COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
14e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 10 FEVRIER 2017
N°2017/272
Rôle N° 15/17656
Société GENEX
C/
URSSAF PACA
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE
Grosse délivrée
le :
à :
Me Hélène BAU
URSSAF PACA
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du VAR en date du 04 Septembre 2015,enregistré au répertoire général sous le n° 21301196.
APPELANTE
Société GENEX, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
URSSAF PACA, demeurant [Adresse 2]
représenté par Mme [T] [W] (Inspectrice du contentieux) en vertu d'un pouvoir spécial
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE, demeurant [Adresse 3]
non comparant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Janvier 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
M. Gérard FORET-DODELIN, Président
Madame Florence DELORD, Conseiller
Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Nathalie ARNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Février 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Février 2017
Signé par M. Gérard FORET-DODELIN, Président et Madame Nathalie ARNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
L'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales Provence-Alpes-Côte d'Azur a procédé à un contrôle de la S.A.S. STVO aux droits de laquelle se trouve la S.A.S. GENEX sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011. A l'issue du contrôle, l'Union a effectué un redressement et a adressé à la société une mise en demeure de lui payer la somme de 23.102 euros au titre des cotisations et majorations de retard.
Après rejet de sa contestation par la commission de recours amiable, la S.A.S. GENEX a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Var de trois recours. Elle a querellé les redressements opérés des chefs des frais professionnels et des heures supplémentaires.
Par jugement du 4 septembre 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale a :
- joint les trois recours,
- annulé le redressement portant sur la déduction forfaitaire spécifique relative aux frais professionnels,
- validé le redressement pour les autres chefs,
- validé la mise en demeure pour son montant résiduel de 21.758 euros, déduction faite de la somme de 7.985 euros montant du redressement concernant la déduction forfaitaire spécifique.
Le jugement a été notifié le 14 septembre 2015 à la S.A.S. GENEX qui a interjeté appel le 2 octobre 2015.
L'affaire a été fixée à l'audience du 6 octobre 2016 et renvoyée à l'audience du 12 janvier 2017.
Par conclusions visées au greffe le 12 janvier 2017 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.S. GENEX :
- s'agissant du redressement résultant de la déduction forfaitaire spécifique : fait valoir que l'activité de ses chauffeurs qui effectuent des transports rapides routiers pour des clients ouvre droit à cette déduction en vertu de l'arrêté du 20 décembre 2002 et demande l'annulation du redressement,
- s'agissant du redressement résultant des indemnités forfaitaires de repas hors des locaux de l'entreprise : soutient qu'elle applique les dispositions de la convention collective nationale du transport routier et que ses chauffeurs utilisent l'indemnité conformément à son objet et demande l'annulation du redressement,
- s'agissant du redressement résultant de la suppression du bénéfice des réductions dites TEPA et FILLON : observe que l'Union a utilisé la méthode de l'échantillonnage et de l'extrapolation sans respecter la procédure prévue, ajoute que les réductions s'appliquent lorsqu'une convention de forfait a été passée avec le salarié, précise que la convention de forfait n'est pas subordonnée à l'existence d'un accord collectif et demande l'annulation de ce chef de redressement,
- s'agissant de la mise en demeure : en demande l'annulation,
- s'agissant des frais de procédure : sollicite la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de l'Union aux dépens.
Par conclusions visées au greffe le 12 janvier 2017 maintenues et soutenues oralement à l'audience, l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales Provence-Alpes-Côte d'Azur qui interjette appel incident :
- s'agissant du redressement résultant de la déduction forfaitaire spécifique : objecte que les salariés de la société ont pour activité réelle celle de la livraison de matériaux à l'aide de camions et non celle de chauffeurs de transports rapides routiers et n'entrent pas dans la liste des professions qui permettent de bénéficier de la déduction et demande le maintien du redressement,
- s'agissant du redressement résultant des indemnités forfaitaires de repas hors des locaux de l'entreprise : réplique que la société ne prouve pas que l'indemnité qu'elle verse à ses chauffeurs et dont le montant excède le barème fixé à l'article 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002 est utilisée conformément à son objet et demande le maintien du redressement opéré sur le différentiel entre le montant de l'indemnité servie et le montant prévu par l'arrêté de 2002,
- s'agissant du redressement résultant de la suppression du bénéfice des réductions dites TEPA et FILLON : prétend qu'il n'existe pas d'horaire collectif de travail, que des salariés ont été rémunérés pour des heures supplémentaires qu'ils n'ont pas accomplies, qu'il n'existait pas de convention de forfait et demande le maintien du redressement fondé sur les heures réellement effectuées,
- s'agissant de la mise en demeure : demande la condamnation de la société à lui payer la somme de 21.758 euros, montant résiduel de la mise en demeure,
- s'agissant des frais de procédure : sollicite la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le redressement résultant de la déduction forfaitaire spécifique :
Le litige porte sur la question de pur fait de déterminer si les chauffeurs de la société exercent une activité de transport rapide routier qui les ferait rentrer dans la liste donnée à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000 et ouvrirait droit à la déduction forfaitaire spécifique prévue à l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels modifié par l'arrêté du 25 juillet 2005.
La société a appliqué cette déduction forfaitaire spécifique.
Les inspecteurs du recouvrement ont relevé que la société avait pour activité la location de camion grue avec conducteur, que les chauffeurs prennent leur service chez les clients et se rendent sur les chantiers et que l'activité réelle des chauffeurs est celle de la livraison de matériaux à l'aide de camions mis à la disposition de l'entreprise utilisatrice. La société, dont l'activité n'est pas celle du transport routier, ne verse aucune pièce sur l'activité de ses chauffeurs et notamment pas les contrats conclus avec ses clients.
Dans ces conditions, la société ne peut pas bénéficier de la déduction forfaitaire spécifique pour ses chauffeurs qui n'assurent pas des transports rapides routiers.
La société querelle le principe du redressement mais non son montant et ne propose pas de contre-chiffrage.
En conséquence, le redressement opéré à hauteur de 7.985 euros en cotisations et contributions au titre de la déduction forfaitaire spécifique sur les frais professionnels doit être validé.
Le jugement entrepris doit être infirmé.
Sur le redressement résultant des indemnités forfaitaires de repas hors des locaux de l'entreprise :
L'article 2 de l'arrêté du 20 décembre 2002 autorise l'employeur à déduire les allocations forfaitaires de repas à condition de démontrer qu'elles ont été utilisées conformément à leur objet. Il répute cette condition remplie lorsque les sommes versées n'excèdent pas le barème d'exonération qui fixait l'allocation forfaitaire à 8,10 euros en 2009, à 8,20 euros en 2010 et à 8,30 euros en 2011.
Les inspecteurs du recouvrement ont constaté que les salariés percevaient une indemnité de repas de midi de 12,08 euros de janvier 2009 à mars 2010, de 12,44 euros d'avril 2010 à avril 2011 et de 12,59 euros à partir de mai 2011.
Il appartient donc à l'employeur de justifier de l'utilisation effective de l'allocation forfaitaire de repas.
La société verse l'attestation d'un salarié qui déclare qu'il ne prend pas le repas de midi à son domicile sans préciser qu'il se rend au restaurant.
La société produit pour le mois de janvier 2011 les fiches d'activité journalière de [Q] [U] qui prouvent que le trajet journalier le plus court a été de 150 kilomètres et le plus long de 445 kilomètres et qu'il travaillait sans coupure, les fiches d'activité journalière de [L] [H] qui prouvent que le trajet journalier le plus court a été de 133 kilomètres et le plus long de 508 kilomètres et qu'il faisait la journée continue, les fiches d'activité journalière de [W] [R] qui prouvent que le trajet journalier le plus court a été de 149 kilomètres et le plus long de 477 kilomètres, les fiches d'activité journalière de [F] [J] qui prouvent que le trajet journalier le plus court a été de 96 kilomètres et le plus long de 522 kilomètres et les fiches d'activité journalière d'[G] [C] qui prouvent que le trajet journalier le plus court a été de 164 kilomètres et le plus long de 412 kilomètres.
Il ne peut se déduire de déplacements professionnels éloignés empêchant le salarié de regagner son domicile qu'il a pris son repas au restaurant. Le seul témoin ne fait pas état de repas au restaurant et les fiches de deux salariés mentionnent des journées de travail continues.
Il n'est communiqué aucune facture de restaurant qui permettrait de démontrer que les frais ont été engagés pour un coût excédant les limites de l'exonération automatique.
Dans ces conditions, le redressement a été justement opéré sur la différence entre le montant des sommes versées par la société et le montant des sommes bénéficiant de la présomption d'une utilisation effective.
La société querelle le principe du redressement mais non son montant et ne propose pas de contre-chiffrage.
En conséquence, le redressement opéré au titre des indemnités de restauration à hauteur de la somme de 6.197 euros en cotisations et contributions doit être validé.
Le jugement entrepris doit être confirmé.
Sur le redressement résultant de la suppression du bénéfice des réductions dites TEPA et FILLON :
Les inspecteurs du recouvrement n'ont pas utilisé la méthode du sondage et de l'échantillonnage.
Les inspecteurs du recouvrement ont constaté que les contrats de travail stipulaient un temps mensuel de travail fixe, que le nombre d'heures fixé induisait l'accomplissement d'heures supplémentaires, que l'employeur tenait un décompte mensuel des heures réellement effectuées, que l'employeur enregistrait dans un compteur les heures supplémentaires que le salarié n'avait pas réalisées mais ne procédait à aucune régularisation et qu'ainsi, l'employeur retenait ces heures non effectuées pour calculer le coefficient de la réduction FILLON. Les inspecteurs ont également remarqué que les décomptes de l'employeur sont erronés en ce qu'il n'a pas pris en considération les absences. Les inspecteurs ont repris les décomptes mensuels de l'employeur et ont procédé à un nouveau calcul des réductions FILLON. Ce nouveau calcul a conduit à un redressement de 1.365 euros en cotisations et contributions. A partir du même nouveau calcul les inspecteurs du recouvrement ont opéré un redressement de 346 euros en cotisations et contributions sur la déduction forfaitaire de cotisations patronales sur les heures supplémentaires. Enfin, ils ont opéré un redressement de 566 euros en cotisations et contributions relatif à la réduction salariale sur les heures supplémentaires.
La société ne fournit pas les contrats de travail de ses salariés et ne justifie donc pas que ceux-ci sont soumis à un forfait. Elle ne produit pas de pièces sur son décompte des heures supplémentaires.
La société querelle le principe du redressement mais non son montant et ne propose pas de contre-chiffrage.
En conséquence, les redressements opérés au titre de la suppression du bénéfice des réductions dites TEPA et FILLON doivent être validés.
Le jugement entrepris doit être confirmé.
Sur la mise en demeure :
La S.A.S. GENEX doit être condamnée à payer à l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 21.758 euros, montant résiduel de la mise en demeure.
Le jugement entrepris doit être infirmé.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et de débouter les parties de leurs demandes présentées en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La procédure devant les juridictions de sécurité sociale étant gratuite et sans frais, la demande relative aux dépens est dénuée d'objet.
La S.A.S. GENEX, appelante succombant, doit être dispensée du paiement du droit prévu à l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a validé les redressements opérés au titre des indemnités de restauration et au titre de la suppression du bénéfice des réductions dites TEPA et FILLON et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles,
Infirmant pour le surplus, statuant à nouveau et ajoutant,
Valide le redressement opéré à hauteur de 7.985 euros en cotisations et contributions au titre de la déduction forfaitaire spécifique sur les frais professionnels,
Condamne la S.A.S. GENEX à payer à l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 21.758 euros, montant résiduel de la mise en demeure,
Déboute les parties de leurs demandes présentées en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déclare la demande relative aux dépens dénuée d'objet,
Dispense la S.A.S. GENEX, appelante succombant, du paiement du droit prévu à l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT