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24/03/2017 | FRANCE | N°16/05947

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre b, 24 mars 2017, 16/05947


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 24 MARS 2017



N° 2017/241













Rôle N° 16/05947





SNCF MOBILITES





C/



[E] [R]































Grosse délivrée le :

29 mars 2017

à :Me Julien SCAPEL

Me Julie ANDREU







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le 

:

29 mars 2017





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section C - en date du 23 Février 2016, enregistré au répertoire général sous le n° 13/2384.







APPELANTE



SNCF MOBILITES pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié a...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 24 MARS 2017

N° 2017/241

Rôle N° 16/05947

SNCF MOBILITES

C/

[E] [R]

Grosse délivrée le :

29 mars 2017

à :Me Julien SCAPEL

Me Julie ANDREU

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

29 mars 2017

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section C - en date du 23 Février 2016, enregistré au répertoire général sous le n° 13/2384.

APPELANTE

SNCF MOBILITES pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège,, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Julien SCAPEL, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Marianne BEGUERIE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [E] [R], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Julie ANDREU, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 Janvier 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Christophe RUIN, Président et Monsieur Yann CATTIN, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Christophe RUIN, Président

Mme Marina ALBERTI, Conseiller

Monsieur Yann CATTIN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2017.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2017.

Signé par Monsieur Christophe RUIN, Président et Mme Agnès BAYLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [E] [R] (né le [Date naissance 1] 1946) indique avoir été exposé quotidiennement à l'inhalation de poussières d'amiante sur des sites de la SNCF situés dans le secteur de Marseille où il a travaillé pendant plusieurs années.

Le 4 juin 2013, il a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins notamment de voir condamner la SNCF à lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice d'anxiété et du préjudice résultant d'un bouleversement dans ses conditions d'existence.

Par jugement rendu en date du 23 février 2016, le conseil de prud'hommes de Marseille a :

- déclaré recevable l'action de Monsieur [E] [R] ;

- constaté que Monsieur [E] [R] a été exposé à l'amiante ;

- condamné la SNCF Mobilités à payer à Monsieur [E] [R] une somme de 8.000 euros au titre du préjudice subi ;

- condamné la SNCF Mobilités à payer à Monsieur [E] [R] une somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté Monsieur [E] [R] du surplus de ses demandes ;

- débouté la SNCF Mobilités de ses demandes reconventionnelles ;

- condamné la SNCF Mobilités aux entiers dépens.

Le 23 mars 2016, la SNCF Mobilités a interjeté appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures reprises oralement lors de l'audience, la SNCF Mobilités conclut que le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions et que l'intimé sera débouté de toutes ses demandes.

Dans ses dernières écritures reprises oralement lors de l'audience, Monsieur [E] [R] conclut que la SNCF Mobilités sera condamnée à lui verser une somme de 15.000 euros en réparation de son préjudice d'anxiété, ou subsidiairement à titre d'indemnisation de la violation de l'obligation de sécurité de résultat, ainsi qu'une somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées qui ont été oralement reprises lors de l'audience.

MOTIFS

La SNCF Mobilités relève que :

- les demandes indemnitaires formées par l'intimé s'analysent en une seule demande d'indemnisation au titre du préjudice d'anxiété ;

- le salarié n'est pas atteint d'une maladie professionnelle ;

- la SNCF ne fait pas partie des entreprises visées par l'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 puisqu'aucun arrêté ne la fait figurer sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité.

L'intimé fait valoir que :

- il bénéficie d'un suivi post-professionnel et d'une surveillance médicale gratuite, avec fiche individuelle d'exposition aux risques liés à l'amiante, qui constituent une reconnaissance non équivoque par la SNCF de son exposition à l'inhalation de poussières d'amiante ;

- le régime de la Caata n'est pas applicable aux salariés de la SNCF qui bénéficient toutefois d'un régime spécifique assimilable de cessation anticipée d'activité (article 4 du décret n° 2008-639 du 30 juin 2008) lorsqu'ils sont reconnus atteints d'une maladie professionnelle causée par l'amiante dans les conditions fixées par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;

- le fait d'exposer un salarié à un danger sans appliquer les mesures de protection constitue une faute contractuelle engageant la responsabilité de l'employeur ;

- même s'il n'a pas développé de pathologie en lien direct avec l'amiante, il se trouve dans un état d'anxiété permanent du fait de son exposition dans le cadre professionnel (attestations produites en ce sens).

En l'espèce, l'intimé n'a pas déclaré une maladie professionnelle provoquée par l'amiante et ne justifie pas souffrir d'une pathologie imputable à une exposition à l'amiante dans le cadre professionnel. Il invoque, tant au titre du préjudice d'anxiété que de l'indemnisation de la violation de l'obligation de sécurité de résultat, un sentiment permanent d'inquiétude ou d'angoisse depuis qu'il a appris son exposition (certaine, probable ou non démontrée selon les écritures des parties) à l'amiante sur un ou plusieurs sites de la SNCF.

Le préjudice moral résultant pour un salarié du risque de développer une maladie induite par son exposition à l'amiante est constitué par le seul préjudice d'anxiété dont l'indemnisation répare l'ensemble des troubles psychologiques résultant de la connaissance d'un tel risque. En outre, les préjudices patrimoniaux résultant du manquement à l'obligation de sécurité de résultat sont pris en compte, pour les salariés exposés à l'amiante, par des mécanismes d'indemnisation spécifiques.

Au regard des observations et pièces produites par l'intimé, il apparaît que c'est bien du seul préjudice d'anxiété lié à une exposition à l'amiante dont le salarié réclame réparation à la SNCF.

Il n'est pas contesté que la SNCF n'est pas une entreprise ouvrant droit à l'Acaata. L'intimé ne prétend pas avoir travaillé du fait de son employeur sur un site figurant sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité.

Or, nonobstant les dispositions spécifiques à la SNCF, notamment en matière de signalement de l'exposition au risque amiante et à la cessation anticipée d'activité pour les agents atteints d'une maladie professionnelle causée par l'amiante alors qu'en l'état actuel de la législation le dispositif Caata n'est pas applicable aux personnels relevant d'un régime spécial de sécurité sociale, le salarié ne peut obtenir réparation d'un préjudice spécifique d'anxiété par une demande dirigée contre une société qui n'entre pas dans les prévisions de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la SNCF Mobilités à payer des dommages et intérêts au salarié en réparation d'un préjudice d'anxiété lié à une exposition à l'amiante.

Le jugement sera également infirmé en ce qu'il a condamné la SNCF Mobilités au titre des frais irrépétibles. Monsieur [E] [R], qui succombe totalement en son action, sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel. En l'espèce, il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi, en matière prud'homale et par arrêt contradictoire,

- Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la SNCF Mobilités à payer à Monsieur [E] [R] une somme de 8.000 euros au titre du préjudice subi et, statuant à nouveau, déboute Monsieur [E] [R] de ses demandes de dommages et intérêts ;

- Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la SNCF Mobilités au titre des frais irrépétibles ;

- Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Confirme le jugement déféré en ses dispositions non contraires ;

- Condamne Monsieur [E] [R] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/05947
Date de la décision : 24/03/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-24;16.05947 ?
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