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25/11/2016 | FRANCE | N°14/19992

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre a, 25 novembre 2016, 14/19992


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 25 NOVEMBRE 2016



N°2016/682















Rôle N° 14/19992







[Z]-[H] [K]





C/



Association LA CHRYSALIDE MARSEILLE































Grosse délivrée le :

à :

Me Christophe DESCHAMPS, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Denis FERRE, avocat

au barreau de MARSEILLE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section AD - en date du 23 Septembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/4351.





APPELANT



Monsieur [Z]-...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 25 NOVEMBRE 2016

N°2016/682

Rôle N° 14/19992

[Z]-[H] [K]

C/

Association LA CHRYSALIDE MARSEILLE

Grosse délivrée le :

à :

Me Christophe DESCHAMPS, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Denis FERRE, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section AD - en date du 23 Septembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/4351.

APPELANT

Monsieur [Z]-[H] [K], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Christophe DESCHAMPS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Association LA CHRYSALIDE MARSEILLE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Denis FERRE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Nathalie FRENOY, Conseiller

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Novembre 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Novembre 2016

Signé par Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président et Mme Nadège LAVIGNASSE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 23 septembre 2014 qui:

- déboute Monsieur [K] de l'ensemble de ses demandes,

- déboute l'association la Chrysalide de sa demande reconventionnelle,

- condamne Monsieur [K] aux dépens.

Vu l'appel régulièrement interjeté contre ce jugement par Monsieur [K], suivant lettre recommandée expédiée le 7 octobre 2014.

Vu la reprise à l'audience par Monsieur [K] de ses dernières conclusions de première instance aux termes desquelles il est demandé:

- de dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- de condamner l'association la Chrysalide à lui payer les sommes suivantes:

* 3 928,14 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 39,28 euros au titre des congés payés afférents,

* 5 892,21 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* 70 706,52 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de l'association la Chrysalide déposées et soutenues à l'audience, demandant à la cour:

- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- de condamner Monsieur [K] à lui payer la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- de condamner Monsieur [K] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

MOTIFS

Attendu que Monsieur [K] a été embauché le 11 décembre 2006, par l'association la Chrysalide dont l'objet est l'aide aux personnes handicapées mentales et physiques, suivant contrat à durée déterminée, en qualité d'agent technique;

Qu'au terme de ce premier contrat, les relations se sont poursuivies à durée déterminée dans un premier temps puis à durée indéterminée par avenant du 1er avril 2008;

Que dans le dernier état des relations contractuelles, Monsieur [K] occupait les fonctions d'agent technique supérieur;

Que par courrier du 17 janvier 2013, l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave;

Que Monsieur [K] a saisi, par requête reçue le 22 octobre 2013, le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de contestation du bien-fondé de la mesure de licenciement;

Qu'il fait grief à cette juridiction de l'avoir débouté de l'ensemble de ses demandes;

Qu'aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, il est reproché à Monsieur [K] d'avoir le 20 décembre 2012, alors qu'il accompagnait avec son collègue Monsieur [L], Madame [H], salariée d'un prestataire de service de l'association, à bord du véhicule de service et sans l'autorisation de l'employeur, vers la maison de retraite [Établissement 1], tenu des propos déplacés à l'encontre de cette dernière, dont le caractère dégradant, humiliant se référant à des actes de nature sexuelle et leur contexte peuvent être assimilés à du harcèlement sexuel;

Qu'il lui est plus particulièrement fait grief d'avoir demandé à Madame [H] de se justifier de sa tenue pour monter dans le véhicule dans les termes suivants: ' Mais pourquoi tu t'es changée, c'était plus rapide!', puis de lui avoir demandé de se placer sur la banquette entre Monsieur [L] et lui-même en lui disant: ' vas y monte dans le camion, comme ça on te prend à deux', puis d'avoir proféré les propos suivants en dépit des demandes de Madame [H] à plus de respect et sur son interrogation sur le trajet emprunté: ' oui, oui on va derrière les petites maisons, il y a un endroit tranquille où tu vas pouvoir nous faire des pipes', ce qui a amené Madame [H] à menacer d'arrêter une voiture de police afin de ne plus être importunée;

Attendu que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue la violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis;

Qu'il appartient à l'employeur qui l'invoque de la prouver;

Qu'en l'espèce, les dits propos sont confirmés par une attestation de Madame [H] et des témoignages de son employeur et d'une infirmière qui a recueilli ses confidences le lendemain, lesquels confirment le traumatisme qui en est résulté pour cette dernière;

Que Monsieur [K] reconnaît en substance avoir tenu les propos rapportés par Madame [H] tout en évoquant un contexte substantiellement différent; qu'il fait ainsi valoir que ces propos s'inscrivaient dans un cadre humoristique et taquin, qu'ils ont été tenus à l'égard d'une tierce personne non salariée de l'association et en dehors de l'exécution de la prestation de travail, qu'ils n'ont pas été réitérés et ont été suivis d'excuses de sa part;

Qu'il sera néanmoins rappelé que les propos et attitudes déplacées peuvent constituer un harcèlement moral dès lors qu'ils s'adressent comme en l'espèce à des personnes placées en contact avec le salarié auteur en raison de son travail, peu important que les agissements aient eu lieu en dehors du temps et du lieu de travail;

Que pour autant, le harcèlement ne peut, sauf le cas d'une pression particulièrement grave, être caractérisé par un seul acte; que si la répétition inhérente à la notion de harcèlement peut intervenir sur un court laps de temps, elle ne saurait pour autant résulter de la profération à plusieurs reprises de propos litigieux au cours d'une même unité de temps;

Que par ailleurs, l'analyse des pièces produites ne permet pas d'acquérir la certitude que Monsieur [K] a proféré les propos incriminés dans le but précis réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle à son profit ou à celui d'un tiers, en échange du transport opéré; que la pression d'une particulière gravité à l'occasion d'un acte unique n'est pas non plus caractérisée;

Qu'au delà de la notion de harcèlement sexuel proprement dite qui ne peut donc être retenue et en admettant même la thèse de Monsieur [K], il n'en demeure pas moins que les propos tenus, que ce dernier concède lui-même comme relevant d'un 'humour douteux', présentent un caractère particulièrement déplacé, humiliant, dégradant et portent atteinte à la dignité de la personne qui en a été destinataire; que le traumatisme qui en est résulté pour elle et son attitude de défiance voir d'évitement par la suite telle qu'attestée par son employeur notamment, montre qu'à l'évidence ces propos n'ont pas été perçus sur un mode uniquement humoristique par Madame [H];

Que Monsieur [L] lui-même qui confirme la thèse de Monsieur [K] admet qu'il ne ' trouvait pas cela amusant'; que de la même façon, Monsieur [K], dans une note produite aux débats reconnaît avoir tenté de contacter l'employeur de Madame [H] qu'il connaissait par ailleurs et avoir laissé sur son répondeur le message suivant: ' Bonjour, [Z] [K] à l'appareil, vous serait il possible de me rappeler parce que je crois que j'ai fait une grosse bêtise.', ce qui atteste là également de ce que l'intéressé lui-même avait conscience du caractère à tout le moins inadapté de ses propos;

Que ces agissements qu'il convient également de replacer dans le cadre des missions poursuivies par l'association ( aide aux personnes handicapées mentales et physiques) sont d'une particulière gravité et justifiaient assurément le licenciement de Monsieur [K];

Que néanmoins, et dans la mesure où la notion de harcèlement sexuel n'est pas retenue, il convient de prendre en compte l'ancienneté de l'intéressé et l'absence d'antécédent disciplinaire avéré pour considérer que les griefs allégués ne justifiaient pour autant pas un licenciement privatif d'indemnités de préavis et de licenciement;

Que le licenciement opéré sera donc requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse;

Sur les conséquences financières

Attendu qu'il n'est pas contesté que le salaire mensuel de référence de Monsieur [K] était de 1 964,07 euros;

Que par application de l'article 16 de la convention collective nationale des étalissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, Monsieur [K] avait droit, compte tenu de son ancienneté, à un préavis de deux mois; que l'employeur sera donc condamné à lui payer la somme de 3 928,14 euros à ce titre, outre celle de 39,28 euros au titre des congés payés afférents;

Attendu qu'au regard de son ancienneté ( 6 ans) et par application de l'article 17 de la dite convention collective qui prévoit que, sauf dispositions particulières aux cadres, le salarié licencié qui compte 2 ans d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement égale à une somme calculée sur la base d'un demi mois de salaire par année d'ancienneté dans la limite de 6 mois de salaire, l'intéressé peut également prétendre à ce titre à l'allocation de la somme de 5 892,21 euros;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu que les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées ;

Attendu qu'il est équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais qu'elles ont exposés non compris dans les dépens;

Attendu que les dépens d'appel seront à la charge de Monsieur [K], partie succombante à titre principal, par application de l'article 696 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une faute grave et en ce qu'il a débouté Monsieur [K] de ses demandes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

Statuant à nouveau des chefs infirmés:

Dit que le licenciement de Monsieur [K] ne repose pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse,

Condamne l'association La Chrysalide à payer à Monsieur [K] les sommes suivantes:

* 3 928,14 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 5 892,21 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

Y ajoutant:

Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'association La Chrysalide aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

David MACOUIN faisant fonction


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre a
Numéro d'arrêt : 14/19992
Date de la décision : 25/11/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9A, arrêt n°14/19992 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-25;14.19992 ?
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