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19/05/2016 | FRANCE | N°15/09149

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre b, 19 mai 2016, 15/09149


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

11e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 19 MAI 2016



N° 2016/256













Rôle N° 15/09149







[Z] [F]

[K] [U] épouse [F]





C/



SAS SUD EST INVESTMENTS





















Grosse délivrée

le :

à :



SELARL BOULAN

ME LADOUCE













Décision déférée à la Co

ur :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 07 Avril 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/02112.





APPELANTS



Monsieur [Z] [F]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 3]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Pierre-yves IMPERATORE de la SELARL BOULAN CHE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

11e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 19 MAI 2016

N° 2016/256

Rôle N° 15/09149

[Z] [F]

[K] [U] épouse [F]

C/

SAS SUD EST INVESTMENTS

Grosse délivrée

le :

à :

SELARL BOULAN

ME LADOUCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 07 Avril 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/02112.

APPELANTS

Monsieur [Z] [F]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 3]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Pierre-yves IMPERATORE de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

et assisté par Me Thierry RICHARD, avocat au barreau de VALENCE plaidant

Madame [K] [U] épouse [F]

née le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 2]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Pierre-yves IMPERATORE de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

et assisté par Me Thierry RICHARD, avocat au barreau de VALENCE plaidant

INTIMEE

SAS SUD EST INVESTMENTS, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Florent LADOUCE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Avril 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Brigitte PELTIER, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre

Mme Brigitte PELTIER, Conseiller

Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Anaïs ROMINGER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Mai 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Mai 2016,

Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

En 2010, les époux [F] qui avaient pris l'habitude de séjourner au camping « [Établissement 1] », sis à [Localité 1], exploité par la société Sud Est Investments (SEI), ont accepté d'acquérir un des mobil home qui s'y trouvait et ils ont signé un contrat de location d'emplacement viabilisé pour la saison 2010, renouvelé en 2011.

Le 6 novembre 2011, ce mobil home a été détruit à la suite de fortes intempéries ; ils ont cependant souscrit un nouveau contrat d'emplacement pour la saison suivante suivi de l'acquisition d'un nouveau mobil-home auprès de la société Sud Est Résidences, dirigée par M. [W], par ailleurs gérant du camping.

M. [F] ayant été victime, au mois de juin 2011, d'une chute sur un carrelage mouillé du camping, à l'origine d'une invalidité de travail dont la prise en charge était refusée par l'assureur du camping, a saisi le juge des référés le 1er août 2012, à fin de désignation d'un médecin expert.

Par courrier recommandé en date du 25 septembre 2012, la société SEI a délivré congé aux époux [F] pour le 31 décembre 2012, suivie d'une sommation de déguerpir le 28 janvier 2013 et enfin d'une sommation de quitter les lieux par acte en date du 1er février 2013.

Les époux [F] ont contesté ce refus de renouvellement par courrier, réitéré par leur conseil puis ont fait assigner la bailleresse par acte du 25 février 2013 en réparation de leurs préjudices matériel et moral.

Par ordonnance du 18/12/2013, le juge des référés a ordonné leur expulsion, leur enjoignant d'avoir dans les deux mois de la signification de l'ordonnance, à retirer le mobil home, lequel devait être mis à leur disposition à l'entrée du camping, la société SEI étant autorisée, passée ce délai à le faire transporter chez tel dépositaire de son choix.

Par ordonnance en date du 9 mai 2014, le Premier Président a rejeté la demande à fin de suspension d'exécution provisoire et par arrêt en date du 05/02/2015, la Cour d'Appel a confirmé l'ordonnance de référé et a condamné les époux [F] au paiement d'une astreinte.

Par jugement en date du 7 avril 2015, le Tribunal de grande instance de Draguignan a débouté les époux [F] de leur demande à fin de médiation, faute d'acceptation de la partie adverse ; a dit que le contrat de location avait pris fin en le 31 décembre 2012 ; a dit abusif le refus de renouvellement opposé par la société SEI ; a condamné cette société à leur payer la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral outre celle de 1.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; a condamné les époux [F], occupants sans droit ni titre depuis le 1er janvier 2013, à payer à SEI la somme de 9.892 euros à titre d'indemnité d'occupation ; a mis à la charge de la société SEI les frais d'enlèvement du mobilhome et de remise en état de la parcelle ; a ordonné l'exécution provisoire ; le premier juge a considéré que le renouvellement du contrat de location constituait une prestation de service, soumise aux dispositions de l'article L.122-1 du Code de la consommation et que le caractère abusif du refus de cette prestation, sans motif légitime, n'affectait pas la validité du congé délivré mais ouvrait droit à des dommages et intérêts, lesquels ne pouvaient être équivalents au prix d'acquisition de leur nouvelle caravane.

Les époux [F] ont relevé appel de cette décision.

Aux termes de leurs écritures en date du 3 décembre 2015, les appelants concluent à la réformation du jugement déféré en ce qu'il a limité le montant des dommages et intérêts qui leur a été alloué et les a condamnés à payer à SEI, la somme de 9.892 euros à titre d'indemnité d'occupation ; à la condamnation de la société SEI à leur payer une somme de 26.000 euros au titre du préjudice matériel, 5.000 euros au titre du préjudice moral sur le fondement des articles L122-1 du Code de la consommation et 1134, 1135 du Code civil, 5.200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre entiers dépens ; au débouté adverse.

Ils exposent que faute d'espace de stockage, ils ont tenté de vendre le mobil home dès la confirmation de l'ordonnance de référé et ont immédiatement pris contact par courriel du 20 mars 2015 avec le bailleur pour définir les modalités de l'enlèvement du mobil home, compte tenu de la clause contractuelle réservant au bailleur l'organisation des opérations de déplacement des mobil home ; que faute de réponse, ils ont saisi le juge de l'exécution par acte du 8 juin 2015, l'audience étant reportée à la demande du bailleur au 1er septembre 2015, date à laquelle il s'engageait à sortir le mobil home pour le 15 septembre 2015 ; que le 18 septembre, en méconnaissance de l'ordonnance, il avait fait transporter le mobil home, sans délai de prévenance, dans l'établissement de dépôt vente.

Ils soutiennent s'agissant de leur demande en dommages et intérêts : que le premier juge s'est mépris à double titre d'une part en qualifiant de caravane leur mobil home alors que son déplacement nécessite de lourds moyens constituant un convoi exceptionnel, d'autre part en considérant que d'autres campings étaient susceptibles de recevoir ce mobil home alors que tous les campings n'acceptent pas des mobilhomes et que ceux qui les reçoivent exigent généralement une harmonie qui passe par une similitude de modèles ; que l'attitude du bailleur leur cause en conséquence un préjudice bien plus important compte tenu de la décote appliquée par la société ayant accepté de recevoir le mobilhome en dépôt vente ;

S'agissant de la condamnation prononcée à leur encontre à titre d'indemnité d'occupation : que l'expulsion ayant été prononcée par ordonnance du 18 décembre 2013, l'indemnité d'occupation n'est pas due au titre de l'année 2013 ; qu'il est établi d'une part qu'ils ont été interdits d'accès au camping dès le mois de janvier 2013, d'autre part que la société SEI, qui a refusé la demande de médiation qu'ils sollicitaient, n'a pas usé de l'autorisation qui lui avait été donnée de faire transporter le mobilhome chez tel dépositaire de son choix, alors enfin que l'article 6 du contrat de location prévoit qu'en cas de « Résiliation (...) seul le camping est habilité à désinstaller et sortir le mobil home de sa parcelle (...) » ; que l'attitude de la société SEI a été dictée par la volonté de leur nuire.

Aux termes de ses leurs écritures en date du 13 octobre 2015, l'intimé conclut à la confirmation du jugement déféré excepté en ce qu'il l'a condamné au paiement d'une somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts et à la réduction de cette indemnité à la somme de 1.500 euros ; à la condamnation des époux [F] au paiement d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et 3.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre entiers dépens.

Il fait valoir s'agissant de la demande en dommages et intérêts adverse : qu'il n'existe aucun lien de causalité entre le refus de renouvellement du contrat de location et la décote du mobil home alors qu'il existe 175 campings pour le seul département du Var et que les époux [F] ont persisté dans leur refus de libérer les lieux ; qu'il lui était impossible de procéder au déplacement du mobil home en pleine période estivale en raison de l'occupation touristique du camping ; que si les époux [F] avaient immédiatement réglé le montant des condamnations prononcées à leur encontre, ils auraient pu récupérer immédiatement le mobil home ; que l'indemnisation allouée au titre du préjudice moral est excessive.

S'agissant des indemnités d'occupation : que les époux [F] sont occupants sans droit ni titre depuis le 1er janvier 2013 et qu'ils sont en conséquence redevables d'une indemnité d'occupation fixée au montant du loyer contractuel.

SUR CE

Sur la demande en dommages et intérêts formées par les époux [F] :

Le premier juge a retenu que le refus de renouvellement opposé aux époux [F] sans motif légitime et sans grief était abusif ; cette disposition n'est pas contestée, les parties ne s'opposant que sur le montant de l'indemnsation susceptible de réparer le dit abus .

Le premier juge a débouté les époux [F] de leur demande en dommages et intérêts pour préjudice matériel et leur a alloué une somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral en considérant qu'il existait de nombreux campings dans la région.

Les époux [F] réclament paiement d'une somme de 26.000 euros au titre du préjudice matériel, au titre de la décote du mobil home outre celle de 5.000 euros à titre de préjudice moral ; ils exposent en ce sens, qu'ils avaient accepté d'acquérir au mois de décembre 2011 un mobil home d'une valeur de 36.102 euros à fin de disposer d'un emplacement pérenne alors qu'ils s'en sont vus en interdire l'accès dès l'année 2013 et qu'ils ont dû attendre le mois de septembre 2015 pour déposer le mobil home en dépôt vente au prix de rachat de 11.000 euros ; ils font valoir qu'ils ne pouvaient procéder à l'évacuation du mobil home et démontrent s'être vus interdire l'accès au camping à compter de la date de non renouvellement.

Pour s'opposer à la demande, la société SEI fait valoir qu'il n'existe pas de lien de causalité entre le refus de renouvellement du contrat et la décote du mobil home et qu'il est faux d'affirmer qu'elle a empêché la reprise du mobil home et ainsi joué un rôle dans sa dévalorisation.

Toutefois, s'il n'existe pas de lien de causalité direct entre la dévalorisation du mobil home par l'effet du temps passé et le refus de renouvellement, il doit être constaté comme les époux [F] le soutiennent que l'article 5 du contrat (« en cas de non renouvellement du contrat, seul le camping est habilité à désinstaller et sortir le mobil homme de sa parcelle. Le camping effectuera un devis en fonction de la difficulté de l'enlèvement du mobil home. ») les empêchaient de disposer du mobil home.

Pour contester cette responsabilité, la société SEI explique qu'elle n'a pas voulu déplacer le mobil home avant le prononcé d'une décision définitive quant à l'expulsion des époux [F], puis a attendu le règlement des condamnations prononcées et enfin n'a pu procéder à l'enlèvement du mobil home durant la pleine période estivale ; toutefois, il sera observé, comme elle le soutenait au demeurant elle même devant le juge des référé que les époux [F] avaient saisi le juge du fond le 25 février 2013 non pas d'une demande à fin d'annulation du refus de renouvellement, non plus que de maintien dans les lieux mais seulement à fin d'indemnisation du préjudice résultant du dit refus, motif pour lequel le juge des référés a retenu sa compétence ; il en résulte que cet argument doit être écarté comme inopérant puisque le refus de renouvellement n'était pas contesté ; or, force est d'admettre que ni la notification du refus du renouvellement en date du 25 septembre 2012, ni la sommation d'avoir à déguerpir en date du 8 janvier 2013, ni la sommation de quitter les lieux en date du 1er février 2013, ne contiennent des précisions quant aux modalités pratiques de l'enlèvement du mobil homme lequel n'a été mis à leur disposition, au demeurant sans délai de prévenance, que le 18 septembre 2015, en suite de la saisine du juge de l'exécution.

Il s'ensuit, alors d'une part que la société SEI se réservait le droit par application de l'article 8 du contrat de procéder à l'enlèvement du mobil home aux frais du propriétaire pour l'entreposer au parking à la disposition de celui-ci, d'autre part que par ordonnance 18 septembre 2013 le juge des référés l'avait autorisée à faire transporter le mobil home chez tel dépositaire de son choix, qu'elle est bien responsable du préjudice résultant de l'impossibilité pour les époux [F] de disposer de leur investissement à fin d'occupation ou de vente et ce, à compter du refus de renouvellement soit depuis le début de l'année 2013 jusqu'au 15 septembre 2015.

Les époux [F] produisent également une facture proforma du 26 juin 2013, d'un montant de 4.036 euros correspondant à la location d'un mobil home durant 28 jours.

Comte tenu de l'ensemble de ces considérations, il leur sera alloué une somme de 12.000 euros à titre de préjudice matériel et le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a évalué leur préjudice moral à la somme de 3.000 euros.

Sur les indemnités d'occupation :

L'ordonnance de référé du 18 septembre 2013 constatant que les époux [F] étaient occupants sans droit ni titre depuis le 1er janvier 2013, leur enjoignait d'avoir à retirer le mobil home dans les deux mois suivant la date de signification de la décision ; si la société SEI ne justifie avoir mis le mobil home à disposition des époux [F] qu'en date du 15 septembre 2015, ces derniers ne démontrent pas avoir sollicité cette mise à disposition avant le mois de mars 2015, date à laquelle la société SEI déclarait avoir pris contact avec son prestataire et les tenir au courant de la date d'enlèvement dès qu'elle le pourrait (cf courriel du 20 mars 2015) ; dès lors, c'est sans erreur d'appréciation que le premier juge a fixé l'indemnité d'occupation due à la somme de 9.892 euros, réclamée par la société SEI ; le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Enfin, les dépens ainsi qu'une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, seront mis à la charge de la société SEI à l'origine du refus de renouvellement en litige.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société SEI à payer aux époux [F] une somme de 3.000 euros à titre dommages et intérêts pour préjudice moral et les a condamnés à payer à la société SEI une somme de 9.892 euros à titre d'indemnité d'occupation.

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté les époux [F] de leur demande en dommages et intérêts à titre de préjudice matériel, et statuant à nouveau

Condamne la société Sud Est Investments à payer aux époux [F] une somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel et 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société Sud Est Investments aux entiers dépens, distraits au profit de l'avocat de la cause.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre b
Numéro d'arrêt : 15/09149
Date de la décision : 19/05/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence B1, arrêt n°15/09149 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-19;15.09149 ?
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