COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 24 FEVRIER 2017
N°2017/118
Rôle N° 16/20625
[D] [F]
C/
SAS VITEMBAL TARASCON
Grosse délivrée le :
à :
Me Anne France BREUILLOT, avocat au barreau de CARPENTRAS
Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau D'AIX-EN-
PROVENCE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Conseil de prud'hommes - Formation de départage d'AIX-EN-PROVENCE - section - en date du 03 Novembre 2016, enregistré au répertoire général sous le n° 16/44.
APPELANT
Monsieur [D] [F], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Anne France BREUILLOT, avocat au barreau de CARPENTRAS
INTIMEE
SAS VITEMBAL TARASCON, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Yann DECROIX, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président
Mme Nathalie FRENOY, Conseiller
Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Février 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Février 2017
Signé par Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président et Mme Nadège LAVIGNASSE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur [D] [F] a été engagé par la société VITEMBAL TARASCON suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 2 octobre 2000, mais avec une reprise d'ancienneté au 9 mars 1998, en qualité de Conducteur affecté au service production de l'usine VITEMBAL TARASCON.
Au dernier état de la relation contractuelle, il a occupé les fonctions de Chef d'Equipe.
Il a été désigné délégué syndical de la société VITEMBAL TARASCON, délégué syndical de l'UES constituée entre la SI VITEMBAL et la société VITEMBAL TARASCON, représentant syndical au comité d'établissement, représentant syndical au comité central d'entreprise de l'UES, membre du CHSCT et a été élu conseiller prud'homme.
Par jugement du 8 avril 2011, le tribunal de commerce de Tarascon a placé la société VITEMBAL TARASCON en redressement judiciaire et par ordonnance du 27 septembre 2011, le juge commissaire chargé de la procédure collective a, en visant un projet de restructuration impliquant notamment des modifications de contrats de travail et un projet de licenciement économique avec PSE, autorisé le licenciement de 32 salariés dont Monsieur [F].
Le 24 août 2011, l'ensemble des organisations syndicales représentatives a signé un accord portant sur la modification des cycles de travail.
Les 18 octobre 2011, 9 et 14 décembre 2011, 11 janvier, 17 et 23 février 2012, la société VITEMBAL TARASCON a proposé à Monsieur [F] plusieurs offres de reclassement en cycle 3x8. Ce dernier ayant refusé ces propositions, le juge commissaire a autorisé son licenciement par ordonnance du 20 décembre 2011.
Par décision du 20 mars 2012, l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de Monsieur [F] au motif que la société n'avait pas respecté son obligation de recherche de reclassement et qu'elle avait fait preuve de discrimination dans cette démarche.
Les 22 et 28 mars, 10 avril, 31 mai et 28 septembre 2012, la société VITEMBAL TARASCON a présenté de nouvelles offres de reclassement qui ont toutes été refusées par Monsieur [F].
Par décision du 14 septembre 2012, le Ministère du Travail a confirmé la décision de l'inspecteur du travail du 20 mars 2012 au motif que la société n'avait pas respecté la procédure relative à la convocation à l'entretien préalable au licenciement du salarié.
Le 12 décembre 2012, la société a de nouveau saisi l'inspecteur du travail qui par décision du 24 janvier 2013 a autorisé le licenciement de Monsieur [F] en considérant l'absence de lien entre la demande de l'employeur et les mandats du salarié.
Par lettre du 28 janvier 2013, le licenciement pour motif économique a été notifié à Monsieur [F].
Par décision du 26 juillet 2013, le Ministère du Travail a confirmé la décision de l'inspecteur du travail du 24 janvier 2013 mais par jugement du 17 novembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions des 24 janvier 2013 et 26 juillet 2013. La société VITEMBAL TARASCON a interjeté appel le 14 janvier 2016.
Par lettre du 3 décembre 2015, Monsieur [F] a demandé sa réintégration et le paiement de ses salaires depuis son licenciement.
En réponse, par lettre du 10 décembre 2015, la société VITEMBAL TARASCON a informé Monsieur [F] de la suppression de son poste de Chef d'Equipe, de son impossibilité de le réintégrer dans son emploi d'origine, lui proposait de rechercher un poste équivalent et dans l'attente, de lui payer son salaire à compter du 7 décembre 2015.
Par lettre du 15 décembre 2015, la société a proposé à Monsieur [F] sa réintégration à un poste de Chef d'Equipe en 3x8, proposition que Monsieur [F] a refusé par lettre du 11 janvier 2016 au motif que l'employeur voulait lui imposer une modification de la durée de son temps de travail en le faisant passer de 156,55 à 162,34 heures mensuelles.
Par lettre du 15 janvier 2016, la société a informé Monsieur [F] de ce qu'elle considérait avoir respecté son obligation de réintégration, qu'elle prenait acte de son refus et qu'elle en tirait toutes les conséquences de droit. Elle cessait de payer les salaires à compter du 14 janvier 2016 le considérant comme 'absent' et le convoquait à un entretien préalable fixé le 12 février 2016 puis réunissait le 15 février 2016 le comité d'entreprise extraordinaire lequel émettait un avis favorable au projet de licenciement de Monsieur [F].
Par acte d'huissier du 2 mars 2016, Monsieur [F] a fait assigner la société VITEMBAL TARASCON devant le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence statuant en sa formation des référés pour la voir condamner, sous astreinte, à mettre fin au trouble manifestement illicite subi par lui en reprenant le paiement des salaires et des frais de panier à compter du 14 janvier 2016 sur une base salariale de 2 917,73 € par mois outre 101 € mensuels de frais de panier et en sollicitant une provision à ce titre.
Par lettre du 20 avril 2016, Monsieur [F] a informé son employeur de son acceptation de l'emploi proposé tout en lui notifiant un arrêt de travail à compter du 19 avril 2016.
En l'état de l'acceptation par Monsieur [F] du poste proposé, l'inspecteur du travail a refusé l'autorisation de licenciement sollicitée par la société, cette dernière formant néanmoins un recours gracieux puis hiérarchique contre cette décision.
Par ordonnance du 3 novembre 2016, le conseil de prud'hommes a :
- constaté que Monsieur [F] ne rapporte pas la preuve suffisante qui lui incombe de la nécessité de faire cesser un trouble manifestement illicite.
- débouté Monsieur [F] de l'intégralité de ses demandes formulées sur ce fondement juridique.
- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision sur dommages-intérêts pour perte de revenus du fait d'un licenciement nul.
- renvoyé les parties à mieux se pourvoir.
- dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- laissé les dépens à la charge de Monsieur [F].
Par déclaration du 18 novembre 2016, Monsieur [F] a interjeté appel de l'ordonnance.
Il demande à la cour d'infirmer l'ordonnance et de condamner la société VITEMBAL TARASCON à lui payer à titre de provisions, les sommes de :
- 700 € en remboursement du salaire indûment déduit du salaire de décembre 2015.
- 1 616,56 € en remboursement de la somme indûment déduite de son salaire en janvier 2016.
- 2 917,73 € au titre du salaire de février 2016.
- 2 917,73 € au titre du salaire de mars 2016.
- 1 167,09 € au titre du salaire pour la période du 1er avril au 18 avril 2016.
- 5 000 € à titre de dommages-intérêts à valoir sur le préjudice résultant du trouble manifestement illicite.
- 41 181,10 € à valoir sur le préjudice de la perte de revenus subi du fait du licenciement nul.
- 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [F] demande de constater que ces rappels de salaires donneront droit à congés payés correspondants, de condamner, sous astreinte, la société VITEMBAL TARASCON à délivrer les bulletins de salaire rectifiés des mois de décembre 2015 et de janvier à avril 2016, la débouter de ses demandes reconventionnelles et la condamner aux dépens.
La société VITEMBAL TARASCON demande à la cour :
- de déclarer nulle la procédure d'appel de Monsieur [F] dont la cour est saisie et dire que cette nullité est insusceptible de régularisation, le délai de forclusion étant acquis.
- subsidiairement, de confirmer l'ordonnance querellée dans toutes ses dispositions, en conséquence, de constater l'absence de trouble manifestement illicite et de débouter Monsieur [F] de l'ensemble de ses demandes.
- de dire régulier le congé sans solde porté à la paye du mois de décembre 2015 en raison de la fermeture de l'entreprise pour congés annuels et en conséquence de débouter Monsieur [F] de la demande en allocation d'une provision de 700 €. A titre infiniment subsidiaire, de dire sérieusement contestable l'obligation alléguée et en conséquence de juger n'y avoir lieu à provision.
- de débouter Monsieur [F] de sa demande d'allocation d'une provision de 41181,10 €. Subsidiairement, de dire sérieusement contestable l'obligation alléguée et en conséquence de juger n'y avoir lieu à provision et encore plus subsidiairement, de fixer la provision à la somme de 4 058,64 €.
- reconventionnellement, de condamner Monsieur [F] à lui payer la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Pour plus ample exposé des faits et moyens des parties, il est renvoyé aux écritures déposées et réitérées oralement à l'audience.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nullité de la déclaration d'appel
La société VITEMBAL TARASCON soutient qu'en application de l'article R 1436-1 du code du travail, issu du décret du 20 mai 2016, rendant obligatoire la représentation en appel des parties par un avocat ou un délégué syndical et de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971, posant le principe de la postulation territoriale, si un avocat n'exerce pas dans le ressort de la cour d'appel compétente pour son dossier, le recours à un avocat postulant pour les actes de procédure, déclaration d'appel comprise, est obligatoire. La société VITEMBAL TARASCON souligne qu'en l'espèce, Monsieur [F] a interjeté appel de l'ordonnance de référé selon déclaration du 18 novembre 2016, constituant la SCP BREUILLOT & VARO, Avocats au barreau de Carpentras dont la domiciliation professionnelle est rattachée à la cour d'appel de Nîmes et qui en application des textes sus-visés ne pouvait donc pas postuler devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence. La société VITEMBAL TARASCON en conclut qu'en application de l'article 117 du code de procédure civile, la déclaration d'appel est affectée d'une irrégularité de fond et est entachée de nullité qui ne peut plus être régularisée du fait de l'expiration du délai d'appel.
Monsieur [F] fait valoir qu'il n'a pas été dans l'intention du législateur de rendre la postulation obligatoire dans le domaine de la procédure d'appel des décisions du conseil de prud'hommes, position qui a été confirmée par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 21 octobre 2016 et par la circulaire émanant de la Direction de Affaires Civiles et du Sceau du 27 juillet 2016.
Si les dispositions issues des articles 28 à 30 du décret du 20 mai 2016 ont pour objet, à compter du 1er août 2016 de rendre obligatoire en appel la représentation des parties par tout avocat ou par un défenseur syndical, elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'étendre, à compter de cette date, les règles de postulation prévues par l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 aux procédures d'appel devant la chambre sociale de la cour.
Il en résulte que la déclaration d'appel du 18 novembre 2016 constituant la SCP BREUILLOT & VARO, Avocats au barreau de Carpentras dont la domiciliation professionnelle est rattachée à la cour d'appel de Nîmes, est régulière.
L'exception de nullité de la déclaration d'appel sera rejetée.
Sur le trouble manifestement illicite résultant du refus de paiement des salaires
Selon les dispositions de l'article R 1455-6 du code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Monsieur [F] fonde son argumentation d'une part sur les conséquences d'une proposition d'emploi équivalent et d'autre part sur l'existence d'une discrimination syndicale
Sur les conséquences d'une proposition d'emploi équivalent
Monsieur [F] soutient que, suite à la décision du tribunal administratif de Marseille du 17 novembre 2015 annulant les décisions de l'inspecteur du travail et du Ministère du travail qui avaient autorisées son licenciement, à sa lettre du 3 décembre 2015 sollicitant sa réintégration dans ses anciennes fonctions et en application de l'article L2422-1 du code du travail, la société avait l'obligation de reprendre le paiement du salaire. Monsieur [F] prétend que le fait de cesser à compter du 14 janvier 2016 de payer les salaires et ce suite à son refus d'occuper le poste qui lui avait alors été proposé, constitue un trouble manifestement illicite dès lors qu'étant un salarié protégé seul l'inspecteur du travail est compétent pour se prononcer sur le caractère équivalent ou non de l'emploi proposé et pour dire si le refus du salarié est susceptible de fonder son licenciement.
La société VITEMBAL TARASCON fait valoir que le refus du salarié protégé à sa réintégration sur un emploi équivalent proposé en application de l'article L2422-1 du code du travail dispense l'employeur de lui fournir une rémunération de sorte qu'aucun trouble manifestement illicite ne peut être évoqué en la matière.
***
Selon l'article L2422-1 du code du travail, 'lorsque le ministre compétent annule, sur recours hiérarchique, la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement d'un salarié investi de l'un des mandats énumérés ci-après, ou lorsque le juge administratif annule la décision d'autorisation de l'inspecteur du travail ou du ministre compétent, le salarié concerné a droit, s'il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent.'
Dans le cadre des mesures de restructuration et de réorganisation de l'emploi destinées à empêcher la liquidation judiciaire de la société VITEMBAL TARASCON et par conséquent à sauvegarder les emplois et suite à l'accord unanime des organisations syndicales représentatives (dont celle à laquelle appartient Monsieur [F]) du 24 août 2011, les cycles de travail ont été modifiés au sein de l'atelier thermoformatage en passant du cycle 4x8 du lundi au samedi au cycle 3x8 du lundi au vendredi.
Il en résulte que le poste de Chef d'Equipe basé sur le cycle 4x8, qui était occupé par Monsieur [F] lors de son licenciement, n'existait plus de sorte que celui-ci ne pouvait plus prétendre être réintégré sur ce poste.
Suite au jugement le tribunal administratif de Marseille du 17 novembre 2015 qui a annulé les décisions de l'inspecteur du travail et du ministre du travail qui avaient autorisé le licenciement de Monsieur [F] et suite au courrier de ce dernier du 3 décembre 2015 sollicitant sa réintégration, la société VITEMBAL TARASCON a proposé par courrier du 15 décembre 2015 de le réintégrer sur le poste de 'Chef d'Equipe en équipe postée 3x8", comportant une reprise d'ancienneté, le même coefficient, le même niveau de rémunération, la même qualification, les mêmes perspectives de carrière que l'emploi précédemment occupé et permettant l'exercice du mandat représentatif.
Il en résulte que la société VITEMBAL TARASCON, qui a proposé à Monsieur [F] le poste équivalent dont les caractéristiques étaient les plus proches de celui qu'il occupait précédemment, a respecté son obligation de réintégration découlant de l'article L 2422-1 du code du travail.
Suite au refus de Monsieur [F], formalisé dans un courrier du 11 janvier 2016, d'occuper le poste proposé et de fournir un travail, la société VITEMBAL TARASCON n'était plus tenu de poursuivre le paiement du salaire à compter du refus de réintégration. Le trouble manifestement illicite n'est donc pas caractérisé en l'espèce.
Sur la discrimination syndicale
Monsieur [F] fait également état du trouble manifestement illicite résultant d'une discrimination syndicale dont il serait victime, en invoquant:
- la mauvaise foi de l'employeur qui connaissait le caractère difficilement acceptable de la proposition qu'il avait déjà refusée à plusieurs reprises,
- le fait que le poste proposé n'était pas disponible, ce qui aurait été évoqué lors d'une réunion du comité d'entreprise. A ce titre, Monsieur [F] conteste la sincérité du compte-rendu des débats du comité d'entreprise qui ne ferait pas état des échanges qui ont réellement eu lieu sur ce sujet.
- une condamnation antérieure de la société par la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour des faits de discrimination syndicale à son encontre
- le fait que la société, qui devrait se satisfaire de son acceptation finale du poste proposé, s'acharnerait à contester la décision de l'inspecteur du travail qui a refusé d'autoriser son licenciement.
Cependant, dans le cadre du régime probatoire instauré par les dispositions de l'article L1134-1 du code du travail applicable en matière de discrimination, la société VITEMBAL TARASCON présente des éléments qui seraient susceptibles d'établir que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et notamment :
- que Monsieur [F] a finalement accepté le poste proposé mais que compte tenu de la teneur de la lettre d'acceptation du 20 avril 2016 dans laquelle le salarié fait état d'une obligation d'accepter le poste du fait de la contrainte économique que l'employeur fait peser sur lui par la privation de ses salaires, et compte tenu du fait que Monsieur [F] n'avait pas fait retour des documents signés qui auraient formalisé son accord, la société VITEMBAL TARASCON soutient avoir décidé d'exercer un recours contre la décision de l'inspecteur du travail qui a refusé l'autorisation de licenciement justement parce que Monsieur [F] avait accepté le poste de Chef d'Equipe.
- que le compte-rendu de la réunion du CE du 15 janvier 2016 relate fidèlement les propos qui y ont été tenus.
- que suite à la décision du tribunal administratif, elle a fait en sorte de rendre libre le poste de Chef d'Equipe proposé à Monsieur [F] le 15 décembre 2015, alors affecté à Monsieur [Y] en proposant à ce dernier un poste de responsable Essais et suppléant Chef d'Equipe qu'il a accepté également le 15 décembre 2015.
Il appartient au juge du fond de former sa conviction au vu des éléments qui lui seront produits mais en l'état le trouble manifestement illicite résultant d'une discrimination syndicale n'est pas établie.
En conséquence, pour l'ensemble de ces motifs, à défaut de trouble manifestement illicite, il n' y a pas lieu à référé aux fins d'ordonner le paiement des salaires, des primes de panier à compter de janvier 2016 et la rectification, sous astreinte, des bulletins de salaire de janvier à avril 2016.
L'ordonnance du conseil de prud'hommes sera donc confirmée.
Sur la demande en paiement d'une provision au titre d'un rappel de salaire de décembre 2015 et de rectification du bulletin de salaire de décembre 2015
Sur les fondements de l'absence de contestation sérieuse et du trouble manifestement illicite, Monsieur [F] demande le paiement de la somme de 700 € qui lui a été retirée du salaire de décembre 2015 au titre d'un congé sans solde, selon lui de façon totalement inexplicable et abuve.
Il est constant que l'entreprise a connu une période de fermeture du 24 au 31 décembre 2015 en raison de congés annuels de fin d'année et ce après information et consultation du comité d'entreprise lors de sa réunion ordinaire du 27 février 2015.
Du fait de son licenciement intervenu le 28 janvier 2013, les droits à congés payés de Monsieur [F] avaient été soldés et il n'avait pas acquis de nouveaux droits à congés payés depuis sa réintégration du 7 décembre 2015.
Or, dans cette hypothèse, à savoir lorsque le salarié qui n'a pas droit aux congés pleins ou même d'une durée inférieure, l'employeur n'est pas tenu de verser un salaire et l'intéressé ne peut prétendre qu'aux allocations pour privation partielle d'emploi et ce compte tenu des journées ou des indemnités compensatrices de congés payés dont il aurait pu bénéficier pendant la période de référence.
Il en résulte que le trouble manifestement illicite n'est pas établi en l'espèce et que par ailleurs la demande de Monsieur [F] présente une contestation sérieuse qui relève dès lors de l'appréciation du juge du fond.
L'ordonnance du conseil de prud'hommes sera donc confirmée.
Sur la demande de provision au titre de l'indemnité de l'article L2422-4 du code du travail
Monsieur [F] prétend que le caractère exécutoire du jugement du 17 novembre 2015 du tribunal administratif qui annule les autorisations de l'inspecteur du travail et du ministère du travail de le licencier, entraîne nécessairement la nullité de son licenciement et le droit de demander réparation du préjudice résultant de cette nullité de sorte que sa demande formulée à ce titre n'est pas sérieusement contestable.
Cependant, le droit à indemnisation du préjudice subi par le salarié protégé réintégré est strictement prévu à l'article L2422-4 du code du travail qui dispose que 'lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision.'
Dès lors que la société VITEMBAL TARASCON a relevé appel du jugement du 17 novembre 2015 et que le conseil d'état n'a pas encore statué, la décision d'annulation de la décision d'autorisation rendue par le tribunal administratif est certes exécutoire mais non définitive. La demande de Monsieur [F] est donc sérieusement contestable.
Il n'y a donc pas lieu à référé et l'ordonnance du conseil de prud'hommes sera confirmée.
Sur les autres demandes
Il résulte des dispositions de l'arrêt que Monsieur [F] n'a subi aucun trouble manifestement illicite et qu'en conséquence sa demande en paiement de dommages-intérêts sur ce fondement doit être rejetée par confirmation de l'ordonnance du conseil de prud'hommes.
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées et il est équitable de condamner Monsieur [F] à payer à la société VITEMBAL TARASCON la somme de 800 € au titre des frais qu'elle a engagés en cours d'appel.
Les dépens d'appel seront à la charge de Monsieur [F] , partie succombante par application de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant pas arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ont été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Rejette l'exception de nullité de la déclaration d'appel.
Confirme l'ordonnance déférée dans toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [D] [F] à payer à la société VITEMBAL TARASCON la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Monsieur [D] [F] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
David MACOUIN faisant fonction