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19/05/2017 | FRANCE | N°14/18596

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre c, 19 mai 2017, 14/18596


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 19 MAI 2017



N°2017/ 397



Rôle N° 14/18596







[H] [O]





C/



SAS DHL HOLDING (FRANCE)

















Grosse délivrée le :



à :



Me François GOMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Jane SALMON, avocat au barreau de MARSEILLE



















Copie

certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section C - en date du 04 Septembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/3740.





APPELANTE



Madame [H] [O], demeurant [Adresse 1]



...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 19 MAI 2017

N°2017/ 397

Rôle N° 14/18596

[H] [O]

C/

SAS DHL HOLDING (FRANCE)

Grosse délivrée le :

à :

Me François GOMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Jane SALMON, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section C - en date du 04 Septembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/3740.

APPELANTE

Madame [H] [O], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me François GOMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Christel ANDRAUD, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉE

SAS DHL HOLDING (FRANCE), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jane SALMON, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Séverine ARTIERES, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 09 Mars 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Virginie PARENT, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Catherine LE LAY, Président de Chambre

Madame Hélène FILLIOL, Conseiller

Madame Virginie PARENT, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Mai 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Mai 2017

Signé par Madame Catherine LE LAY, Président de Chambre et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée du 14 mai 2001, [H] [O] a été engagée par la société DUCROS TRANSPORT en qualité de gestionnaire régional du personnel au sein de l'établissement de l'Estaque, statut employé, coefficient 148.50.

En 2005, la société DUCROS TRANSPORTS est rachetée par le groupe Deutsch Post , qui fusionnera avec le groupe DHL, pour devenir DP DHL. En 2009, Mme [O] a été affectée dans le groupe DHL auprès de la société DHL Holding.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la Convention Collective Nationale des transports routiers.

[H] [O] a été licenciée pour motif économique le 28 juin 2011 par la société DHL Holding par lettre recommandée avec accusé réception dans les termes suivants:

' Nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif économique.

Cette mesure se place dans le cadre du projet de réorganisation de la société DHL Holding, dont les causes économiques, conformément aux dispositions légales, ont été exposées au comité central d'UES les 17 décembre 2010, 12 janvier et 22 mars 2011, et au Comité d'Etablissement Siège Sud les 25 janvier et le 2 mai 2011, et qui sont les suivantes:

Le groupe DP DHL est organisé en différentes divisions, qui à ce jour, sont les suivantes:

- la division Express (pôle transport), propose des services de transport express pour les entreprises;

- la division Forwadinq (experte en fret aérien, maritime et terrestre, regroupe les activités des marques DHL Global Forwarding et DHL Freight) ;

- la division GBS (regroupe les activités supports pour l'ensemble des entités du groupe) ;

- la division Supply chain (offre des solutions logistiques d'entreposage et de distribution et correspond aux activités de DHL Supply Chain) ;

- la division Courrier (regroupe les activités courriers).

Depuis une dizaine d'années, le groupe DP DHL connaît des modifications significatives en raison d'un contexte concurrentiel contraignant.

Le groupe a notamment du faire face à des pertes importantes concernant l'activité messagerie.

Ainsi, l'activité messagerie hébergée par l'entité DHL Express, qui était l'une des principales clientes de DHL Holding, a accumulé des pertes dont le montant cumulé depuis 2006 s'élève à près de 500 millions d'euros, en dépit d'efforts constants entrepris pour redresser la situation, efforts qui se sont traduits par la mise en 'uvre de plusieurs projets de restructuration.

' Ainsi, dès janvier 2005, étaient mis en 'uvre les projets Hope, NOPR-C, Coverage ... visant à la construction d'un réseau unique, à la rationalisation des implantations des agences, ainsi qu'au redécoupage des zones de livraison et d'enlèvement.

' En 2006, la mise en oeuvre du volet OPI, dans le cadre du projet Plan de Relance, avait pour objectif de créer les conditions nécessaires à une amélioration continue et durable de la performance opérationnelle, à atteindre un taux de qualité de service optimal, tout en réduisant les coûts opérationnels pour chacune des agences. Les actions menées dans ce cadre, conjuguées aux mesures drastiques de gestion du réseau au quotidien, ont notamment généré un effet cumulatif d'économies qui s'élevait à de plus de 20 millions d'euros en 2008.

En dépit de ces réorganisations structurelles, les coûts indirects restaient trop élevés pour l'activité messagerie, par rapport au chiffre d'affaires généré.

Pour autant, depuis 2006, DHL Express, et le groupe plus généralement, s'étaient également inscrits dans une démarche d'optimisation des coûts indirects ayant pour objectif de réduire les dépenses des fonctions indirectes.

Il est ainsi apparu nécessaire d'adapter géographiquement et matériellement les infrastructures existantes. Une réorganisation des sièges sociaux et des plates-formes fonctionnelles a ainsi été

entreprise.

Le projet Dashboard également, a réorganisé la fonction comptable autour de deux pôles de comptabilité, l'un dédié à la comptabilité clients, l'autre à la comptabilité générale et à la

comptabilité fournisseurs.

Le projet Transformation, mis en 'uvre en janvier 2008, a entériné la séparation des activités opérationnelles. Les activités opérationnelles et fonctionnelles ont ainsi été scindées dans des entités juridiques distinctes et indépendantes, pour permettre une concentration des équipes sur leur métier, et contribuer à une amélioration de la qualité de service et des résultats financiers propres à chaque activité.

Bien que cette concentration des équipes opérationnelles, commerciales et du management sur le métier de la messagerie, combinée à une amélioration de la qualité de service, aient permis une évolution positive au niveau du chiffre d'affaires, celui-ci restait néanmoins encore fortement déficitaire, avec -33,4 millions d'euros en 2008, avant même que ne soient comptabilisés ses frais de structure.

L'année 2008 s'est donc clôturée avec un résultat courant négatif de -97,7 millions d'euros.

En 2009, la conjoncture de crise mondiale a généré une baisse du revenu, et bien que la marge brute ne se soit pas détériorée, DHL Express clôturait encore son résultat opérationnel à hauteur de près de -80 millions d'euros à fin 2009.

Le groupe DP DHL est ainsi arrivé au constat que la situation gravement déficitaire de la messagerie depuis plusieurs années ne paraissait pas pouvoir être solutionnée en interne.

Bien que les efforts entrepris aient permis une amélioration des résultats, ceux-ci n'étaient pas suffisants pour permettre au groupe d'assurer son redressement et la sauvegarde de sa compétitivité au sein du secteur d'activité dans lequel il évoluait.

Le groupe n'avait donc d'autre choix que de céder l'activité messagerie, ainsi que l'activité Champagne qui lui est directement rattachée, en France. Celles-ci ont été cédées au groupe Caravelle le 1er juillet 2010.

Suite à la cession des activités messagerie et Champagne, il est apparu que les fonctions support GBS (Global Business Services) hébergées par DHL Holding étaient inadaptées et surdimensionnées, l'activité messagerie représentant, pour GBS, 35% de son activité globale.

Une optimisation des fonctions support s'avère ainsi indispensable, particulièrement au vu du contexte très concurrentiel dans lequel le groupe évolue, contexte qui se caractérise par une concentration accrue des principaux acteurs du marché, qui se livrent une compétition sans relâche.

Il en résulte une pression constante sur les prix et les coûts, qui a contraint les principaux concurrents des entités du groupe en France, à mettre en 'uvre en 2010 des plans drastiques visant à réduire leurs coûts, et ce, en dépit de la reprise qui était constatée au niveau du secteur d'activité.

Au vu des mesures rigoureuses prises par leurs concurrents, les entités du groupe OP DHL se voient contraintes d'adapter leurs coûts et leurs structures afin de rester compétitives, particulièrement dans le secteur du transport et de la logistique, qui se caractérise par des marges faibles et des coûts de structure élevés, et compte tenu de leur situation économique et financière encore fragile.

Face à ce contexte concurrentiel, une démarche de réduction des coûts indirects avait été entreprise au sein du groupe dès 2008, car il était apparu que DHL avait un niveau de coûts indirects bien supérieur à celui de ses concurrents mondiaux, suite à une étude menée sur sa compétitivité. Un programme d'optimisation des coûts indirects avait ainsi été initié dans l'ensemble des entités du groupe.

Bien que ce programme ait permis de réduire notablement le coût des fonctions indirectes à fin 2009, il est apparu nécessaire de le reconduire, au vu du contexte concurrentiel dans lequel le groupe évolue, et de la situation encore fragile des entités du groupe en France, et ce bien qu'une reprise de l'activité ait été constatée, celle-ci restant encore fragile et méritant d'être confirmée dans le temps.

Cette nécessité est d'autant plus impérative du fait de la cession de l'activité messagerie, qui absorbait 32 % des coûts des fonctions support de GBS.

Depuis la cession, certaines fonctions support sont encore temporairement utilisées par Ducros Express, repreneur de l'activité messagerie, qui en assume les coûts. Néanmoins, une fois que ces prestations pour Ducros auront pris fin, les coûts des fonctions auparavant financées par l'activité messagerie pèseront directement sur les comptes du groupe, et seront à terme répercutés sur les autres entités clientes, qui ne pourront assumer à long terme ces coûts supplémentaires.

En effet, si les fonctions support GBS ne sont pas rapidement redimensionnées suite au départ de l'activité messagerie, les coûts auparavant pris en charge par celle-ci représenteraient pour chacune des autres entités clientes, une augmentation très conséquente de leurs coûts indirects, qui serait susceptible de remettre en cause la sauvegarde de leur compétitivité.

Il convient donc de redimensionner rapidement les fonctions support de GBS en fonction des activités restantes, afin de ne pas compromettre la reprise encore fragile, constatée au niveau de la majorité des entités clientes.

En conséquence, le projet Holding vise à adapter et réorganiser les fonctions support GBS, hébergées par l'entité DHL Holding, suite à la cession de l'activité messagerie.

Ce projet nécessité par la sauvegarde de compétitivité du groupe, se traduit notamment par la suppression de votre poste de Gestionnaire Comptable Paie au sein de la votre service.

Dans le cadre des recherches actives de reclassement réalisées au sein du groupe, nous avons pu identifier plusieurs postes de reclassement situés sur le territoire national.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 31/05/11 des solutions de reclassement interne sur les postes de, Conseiller Clientèle Grands Comptes, Assistante OPS vous ont ainsi été proposées, avec toutes indications utiles sur les caractéristiques et les conditions contractuelles de ces postes ainsi que sur les modalités d'accompagnement de ce reclassement.

Votre absence de réponse dans le délai qui vous était imparti, nous a contraint à considérer que vous refusiez ces offres de reclassement.

Par ailleurs, conformément à nos obligations légales, par lettre en date du 09/05/11, nous vous avons interrogée pour savoir si vous acceptiez de recevoir des offres de reclassement dans les pays etrangers où sont localisées les sociétés du groupe et, dans l'affirmative, sous quelles restrictions éventuelles quant aux caractéristiques des emplois offerts, notamment en matière de loca 1 isation.

Vous ne nous avez toutefois pas répondu dans le délai de six jours ouvrables qui vous était ouvert pour le faire. Vous êtes donc réputée avoir refusé de recevoir des offres de reclassement en dehors du territoire national.

Nous avons le regret de vous informer que, malgré nos efforts, nous ne sommes pas en mesure de vous proposer un autre poste de reclassement.

Compte tenu du motif économique rappelé ci-dessus et de l'impossibilité de procéder à votre reclassement, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour motif économique.....'

Le 1er juillet 2011, Mme [O] et son employeur ont signé un accord sur les modalités et les conditions de mise en oeuvre du congé de reclassement de Mme [O].

La société DHL Holding employait habituellement au moins onze salariés au moment du licenciement.

Contestant son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits, [H] [O] a saisi le 29 juillet 2013 le conseil des prud'hommes de Marseille qui par jugement du 4 septembre 2014 a:

- débouté Mme [H] [O] de toutes ses demandes fins et conclusions

- débouté la SAS DHL HOLDING de sa demande reconventionnelle

- condamné la partie demanderesse aux entiers dépens.

Le 15 septembre 2014 , [H] [O] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats et auxquelles la cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, [H] [O] demande de :

- infirmer le jugement

- dire le licenciement de Mme [O] sans cause réelle et sérieuse

- condamner l'employeur à payer à Mme [O] la somme de 30 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- le condamner à payer la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats et auxquelles la cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, la société DHL HOLDING demande de :

- constater que le motif économique invoqué à l'appui de la procédure de licenciement collectif pour motif économique est réel et sérieux

- constater que les mesures de réorganisation et de restructuration étaient indispensables à la sauvegarde de la compétitivité de la Société DHL HOLDING ainsi que du Groupe auquel elle appartient;

En conséquence:

- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de 4 septembre 2014

- débouter Madame [O] de sa demande de condamnation de la Société DHL HOLDING au paiement de la somme de 30.000€ à titre de dommage et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- débouter Madame [O] de demande relative à la condamnation de la Société DHL HOLDING au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du CPC

- condamner Madame [O] à payer à la Société DHL HOLDING la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du CPC, outre les entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la date de la rupture du contrat de travail

Il est constant que la rupture du contrat de travail se situe à la date à laquelle l'employeur a manifesté sa volonté d'y mettre fin.

[H] [O] soutient que le licenciement notifié le 28 juin 2011 ne peut valoir rupture régulière du contrat de travail dans la mesure où par courriel du 31 mars 2011, soit pratiquement trois mois avant la réception de la lettre de licenciement le DRH a officialisé le départ de Mme [O]. Elle demande de considérer ce courriel du 31 mars 2011 comme une lettre de rupture, de constater que ce courriel ne contient aucune motivation de licenciement économique et conclut à l'absence de cause réelle et sérieuse .

Le courriel en question est le suivant:

Bonjour [H],

Je vous confirme par ce mail les accords obtenus suite à votre demande d'être dans nos effectifs au moment du démarrage-de votre fongecif soit le 12/09.

- prise de vos CP/RTT à compter du 9 mai jusqu'à la date de notification. Les CP reliquats devant être pris avant fin mai pour ne pas les perdre.

- engagement du process de licenciement économique (projet Holding) mi/fin mai 2011 et notification du licenciement fin juin pour un début de préavis le l/07/2011et une fin de préavis le 30/09/1011

- Prise en charge de la formation à 100% par le fongecif(selon le document que vous m'avez transmis) . Une fois le préavis terminé, vous ne serez plus remunéréé par DHL (nous ne prenons pas en marge vos salaires pendant la durée de votre fongecif comme vous ne ferez plus partie de nos effectifs) et un SDTC vous sera préparé à l'issue de votre préavis.

- si vous preniez le congé de reclassement (CR), celui-ci s'arrêterait automatiquement à la date de démarrage de votre Fongecif soit le 12/9 comme me l'a confirmé le cabinet Altedia.

Je vous remercie de votre confirmation sur ce planning et je vous laisserais faire le nécessaire auprès d'[S] [S] (feuille de CP, ... ) pour préparer votre départ.

Je reste à votre disposition.

Il est à bon droit soutenu par la société DHL Holding que ce mail , qui s'inscrit dans la lignée du projet de réorganisation de la société présenté aux institutions représentatives du personnel, n'a pour objectif que de présenter à Mme [O], dans un but d'information, les conséquences de cette réorganisation, qu'il est ainsi envisagé la possibilité offerte par ledit plan et en vertu de l'accord par le Fongecif , de bénéficier d'une formation professionnalisante , d'un congé de reclassement, que ce mail est rédigé en des termes imprécis , prévoyant des dates approximatives , de sorte qu'il a été à juste titre considéré par les premiers juges qu'il ne s'analysait pas comme la volonté de l'employeur de mettre fin au contrat de travail de Mme [O]. Ce moyen doit donc effectivement être rejeté, la date de la rupture du contrat de travail étant la lettre notifiant le licenciement le 28 juin 2011.

Sur le licenciement

[H] [O] demande à la cour de dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et invoque deux moyens :

- absence de difficultés économiques de l'employeur, dans la mesure où la lettre de licenciement retient comme difficultés économiques celles affectant la totalité du groupe et non seulement la société DHL Holding; elle considère que dès lors que seules les difficultés touchant la société DHL Holding et son secteur d'activité auraient pu motiver la restructuration et la rupture du contrat de travail ; qu'à défaut pour l'employeur d'en justifier, le licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse

- absence de preuve par l'employeur de l'impossibilité de reclassement de la salariée

sur le premier moyen

Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

La réorganisation de l'entreprise constitue également un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité ou celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient.

La sauvegarde de la compétitivité implique que l'entreprise ou le secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, soit déjà atteinte ou à tout le moins menacée de manière prévisible.

Les pièces produites par la société DHL Holding sont les suivantes

- le plan de sauvegarde de l'emploi signé entre la société DHL Express et les organisations syndicales le 8 juin 2007

- l' accord d'entreprise portant avenant au plan de sauvegarde du 18 juin 2007

- le bilan actif- passif de la société DHL Holding au 31 décembre 2010

- les procès-verbaux de réunion extraordinaire du comité central d'entreprise d'UES du 17 décembre2010, du 12 janvier 2011, du 22 mars 2011

- la note d'information- consultation du comité central d'entreprise d'UES sur le projet de licenciements pour motif économique

- le rapport de l'expert comptable sur la DHL Holding - plan de restructuration de GBS du 12 janvier 2011

- le projet de réorganisation site de [Localité 1] - rapport d'avril 2011.

Au vu de celles-ci, il est justifié par l'intimée que :

- le groupe DHL initialement divisé en 2 secteurs d'activité ( transport et logistique d'une part et distribution du courrier, d'autre part) a été réorganisé fin 2002 , que de nouvelles entités juridiques ont été créées en 2007 et 2008 , qu'une holding a été créée pour regrouper les différents activités du groupe en pôles de métiers cohérents,

- la société DHL Holding regroupe ainsi les entités suivantes:

- DHL expresse ( activités de transport express et messagerie aérien)

- DHL Freigt ( activités d'affrètement )

- DHL Supply Chain ( solutions logistiques)

- DHL Global Forwardiing ( affrètement aérien et maritime)

- DHL Global Mail ( solutions courrier à l'international)

- la société DHL Holding a en charge par ailleurs la division GBS ( Global Business Services) regroupant l'ensemble des fonctions support des entités du groupe, à savoir les départements suivants: informatique et finance, immobilier, ressources humaines, achats, gestion parc et flotte, fiscalité, assurances.

- la société DHL Holding est à la fois la société holding des filiales françaises du Groupe et l'employeur des salariés occupant des fonctions support

- [H] [O] occupe les fonctions de gestionnaire comptable au service de paie au sein de la société DHL Holding. Elle est affectée à la division GBS, elle est ainsi en charge de réaliser une partie des activités de paie pour l'ensemble des filiales de la société HOLDING, établit des chèques pour l'ensemble des entités , et encaisse des chèques reçus des différents organismes ou effectue certains travaux administratifs simples.

- le déclin de l'activité messagerie ( DHL Express ) a entraîné des pertes considérables telles que pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe, l'activité messagerie a été cédée à un groupe spécialisé dans le recouvrement des entreprises le groupe Caravelle le 1er juillet 2010.

- avec la cession de l'activité messagerie au 1er juillet 2010, le volume d'activité du service paie a considérablement réduit, en raison du nombre moindre de bulletins de salaire à traiter; cette activité messagerie générait ainsi près de 45% de l'activité du service, soit environ 7000 bulletins de salaire , contre 3500 après la cession.

- le projet de réorganisation de DHL Holding soumis à information et consultation du Comité central d'entreprise mentionne les éléments suivants: il est nécessaire pour les entreprises du groupe aujourd'hui d'adapter en permanence leurs coûts et leurs structures afin de rester compétitives.. Dans le cadre du plan de redressement et de sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité du groupe, l'optimisation des fonctions supports s'avère indispensable.

- le surdimensionnement des fonctions supports mutualisées au sein de la division GBS, a rendu ainsi nécessaires les mesures de restructuration au sein de la société DHL Holding en vue de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise

- le poste de Mme [O], seul poste de 'gestionnaire comptable paie' à la direction finances et RH a été supprimé.

Il est à bon droit objecté par la société DHL Holding qu'il est fait état des difficultés rencontrées par le groupe DHL mais également la société DHL Holding notamment au regard de l'inadaptation et du surdimensionnement des fonctions support GBS, de la nécessité de mettre en oeuvre des mesures de restructuration afin de sauvegarder leur compétitivité et des conséquences de ces restructurations sur son emploi, de sorte qu'il convient de considérer la lettre parfaitement motivée. Il a été à juste titre retenu par les premiers juges que la société DHL Holding justifiait le motif économique du licenciement de Mme [O].

Sur le second moyen

Il s'agit là d'un moyen nouveau, le reclassement n'ayant pas été discuté par Mme [O] en première instance.

Un licenciement n'a de cause économique réelle et sérieuse que si l'employeur s'est trouvé dans l'impossibilité de reclasser le salarié. Il incombe à l'employeur d'établir qu'il a satisfait à son obligation de reclassement en justifiant qu'il a recherché toutes les possibilités de reclassement existant non seulement dans l'entreprise à laquelle appartient le salarié, mais également , lorsque celle-ci relève d'un groupe, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent la permutation de tout ou partie du personnel. Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés ; La recherche des postes de reclassement s'étend aux emplois relevant de la même catégorie que celui que le salarié occupe ou sur un emploi équivalent, et, à défaut, sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi de catégorie inférieure .

Il est relevé par l'employeur que Mme [O] a le 7 mars 2011 souhaité bénéficier d'un départ anticipé ayant pour projet une formation professionnelle, qu'elle a d'ailleurs mis en oeuvre le 12 septembre 2011 , mettant fin ainsi à son congé de reclassement convenu entre les parties le 1er juillet 2011.

La société DHL Holding a le 9 mai 2011 indiqué à Mme [O] que dans le cadre du projet de réorganisation CHROME elle envisageait son licenciement et qu'elle allait rechercher les possibilités de reclassement existantes et lui soumettre une ou plusieurs proposition de reclassement au sein du groupe. Elle a également dans ce courrier demandé à la salariée si elle acceptait de recevoir des offres de reclassement hors du territoire national. Il est constant que Mme [O] n'a pas répondu à ce courrier et n'a donc pas consenti à un reclassement à l'étranger.

La société DHL Holding justifie avoir identifié l'ensemble des postes de reclassement interne au groupe dans le rapport d'information et de consultation du comité central d'entreprise d'UES sur le projet de licenciements pour motif économique ( livre I) , présenté au Comité central d'entreprise d'UES les 17 décembre 2010 , 12 janvier 2011 et 22 mars 2011.

Mme [O] n'apporte aucun élément de nature à considérer que ces postes ne correspondent pas à l'ensemble des postes disponibles au sein du groupe à la date de l'engagement de la procédure de licenciement à son encontre; dès lors sans qu'il soit nécessaire d'examiner les registres des entrées et sorties du personnel, dont la salariée entend relever l'absence de production aux débats, il apparaît que l'employeur a procédé à des recherches sérieuses et complètes de reclassement.

La société DHL Holdind a proposé à Mme [O] , le 31 mai 2011, deux postes de reclassement: conseiller clientèle grands comptes à [Localité 2] et assistante OPS à [Localité 3] auprès de DHL Express France , postes figurant dans la liste des postes de reclassement interne au groupe ainsi identifiés . Il n'est pas contesté que les postes ainsi proposés, et dont l'employeur communique les fiches de postes correspondent à des emplois relevant de la même catégorie que celui que la salariée occupait ou à des emplois équivalents. Il est acquis que Mme [O] n'a donné aucune suite à ces propositions.

Au vu de ces éléments, il est constaté que l'employeur justifie de l'impossibilité de reclassement de la salariée; ce moyen nouveau doit être rejeté.

La cour confirme en conséquence le jugement en ce qu'il a dit fondé le licenciement de [H] [O] et débouté cette dernière de ses demandes.

Sur les autres demandes

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Mme [O] qui succombe supporte les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement du conseil des prud'hommes en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne [H] [O] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre c
Numéro d'arrêt : 14/18596
Date de la décision : 19/05/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°14/18596 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-19;14.18596 ?
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