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23/02/2017 | FRANCE | N°100

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0606, 23 février 2017, 100


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
2e Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 23 FEVRIER 2017

No 2017/ 100

Rôle No 16/05058

COMPAGNIE NETTOYAGE ET SERVICES
ME NATHALIE X...

C/

Maître Y...
Commune VILLE DE CANNES

Grosse délivrée
le :
à :

Me FICI

Me EGLIE-RICHTERS        

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 10 Mars 2016 enregistrée au répertoire général sous le no2016R00009 .

APPELANTES

CO

MPAGNIE NETTOYAGE ET SERVICES,
demeurant [...]                        

représentée par Me Isabelle FICI, de la SELARL LIBERAS etamp; ASSOCIES avocat au barreau de MARSEI...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
2e Chambre

ARRÊT AU FOND
DU 23 FEVRIER 2017

No 2017/ 100

Rôle No 16/05058

COMPAGNIE NETTOYAGE ET SERVICES
ME NATHALIE X...

C/

Maître Y...
Commune VILLE DE CANNES

Grosse délivrée
le :
à :

Me FICI

Me EGLIE-RICHTERS        

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 10 Mars 2016 enregistrée au répertoire général sous le no2016R00009 .

APPELANTES

COMPAGNIE NETTOYAGE ET SERVICES,
demeurant [...]                        

représentée par Me Isabelle FICI, de la SELARL LIBERAS etamp; ASSOCIES avocat au barreau de MARSEILLE
assistée et plaidant par Me Eric AGNETTI, avocat au barreau de NICE,

Maître Nathalie X... Es qualités d'administrateur judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société CNS (TC Cannes du 15.12.2015)
demeurant [...]                            

représentée par Me Isabelle FICI, de la SELARL LIBERAS etamp; ASSOCIES avocat au barreau de MARSEILLE
assistée et plaidant par Me Eric AGNETTI, avocat au barreau de NICE,

INTIMEES

Maître Y... Es qualités de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société CNS (TC Cannes du 15.12.2015)
assigné le 20.07.2016,
demeurant [...]                                     

défaillant

Commune VILLE DE CANNES,
demeurant [...]                                              

représentée et plaidant par Me Amaury EGLIE-RICHTERS de la SCP EGLIE-RICHTERS - MALAUSSENA, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Janvier 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, monsieur PRIEUR, conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Février 2017

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Février 2017,

Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DE L'AFFAIRE

La COMPAGNIE NETTOYAGE ET SERVICES (société C.N.S.) exerce une activité de nettoyage industriel et notamment :
- le ramassage, le stockage, le traitement et le transport des ordures ménagères et industrielles pour le compte des collectivités et de tous établissements publics ou privés,
- le nettoyage industriel de tout lieu public (tel que les voiries) ou de tout bâtiment et locaux appartenant à des organismes publics ou privé.

La société C.N.S a obtenu de la ville de Cannes la réalisation de différentes prestations et notamment
- le marché public de fournitures courantes et services « brossage et nettoyage haute pression des voies piétonnes, des places et des marchés publics », reconductible trois fois, par période d'une année, soit sur une durée maximale de quatre ans. notifié le 13 janvier 2015 no14/108 par la Ville de Cannes dont le montant global du marché était fixé à 954.811 euros TTC.
- le marché public de fournitures courantes et services « contrat d'enlèvement et de traitement de la pollution canine » notifié par la Ville de Cannes le 9 décembre 2014.

Par courriers électroniques des 14 avril 2015 et 10 septembre 2015, la Ville de CANNES a notifié à la société C.N.S sa décision de reprendre en régie les prestations confiées pour le marché no14/087 à compter du 11 décembre 2015 et pour le marché no14/108, à partir du 2 janvier 2016.

Par jugement du 15 décembre 2015, le Tribunal de Commerce de Cannes a ouvert au profit de la société C.N.S., une procédure de sauvegarde et désigné :
- Monsieur C... en qualité de Juge Commissaire,
- Maître Nathalie X... en qualité d'Administrateur avec mission de surveillance,
- Maître Didier Y... en qualité de Mandataire Judiciaire.

Par acte du 8 février 2016, la société C.N.S, a fait assigner la ville de Cannes outre Maître Nathalie X... ès qualité et Maître Didier Y... ès qualité devant le juge des référés de cette ville, sur le fondement de l'article 873 du code de procédure civile pour qu'il soit statué ainsi :
Ordonner à la Ville de Cannes de rétablir les effets des deux contrats :
- marché public de fournitures courantes et services « brossage et nettoyage haute pression des voies piétonnes, des places et des marchés publics », notifié le 13 janvier 2015 par la Ville de Cannes,
- marché public de fournitures courantes et services « contrat d'enlèvement et de traitement de
la pollution canine » notifié par la Ville de Cannes le 9 décembre 2014, la liant à la Société CNS sur la base du chiffre d'affaires mensuel moyen généré pour l'exercice 2015 et ce, sous astreinte de 3.000 € par jour de retard courant à dater d'un délai de 48 heures suivant la signification de la décision à intervenir.
Dire et juger que le maintien des effets des contrats liant la Ville de Cannes à la Société CNS sur la base du chiffre d'affaires mensuel moyen généré pour l'exercice 2015, s'opérera jusqu'à la décision à intervenir de Monsieur le Juge Commissaire saisi par la Société CNS et Maître X... ès qualités aux fins de statuer sur la poursuite des relations contractuelles liant les deux parties à l'ouverture de la procédure de sauvegarde.

Parallèlement à cette procédure en référé, la société CNS a saisi par requête le Juge-Commissaire du Tribunal de Commerce de CANNES, en lui demandant de :
-ordonner à la Ville de CANNES la communication de tout document permettant de justier de l'éventuelle notification de la résiliation des conventions dont s'agit, intervenue antérieurement à l"ouverture de la procédure de sauvegarde de la société CNS et de la réception par la société CNS de ces éventuelles décisions de non reconduction des contrats ;
-à défaut de justificatif probant, et en considération des pièces versées aux débats, constater conformément aux dispositions de l'article L. 627-2 du Code de commerce que les conventions précitées liant la société CNS et la Ville de Cannes, demeuraient en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société CNS (et le demeurent encore) au sens de
l'article L. 622-13 du Code de commerce et statuer en conséquence sur la poursuite des dits contrats.

Préalablement au prononcé de l'ordonnance précitée, le 8 mars 2016 veille de l'audience fixée devant le juge-commissaire, la Ville de CANNES a saisi le Tribunal Administratif de NICE d'un recours en interprétation aux fins de voir :
« Interpréter les stipulations contractuelles et règles juridiques applicables au marché public no14/087 conclu entre la Ville de CANNES et la société CNS, ayant pour objet l'enlèvement et le traitement de la pollution canine » afin de préciser les modalités de notification s'imposant à la décision de non-reconduction du marché en date du 14 avril 2015. »

Par ordonnance du 10 mars 2016, le juge des référés du tribunal de commerce, considérant que la solution du litige ne pouvait intervenir sans qu'il ait été statué sur la réalité de la résiliation des clauses du contrat, s'est déclaré incompétent et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Suivant décision du 30 juin 2016, le Tribunal administratif de Nice a jugé que « les stipulations contractuelles applicables aux marchés 14/087 et 14/108 conclus entre la commune de Cannes et la société SAS COMPAGNIE NETTOYAGE ET SERVICES doivent être interprétés comme ne permettant pas la transmission par courriel des décisions de non-reconduction des marchés à bons de commande en cause. »

Un recours a été engagé contre cette décision.

Par décision du 6 décembre 2016, le juge commissaire a sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt que doit rendre la Cour administrative d'appel.

La société C.N.S a relevé appel de l'ordonnance du 10 mars 2016 et soutient :
-que la décision de non-reconduction des deux marchés par la Ville de Cannes ne pouvait pas être été valablement notifiée à la société CNS par voie dématérialisée, dans le respect d'un délai de préavis de quatre mois, et qu'en conséquence, les conventions demeuraient en cours lors de l'ouverture de la procédure collective,
-que la notion de « contrats en cours au jour du Jugement d'ouverture » est, par essence, propre au droit des procédures collectives et par suite relève de contestations relatives à la mise en œoeuvre des règles propres à la procédure collective,
-que la présente juridiction est compétente pour statuer, et qu'il n'y a lieu de faire droit à la demande de sursis à statuer,
-que ses demandes sont recevables,
-qu'il existe un dommage imminent puisqu'elle risque une conversion de la procédure de sauvegarde en liquidation judiciaire,
-qu'il existe un trouble illicite puisque la notification des décisions de la Ville de CANNES ne pouvait aucunement intervenir par voie dématérialisée.

La société C.N.S réitère les réclamations présentées en première instance.

La Ville de CANNES rétorque :
-que la société C.N.S a saisi le juge commissaire pour notamment qu'il soit statué sur la poursuite des contrats mais que l'affaire a été renvoyée pour tenir compte des recours en interprétation introduits par la Ville de CANNES devant le Tribunal administratif de NICE,
-que les marchés publics conclus en application du code des marchés publics sont de la compétence exclusive des juridictions administratives,
-que les règles du code de commerce relatives à la sauvegarde, au redressement et à la liquidation judiciaire n'ont pas pour objet ou pour effet de déroger aux dispositions régissant la compétence des juridictions administratives,
Subsidiairement,
-qu'il n'appartient pas au juge des référés juge de l'évidence, de statuer sur la validité des deux décisions de non-reconduction de ces marchés publics, ce qui implique notamment d"interpréter les stipulations du Cahier des Clauses Administratives Générales (CCAG) et des Cahiers des Clauses Administratives Particulières,
A titre très subsidiaire,
-que la solution du litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative et que du fait de l'existence d'une question préjudicielle, il convient de surseoir à statuer.

Me X... ès qualités est intervenu aux débats. Me Y... ès qualités, régulièrement assigné n'a pas comparu.

La cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties à leurs écritures précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

La marché no14/087 portant sur l'enlèvement et traitement de la pollution canine » a été notifié à la société CNS le 12 décembre 2014.

Le marché no14/108 relatif au brossage et nettoyage haute pression des voies piétonnes, des places et des marchés publics a été notifié à la société appelante le 13 janvier 2015.

Les Cahiers des Clauses Administratives Particulières des deux marchés prévoit que :
« Le marché est un marché à bons de commande passé pour une durée initiale d'un (1) an à compter de la notification du marché. Il est reconductible 3 fois, par période de 1 An(s), pour une durée maximale de 4 An(s).
A défaut de décision expresse du pouvoir adjudicateur 4 mois au plus tard avant la date anniversaire, le marché sera considéré comme tacitement reconduit.
Toutefois, le titulaire peut refuser la reconduction, dans ce cas il devra, par décision motivée, notifier son refus au pouvoir adjudicateur par LRAR 5 mois au plus tard avant la date anniversaire du marché. A défaut de refus exprès avant ce délai, le titulaire sera alors tenu d'accepter la reconduction.
La durée de validité du marché est la période à l'intérieur de laquelle les bons de commande peuvent être émis. Elle est fixée à 1 An(s), à compter de la notification du marché.
L'émission des bons de commande ne peut intervenir que pendant la durée de validité du marché. »

Ces dispositions répondent aux critères de l'article 77 du code des marchés publics.

Selon l'article 2 de la Loi MURCEF no 2001-1168 du 11 décembre 2001 :«Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. »

La notion de contrat en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective, qui concerne uniquement le droit de la procédure collective, ne peut enlever à un contrat de marché public son caractère administratif.

Les contrats litigieux passés à la suite d'appels d'offres en application du code des marchés publics présentent le caractère de marché public, et en conséquence, leur exécution et leur règlement relèvent de la compétence administrative.

Dès lors, la décision attaquée doit être confirmée.

Il convient de condamner la société C.N.S à payer à la COMPAGNIE NETTOYAGE ET SERVICES une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme l'ordonnance attaquée,

Y ajoutant,

Condamne la société C.N.S à payer à la COMPAGNIE NETTOYAGE ET SERVICES une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

Condamne la société C.N.S aux dépens recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0606
Numéro d'arrêt : 100
Date de la décision : 23/02/2017

Analyses

Selon l'article 2 de la loi MURCEF nº2001-1168 du 11 décembre 2001 : « Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. » Les contrats litigieux passés à la suite d'appels d'offres en application du code des marchés publics présentent le caractère de marché public, d'où il suit que le contentieux relatif à leur exécution et leur règlement relève de la compétence des juridictions administratives, et non de celle du juge commissaire, nonobstant leur caractère de contrats en cours au sens du droit des procédures collectives.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Cannes, 10 mars 2016


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2017-02-23;100 ?
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