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27/10/2016 | FRANCE | N°15/09781

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 27 octobre 2016, 15/09781


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 27 OCTOBRE 2016



N° 2016 / 383













Rôle N° 15/09781







[P] [E]





C/



[N] [N]

SA ASSURANCE BANQUE POPULAIRE IARD

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR 'CPAM'















Grosse délivrée

le :





à :



Me Annie COUSSIERE

Me Eric AGRINIER


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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 26 Mai 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/07783.





APPELANT



Monsieur [P] [E]

né le [Date naissance 1] 1983 à [Locali...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 27 OCTOBRE 2016

N° 2016 / 383

Rôle N° 15/09781

[P] [E]

C/

[N] [N]

SA ASSURANCE BANQUE POPULAIRE IARD

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR 'CPAM'

Grosse délivrée

le :

à :

Me Annie COUSSIERE

Me Eric AGRINIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 26 Mai 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/07783.

APPELANT

Monsieur [P] [E]

né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

Me Annie COUSSIERE, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [N] [N],

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Eric AGRINIER de la SCP DUHAMEL AGRINIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

SA ASSURANCE BANQUE POPULAIRE IARD

dont le siège social est : [Adresse 3]

représentée par Me Eric AGRINIER de la SCP DUHAMEL AGRINIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR

dont le siège social est : [Adresse 4]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Septembre 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Olivier GOURSAUD, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier GOURSAUD, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Brigitte NADDEO,

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2016

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2016,

Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 4 avril 2008, M. [P] [E] circulant sur sa motocyclette a été victime d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule automobile conduit par M. [N] [N] et assuré auprès de la société Assurances Banque Populaire.

Par exploits d'huissier en date des 21, 28 août et 11 septembre 2014, M. [P] [E] a fait assigner M. [N] [N], la société Assurances Banque Populaire et la CPAM du Var devant le tribunal de grande instance de Draguignan aux fins d'obtenir l'indemnisation de son dommage sur les bases d'un rapport d'expertise amiable établi par les docteurs [M] et [O] en date des 8 avril et 29 novembre 2010.

Par jugement en date du 26 mai 2015, le tribunal de grande instance de Draguignan a :

- condamné la société Assurances Banque Populaire à payer à M. [P] [E] la somme de 15.387,40 € en réparation de son préjudice corporel et celle de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que le montant de l'indemnité allouée par le tribunal produira intérêts au double du taux d'intérêt légal à compter du 8 septembre 2010 jusqu'au jour du jugement,

- débouté les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires,

- condamné la société Assurances Banque Populaire aux dépens de l'instance,

- déclaré le jugement commun à la CPAM du Var,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par déclaration en date du 1er juin 2015, M. [P] [E] a interjeté appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions en date du 1er décembre 2015, M. [E] demande à la cour de :

- le dire recevable et bien fondé en son appel,

- confirmer le jugement sur les postes :

- frais d'ambulance restés à charge pour 899,57 €,

- frais de semelle orthopédiques restés à charge pour 1.140,57 €

- frais de déplacement pour 1.000 €,

- frais d'assistance à expertise pour 800 €,

- frais de photocopie et d'envoi du dossier médical pour 49,50 €,

- pretium doloris pour 8.000 €,

- déficit fonctionnel permanent pour 31.500 €,

- préjudice esthétique pour 5.000 €,

statuant à nouveau sur le surplus,

si par extraordinaire, la cour devait considérer la perte de promotion comme une perte de chance, dire et juger que ce poste inclura les pertes de revenus futures consécutives,

- condamner la société Assurances Banque Populaire IARD et M. [N], tenus in solidum, à lui payer la somme de 1.196.268,26 €, à parfaire au jour de l'arrêt, déduction opérée du recours des tiers payeurs sur son préjudice corporel, professionnel et économique des suites de l'accident du 4 avril 2008 et dont il conviendra de déduire les provisions versées pour 304.000 € en deniers ou quittances,

- confirmer la condamnation de la société Assurances Banque Populaire par application des articles L 211-9 et suivants du code des assurances mais sur l'ensemble des indemnités (indemnisation définitive allouée, provisions versées et recours de la CPAM) qui porteront intérêts au double du taux légal à compter du 8 septembre 2010, 5 mois après le dépôt du rapport d'expertise en date du 8 avril 2010 et jusqu'au jour de la décision à intervenir,

- condamner la société Assurances Banque Populaire à lui payer la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais irrépétibles exposés en première instance et à la même somme pour les frais irrépétibles exposés en appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 689 du code de procédure civile.

Dans le dernier état de leurs écritures en date du 1er octobre 2015, M. [N] [N] et la société Assurances Banque Populaire demandent à la cour de :

- débouter M. [P] [E] de ses demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que le préjudice de M. [E] doit être liquidé sur la base des rapports contradictoires et non contestés des docteurs [M] et [O],

- dire et juger satisfactoires les offres suivantes :

PRÉJUDICES PATRIMONIAUX TEMPORAIRES :

. dépenses de santé actuelles :

- frais d'ambulance : 899,57 €

- semelles orthopédiques : 243,00 €

- aide humaine :

80 jours X 12 € x 2,5 heures : 2.400,00 €

62 jours X 12 € x 2 heures : 1.488,00 €

. frais de déplacement (forfait) : 1.000,00 €

. assistance à expertise : 800,00 €

. frais d'envoi dossier médical : 49,75 €

. perte de gains professionnels actuels :

ITT du 4 avril 2008 au 4 avril 2010 (1.420 X 24 mois) : 34.080,00 €

. perte de salaire pendant la recherche d'emploi du 5 avril 2010 au 19

septembre 2011 (534 jours soit 1.420 €/30 jours x 534) : 25.275,00 €

. dont à déduire indemnités journalières :- 41.111,28 €

. solde perte de gains professionnels actuels : 18.243,72 €

- débouter M. [E] de sa demande de prise en charge de la perte de mutuelle,

PRÉJUDICES PATRIMONIAUX PERMANENTS :

- dépenses de santé futures :

. renouvellement des semelles orthopédiques 80 € x 27.515 (euro de rente BCIV

2014 (30 ans) : 1.940,11 €

. dont à déduire la créance de la CPAM : 288,60 €

- perte de chance : 30.000,00 €

- perte de gains professionnels futurs

. 162 € x 12 x 27.515 (BCIV 2014) : 54.665,28 €

- incidence professionnelle : 100.00,00 €

- dire et juger que la cour devra imputer la rente sur le poste perte de gains professionnels futurs et incidence professionnelle, soit 35.229,47 € à déduire,

- débouter purement et simplement M. [E] de sa demande au titre de la perte de repas futur et de la perte de mutuelle,

PRÉJUDICE EXTRA PATRIMONIAUX TEMPORAIRES ET PERMANENTS :

- déficit fonctionnel permanent 15 % : 30.000,00 €

- souffrances endurées (3,5/7) : 8.000,00 €

- préjudice esthétique (2/7) : 5.000,00 €

- préjudice d'agrément : 5.000,00 €

- dire et juger que des sommes offertes ci-dessus devront être déduites les provisions déjà versées, d'un montant global de 304.000 €,

- débouter M. [E] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner qui il appartiendra aux entiers dépens, distraits au profit de la scp Duhamel-Agrinier, avocats associés sur ses offres et affirmations de droit et ce en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par exploits d'huissier en date du 3 septembre 2015, M. [P] [E] a fait signifier à la CPAM du Var sa déclaration d'appel et ses conclusions.

La CPAM du Var n'a pas constitué avocat et par courrier adressé à la cour le 21 septembre 2015, elle a indiqué qu'elle n'entendait pas intervenir à l'instance mais a fourni un décompte définitif de ses débours, précisant que la victime avait été prise en charge au titre de la législation sur les accidents du travail.

Elle a été assignée à personne morale et il convient de statuer par décision réputée contradictoire.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 août 2016 et l'affaire a été fixée à plaider à l'audience du 14 septembre 2016.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le rapport d'expertise établi par les docteur [M] et [O] sur la base duquel les parties s'accordent pour évaluer le préjudice de M. [E] mentionne que l'accident a occasionné à ce dernier :

- au niveau de la cheville et du pied droits, une fracture de la malléole externe, une fracture marginale postérieure du pilon tibial, une fracture du processus latéral du talus, une fracture de l'os naviculaire, une fracture du bord externe du cuboïde, une fracture des 2ème et 3ème cunéiformes et une fracture de la base du 1er et 2ème métatarsien,

- au niveau de la cheville et du pied gauches, une fracture de la malléole interne peu déplacée avec une plaie en regard, une fracture comminutive marginale antérieure du pilon tibial et une fracture du bord externe du calcanéen et du bord externe du talu.

M. [E] a été hospitalisé du 4 au 11 avril 2008.

La fracture de la malléole externe gauche a été ostéosynthésée le 7 avril 2008 sous anesthésie générale et les fractures de la cheville et du pied droit ont été traitées orthopédiquement.

M. [E] a été immobilisé en fauteuil roulant jusqu'au 30 juin 2008 puis s'est déplacé avec des cannes anglaises jusqu'au 31 août 2008 et a retrouvé une marche autonome fin septembre 2008.

Il a subi de nombreuses séances de rééducation jusqu'en mars 2010.

Il persiste à ce jour un état séquellaire plus important du côté droit avec raideur tibio tarsienne modérée, déformation médio-tarsienne et troubles de l'appui plantaire avec douleurs importantes du pied à l'appui et à la marche.

Les conséquences médico-légales s'établissent comme suit :

- déficit fonctionnel temporaire total du 4 avril au 30 juin 2008 (87 jours),

- déficit fonctionnel temporaire partiel :

. à 50 % du 1er juillet 2008 au 31 août 2008 (soit 2 mois),

. à 25 % du 1er septembre 2008 au 4 avril 2010 (soit 19 mois et 4 jours),

- date de consolidation médico-légale 4 avril 2010,

- assistance par une tierce personne à domicile à raison de deux heures trente par jour du 12 avril 2008 au 30 juin 2008 puis à raison de deux heures par jour du 1er juillet au 31 août 2008,

- existence d'un retentissement professionnel en raison d'une inaptitude à son métier de cuisinier et de la nécessité d'un reclassement professionnel

- déficit fonctionnel permanent de 15 %,

- souffrances endurées à hauteur de 3,5/7,

- préjudice esthétique à hauteur de 2/7,

- existence d'un préjudice d'agrément pour les activités sportives nécessitant la marche ou la course à pied,

Ces conclusions médico-légales qui ne font l'objet d'aucune critique particulière méritent de servir de base à l'évaluation du préjudice de M. [E] qui s'évalue comme suit :

I PRÉJUDICE PATRIMONIAL :

* préjudice patrimoniaux temporaires :

- dépenses de santé actuelles :

- frais médicaux pris en charge par la CPAM :

Selon le décompte du 17 septembre 2015, ce montant s'élève à 41.995,41 €

- frais médicaux restés à charge :

Au vu des justificatifs produits et en l'état de l'accord des parties sur ce point, il peut être alloué à M. [E] la somme de 899,57 € au titre des frais d'ambulance restés à charge et celle de 243 € au titre du renouvellement des frais orthopédiques, soit au total la somme de 1.142,57 €, ramenée à 1.140,57 € conformément à sa demande sur ce point.

- frais divers restés à charge :

Au vu des justificatifs produits et alors que ce poste de préjudice n'est pas discuté en cause d'appel, il peut être alloué à M. [E] la somme de 1.000 € au titre des frais de déplacement qu'il a engagés pour se rendre à l'hôpital pour les examens médicaux et les séances de rééducation, celle de 800 € au titre des frais d'assistance à expertise et celle de 49,57 € au titre des frais de photocopie et d'envoi de dossier médical, soit au total 1.849,57 €, le jugement étant confirmé de ce chef.

Le premier juge a justement évalué le poste de préjudice d'assistance par une tierce personne sur la base de 15 € de l'heure et alloué à M. [E] à ce titre la somme de 4.860 € se décomposant comme suit :

. 80 jours x 2h30 x 15 :3.000 €

. 62 jours x 2h00 x 15 :1.860 €

Il peut donc être alloué à M. [E] au titre des frais divers restés à charge la somme de 6.709,57€.

- perte de gains professionnels actuels :

M. [E] qui exerçait la profession de second de cuisine avec un salaire mensuel de 1.242,95 € (moyenne d'un net annuel de 14.915,43 €), soutient qu'il devait être embauché en qualité de chef de cuisine avec un salaire mensuel de 2.500 € à compter du 1er novembre 2008.

Il a été en arrêt de travail jusqu'au 25 juin 2010 puis a été déclaré inapte par la médecine du travail au cours de l'été 2010 et licencié pour inaptitude le 18 septembre 2010.

Il n'a donc jamais repris son travail au sein du restaurant où il exerçait son activité à [Localité 2].

M. [E] a fait l'objet d'une reconnaissance de travailleur handicapé à compter du 1er novembre 2010 et a été inscrit à Pôle emploi de décembre 2010 à août 2011.

Il a finalement retrouvé un emploi comme employé commercial polyvalent le 19 septembre 2011.

Dans une attestation produite aux débats, M. [Y], gérant de la sarl la Capitainerie où la victime travaillait avant son accident, déclare que compte tenu du sérieux et du savoir-faire de M. [E], il lui aurait confié à brève échéance le poste de chef de cuisine rémunéré à 2.500 € net et dans une seconde attestation, le même M. [Y] déclare avoir employé après le départ du chef de cuisine le 2 novembre 2008, M. [X] [W] qui a pris sa place alors que celle-ci était destinée à M. [E].

M. [W] lui même atteste avoir eu le poste de chef de cuisine le 2 novembre 2008, poste que M. [E] aurait du avoir s'il avait pu reprendre le travail.

Ces éléments qui attestent du souhait de l'employeur de remplacer le chef cuisinier par M. [E] et le peu le temps écoulé entre le mois d'avril 2008, date de l'accident, et le mois de novembre 2008, date du remplacement effectif du chef cuisinier, suffisent à établir de façon certaine, et non pas au titre d'une perte de chance, que si l'accident ne s'était pas produit M. [E] aurait eu ce poste rémunéré à hauteur de 2.500 € net à compter du 1er novembre 2008.

Par ailleurs, il ne saurait être tiré argument de ce que M. [W] ne perçoit qu'un salaire mensuel net de 2.000 € dés lors qu'il est justifié que ce dernier titulaire d'un CAP est moins diplômé que M. [E], lui même titulaire d'un BTS en cuisine.

M. [E] bénéficiait au moment de l'accident d'un revenu salarial mensuel de 1.415 € (moyenne des 4 derniers bulletins de salaire avant l'accident).

A cette somme s'ajoute l'avantage en nature dont il bénéficiait du fait qu'il prenait ses repas dans le restaurant, avantage qui peut être fixé à 102,72 € par mois (moyenne des 4 derniers bulletins de salaire avant l'accident).

M. [E] bénéficiait donc d'un revenu effectif mensuel de 1.517,72 €.

Par ailleurs, il ressort de ce qui précède que la perte de revenus de M. [E] avant consolidation peut être calculée sur la base de 2.500 € par mois à compter du 1er novembre 2008 auquel s'ajoute l'avantage repas dont il aurait également bénéficié s'il était resté dans le restaurant, soit 2.602,72 €.

La perte de gains professionnels actuels pour la période avant consolidation s'établit donc comme suit :

- du 4 avril 2008 au 4 novembre 2008 soit 1.517,72 € x 7 soit : 10.624,04 €

- du 4 novembre 2008 au 4 avril 2010 soit 2.602,72 € x 17 soit : 44.246,24 €

54.870,28 €

Il est établi en outre que la mutuelle de M. [E] était prise en charge par son ancien employeur, avantage dont il ne bénéficie plus après l'accident et pour la période considérée, soit jusqu'au 4 avril 2010, il peut lui être alloué à ce titre, et au vu du justificatif produit concernant la souscription d'une nouvelle mutuelle, la somme de 448,66 € x 2, soit 897,32 €.

Le total du perte de gains actuels s'élève donc à 54.870,28 € + 897,32 € soit 55.767 €.

* préjudice patrimoniaux permanents :

- frais futurs exposés par la CPAM :

Ils s'élèvent selon le décompte produit à la somme de 288,60 €

- frais futurs à la charge de M. [E] :

Les parties s'accordent pour considérer que M. [E] assumera une dépense annuelle de 81 € pour le renouvellement d'une paire de semelles.

Par ailleurs, c'est à bon droit que le tribunal a fait application du barème de capitalisation publié dans la gazette du palais du 27 et 28 mars 2013 qui repose sur des critères actualisés prenant en considération :

- les tables d'espérance de vie les plus récentes publiées par l'Insee (table définitive Insee 2006-2008 France entière)

- un taux d'intérêt de 1,20 %, inférieur à ceux des précédents barèmes, mais qui prend en compte l'évolution du coût de la vie et du taux de l'inflation.

Il peut donc être alloué à M. [E] à ce titre, compte tenu de son âge au jour où la cour statue, soit 32 ans, la somme de 81 x 34,553 soit 2.798,79 €.

- perte de gains professionnels futurs :

Ce poste de préjudice s'entend des pertes de revenus subis postérieurement à la date de la consolidation, soit en l'espèce le 4 avril 2010.

M. [E] a finalement retrouvé un emploi comme employé commercial polyvalent le 19 septembre 2011 avec un salaire net d'environ 1.200 € par mois, puis en 2012 de 1.299,80 € (moyenne d'un net annuel de 15.597,65 €), en 2013 de 1.416,76 € (moyenne d'un net annuel de 17.001,14 €) et en 2014 de 1.452,34 € (moyen d'un net imposable sur trois mois de 4.357,01 €).

Compte tenu des demandes, il est nécessaire de distinguer plusieurs périodes.

- période du 4 avril 2010 au 25 juin 2010 (82 jours) :

Il peut être alloué à M. [E] sur la base d'une perte de revenus de 2.602,72 € la somme de 7.016,65 €.

- période du 26 juin 2010 au 31 décembre 2012 (36 mois et 5 jours) :

Ainsi qu'il a été relevé plus haut, M. [E] sur cette période, soit n'a perçu aucun revenu soit a perçu un revenu salarial à compter du 19 septembre 2011 allant de 1.200 à 1.300 € par mois.

Il peut donc lui être alloué, conformément à ce qu'il demande, une perte de revenus mensuelle de 1.258,84 € soit la somme de 45.525,17 €.

- année 2013 :

M. [E] percevait un salaire de 1.416,76 € et sa perte de revenus s'établit pour cette période à 2.602,72 € - 1.416,76 € soit 1.185,96 €.

Il peut donc lui être alloué pour cette période la somme de 1.185,96 € x 12 soit 14.231,52 €.

- 1er janvier 2014 à fin octobre 2016 (date du prononcé de l'arrêt) :

M. [E] perçoit un salaire de 1.452,34 € et sa perte de gains peut être fixée pour cette période à 2.602,72 € - 1.452,34 € soit 1.150,38 €.

Il lui est donc alloué pour cette période la somme de 1.150,38 € x 34 soit 39.112,92 €.

- période postérieure à l'arrêt :

Il est nécessaire de réactualiser la perte de revenus au jour de l'arrêt en tenant compte de l'inflation, soit une perte de revenus mensuels de 1.246 €.

M. [E] est âgé de 33 ans au jour de l'arrêt et après capitalisation jusqu'à l'âge prévisible de la retraite, soit 65 ans, il est alloué à ce titre à M. [E] la somme de :

1.246 € x 12 x 25,157 soit 376.147,46 €.

Il convient enfin d'ajouter la perte d'avantage de la mutuelle sur la base de 448,66 € à compter du 4 avril 2010, date de la consolidation, la période antérieure ayant déjà été prise en charge au titre du poste perte de gains actuels.

A cette date, M. [E] était âgé de 26 ans et après capitalisation, il lui est alloué à ce titre la somme de 448,66 € x 29,644 soit 13.300,07 €.

Le total du poste perte de gains professionnels futurs s'élève donc à :

7.016,65 € + 45.525,17 € + 14.231,52 € + 39.112,92 € + 376.147,46 € + 13.300,07 € soit 495.333,79 €.

- incidence professionnelle :

Il est incontestable que la nécessité pour M. [E] d'abandonner le métier de cuisinier qu'il avait choisi et dans lequel il pouvait espérer faire une carrière, la dévalorisation sur le marché du travail et la nécessité d'occuper un emploi moins intéressant que ce qu'il espérait et enfin l'incidence sur sa retraite d'un revenu salarial, qui n'a pas été prise en compte au titre du poste perte de gains professionnels futurs caractérisent une réelle incidence professionnelle imputable aux conséquences de l'accident.

La cour dispose des éléments d'appréciation nécessaires pour fixer ce poste de préjudice à la somme de 100.000 € ainsi que l'offre la société Assurances Banque Populaire.

Le total du poste préjudice patrimonial s'élève donc à la somme de 704.033,73 €.

II PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX :

* préjudices extra-patrimoniaux temporaires :

- Déficit fonctionnel temporaire partiel et total :

Ce poste de préjudice peut être indemnisé sur la base de 800 € par mois et il convient d'allouer à ce titre à M. [E] la somme de 6.914 € se décomposant comme suit :

- déficit fonctionnel temporaire total (87 jours) :2.288 €

- déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % (deux mois) : 800 €

- déficit fonctionnel temporaire partiel à 25 % : (19 mois et 4 jours) :3.826 €

- souffrances endurées :

Conformément à l'accord des parties sur ce point, il est alloué au titre de ce poste de préjudice, fixé par l'expert à 3,5/7, la somme de 8.000 €.

* préjudices extra-patrimoniaux permanents :

- déficit fonctionnel permanent :

Le rapport d'expertise a fixé à 15 % le taux de ce déficit.

Ce poste de préjudice, compte tenu de l'âge de la victime, soit 26 ans à la date de la consolidation, a été justement évalué par le premier juge à la somme de 31.500 €.

- préjudice esthétique :

Conformément à l'accord des parties sur ce point, il est alloué au titre de ce poste de préjudice, fixé par l'expert à 2/7, la somme de 5.000 €.

- Préjudice d'agrément :

L'expert retient l'existence d'un préjudice d'agrément pour les activités sportives nécessitant la marche ou la course à pied.

Compte tenu de son jeune âge au jour de l'accident, il peut lui être alloué à ce titre la somme de 8.000 €.

Le total du poste préjudice extra-patrimonial s'élève donc à la somme de 59.414 € et le préjudice total à 763.447,73 €.

Après déduction de la créance de la CPAM du Var qui verse à M. [E] une rente accident du travail, soit la somme de 118.623,97 €, et des provisions versées, soit 304.000 €, il revient à la victime la somme de 340.823,76 €.

Il convient de condamner in solidum M. [N] et la société Assurances Banque Populaire à payer cette somme à M. [E] en deniers ou quittances pour tenir compte des sommes déjà versées au titre de l'exécution provisoire.

Selon l'article L 211-9 2ème alinéa du code des assurances, une offre d'indemnité doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident et l'article L 211-9 3ème alinéa précise que cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime, l'offre d'indemnisation devant être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

Par ailleurs, l'article L 211-13 du code des assurances dispose que lorsque l'offre d'indemnité prévue à l'article L 211-9 du code des assurances n'a pas été faite dans les délais impartis par ce texte, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit, au double du taux de l'intérêt légal, à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

En l'espèce, le premier juge a retenu à bon droit que l'assureur qui avait été informé de la date de consolidation de M. [E] à la suite des conclusions du rapport d'expertise amiable déposées le 8 avril 2010 aurait du présenter une offre d'indemnisation au plus tard le 8 septembre 2010.

En l'absence d'offre faite par l'assureur, il a donc à juste titre appliqué la sanction du doublement des intérêts légaux à compter de cette date ce qui n'est d'ailleurs pas discuté par la société Assurances Banque Populaire.

En outre, la sanction prévue à l'article L 211-13 du code des assurances a pour assiette la totalité de l'indemnité allouée à la victime à titre de dommages et intérêts et non pas le solde restant du après imputation de la créance des organismes sociaux ou des provisions déjà versées.

Il convient dés lors, réformant le jugement de ce chef, de dire que la sanction du doublement des intérêts légaux s'applique sur la totalité des indemnités allouées avant imputation des organismes sociaux et déduction des provisions.

Enfin, en l'absence d'offre manifestement suffisante faite par l'assureur, y compris dans le cadre de la procédure d'appel, les sommes proposées représentant moins de la moitié du montant des indemnités allouées, il convient de dire que la sanction s'appliquera jusqu'à la date du présent arrêt.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a alloué à M. [E] une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande à nouveau de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel à son profit et il lui est alloué à ce titre la somme de 2.000 €.

Les dépens de la procédure d'appel sont mis à la charge de M. [N] et de la société Assurances Banque Populaire.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la société Assurances Banque Populaire à payer à M. [E] la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance,

Statuant de nouveau,

Fixe le préjudice corporel subi par M. [P] [E] à la suite de l'accident dont il a été victime le 4 avril 2008 à la somme de 763.447,73 €.

Après déduction de la créance de la CPAM du Var et des provisions versées, condamne in solidum M. [N] [N] et la société Assurances Banque Populaire à payer en deniers ou quittances à M. [P] [E] la somme de TROIS CENT QUARANTE MILLE HUIT CENT VINGT TROIS EUROS SOIXANTE SEIZE (340.823,76 €).

Dit que la totalité des indemnités allouées avant imputation des organismes sociaux et déduction des provisions est productive d'intérêts au double de l'intérêt au taux légal à compter du 8 septembre 2000 et qu'au jour du présent arrêt.

Condamne M. [N] [N] et la société Assurances Banque Populaire in solidum à payer en cause d'appel à M. [P] [E] la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000 €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Déclare le présent arrêt commun à la CPAM du Var.

Condamne M. [N] et la société Assurances Banque Populaire in solidum aux dépens de la procédure d'appel et accorde au conseil de l'appelant le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 15/09781
Date de la décision : 27/10/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°15/09781 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-27;15.09781 ?
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