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07/07/2016 | FRANCE | N°15/08110

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 07 juillet 2016, 15/08110


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 07 JUILLET 2016



N° 2016/313













Rôle N° 15/08110







[R] [E]





C/



SA AXA FRANCE IARD

CPAM DES BOUCHES-DU-

RHONE





































Grosse délivrée

le :

à :

Me

KUHN-MASSOT

Me IMPERATORE
>







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 21 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/09083.





APPELANT



Monsieur [R] [E]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Olivier KUHN-MASSOT, avocat au barreau de MARS...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 07 JUILLET 2016

N° 2016/313

Rôle N° 15/08110

[R] [E]

C/

SA AXA FRANCE IARD

CPAM DES BOUCHES-DU-

RHONE

Grosse délivrée

le :

à :

Me

KUHN-MASSOT

Me IMPERATORE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 21 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/09083.

APPELANT

Monsieur [R] [E]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Olivier KUHN-MASSOT, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

SA AXA FRANCE IARD

[Adresse 3], en son Etablissement de Marseille sis [Adresse 4]

représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assistée de Me Jean François ABEILLE de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, substité par Me Haziza ABOU EL HAJA, avocat au barreau d'AIX-EN-RPOVENCE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE

[Adresse 2]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Juin 2016 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller, et Madame Anne VELLA, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Christiane BELIERES, Présidente

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Sylvie GALASSO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Juillet 2016.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Juillet 2016.

Signé par Madame Christiane BELIERES, Présidente et Madame Samira CHKIRNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé des faits et de la procédure

Le 2 septembre 1990 M. [R] [E] a été victime d'un accident de la circulation alors qu'il était passager d'un véhicule conduit par M. [F], propriété de M. [K] [P] et assuré auprès de la Sa Axa France Iard (Sa Axa).

Il a été blessé dans cet accident.

Une expertise amiable a été diligentée, confiée au docteur [C] qui a déposé son rapport le 6 juillet 1992 fixant une incapacité temporaire totale de trois mois, une consolidation au 17 juin 1992 et une incapacité permanente partielle de 10 % avec réserve pour l'avenir (comitialité).

Par jugement du 25 mars 1997 le tribunal de grande instance de Marseille a débouté M. [X] [E] de ses demandes d'indemnisation de l'incapacité temporaire totale, de l'incapacité temporaire partielle et du préjudice d'agrément en l'état d'une transaction du 6 novembre 1992 ; sa demande d'indemnisation du préjudice découlant de la perte de chance d'obtenir le baccalauréat a été rejetée faute de preuve d'un lien causal direct et exclusif entre le fait générateur du préjudice et la non obtention du baccalauréat ; sur la base du rapport d'expertise médicale du docteur [N] en date du 22 janvier 1996 sa demande d'indemnisation d'un préjudice d'aggravation a été rejetée ; cette décision a été partiellement infirmée par la cour d'appel d'Aix en Provence par arrêt du 31 octobre 2000 qui a estimé que le préjudice scolaire, expressément réservé par le protocole transactionnel, devait être indemnisé à hauteur de 152,45 € (10'000 Francs).

M. [X] [E] invoquant une aggravation de son état a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 28 mai 2010, a prescrit une mesure d'expertise médicale et a désigné pour y procéder le docteur [I] qui a déposé un rapport de non consolidation le 21 décembre 2010 retenant que le taux d'incapacité permanente partielle né de l'aggravation de l'état de santé ne serait pas inférieur à 10 %.

Par ordonnance du 27 mai 2011 le juge des référés a condamné M. [K] [P] et la Sa Axa à payer à M. [X] [E] une provision de 30'000 € à valoir sur l'indemniSation de son préjudice corporel résultant de l'aggravation.

Le docteur [I] a déposé son rapport de consolidation le 21 décembre 2011.

Par exploits d'huissier du 10 juillet 2013, M. [X] [E] a fait assigner la Sa Axa devant le tribunal de grande instance de Marseille, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône (Cpam) prise en sa qualité de tiers payeur, pour obtenir la réparation du préjudice corporel résultant de l'aggravation.

Par jugement du 3 octobre 2014, assorti de l'exécution provisoire, cette juridiction a :

- rappelé que la Sa Axa est responsable des conséquences dommageables de l'accident du 2 septembre 1990 et que le droit à indemnisation de M. [X] [E] est entier,

- fixé le montant du préjudice résultant de l'aggravation des conséquences dommageables de l'accident depuis le 29 novembre 2009 à la somme de 60'162 €,

- condamné la Sa Axa à verser à M. [X] [E] la somme de 60'162 € dont à déduire la provision versée,

- dit le jugement commun et opposable à la Cpam,

- condamné la Sa Axa à payer à M. [X] [E] la somme de 1 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Sa Axa aux dépens avec distraction.

Il a détaillé ainsi qu'il suit le préjudice corporel de la victime :

- perte de gains professionnels actuels : aucune somme, faute de preuve d'une perte de revenus entre l'aggravation du 29 novembre 2009 et la nouvelle consolidation du 29 novembre 2011, imputable à l'épilepsie chronique affectant la victime,

- perte de gains professionnels futurs : aucune somme, faute de preuve d'une perte de revenus consécutive à l'aggravation des séquelles de l'accident et perdurant après la consolidation,

- incidence professionnelle : 20'000 €, l'épilepsie chronique limitant les possibilités professionnelles de la victime,

- déficit fonctionnel temporaire total et partiel sur une base de 760 € par mois, soit 1 812 €,

- souffrances endurées : 7 950 €,

- déficit fonctionnel permanent : 20'400 €,

- préjudice d'agrément : aucune somme, faute de preuve de la pratique d'activités sportives ou de loisirs antérieures à l'aggravation,

- préjudice sexuel : 10'000 € au titre de la perte de la libido,

- préjudice d'établissement : aucune somme, la victime ne justifiant pas de la perte de chance de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap.

Par déclaration du 7 mai 2015 dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, M. [X] [E] a interjeté appel général de ce jugement.

Moyens des parties

M. [X] [E] demande dans ses conclusions du 20 mai 2016, en application de la loi du 5 juillet 1985, de :

confirmer le jugement quant à la survenance de l'aggravation et au droit à indemnisation,

infirmer le jugement pour le surplus et

- à titre principal :

* ordonner une mesure d'expertise médicale,

* lui allouer une provision de 150'000 € à valoir sur son indemnisation,

- à titre subsidiaire, condamner la Sa Axa à lui verser les sommes suivantes :

* dépenses de santé actuelles : à régler en deniers ou quittance à qui il appartiendra

* perte de gains professionnels actuels : 1 000 €

* déficit fonctionnel temporaire total : 600 €

* déficit fonctionnel temporaire partiel : 4 725 €

* souffrances endurées : 8 000 €

* perte de gains professionnels futurs et incidence professionnelle : à raison d'une perte mensuelle de 1 000 € jusqu'à la liquidation de ses droits à la retraite à l'âge de 65 ans soit 324'000 € et sur une base mensuelle de 500 € passé l'âge de 65 ans soit 120'000 €,

* déficit fonctionnel permanent : 60'000 €

* préjudice d'agrément : 15'000 €

* préjudice d'établissement : 100'000 €

* préjudice sexuel : 15'000 €

obtenir la condamnation de la Sa Axa à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

obtenir la condamnation de la Sa Axa aux dépens, dont les frais d'expertise et d'appel avec distraction.

Il fait valoir que la mesure d'expertise confiée à l'expert n'était pas complète ni adaptée à la pathologie très spécifique des traumatisés crâniens, qu'ainsi certains postes de préjudice sont évoqués mais non repris dans les conclusions et d'autres postes ont été omis, qu'il y a lieu en outre de tenir compte de l'affection oculaire en lien avec l'accident.

Il estime qu'il a subi un préjudice d'établissement professionnel considérable puisqu'il perçoit désormais le SMIC majoré pour travail de nuit alors qu'il avait, malgré l'accident, géré avec succès deux établissements successifs jusqu'à ce qu'il accumule de mauvaises décisions en relation avec ses troubles du discernement relevés par l'expert judiciaire ce qui a conduit à la liquidation de son seconde fonds de commerce ; il précise que si ses avis d'imposition ne font pas apparaître de revenus tirés de l'exploitation de ce second fonds de commerce c'est parce qu'il investissait les bénéfices dans l'achat du fond à hauteur de 5 000 € mensuels et que ne pouvant plus travailler sur informatique ni conduire, étant atteint d'agoraphobie et selon les psychiatres d'une bipolarité certaine et inquiétante se recoupant avec les problèmes de compréhension et de mémoriSation en liaison directe avec l'accident, son avenir professionnel est gravement obéré.

Il estime que ses séquelles ont une répercussion sur ses activités avec ses enfants et ses amis et qu'il subit ainsi un véritable préjudice d'agrément.

La Sa Axa demande dans ses conclusions du 31 mai 2016, en application de la loi du 5 juillet 1985 et des articles 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme et 15, 16 et suivants du code de procédure civile, de :

rejeter comme tardives les réclamations tendant à une nouvelle expertise et à l'octroi d'une provision ces demandes étant au surplus non fondées,

confirmer le jugement en ce qu'il a

- débouté M. [X] [E] de ses demandes au titre de la perte de gains professionnels actuels, de la perte de gains professionnels futurs, du préjudice d'agrément et du préjudice d'établissement,

- allouer à M. [X] [E] une somme de 20'000 € au titre de l'incidence professionnelle,

infirmer le jugement pour le surplus et

- débouter M. [X] [E] de sa demande tendant à l'indemnisation d'un préjudice sexuel

- réduire ainsi qu'il suit les autres indemnités allouées en lien avec l'aggravation :

* dépenses de santé actuelles : surseoir à statuer jusqu'à la communication de la créance définitive de la Cpam,

* perte de gains professionnels : rejeter cette demande ; en effet celle-ci n'est pas en conformité avec à la nomenclature Dintilhac pour ne pas distinguer les pertes subies avant la consolidation et après celle-ci ; il n'est pas justifié d'une éventuelle perte de revenus ni des indemnités journalières versées par la Cpam ; l'expert judiciaire n'a pas retenu l'existence de ce poste de préjudice, et, en dépit de l'aggravation épileptique retenue en 2009, la victime a pu conserver son emploi et ne démontre pas une baisse effective ou prévisible de ses revenus ni de son avantage vieillesse

* déficit fonctionnel temporaire : sur une base de 20 € par jour, soit 3 735 €

* souffrances endurées : 4 000 €

* déficit fonctionnel permanent : 15'000 €.

La Cpam, assignée par acte d'huissier du 20 juillet 2015 délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat.

Malgré un rappel en date du 26 novembre 2015 elle n'a pas communiqué sa créance à la cour.

L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

Motifs de la décision

Le droit à indemnisation de l'aggravation du préjudice corporel subi par M. [E] n'est pas contesté ; seule est discutée en cause d'appel l'évaluation de ses préjudices liées à cette aggravation, au titre notamment des pertes de gains professionnels actuels et futurs.

Sur le préjudice corporel

L'expert [I] indique que M. [X] [E] a installé le 29 novembre 2009 à distance du traumatisme crânien subi le 2 septembre 1990, une épilepsie partielle avec état dépressif qui constitue une aggravation de ce traumatisme crânien.

Il conclut à :

- une aggravation du 29 novembre 2009

- une perte de gains professionnels actuels : du 29 novembre au 6 décembre 2009, du 16 août 2010 au 31 août 2010, du 29 septembre 2011 au 30 septembre 2011, du 3 novembre 2011 au 18 novembre 2011

- un déficit fonctionnel temporaire total le 29 novembre 2009 et du 16 août 2010 au 20 août 2010

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 % du 30 novembre 2009 au 15 août 2010 et du 21 août 2010 jusqu'au 29 novembre 2011

- une consolidation au 29 novembre 2011

- des souffrances endurées de 3,5/7

- la victime se trouve dans l'impossibilité de conduire du fait de son épilepsie post traumatique.

Le docteur [I] est spécialisé en neurologie ; son rapport repose sur des données objectives, après consultation de l'entier dossier médical, examen de M. [E] et analyse de ses doléances ; la victime était assistée d'un médecin conseil et a été en mesure de rédiger des dires afin de faire valoir ses contestations ; les certificats médicaux que M. [E] a communiqués ne sont pas suffiSants à remettre en cause les conclusions de l'expert et la demande de nouvelle expertise sera rejetée.

Son rapport constitue ainsi une base valable d'évaluation de l'aggravation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 1] 1971, de son activité de veilleur de nuit, de la date de consolidation de l'aggravation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel Sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemniSant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Préjudices patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Perte de gains professionnels actuels /

Ce poste vise à compenser une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d'une perte effective de revenus.

Il ressort des bulletins de salaire que M. [E] a communiqués que l'établissement public Assistance des Hopitaux de Marseille a maintenu ses salaires pendant les 41 jours d'arrêt de travail discontinus retenus par l'expert.

Par ailleurs les attestations de paiement d'indemnités journalières délivrées par la Cpam et versées aux débats par la victtme démontrent qu'il a perçu pour les périodes du 2 décembre 2009 au 6 décembre 2009 et du 19 août 2010 au 31 août 2010 ces prestations en espèces à hauteur de 143,75 € et 392,34 €.

La perte de gains actuels n'est donc pas démontrée et aucune somme ne sera allouée de ce chef.

Préjudices patrimoniaux

permanents (après consolidation)

- Perte de gains professionnels futurs /

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

Seuls sont indemnisables les préjudices liés à l'aggravation et non ceux afférents au traumatisme initial.

En l'espèce, les bulletins de salaire de M. [E] font ressortir qu'employé, au jour de l'aggravation, soit le 29 novembre 2009 et depuis plusieurs années, par l'établissement public Assistance des Hôpitaux de Marseille il a continué à travailler pour celui-ci malgré l'aggravation de son état de santé.

Son activité de nuit a été obtenue en 2008 de sorte que l'aggravation de 2009 est sans incidence sur la modification de son poste de travail.

Enfin ses avis d'imposition sur les revenus des années 2007, 2008 et de 2009 démontrent qu'il n'a perçu, sur ces années, aucun revenu industriel ou commercial et les jugements du tribunal de commerce de Marseille du 1er octobre 2007 et du 5 novembre 2008 établissent que la société ACPL au titre de laquelle il demande une indemnisation était largement en difficulté à ces dates puisqu'elle a fait l'objet d'un plan de redressement sur 10 ans puis d'une liquidation judiciaire à court délai.

Au vu de l'ensemble de ces données, M. [E] ne justifie pas d'une perte de gains professionnels futurs liée de façon certaine et directe à l'aggravation de son état de santé et sa demande formulée de ce chef sera rejetée.

- Incidence professionnelle50 000 €

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.

M. [X] [E] est atteint de crises d'épilepsie, ce qui est de nature à rendre son activité professionnelle plus difficile ; en outre il est dans l'incapacité de conduire ce qui constitue une entrave à l'exercice de nombre de métiers et entraîne sa dévalorisation sur le marché du travail.

Ce chef de dommage est donc établi et doit être indemnisé par l'allocation d'une somme de 50.000 €.

Préjudices extra-patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire4 900 €

Ce poste inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l'existence et le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel pendant l'incapacité temporaire.

Il doit être réparé sur la base d'environ 800 € par mois, eu égard à la nature des troubles et de la gêne subie soit 160 € (800 € x 6 jours : 30 jours) pendant la période d'incapacité totale de 6 jours et proportionnellement pendant la période d'incapacité partielle à 25 % de 23,75 mois soit 4 750 € (800 € x 25 % x 23,75 mois) soit 4 910 € au total arrondi à 4 900 €.

- Souffrances endurées8 000 €

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison des souffrances et angoisse consécutives aux crises ; évalué à 3,5/7 par l'expert, il justifie l'octroi d'une indemnité de 8 000 €.

permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent31 200 €

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte anatomo-physiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence (personnelles, familiale et sociales).

Il est caractérisé par des crises d'épilepsie et un état dépressif, ce qui conduit à un taux d'aggravation de 12 % qui participe d'un déficit fonctionnel permanent total de 22 % justifiant une indemnité de 31 200 € pour un homme âgé de 38 ans à la consolidation de l'aggravation.

- Préjudice d'agrément/

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

M. [X] [E] ne justifiant pas s'adonner, avant l'aggravation de son état de Santé à une activité de cette nature, en l'absence du moindre élément produit à ce sujet (attestation ou autre) doit être débouté de toute demande à ce titre.

- Préjudice sexuel/

Ce poste comprend divers types de préjudices touchant à la sphère sexuelle et notamment celui lié à l'acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l'accomplissement de l'acte sexuel.

L'expert ne retient pas une baisse de l'envie ou de la libido ; ce chef de préjudice allégué n'est pas démontré ; aucune somme ne sera allouée de ce chef.

- Préjudice d'établissement /

Ce poste de prejudice indemnise la perte d'espoir, de chance ou de toute possibilité de réaliser un projet de vie familiale 'normal' en raison de la gravité du handicap permanent, dont reste atteint la victime après sa consolidation : il s'agit de la perte d'une chance de se marier, de fonder une famille, d'élever des enfants et plus généralement des bouleversements dans les projets de vie de la victime qui l'obligent à effectuer certaines renonciations sur le plan familial.

En l'espèce M. [X] [E] n'établit pas des renoncements dans sa vie familiale, ainsi qu'il l'invoque ; il ne peut prétendre à aucune indemnisation sur ce point.

Le préjudice corporel global subi par M. [E] au titre de l'aggravation de son état s'élève ainsi à la somme de 94 100 €, provisions non déduites qui, en application de l'article 1153-1 du code civil, porte intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 3 octobre 2014 à hauteur de 60 162 € et à compter du prononcé du présent arrêt soit le 7 juillet 2016 à hauteur de 33 938 €.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime doivent être confirmées.

La Sa Axa qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemniSation supportera la charge des entiers dépens d'appel.

L'équité commande d'allouer à M. [X] [E] une indemnité de 1.500 € au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs

La Cour,

- Confirme le jugement

hormis sur le montant de l'indemnisation allouée à M. [R] [E],

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Déboute M. [R] [E] de sa demande de nouvelle expertise et de provision,

- Fixe le préjudice corporel global né de l'aggravation de l'état de santé de M. [R] [E], à la somme de 94 100 €,

- Condamne la Sa Axa France Iard à payer à M. [R] [E] les sommes de :

* 94 100 €, sauf à déduire les provisions versées, avec les intérêts légaux à compter du 3 octobre 2014 à hauteur de 60 162 € et à compter du 7 juillet 2016 à hauteur de 33 938 €,

* 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Condamne la Sa Axa France Iard aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément  aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 15/08110
Date de la décision : 07/07/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°15/08110 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-07-07;15.08110 ?
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