Adresse 7] à lui verser la somme de 8000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MM. [D] et [Q] sollicitent de voir (conclusions déposées le 14 mars 2017 par le RPVA) :
'se déclarer incompétent au profit du tribunal administratif de Toulon pour se prononcer tant sur la régularité de la nomination des syndics de l'association syndicale autorisée [Adresse 1], que sur les pouvoirs du président du syndicat, ou sur les conditions de sa nomination,
(')
'annuler la décision rendue (par le tribunal de grande instance de Toulon le 15 juin 2010) ou subsidiairement, la réformer,
'dire et juger que constituent des exceptions de procédure au sens de l'article 117 du code de procédure civile les irrecevabilités retenues par la décision entreprise concernant en premier lieu la mise en conformité des statuts avec les dispositions de l'ordonnance du 1er juillet 2004 et du décret du 3 mai 2006, en second lieu le défaut allégué de régularité de la délibération du 31 mars 2007 donnant mandat au président du syndicat d'introduire l'action en justice pour obtenir la dévolution au profit de l'association syndicale des parties communes [Adresse 1] et en troisième lieu la régularité des décisions prises en assemblée générale de l'association syndicale désignant les membres du syndicat,
'dire et juger que le tribunal de grande instance de Toulon n'était pas compétent pour se prononcer sur les exceptions de procédure au sens de l'article 117 du code de procédure civile, seul le juge de la mise en état ayant compétence pour ce faire,
'dire et juger que le tribunal de grande instance, se prononçant sur les exceptions de procédure, s'est livré à un excès de pouvoir,
'annuler, en conséquence, ou subsidiairement, réformer la décision entreprise sur ce premier point et rejeter les exceptions de procédure soulevées,
'dire et juger qu'en tout état de cause, en application des dispositions des articles 121 du code de procédure civile au principal et subsidiairement, 126 du code de procédure civile, les irrecevabilité évoquées ont été couvertes, soit au titre de la nullité, soit au titre de la fin de non-recevoir, leur cause ayant disparu au moment où le juge statue,
'dire et juger que l'irrecevabilité des demandes formulées par l'assignation du 18 avril 2007 au titre de l'autorité de la chose jugée au visa des décisions rendues par la cour d'appel le 5 décembre 1996 et par la chambre des criées du tribunal de grande instance le 25 octobre 2001, a été retenue à tort par la décision entreprise, ces décisions ne s'étant prononcées ni sur la demande de dévolution à l'association syndicale des parties communes du lotissement détenues successivement par M. [W] puis par la société [Adresse 7], ni sur la demande en nullité de la vente intervenue par acte authentique du 11 juin 2007,
'dire et juger que l'autorité de la chose jugée ne s'attache en aucune manière au jugement du 28 juin 2004, qui n'a pas abordé le fond du débat, se bornant à retenir un défaut de qualité pour agir et dès lors, une irrecevabilité,
'dire et juger, en tout état de cause, que l'autorité de la chose jugée des différentes décisions de justice invoquées tant par M. [W] que par la société les Parcs du Cap Bénat ne leur est pas opposable,
'constater que le tribunal de grande instance de Toulon a omis de se prononcer sur la demande en nullité de la vente intervenue par acte authentique du 11 juin 2007 dans les rapports entre M. [W] et la société [Adresse 7],
'dans la mesure où le jugement est annulé, évoquer en application des dispositions de l'article 568 du code de procédure civile et, en tout état de cause, annulant au réformant le jugement,
'prononcer la nullité de la vente intervenue le 11 juin 2007 dans les rapports entre M. [W] et la société [Adresse 7], publiée à la conservation des hypothèques [Localité 5] le 30 juillet 2007, 2ème bureau volume 2007 n° 70,
'dire et juger que par l'effet de la loi du 14 mars 1919 dite « loi Cornudet », de la loi modificative du 19 juillet 1921, de la loi du 15 octobre 1943, du décret du 26 juillet 1954, du décret du 31 décembre 1958, du cahier des charges [Adresse 1], des statuts de l'association syndicale autorisée des propriétaires [Adresse 7] et des arrêtés préfectoraux successifs (8 octobre 1953, 29 novembre 1953, 19 juin 1959 et 6 mars 1986), les espaces verts [Adresse 1] n'étaient pas cessibles indépendamment des lots, dès la date du 17 février 1988 ayant constaté que les prescriptions imposées par l'arrêté de lotir avaient été exécutées en totalité,
'dire et juger que M. [W] ne pouvait disposer des espaces verts [Adresse 1] par acte de vente, alors qu'il en avait disposé dans le cadre de l'obtention d'un arrêté de lotissement, des dispositions du cahier des charges, des actes de vente de lots, soit par lui-même, soit du fait de son auteur,
'subsidiairement et dès lors que la cour ne prononcerait pas la nullité de la vente intervenue le 11 juin 2007, constater que la société les Parcs du Cap Bénat est tenue aux obligations réelles et d'ordre public qui ont pesé successivement sur la société artistique [Adresse 7] puis sur M. [W] au titre du transfert à l'association syndicale des parties communes du lotissement acquises par la société les Parcs du Cap Bénat le 11 juin 2007 et dès lors, condamner cette société à transférer à l'association syndicale, par acte authentique, dans le mois de la date de la signification de l'arrêt à intervenir sous une astreinte de 10 000€ par jour de retard, laquelle courra pendant un délai de deux mois, les parcelles de terrains ci-après identifiées après lequel, faute de cession, l'association syndicale et eux-mêmes pourront saisir le juge de l'exécution afin de faire liquider l'astreinte et en prononcer une nouvelle pour contraindre derechef la société [Adresse 7] à régulariser, par acte authentique, la cession desdites parties communes et ce, d'autant que cette société a déclaré « vouloir faire son affaire personnelle de la réclamation formulée »,
'en tant que de besoin et pour les besoins de la publicité foncière, dire et juger que sont dévolues à l'association syndicale :
A [Localité 1], dans le lotissement dénommé domaine [Adresse 7], les parcelles ci-après identifiées :
' BI [Cadastre 4] pour 46 a 46 ca
' BK [Cadastre 8] pour 2 ha 96 a 76 ca
' BI [Cadastre 6] pour 18 ares 00 ca
' BI [Cadastre 5] pour 2 a 21 ca
' BI [Cadastre 7] pour 1 a 11 ca
' BK [Cadastre 9] pour 5 ha 16 a 76 ca
' BL [Cadastre 10] pour 88 a 82 ca
' BM [Cadastre 11] pour 4 ha 51 a 65 ca
' BN [Cadastre 4] pour 53 a 20 ca
'plus subsidiairement, dire et juger que l'arrêt à intervenir vaudra cession gratuite ou dévolution par la société les Parcs du Cap Bénat à l'association syndicale des parcelles de terrain ci-dessus défini et que cet arrêt sera transcrit comme tel à la conservation des hypothèques [Localité 5], 2ème bureau, par la partie la plus diligente aux entiers frais de la société [Adresse 7] y inclus les droits et honoraires de mutation et les frais de publication,
'leur donner acte de ce qu'ils se désistent de l'appel formé à l'encontre du jugement du 15 juin 2010 à l'égard de M. [P] ès qualités, en l'état des dispositions du jugement du 21 mai 2007 rendu par le tribunal de commerce de Paris, désistement signifié avant que ce dernier n'ait conclu,
'condamner M. [W] et la société les Parcs du Cap Bénat in solidum à payer à chacun d'eux la somme de 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La société les Parcs du Cap Bénat demande, pour sa part, à la cour (conclusions déposées le 20 mai 2015 par le RPVA) de :
'débouter l'association syndicale de toutes ses fins, demandes, moyens et conclusions,
'confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Toulon en date du 15 juin 2010 en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de l'association syndicale,
'dire et juger, en tant que de besoin, que le tribunal était compétent pour statuer sur les exceptions de procédure tirées du défaut de capacité d'ester en justice et du défaut de pouvoir du représentant légal de l'association syndicale,
'dire et juger que l'association syndicale ne justifie pas de sa capacité d'ester en justice, ni des pouvoirs de son représentant légal et, en conséquence, déclarer irrecevable ses demandes,
'dire et juger que l'autorité de la chose jugée et le principe de concentration des moyens rendent irrecevables les demandes de l'association syndicale,
'dire et juger prescrites les demandes de l'association syndicale,
'subsidiairement, dire et juger que l'objet social de l'association syndicale ne lui permet pas de devenir propriétaire des terrains, dont elle demande le transfert de propriété à son profit,
'dire et juger, au surplus, que l'association syndicale ne peut se prévaloir des modifications qu'elle a elle-même apportées à son cahier des charges pour tenter d'inclure les espaces verts dans les biens, dont elle serait susceptible d'être propriétaire, et constater qu'à tout le moins, ces modifications du cahier des charges ne lui sont pas opposables et ne peuvent servir de base aux demandes de l'association syndicale,
'dire et juger que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international et qu'ainsi, les demandes de l'association syndicale et de M. [Q] sont autant irrecevables qu'infondées,
'réformer le jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à ses demandes et condamner l'association syndicale, sous astreinte de 2000 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir, à installer sur les parcelles, dont elle a la gestion et au droit des ouvertures pratiquées sans droit ni titre sur ses terrains, une clôture destinée à empêcher l'usage de ces voies irrégulièrement créées,
'condamner, sous la même astreinte de 2000 € par jour de retard, l'association syndicale à remettre en état ses terrains et ce, afin de supprimer les voies créées, tel que l'établit le procès-verbal de constat du 25 juin 2008,
'condamner l'association syndicale et M. [Q] à la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé,
'condamner l'association syndicale et M. [Q] à la somme de 20 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [W], qui avait constitué un avoué près la cour d'appel d'Aix-en-Provence antérieurement 1er janvier 2012, a été assigné devant la cour de renvoi, à la requête de l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1], par acte d'huissier de justice en date du 20 novembre 2014 délivré à sa personne, mais n'a pas constitué avocat malgré l'invitation qui lui a été faite.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 21 mars 2017.
MOTIFS de la DECISION :
Il convient de donner acte à MM. [D] et [Q] de ce qu'ils se désistent de leur appel dirigé à l'encontre de M. [P] pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation des biens de M. [W], lequel est redevenu in bonis à la suite d'un jugement rendu le 21 mai 2007 par le tribunal de commerce de Paris clôturant la liquidation pour extinction du passif.
C'est à juste titre que l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1] et MM. [D] et [Q] font valoir que le premier juge ne pouvait déclarer irrecevable (sic) l'action de l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1] aux motifs que celle-ci ne démontrait pas avoir respecté les dispositions de l'ordonnance du 1er juillet 2004 et de son décret d'application du 3 mai 2006 sur la mise en conformité de ses statuts et qu'aucun document n'était produit permettant de vérifier la régularité de la délibération du syndicat en date du 31 mars 2007 autorisant le président, M. [I], à agir en justice, alors que de tels moyens s'analysaient en des exceptions de nullité tirées du défaut de capacité à agir de l'association syndicale et du défaut de pouvoir de son représentant au sens de l'article 117 du code de procédure civile, dont seul le juge de la mise en état, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pouvait connaître en application de l'article 771 du même code ; l'association syndicale et MM. [D] et [Q] sont recevables à se prévaloir, même pour la première fois en cause d'appel, de l'irrecevabilité des exceptions de procédure, qu'avait soulevé M. [W] en première instance puisqu'il s'agit là d'un moyen nouveau recevable en application de l'article 563 du code de procédure civile.
En revanche, MM. [D] et [Q] ne sont pas fondés à en déduire que le jugement serait nul en raison de l'excès de pouvoir commis par le premier juge pour s'être prononcé sur des exceptions de procédure en dépit de la compétence exclusive du juge de la mise en état pour en connaître ; en effet, l'excès de pouvoir du juge ne peut être invoqué que dans le cadre d'un appel'nullité du jugement qui n'est ouvert que lorsque l'appel aux fins de réformation est irrecevable, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
En toute hypothèse, les dispositions de l'article 7 de la loi du 21 juin 1865 selon lesquelles une association syndicale n'acquiert la personnalité morale qu'après la publication dans un journal d'annonces légales d'un avis de constitution, dispositions que la société [Adresse 7] persiste à invoquer, ne sont pas applicables à l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1], qui est une association syndicale autorisée, instituée par un arrêté préfectoral du 28 mars 1961, dont l'article 2 prévoit qu'un extrait de l'acte d'association et le présent arrêté seront insérés au recueil des actes administratifs de la préfecture du Var et seront affichés au plus tard dans un délai de 15 jours tant à la porte principale de la mairie qu'à un autre endroit apparent et fréquenté du public désigné par arrêté municipal ; en outre, par arrêté du 18 mai 2009, publié au recueil des actes administratifs du Var le 26 mai 2009, le préfet du département a approuvé les statuts de l'association syndicale, tels qu'adoptés par son assemblée des propriétaires, réunie le 23 août 2008, afin de les mettre en conformité avec les dispositions de l'ordonnance n° 2004'632 du 1er juillet 2004 et de son décret d'application n° 2006'504 du 3 mai 2006.
L'article 5 des statuts de l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1], également dénommée en abrégé « [Adresse 1] », dispose que celle-ci a notamment pour objet d'aménager d'entretenir les voies et réseaux divers du lotissement dont la propriété temporaire lui a été transférée par les arrêtés préfectoraux des 8 octobre 1953, 23 décembre 1954 et 29 novembre 1955, portant approbation du lotissement [Adresse 7] et des terrains communs d'usage collectif, dénommé espaces libres ou espaces verts dans le cahier des charges dès que leur propriété a été remis à l'[Adresse 1] par les lotisseurs en application de la loi, des réglementations, du cahier des charges et des autres documents approuvés du lotissement.
Il résulte de ce qui précède que l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1], dont la mise en conformité des statuts a été approuvée par un acte de l'autorité administrative en conformité de l'article 60 de l'ordonnance du 1er juillet 2004, a donc la capacité d'agir en justice en vue d'obtenir le transfert de la propriété de parcelles, qu'elle considère comme des espaces verts du lotissement.
Les articles 17 et 18 des statuts de l'[Adresse 1] prévoient également que le syndicat, composé des propriétaires membres de l'association syndicale élus par l'assemblée, est notamment chargé d'autoriser son président à ester en justice en engageant toutes actions devant les tribunaux judiciaires et administratifs et que le président représente l'association en justice ; en l'occurrence, par délibération du 31 mars 2007, le syndicat de l'[Adresse 1] a autorisé son président à entreprendre et poursuivre toute action en justice devant les juridictions, afin de faire attribuer à l'association syndicale la pleine propriété des parcelles litigieuses ; une résolution (n° 5) a également été prise par l'assemblée générale des propriétaires tenue le 6 août 2007, dont le procès-verbal est versé aux débats, confirmant les pouvoirs du syndicat d'engager toute action devant les tribunaux à l'encontre de M. [W] ou ses acquéreurs potentiels, afin d'obtenir la cession amiable ou forcée des parcelles et espaces libres BI 18, BI 22, BI 23, BI 25, BK 15, BK 37, BL 58, BM 5 et BN 18 ; la société les Parcs du Cap Bénat ne saurait invoquer le fait que la délibération des syndics du 31 mars 2007 serait insuffisante à défaut de production du procès-verbal de l'assemblée générale des propriétaires désignant les membres du syndicat, alors que l'irrégularité d'une telle décision, s'agissant de la désignation de l'organe administratif de la personne morale, ne peut être soulevée par un tiers et que le contentieux de la validité d'une décision du syndicat d'une association syndicale autorisée, rendue exécutoire par l'autorité administrative, relève de la compétence de la juridiction administrative ; contrairement à ce qu'a décidé le premier juge, le président du syndicat a donc le pouvoir d'agir en justice au nom de l'[Adresse 1].
Par arrêté du 8 octobre 1953, le préfet du Var a approuvé le projet de lotissement de la propriété située à [Adresse 8], appartenant alors à la société artistique [Adresse 7].
Si dans le dispositif de son arrêt du 5 décembre 1966, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a dit que le classement en « espace vert » de la parcelle de terre dite « le Balcon » ne saurait avoir pour effet d'en transférer la propriété à l'association syndicale des propriétaires [Adresse 1] et qu'en l'absence de tout élément de preuve justifiant que la société artistique [Adresse 7] ait procédé à l'aliénation de cette parcelle, dont elle était légitime propriétaire lors de l'établissement du lotissement, cette société a été fondée en interdire le passage à la société civile immobilière du Pinet, elle n'a pas statué sur l'obligation du lotisseur de transférer la propriété de ces espaces verts à l'[Adresse 1] après achèvement du lotissement ; il en est de même du jugement du 25 octobre 2001, aux termes duquel la chambre des criées du tribunal de grande instance de Toulon a débouté l'[Adresse 1] de sa demande tendant à ce que les espaces verts du lotissement soient exclus d'une procédure de saisie immobilière diligentée contre M. [W], après avoir relevé que ces biens étaient incontestablement la propriété de ce dernier ; enfin, le jugement du tribunal de grande instance de Toulon du 28 juin 2004 s'est borné à déclarer irrecevable la demande de l'[Adresse 1] tendant à contraindre M. [W] à lui transférer la propriété des espaces libres du lotissement ; la société les Parcs du Cap Bénat, comme l'avait fait précédemment M. [W], ne peut dès lors invoquer la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à ces trois décisions.
Reprenant le moyen également soutenu par M. [W], la société les Parcs du Cap Bénat fait valoir, se fondant sur les dispositions de l'article L. 315-1 (ancien) du code de l'urbanisme et des articles 2262 et de 2265 (anciens) du code civil, que l'action de l'association syndicale, s'analysant en une demande d'exécution d'une obligation de faire, qui aurait été prise par le lotisseur en son temps, de lui transférer la propriété des espaces libres, est atteinte par la prescription prévue par ces textes ; l'article L. 315-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction de la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985, dispose qu'en cas d'inobservation de la réglementation applicable aux lotissements, la nullité des ventes et locations concernant les terrains compris dans un lotissement peut être prononcée à la requête des propriétaires ou du maire ou du représentant de l'État dans le département aux frais et dommages du lotisseur et que l'action en justice née de la violation de la réglementation applicable aux lotissements se prescrit par dix ans à compter de la publication des actes portant transfert de propriété à la publicité foncière ; ce texte est manifestement inapplicable à un litige qui, comme en l'espèce, vise à obtenir l'exécution de l'obligation contractuelle pesant sur M. [W] de transférer à l'association syndicale la propriété des espaces verts inclus dans le périmètre du lotissement ; en outre, ce n'est que le 17 février 1988 que le préfet du Var a, conformément aux dispositions de l'article R. 315-36 (ancien) du code de l'urbanisme, délivré un certificat constatant que les prescriptions imposées par l'arrêté d'autorisation de lotir étaient exécutées dans leur totalité ; l'[Adresse 1] ne pouvait dès lors exiger que le lotisseur lui transfère la propriété des parties communes avant l'achèvement du lotissement, ce dont il résulte que son action, de nature contractuelle, introduite par exploit du 18 avril 2007, ne se trouve pas atteinte par la prescription trentenaire.
Sur le fond du litige, l'article 5 du cahier des charges du 3 octobre 1953, déposé le 16 novembre 1953 au rang des minutes de Me [R], notaire à [Localité 2], énonce que le syndicat (l'association syndicale des propriétaires) aura la charge de toutes les dépenses relatives aux travaux supplémentaires de toute nature qui pourraient être prescrits par l'administration postérieurement à l'approbation du projet de lotissement ou qu'il estimerait nécessaire en dehors de ceux auxquels le vendeur s'est engagé aux termes du présent cahier des charges, et qu'il aura également la charge des travaux d'entretien, de réfection, de réparation concernant la voirie en général, l'enlèvement des, ordures ménagères et autres, les plantations, des débroussaillements et toutes autres mesures préventives ou défensives contre les incendies de forêt et généralement, tous les frais quelconques relatifs aux voies dont la propriété temporaire lui est attribuée par le présent cahier des charges ; l'article 1 des statuts indique que des espaces libres ont été réservés le long des voies qui sont des lieux de point de vue successifs, que pour permettre l'accès du public à la mer, des passages de piétons seront réservés entre la voie la plus haute du lotissement et le sentier du bord de mer, qu'aux points du sentier de bord de mer où les difficultés naturelles s'opposeraient à la circulation des piétons ou la rendrait dangereuse par mer agitée, il sera réservé des passages praticables permettant de contourner ou surmonter les obstacles, que le tracé du sentier indiqué sur le plan d'ensemble sera déterminé exactement sur le terrain (') par le géomètre du lotissement, lors de l'implantation des lots vendus et que les 140 hectares du lotissement comprendront des espaces libres sur 30 hectares et 246 lots sur 110 hectares comprenant des grands lots (4), des lots moyens (96), des petits lots (130) et des lots commerciaux (16).
L'expression « la voirie en général », utilisée à l'article 5 du cahier des charges, s'entend nécessairement, non seulement des chemins et des sentiers, mais également des espaces libres qu'ils desservent et la référence, dans le cahier des charges, à des opérations de débroussaillement et aux mesures préventives et défensives contre les incendies de forêt implique que la gestion des espaces libres, correspondant à des espaces boisés, incombe à l'association syndicale et entre dès lors dans son objet social qui est, selon l'article 4 des statuts, de prendre en charge la gestion et l'administration de la voirie et de la viabilité en général.
Par ailleurs, M. [W] a été déclaré adjudicataire, aux termes du jugement de la chambre des criées du tribunal de grande instance de Toulon en date du 14 novembre 1972, d'un lot unique comprenant des lots de lotissement numérotés, mais également les parcelles litigieuses alors cadastrées F [Cadastre 1], F [Cadastre 2] et F [Cadastre 3], correspondant à une partie des espaces libres réservés prévus par les documents approuvés du lotissement ; le cahier des charges de la vente disposait notamment, page 3, qu'aucune des parcelles cadastrales incluses dans le lot unique d'adjudication n'est actuellement constructible aux termes d'une lettre de l'administration de l'urbanisme en date du 13 juin 1972, confirmant diverses lettres antérieures et des certificats délivrés courant mai 1972 et que la majeure partie de la superficie cadastrale vendue est constituée d'espaces verts du lotissement approuvé ; il a également été mentionné, dans un dire déposé le 6 septembre 1972, reproduit en page 11 du jugement, que l'on ne peut imaginer qu'un adjudicataire devienne propriétaire de la presque totalité des lots alors qu'un autre deviendrait propriétaire des espaces verts et des routes qui desservent l'ensemble.
La lettre du 13 juin 1972, évoquée dans le jugement d'adjudication, qui a été adressée à Me [X], avoué en charge de la vente sur saisie immobilière, par le directeur départemental de l'équipement, est ainsi rédigée :
Le lotissement comporte deux tranches de travaux ; si la première, approuvée par arrêté préfectoral du 19 juin 1959, peut être exploitée commercialement, il n'en est pas de même de la 2ème tranche, approuvée par arrêté préfectoral du 20 juillet 1966.
En effet, les travaux d'aménagement de cette tranche, notamment ceux décrits dans le programme annexé à l'arrêté préfectoral du 20 juillet 1966 susvisé, n'ont pas été exécutés ; l'état d'avancement de ces travaux est tel actuellement que le lotissement ne peut pas bénéficier des mesures dérogatoires prévues à l'article 8 du décret n° 58'1466 du 31 décembre 1958, permettant au préfet d'autoriser la vente des lots avant l'entier achèvement de la voirie.
Cependant, l'administration ne saurait s'opposer à la vente par autorité de justice [Adresse 7]. Mais une telle vente devrait porter nécessairement sur la totalité de la partie saisie ; il ne pourrait être admis qu'elle ait lieu par fraction sou par lots ; c'est donc, et il convient d'insister sur ce point, une vente en bloc des biens saisis qu'il faut envisager.
Dans cette éventualité, l'acquéreur devra se substituer au lotisseur dans les charges et obligations qui lui incombent au titre des différents arrêtés ayant approuvé ce lotissement.
Lorsqu'il a été déclaré adjudicataire des parcelles saisies au préjudice de la société artistique [Adresse 7], M. [W] a été subrogé dans les droits et obligations de cette société qu'il ne pouvait ignorer, ayant été informé des conditions de la vente dans le cadre des débats devant le tribunal et au vu des énonciations du cahier des charges et des dires déposées ; il a donc acquis en connaissance de cause les parcelles saisies, qui consistaient à la fois en des lots de lotissement numérotés et en des espaces verts formant l'assiette de la voirie ; la vente s'est faite en bloc, l'objet de l'opération étant de permettre l'achèvement des travaux de la 2ème tranche du lotissement ; il s'ensuit qu'en se portant adjudicataire desdites parcelles, M. [W] a nécessairement endossé le statut de lotisseur et se trouve subrogé dans les droits et obligations de la société artistique [Adresse 7] découlant des arrêtés préfectoraux des 8 octobre 1953, 19 juin 1959 et 20 juillet 1966 ; il a ainsi fait procéder aux travaux d'aménagement de la 2ème tranche du lotissement et vendu divers lots privatifs, sans pour autant restituer à l'association syndicale la propriété des espaces libres du lotissement.
Le cahier des charges [Adresse 1], déposé en vue de sa publication, le 16 novembre 1953, au rang des minutes de Me [R], notaire à [Localité 2], se réfère à la loi d'urbanisme n° 324 du 15 juin 1943, qui dispose en particulier, dans son article 84, que le préfet peut exiger la réserve d'emplacements destinés à des édifices et services publics, à des voies et places publiques et à des espaces libres, la réserve de terrains pour des voies et places publiques et pour des espaces libres donnant lieu à indemnité lorsque leur ensemble représente une surface supérieure à celle qui résulterait de l'application des règlements et, le cas échéant, du projet d'aménagement de la commune, sachant qu'en aucun cas, les intéressés ne peuvent être tenus de réserver gratuitement une surface supérieure au quart de la surface totale du groupe d'habitations ou du lotissement ; l'article 5 dudit cahier des charges prévoit la création d'une association syndicale des propriétaires (ou syndicat) dont les acquéreurs de terrains lotis font obligatoirement partie, qui assure la gestion des voies, dont la propriété temporaire lui est attribuée par le présent cahier des charges, et l'article 4 des statuts de l'association syndicale, se référant notamment à l'article 5 du cahier des charges, énonce que le but de l'association est de prendre en charge la gestion et l'administration de la voirie et de la viabilité en général, dont la propriété temporaire lui est concédée en conséquence de l'arrêté de M. le préfet du Var en date du 8 octobre 1953 modifié.
Les concepteurs du lotissement ont ainsi fait le choix de constituer des espaces libres, représentant le quart de la surface du lotissement, qui correspondent à des emplacements réservés, dont la propriété, comme celle des chemins et sentiers, est attribuée provisoirement à une association syndicale, dont il est précisé, à l'article 5 du cahier des charges, qu'elle cessera d'exister lorsque toutes les attributions auront été prises en charge par une ou plusieurs collectivités publiques ; plutôt que de transférer la propriété des espaces ou équipements collectifs aux co-lotis en indivision, il a donc été prévu que celle-ci soit attribuée à une association syndicale, en charge de leur gestion et de leur administration, jusqu'à un éventuel transfert à une collectivité publique, ainsi que l'a, par la suite, imposé le décret n° 77'860 du 26 juillet 1977, l'article R. 315'6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de ce décret, rendant ainsi obligatoire l'engagement du lotisseur que sera constituée une association syndicale des acquéreurs de lots à laquelle seront dévolus la propriété, la gestion et l'entretien des terrains et équipements communs jusqu'à leur transfert éventuel dans le domaine d'une personne morale de droit public.
Le cahier des charges du lotissement de 1953, document contractuel s'imposant tant au lotisseur qu'aux co-lotis, a donc nécessairement créé, à la charge de ce dernier, l'obligation de transférer à l'association syndicale la propriété des espaces libres du lotissement ; ces espaces libres doivent être considérés, en application de l'article 1615 du code civil, comme l'accessoire des lots vendus, affectés à leur usage perpétuel, relevant de l'obligation de délivrance pesant sur le lotisseur, sans que celui-ci puisse exiger, lors des ventes de lots, un complément de prix ; M. [W] qui a acquis en bloc, en toute connaissance de cause, des parcelles consistant en des lots commercialisables et en des espaces libres, accessoires aux lots et donc sans valeur marchande particulière, a contracté l'obligation, en tant que lotisseur subrogé à la société artistique [Adresse 7], de transférer les espaces libres du lotissement à l'association syndicale constituée à cet effet ; au surplus, il n'a pas contesté l'assemblée générale du 14 août 1984 mettant les statuts de l'association syndicale en conformité du décret du 26 juillet 1977, alors qu'il était représenté à l'assemblée, l'article 1er du cahier des charges ayant été complété comme suit : Il est entendu que par le terme espaces libres, il faut lire espaces verts inconstructibles (sauf pour les parcelles 75 et 78 BI et 1335). Le lotisseur s'engage de céder ces espaces libres au syndicat.
Les parcelles litigieuses qui, d'après les plans annexés à l'arrêté préfectoral autorisant le lotissement [Adresse 7], font partie des espaces libres de ce lotissement, ne pouvaient donc, en vertu de l'obligation incombant à M. Brackers de [O] en sa qualité de lotisseur d'en transférer la propriété à l'association syndicale des propriétaires du Cap Bénat, être cédées à un tiers, ces parcelles étant hors du commerce et de surcroît inconstructibles ; cette obligation de transfert préexistait au jugement d'adjudication du 14 novembre 1972, aux termes duquel l'intéressé est devenu propriétaire de ces espaces libres avec des lots de lotissement commercialisables, dont ils constituaient l'accessoire, en sorte qu'il ne saurait invoquer une atteinte à son droit de propriété ; il y a lieu, en conséquence, de prononcer la nullité de la vente du 11 juin 2007 consentie à la société les Parcs du Cap Bénat et d'ordonner à M. [W] de céder à titre gratuit la propriété des parcelles à l'[Adresse 1] selon des modalités qui seront précisées au dispositif du présent arrêt.
La société les Parcs du Cap Bénat, qui est réputée n'avoir jamais été propriétaire des parcelles litigieuses, destinées à être attribuées à l'association syndicale, ne peut qu'être déboutée de ses demandes reconventionnelles visant à obtenir la condamnation de celle-ci à installer une clôture destinée à empêcher l'usage de voies créées sur ces parcelles, à remettre celles-ci en état afin de supprimer les voies créées et à l'indemniser du préjudice prétendument subi.
Au regard de la solution apportée au règlement du litige, M. [W] et la société les Parcs du Cap Bénat doivent être condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel, y compris ceux afférents à la décision cassée, ainsi qu'à payer à l'[Adresse 1], d'une part, et à MM. [D] et [Q], d'autre part, des indemnités de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Donne acte à MM. [D] et [Q] de ce qu'ils se désistent de leur appel dirigé à l'encontre de M. [P] pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation des biens de M. [W],
Rejette la demande de nullité du jugement,
Infirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 juin 2010 par le tribunal de grande instance de Toulon et statuant à nouveau,
Met hors de cause M. [P] ès qualités,
Rejette les exceptions de procédure et les fins de non-recevoir,
Prononce la nullité de la vente conclue entre [T] [W] et la société les Parcs du Cap Bénat selon acte reçu le 11 juin 2007 par Me [J], notaire à [Localité 4], avec la participation de Me [G], notaire à [Localité 3], publié le 30 juillet 2007 au 2ème bureau des hypothèques de [Localité 5], volume 2007 P n° 7070, ladite vente portant sur les biens suivants :
A [Localité 1] (83 250), dans le lotissement dénommé « domaine [Adresse 7] », plusieurs parcelles de terrain à usage d'espaces verts, cadastrées :
' section BI n° 18 lieu-dit Cap Bénat pour 46 a 44 ca,
' section BK n° 15 lieu-dit Cap Bénat pour 2 ha 96 a 76 ca,
' section BK n° 37 lieu-dit Cap Bénat pour 5 ha 16 a 76 ca,
' section BL n° 58 lieu-dit Cap Bénat pour 88 a 82 ca,
' section BM n° 5 lieu-dit Cap Bénat pour 4 ha 51 a 65 ca,
' section BN n° 18 lieu-dit Cap Bénat pour 53 a 02 ca,
' section BI n° 23 lieu-dit Cap Bénat pour 18 a,
' section BI n° 22 lieu-dit Cap Bénat pour 02 a 21 ca,
' section BI n° 25 lieu-dit Cap Bénat pour 01 a 11 ca,
Ordonne à M. [W] de céder à titre gratuit à l'association syndicale autorisée des propriétaires [Adresse 7] (l'[Adresse 1]) la propriété des parcelles suivantes :
A [Localité 1] (83 250), dans le lotissement dénommé « domaine [Adresse 7] », plusieurs parcelles de terrain à usage d'espaces verts, cadastrées :
' section BI n° [Cadastre 4] lieu-dit [Localité 6] pour 46 a 44 ca,
' section BK n° [Cadastre 8] lieu-dit [Localité 6] pour 2 ha 96 a 76 ca,
' section BK n° [Cadastre 9] lieu-dit Cap Bénat pour 5 ha 16 a 76 ca,
' section BL n° 58 lieu-dit Cap Bénat pour 88 a 82 ca,
' section BM n° 5 lieu-dit Cap Bénat pour 4 ha 51 a 65 ca,
' section BN n° 18 lieu-dit Cap Bénat pour 53 a 02 ca,
' section BI n° 23 lieu-dit Cap Bénat pour 18 a,
' section BI n° 22 lieu-dit Cap Bénat pour 02 a 21 ca,
' section BI n° 25 lieu-dit Cap Bénat pour 01 a 11 ca,
Dit qu'à défaut de réalisation de la cession susvisée par acte notarié dans le délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt, celui-ci vaudra titre de cession et sera publié comme tel à la conservation des hypothèques, aux frais exclusifs de M. [W],
Déboute la société les Parcs du Cap Bénat de ses demandes reconventionnelles,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne M. [W] et la société les Parcs du Cap Bénat in solidum aux dépens de première instance et d'appel, y compris ceux afférents à la décision cassée, ainsi qu'à payer à l'[Adresse 1] la somme de 8000 € et à MM. [D] et [Q] celle de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code,
LE GREFFIERLE PRESIDENT