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30/06/2016 | FRANCE | N°15/21324

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14e chambre, 30 juin 2016, 15/21324


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

14e Chambre





ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2016



N° 2016/935





Action intentée contre le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante (Loi 2000-1257 du 23/12/2000 Décret 2001-963 du 23/10/2001)









Rôle N° 15/21324





[N] [O]

[J] [O]

[Y] [T] [W]





C/



FIVA FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE













Grosse délivrée

le :





a



Me Patrice HUMBERT



Me Alain TUILLIER

















Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :









DEMANDEURS



Monsieur [N] [O], demeurant [Adresse 3]



représenté par Me Patrice HUMBERT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

14e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2016

N° 2016/935

Action intentée contre le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante (Loi 2000-1257 du 23/12/2000 Décret 2001-963 du 23/10/2001)

Rôle N° 15/21324

[N] [O]

[J] [O]

[Y] [T] [W]

C/

FIVA FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE

Grosse délivrée

le :

a

Me Patrice HUMBERT

Me Alain TUILLIER

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

DEMANDEURS

Monsieur [N] [O], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Patrice HUMBERT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [J] [O], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Patrice HUMBERT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [Y] [T] [W], représentant son sa mère madame [G] [O], décédée, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Patrice HUMBERT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

DEFENDERESSE

FIVA Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante, demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Alain TUILLIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 02 Juin 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. Gérard FORET-DODELIN, Président

Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller

Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Nathalie ARNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2016

Signé par M. Gérard FORET-DODELIN, Président et Madame Farida ABBOU , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

[Z] [O], né le [Date naissance 1] 1924, est décédé le [Date décès 2] 2012 d'un mésothéliome pleural diagnostiqué le 13 octobre 2010. Le 28 mars 2013, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches du Rhône a pris en charge la maladie et le décès au titre du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles.

Le 10 décembre 2014, saisi d'une demande d'indemnisation par les ayants droit de [Z] [O], le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante a offert en ce qui concerne l'action successorale la somme de 3.138,02 euros au titre de l'incapacité fonctionnelle, la somme de 23.100 euros au titre du préjudice moral, la somme de 7.800 euros au titre du préjudice physique, la somme de 7.800 euros au titre du préjudice d'agrément, la somme de 500 euros au titre du préjudice esthétique et la somme de 1.792,53 euros au titre des frais funéraires. Il a offert la somme de 8.700 euros à [N] [O], fils de [Z] [O], en réparation de son préjudice moral.

Par lettre recommandée avec accusé de réception reçue au greffe de la cour le 10 février 2015, les fils de [Z] [O], [N] [O] et [J] [O], et le petit-fils de [Z] [O], [Y] [T] [W] venant en représentation de sa mère [G] [O] décédée le [Date décès 1] 2013, ont contesté les offres du Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante.

Un arrêt du 21 octobre 2015 a ordonné le retrait conventionnel de l'affaire du rôle de la cour. L'affaire a été rétablie au rôle de la cour sur demande du Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante reçue au greffe le 21 octobre 2015.

Par conclusions visées au greffe le 2 juin 2016 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [N] [O], [J] [O] et [Y] [T] [W] :

- fixent la date de consolidation au 19 juillet 2010, soulignent que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie verse une indemnité au titre de l'incapacité fonctionnelle jusqu'à la fin du mois au cours duquel le décès est survenu alors que le Fonds verse une indemnité qui s'arrête au jour du décès, soutiennent que la somme réglée par la caisse pour la période postérieure au décès ne peut pas être déduite et réclament la somme de 8.299,59 euros au titre de l'incapacité fonctionnelle de leur auteur,

- affirment que la demande relative à l'assistance d'une tierce personne au bénéfice de leur auteur est recevable, observent que le formulaire du Fonds ne prévoit pas ce poste de préjudice, précisent qu'aucune allocation n'a été versée, s'opposent à tout sursis à statuer et réclament la somme de 34.620 euros,

- réclament la somme de 80.000 euros en réparation du préjudice moral de [Z] [O], la somme de 40.000 euros en réparation des souffrances physiques de [Z] [O], la somme de 25.000 euros en réparation du préjudice d'agrément de [Z] [O] et la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice esthétique de [Z] [O],

- sollicitent la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation du Fonds aux dépens.

Par conclusions visées au greffe le 2 juin 2016 maintenues et soutenues oralement à l'audience, le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante :

- réplique que la première constatation de la maladie est le 13 octobre 2010 et que cette date fait débuter l'indemnisation de l'incapacité fonctionnelle,

- soulève l'irrecevabilité de la demande d'indemnisation de la tierce personne s'agissant d'une réclamation présentée pour la première fois devant la cour, est au rejet de la demande pour la période du 19 juillet 2010 au 10 mai 2012 et souhaite qu'il soit sursis à statuer pour la période du 11 mai 2012 au [Date décès 2] 2012,

- objecte que l'intégralité des sommes versées par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie doivent être déduites de l'indemnisation du déficit fonctionnel et entend que son offre à hauteur de 3.138,02 euros soit validée,

- demande également que ses offres de 23.100 euros au titre du préjudice moral, de 7.800 euros au titre du préjudice physique, de 7.800 euros au titre du préjudice d'agrément et de 500 euros au titre du préjudice esthétique soient entérinées,

- s'oppose à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Seule fait litige l'indemnisation de [Z] [O].

[Z] [O] est né le [Date naissance 1] 1924 et est décédé le [Date décès 2] 2012 d'un mésothéliome pleural à l'âge de 88 ans.

Sur l'indemnisation de l'incapacité fonctionnelle :

[Z] [O] a été hospitalisé le 13 juillet 2010 pour des douleurs abdominales non expliquées et une pleurésie droite non expliquée. En septembre 2010, il a été hospitalisé pour l'exploration de l'épanchement pleural et le scanner n'a pas révélé le mésothéliome pleural qui a été diagnostiqué seulement le 13 octobre 2010 grâce aux biopsies pleurales. Il s'ensuit de ces éléments que, si l'identification de la pathologie, a été tardive la maladie a bien été révélée et constatée le 13 juillet 2010.

Dans ces conditions, il convient de fixer la date de consolidation au 19 juillet 2010 comme le sollicitent les ayants droit de [Z] [O].

Il s'ensuit, en retenant le barème du Fonds et le taux d'incapacité de 100 %, l'indemnité suivante :

- du 19 juillet 2010 au 31 décembre 2010 : 8.613,35 euros, soit 18.939 euros multipliés par 166 jours et divisés par 365 jours,

- du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011 : 18.939 euros,

- du 1er janvier 2012 au [Date décès 2] 2012 : 11.901,56 euros, soit 18.939 euros multipliés par 230 jours et divisés par 366 jours,

- TOTAL : 39.453,91 euros.

L'intégralité de la somme versée par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie au titre du déficit fonctionnel doit être déduite. En effet, le préjudice doit être intégralement réparé sans perte ni profit pour la victime. Aussi, le fait que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie verse une indemnité postérieurement au décès n'a pas à générer un profit. La caisse a réglé la somme de 31.801,67 euros.

En conséquence, l'indemnisation du préjudice fonctionnel doit être fixée à la somme de 7.652,24 euros.

Sur l'indemnisation de l'assistance d'une tierce personne :

S'agissant de la recevabilité de la demande :

Les ayants droit de [Z] [O] n'ont pas demandé au Fonds l'indemnisation de ce poste de préjudice.

Il résulte de l'application combinée de l'article 53 IV de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 dans sa rédaction applicable à la cause, de l'article 15 du décret n° 2001-963 du 23 octobre 2001, de l'article 1382 du code civil et du principe de la réparation intégrale que, dans le cas où l'offre formulée par le Fonds n'est pas acceptée, la victime ou ses ayants droits sont recevables à saisir la cour d'appel de toute demande d'un chef de préjudice trouvant sa source dans la contamination par l'amiante.

En conséquence, la demande d'indemnisation de l'assistance d'une tierce personne doit être déclarée recevable.

S'agissant du bien fondé de la demande :

[Z] [O] a été hébergé en maison de retraite à compter de l'automne 2010 jusqu'à son décès et le coût de l'établissement s'est monté au total à la somme de 32.319,55 euros ainsi que le démontre l'attestation de l'établissement destinée aux services fiscaux. D'une part, cette somme correspond à ce que [Z] [O] a dû acquitter hors aides et allocations, et d'autre part, le fils de [Z] [O] atteste que ce dernier ne percevait pas d'allocation.

La coïncidence entre la survenance de la pathologie en juillet 2010 et l'entrée en maison de retraite en septembre 2010 et le taux de 100 % de l'incapacité causée par la maladie établissent la relation causale entre la maladie et l'hébergement en maison de retraite.

Dans ces conditions, le coût de l'hébergement en maison de retraite doit être indemnisé comme une assistance par tierce personne.

En conséquence, l'indemnisation de l'assistance d'une tierce personne doit être fixée à la somme de 32.319,55 euros.

Sur l'indemnisation des souffrances morales :

La dégradation de l'état général caractérisée par un fort amaigrissement, les difficultés à se nourrir et l'abandon des cures de chimiothérapie ne laissaient pas de doute sur l'issue de la maladie. [Z] [O] qui a accepté l'abandon de la chimiothérapie savait qu'il allait mourir.

Au regard de ces éléments et de l'âge de [Z] [O], l'offre d'indemnisation faite par le Fonds à hauteur de 23.100 euros répare justement le préjudice moral.

En conséquence, les ayants droit de [Z] [O] doivent être déboutés de leur demande au titre des souffrances morales.

Sur l'indemnisation des souffrances physiques :

Les comptes rendus médicaux démontrent une dégradation importante de l'état général, l'abandon de la chimiothérapie qui s'est soldée par deux complications septiques sévères, des douleurs importantes et une désorientation.

Le déficit fonctionnel est indemnisé et ne répare pas une perte de revenu puisque [Z] [O] était à la retraite.

Au regard de ces éléments et de l'âge de [Z] [O], l'offre d'indemnisation faite par le Fonds à hauteur de 7.800 euros répare justement le préjudice physique.

En conséquence, les ayants droit de [Z] [O] doivent être déboutés de leur demande au titre des souffrances physiques.

Sur l'indemnisation du préjudice d'agrément :

Le préjudice d'agrément suppose la privation d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

Il n'est pas versé de pièces objectivant le préjudice d'agrément.

Dans ces conditions, l'offre faite par le Fonds à hauteur de 7.800 euros doit être entérinée.

En conséquence, les ayants droit de [Z] [O] doivent être déboutés de leur demande au titre du préjudice d'agrément.

Sur l'indemnisation du préjudice esthétique :

Au regard des éléments de la cause et de l'âge de [Z] [O], l'offre d'indemnisation faite par le Fonds à hauteur de 500 euros répare justement le préjudice esthétique.

En conséquence, les ayants droit de [Z] [O] doivent être déboutés de leur demande au titre du préjudice esthétique.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

L'équité commande de débouter les ayants droit de [Z] [O] de leur demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens doivent être laissés à la charge du Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Juge que le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante doit verser à [N] [O], [J] [O] et [Y] [T] [W], indivisément, en leurs qualités d'ayants droit de [Z] [O], la somme de 7.652,24 euros au titre du préjudice fonctionnel,

Déclare recevable la demande d'indemnisation de l'assistance d'une tierce personne,

Juge que le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante doit verser à [N] [O], [J] [O] et [Y] [T] [W], indivisément, en leurs qualités d'ayants droit de [Z] [O], la somme de 32.319,55 euros au titre de l'assistance d'une tierce personne,

Déboute [N] [O], [J] [O] et [Y] [T] [W], ayants droit de [Z] [O], de leurs demandes au titre des souffrances morales, des souffrances physiques, du préjudice d'agrément et du préjudice esthétique,

Déboute [N] [O], [J] [O] et [Y] [T] [W], ayants droit de [Z] [O], de leur demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse les dépens à la charge du Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 15/21324
Date de la décision : 30/06/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°15/21324 : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-30;15.21324 ?
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