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22/04/2016 | FRANCE | N°14/22865

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre c, 22 avril 2016, 14/22865


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C



ARRÊT AU FOND



DU 22 AVRIL 2016



N°2016/ 196















Rôle N° 14/22865







SAS FALGUIERE CONSEIL





C/



[R] [C]

























Grosse délivrée le :



à :



-Me Loïc TOURANCHET, avocat au barreau de PARIS



- Me Marianne DESBIENS, avocat au barreau de TARA

SCON







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARLES - section E - en date du 24 Novembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 14/110.





APPELANTE



SAS FALGUIERE CONSEIL, demeurant [Adr...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 22 AVRIL 2016

N°2016/ 196

Rôle N° 14/22865

SAS FALGUIERE CONSEIL

C/

[R] [C]

Grosse délivrée le :

à :

-Me Loïc TOURANCHET, avocat au barreau de PARIS

- Me Marianne DESBIENS, avocat au barreau de TARASCON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARLES - section E - en date du 24 Novembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 14/110.

APPELANTE

SAS FALGUIERE CONSEIL, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Loïc TOURANCHET, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [R] [C], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Marianne DESBIENS, avocat au barreau de TARASCON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 23 Février 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LE LAY, Président de Chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Catherine LE LAY, Président de Chambre

Madame Hélène FILLIOL, Conseiller

Madame Virginie PARENT, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Avril 2016

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Avril 2016

Signé par Madame Catherine LE LAY, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

[R] [C] a été engagé par la SAS FALGUIERE CONSEIL le 29 août 2011 suivant contrat à durée indéterminée signé le 15 juin en qualité d'ingénieur commercial confirmé, statut cadre, coefficient 150, échelon 2.3 de la convention collective des bureaux techniques pour une durée hebdomadaire de 39 h en contrepartie d'une rémunération mensuelle brute de 2625,07 € pour 151,67 h plus 374,83 € pour 17,33 outre une rémunération variable sur objectifs, le lieu d'exécution du travail couvrant la région PACA ;

Le salarié avait pour fonction de faire signer des contrats de partenariat avec des agences immobilières ;

[R] [C] devait refuser de signer le dernier avenant à son contrat de travail en date du 6 août 2012, relatif à sa rémunération, en raison de l'arrêt concomitant par la société de la gratuité de partenariat la liant aux agences immobilières à compter de juin 2012 ;

Suite à un entretien préalable s'étant tenu le 16 novembre 2012, [R] [C] était licencié par courrier recommandé du 21 novembre 2012 en ces termes :

« nous faisons suite à votre entretien préalable du 16 novembre dernier auxquelles vous avez été convoqués par lettre recommandée avec accusé de réception le 7 novembre 2012, et au cours duquel vous avez été reçu par le signataire de la présente.

Les explications que vous nous avez fournies, en réponse aux griefs qui vous étaient reprochés, ne nous permettent cependant pas de modifier notre appréciation des faits.

Dans ces conditions, nous vous notifions votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Cette mesure est justifiée par les faits suivants :

Vous avez été embauché le 29 août 2011 en qualité d'ingénieur commercial confirmé pour développer notre réseau d'agences immobilières partenaire dans la région PACA ouest.

Depuis plusieurs mois, nous déplorons votre insuffisance professionnelle, en dépit des moyens mis à votre disposition et des différents échanges que nous avons eu avec vous sur ce sujet.

En effet, en votre qualité d'ingénieur commercial confirmé, il faut incombe notamment :

De signer de nouveaux contrats de partenariat avec des agences immobilières dans la région ouest ;

de développer le chiffre d'affaires générées par votre portefeuille d'agences immobilières ;

Nous avons le regret de constater que vous n'accomplissez pas pour mission de manière satisfaisante.

Nous déplorons notamment vos résultats en deçà des objectifs qui vous ont été attribués et de ce que vous vous êtes fixé en août ' septembre 2012.

Au titre de la période juin ' juillet 2012, vous aviez pour objectif de maintenir votre réseau d'agences partenaires à 50, en partant d'un portefeuille initial de 79 partenaires. Cela pouvait passer par le maintien des agences déjà partenaires et/ou le recrutement de nouveaux partenaires.

Vous n'avez réalisé que 11 sur 50, soit un taux de réussite de 22 % alors que la moyenne de vos collègues de 26 partenaires pour un taux de réussite de 46 %.

Ces faibles résultats ont fait l'objet de plusieurs points téléphoniques complets de la part de votre responsable. Ce dernier s'est déplacé les 18 et 19 septembre 2012 pour vous aider à réaliser les objectifs que vous vous êtes fixés pour la période suivante (août ' septembre 2012) et mettre en place avec vous un plan d'actions nécessaires à l'atteinte de ces résultats.

Malgré cet accompagnement, au titre de la période août ' septembre 2012, vous n'avez pas réussi à rattraper notre retard.

Vous n'avez réalisé que 22/50 alors que la moyenne d'atteinte des objectifs que vos collègues se sont fixés et de 40 partenaires (objectifs moyens 518) pour un taux de réussite de 82 %.

Pour la deuxième période consécutive, vos résultats étant nettement insuffisants, vous avez une nouvelle fois fait l'objet d'un accompagnement par votre responsable pour vous aider à les améliorer (cf. e-mail du 26 octobre 2012).

Au titre de la période octobre 2012, notre objectif était de recruter 10 agences supplémentaires pour porter votre portefeuille à 32 agences partenaires. Nous avons constaté au 31 octobre que vous n'avez apporté que deux nouveaux partenaires en un mois. Pour la troisième période consécutive, vos résultats ont été insuffisants.

En votre qualité d'ingénieur commercial confirmé et au vu de l'importance de votre fonction dans le développement de notre société sur une région stratégique pour l'entreprise (PACA ouest), vos résultats démontrent une insuffisance dans le développement de votre portefeuille. Cette région est aujourd'hui la moins développée de toutes les zones de provinces couvertes par la société alors que c'est une de celle qui a été développée en premier et qui représente le plus gros potentiel d'affaires en province pour la société.

Lors de notre entretien du 16 novembre dernier, vous n'avez pas été en mesure de nous proposer des éléments concrets supplémentaires à mettre en place pour rattraper votre retard de développement, en plus de ce que nous vous proposions déjà.

Par ailleurs, nous déplorons votre remise en cause virulente de la nouvelle stratégie mise en place par l'entreprise dont vous nous avez fait part à plusieurs reprises, (le 6 juillet 2012 et le 11 octobre 2012). Nous vous rappelons que cette nouvelle stratégie relève du pouvoir de gestion de l'entreprise de la direction et s'impose ainsi à vous et à l'ensemble des salariés.

Dans ces conditions, nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement pour insuffisance professionnelle à compter de ce jour.

Votre solde de tout compte, votre certificat de travail votre attestation pôle emploi, établi selon les règles en vigueur dans la société, où seront adressées par courrier Sud de votre préavis de trois mois que nous vous dispensons effectuer. Celui-ci vous sera néanmoins intégralement rémunéré, aux échéances normales de paix.

Nous vous informons que vous avez acquis 31,67 heures au titre du droit individuel à la formation.

Vous pourrez demander pendant les deux premières années chez votre nouvel employeur a bénéficié de la somme correspondant au solde du nombre d'heures acquises au titre du droit individuel à la formation et non utilisées, multiplié par le montant forfaitaire visé au deuxième alinéa de l'article L 6332 ' 14, afin de financer tout ou partie d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience de formation.

Vous pourrez également demander de bénéficier de cette somme pendant la période de votre pris en charge par le régime d'assurance-chômage.

En application des dispositions de l'article 14 de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008, vous pourrez conserver le bénéfice des garanties des couvertures complémentaires santé prévoyance appliquées actuellement au sein de la société pendant une éventuelle période de prise en charge par le pôle emploi et dans la limite de neuf mois de couverture.

Par ailleurs, vous pouvez bénéficier des dispositions de l'article quatre de la loi et 20 vous permettent, sous certaines conditions, notamment à condition de le faire valoir dans les six mois qui suivent le départ de l'entreprise à l'assureur actuel de conserver le bénéfice du contrat de complémentaire santé groupe à caractère obligatoire.

Nous vous informons que nous entendons renoncer à l'application de votre obligation de non-concurrence. Vous ne serez plus liés par cette obligation de non-concurrence.

Nous vous rappelons que cette libération de votre clause de non-concurrence ne délivre pas de votre obligation de loyauté et de confidentialité au regard des informations et données ayant été portée à votre connaissance durant l'exécution de votre contrat de travail. »

[R] [C] saisissait le 14 mars 2013 le conseil de prud'hommes de diverses demandes.

Par jugement du 24 novembre 2014, le conseil de prud'hommes d'Arles :

- disait infondée la demande de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail

- déclarait le licenciement de [R] [C] sans cause réelle et sérieuse

- condamnait la société FALGUIERE CONSEIL, à payer à [R] [C] les sommes suivantes :

20 000 € nets au titre de dommages et intérêts pour préjudice subi suite à son licenciement abusif

1500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- disait infondées les demandes de [R] [C] relatives :

à la communication du registre d'entrées/sorties du personnel et des comptes de résultats 2011 2012

à l'exécution provisoire de droit

à l'exécution provisoire de la demande

- disait infondée la demande reconventionnelle en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- condamnait la société FALGUIERE CONSEIL aux dépens

La société FALGUIERE CONSEIL interjetait régulièrement appel partiel de cette décision le 28 novembre 2014.

Suivant conclusions reçues le 6 octobre 2015, soutenues oralement, la société FALGUIERE CONSEIL sollicite de la cour qu'elle :

À titre principal,

- infirme le jugement rendu en ce qu'il déclare le licenciement abusif, condamne la société à verser au salarié la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour ce motif et à la somme de 1500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- constate que le licenciement de [R] [C] repose sur une cause réelle et sérieuse

- constate que la société exécutait loyalement contrat de travail

- en conséquence, déboute [R] [C] de l'intégralité de ses demandes

à titre subsidiaire,

- déboute [R] [C] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et la réduise à de plus justes proportions

- déboute [R] [C] de l'intégralité de ses autres demandes

en tout état de cause :

- condamne [R] [C] au paiement de la somme de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

- déboute le requérant de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions reçues le 3 février 2016, réitérées à la barre, [R] [C] conclut à ce que la cour, au visa des articles L. 1152 ' 1 et suivants, L. 1235 ' 1 et suivants, L. 1232 ' 4 et suivants, L. 1235 ' 4, R. 1234 ' 2 et suivants, L3141 ' 22 et suivants du code du travail, et de l'article 1382 du Code civil :

- réforme la décision du conseil de prud'hommes et statuant à nouveau,,

- juge que la société FALGUIERE Conseil a modifié unilatéralement le contrat de travail la liant à [R] [C]

- juge que ces modifications unilatérales du contrat de travail n'ont pas mis en mesure [R] [C] de remplir les objectifs contractuels qui lui étaient impartis

en conséquence,

- condamne la société FALGUIERE CONSEIL au paiement de la somme de 10 000 € au titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

- confirme la décision du conseil en ce qu'elle a jugé que le licenciement de [R] [C] est dépourvu de cause réelle et sérieuse

- condamne la société FALGUIERE CONSEIL au paiement de la somme de 42 000 € au titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- juge qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier et le montant des sommes de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 devra être supporté par le débiteur en de l'application des frais irrépétibles

- condamne la société FALGUIERE CONSEIL au paiement de la somme de 4000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

MOTIFS

Attendu que la société FALGUIERE CONSEIL est une agence immobilière, propriétaire du site internet www.meilleursagents.com lequel contacté par des personnes souhaitant vendre leur bien immobilier les met en relation avec des agences immobilières partenaires ; jusqu'en juin 2012, la société se rémunérait sur les ventes réalisées ; que postérieurement, la société a sollicité une contrepartie financière constituée par un abonnement pour le partenariat avec les agences s'accompagnant de nouvelles prestations selon la société ;

Attendu qu'aux termes du contrat de travail signé le 15 juin 2011, [R] [C] avait notamment pour fonctions, de signer de nouveaux contrats de partenariat avec des agences immobilières et de développer le chiffres d'affaires généré par un portefeuille d'agences immobilières ;

A/ sur l'exécution fautive du contrat de travail

Attendu que [R] [C] pour soutenir l'exécution fautive du contrat de travail par la société FALGUIERE CONSEIL fait valoir :

- que le changement de stratégie mise en place sans recueillir l'avis des ingénieurs commerciaux était particulièrement néfaste par les obligations nouvelles auxquelles étaient assujetties les agences partenaires de sorte que celles-ci ne pouvaient que se désengager ou refuser d'adhérer au système proposé de surcroît dans un contexte économique défavorable ; qu'il a ainsi refusé de signer l'avenant à son contrat de travail en date du 6 juin 2012 modifiant ses conditions de rémunération ainsi que les objectifs qu'il devait atteindre,

que la société FALGUIERE a modifié unilatéralement sa zone géographique qui devait s'exercer sur la totalité de la région PACA pour la diviser en deux zones et en confier la moitié à un autre salarié recruté le 30 mai 2011,

- que la société a raccourci unilatéralement les délais pris en compte pour le calcul des primes ; qu'ainsi les objectifs à atteindre étaient retenus à la date du 31 mai pour le second trimestre 2012, le 23 juillet 2012 pour le troisième trimestre,

- qu'ayant pris 17 jours de congés en juillet 2012, il ne pouvait comme ses collègues travailler à atteindre ses nouveaux objectifs,

- que ces derniers étaient totalement utopiques et qu'il convient de retenir au surplus que tous les partenaires étaient en congé au mois d'août,

- qu'à compter de janvier 2012, son bulletin de salaire mentionnait un coefficient 130 alors que contractuellement il avait été fixé à 150 et que ce n'est qu'en octobre 2012 que la société lui a indiqué qu'il s'agissait d'une erreur informatique,

Attendu que la société FALGUIERE CONSEIL objecte pour sa part :

- qu'il relève de son pouvoir de gestion de définir et faire évoluer son activité, l'adoption d'une nouvelle politique commerciale ne constituant pas une modification du contrat de travail

- que dès son embauche, [R] [C] a partagé la région PACA avec un autre salarié engagé antérieurement,

- que la fixation des délais de réalisation des objectifs ressort de son pouvoir de direction

- que l'erreur de coefficient sur les bulletins de salaire est une erreur matérielle qui n'a eu aucune conséquence sur la rémunération du salarié

Attendu qu'aux termes du contrat de travail, il était mentionné à l'article 3 que les fonctions confiées avaient par nature un caractère évolutif tenant d'une part aux impératifs de la société et d'autre part aux capacités et à l'approfondissement de la compétence du salarié ;

Attendu que la modification de la politique commerciale d'une société et l'évolution de son activité relèvent du seul choix de ses dirigeants, dans l'exercice de leur pouvoir de direction de sorte que [R] [C] ne peut reprocher à son employeur d'avoir usé des droits qui sont les siens  ;

Attendu que s'agissant de la rémunération, il était prévu contractuellement qu'au salaire fixe s'ajoutait une partie variable, constituée par une prime en fonction des performances atteintes conformément aux objectifs fixés annuellement ;

Attendu qu'en juin 2012, l'employeur à raison de la modification de sa stratégie commerciale, a modifié les conditions d'obtention de la prime, les corellant désormais au nombre d'abonnements souscrits par les agences partenaires et prévoyant un montant croissant en fonction du nombre ;

Attendu que la modification des objectifs et leur délai d'accomplissement est la conséquence du droit de l'employeur d'évoluer dans sa politique commerciale ; que si le document porte maladroitement la mention que l'objectif est de vendre 50 abonnements auprès des agences partenaires du secteur attribué au salarié d'ici le 16 juillet 2012, il y a lieu de constater que la prime devait être versée dès le premier abonnement ; qu'elle était croissante par tranches ; que [R] [C] n'établit pas en quoi ces nouvelles modalités comportaient une modification de sa rémunération, la cour relevant au vu des bulletins de salaire que le salarié percevait tous les mois une prime de 500 €, ce chiffre correspondant suivant les nouvelles règles à la souscription de 12,5 abonnements ;

Attendu que le lieu de travail était contractuellement défini comme la totalité de la région PACA ; que [R] [C] ne pouvait ignorer qu'un autre salarié engagé antérieurement exerçait déjà les mêmes fonctions sur la même région et qu'il ne pouvait dès lors à prétendre à revendiquer une exclusivité géographique, ce qu'il n'a d'ailleurs jamais contesté pendant la relation de travail, les deux salariés s'étant dans la réalité partagés la région en deux zones ;

Attendu qu'enfin la modification du coefficient apparaissant sur certaines fiches de paie est à l'évidence une erreur matérielle, n'ayant causé aucun préjudice au salarié et ne pouvant être constitutive d'une exécution déloyale du contrat de travail ;

Attendu qu'en conclusion, il convient de confirmer le conseil de prud'hommes qui a justement décidé que [R] [C] ne rapportait pas la preuve d'une exécution déloyale du contrat de travail et l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts à ce titre ;

B/ sur la cause réelle et sérieuse du licenciement

Attendu que la SAS FALGUIERE CONSEIL sollicite l'infirmation de la décision du conseil de prud'hommes et relève :

- que la lettre de licenciement est suffisamment motivée au regard des prescriptions de la cour de cassation dès lors que l'insuffisance professionnelle reprochée repose sur des éléments vérifiables par les juges

- que le salarié n'avait pas fait valoir une insuffisance de formation devant le premier juge qui avait mentionné les termes d'un courrier adressé par le salarié à son employeur après son licenciement

- que l'objectif de 50 agences à convaincre d'adhérer au nouveau système était tout à fait réalisable compte-tenu de l'attractivité du produit, de l'accompagnement des salariés qui avait été mis en place, et que par suite, l'adhésion de seulement 13 agences au 31 juillet 2012 était très insuffisante tandis que ses collègues réalisaient en moyenne 24 abonnements

- que la société avait accepté à la demande du salarié que celui-ci reporte cet objectif de 50 agences à fin septembre ; qu'au 10 septembre le nombre était seulement de 17, les homologues réalisant en moyenne 40 abonnements ; qu'en octobre 2012 alors que l'objectif était de 10 contrats, [R] n'était en mesure que de fédérer 2 agences aux nouvelles modalités

- que ce déficit de résultat était dû au désaccord du salarié quant à la politique choisie, provoquant un désinvestissement dans ses fonctions

- qu'il a bénéficié d'un accompagnement personnalisé de la société s'agissant de 3 périodes successives de réajustement de ses objectifs, de points hebdomadaires avec le directeur immobilier, d'une procédure de suivi des difficultés rencontrées, d'un accompagnement dans les présentations commerciales

- qu'il n'est pas anodin de savoir que l'intimé exerçait à la même époque une autre activité ainsi qu'il ressort de la lecture d'un arrêt de la cour d'appel de Chambéry en matière familiale ;

- que les attestations élogieuses versées par le salarié sur son professionnalisme par les agences qu'il avait contactées mais qui avaient refusé le nouveau produit démontrent surtout l'incapacité de [R] [C] à mobiliser de façon convaincante alors que la société apporte la preuve que la nouvelle formule était un succès et avait généré un accroissement constant du chiffre d'affaires

Attendu que pour sa part, [R] [C] objecte :

- que son professionnalisme a été salué par ses contacts lesquels ont fait valoir que leur refus d'adhésion au nouveau produit résultait seulement de la formule désormais payante

- que son agenda montre qu'en dehors de ses périodes de congés (du 31 mai au 8 juin, du 14 au 31 juillet) il a organisé 50 rendez-vous et qu'il est malvenu de lui reprocher une insuffisance professionnelle alors qu'il était en congés ou pendant le mois d'août quand les partenaires n'étaient pas disponibles

- que pendant le mois de septembre 2012, il a été sollicité par d'autres tâches

- qu'il a été écarté de la formation dispensée pendant 2 jours en octobre 2012 et qu'il n'a pas bénéficié des outils donnés aux autres commerciaux

- que les scores des responsables régionaux que la société avance sont invérifiables

- que les résultats ne sont pas aussi brillants que la société les affiche.

Attendu que [R] [C] a été licencié pour insuffisance professionnelle ainsi que l'expose le courrier de licenciement dont le motif doit être matériellement vérifiable par le juge, reposant sur des éléments concrets ; qu'en l'espèce, il est allégué que l'insuffisance professionnelle a conduit à une insuffisance des résultats de juin à octobre 2012 ; qu'il est nécessaire que les éléments caractérisant l'insuffisance des résultats soient objectivement vérifiables ;

Attendu qu'il convient de relever que la mise en place d'une nouvelle politique à base d'abonnements payants a été générale sur l'ensemble des secteurs de sorte que tous les responsables commerciaux ont été confrontés aux mêmes difficultés liées à la modification de l'argumentaire qu'ils devaient retenir à l'égard des agences déjà partenaires ; que le collègue de [R] [C], s'occupant de la région PACA EST dans un mail du 21 juin 2012, à l'issue de la première semaine d'abonnement, a effectivement fait état des difficultés qu'il avait rencontrées, ce qui prouve que l'enjeu était le même pour tous ;

Attendu qu'il n'apparaît pas durant la période juin- septembre que [R] [C] ait été victime d'un déficit d'informations par rapport à ses collègues, et alors qu'il résulte des éléments versés au débat que son supérieur, [Z] [M] lui a offert de lui prêter son concours à de nombreuses reprises en attirant son attention sur ses résultats médiocres, a organisé une procédure de suivi et plusieurs réunions téléphoniques hebdomadaires ;

Attendu que l'employeur a produit en pièce n° 25 un tableau synthétique des résultats des 9 régions pour la période juin-juillet et la période août-septembre ; qu'il n'est pas rapporté la preuve que les objectifs à atteindre aient été irréalisables, la cour relevant que dans la région PACA EST dont s'occupait un collègue de l'intimé, l'objectif à atteindre était de 60 abonnés, et celui de [R] [C] en secteur PACA OUEST de 50 ; que l'intimé n'apporte pas d'élément sur le caractère irréalisable et irréaliste du chiffre retenu ;

Attendu que [R] [C] fait valoir que d'une part il y a lieu de retenir qu'il a été en congé jusqu'au 8 juin, et ensuite du 14 au 31 juillet et d'autre part, que la saison d'été dans la région est peu propice à des rencontres avec des partenaires lesquels sont en congé au mois d'août ; que s'il convient de prendre en compte la période de congés, pour autant la situation était la même pour tous les salariés amenés à prendre des vacances estivales, et il ne saurait être acquis une fermeture de toutes les agences immobilières au mois d'août comme semble le présenter le salarié ; qu'enfin cet argument n'est pas recevable à compter de septembre ;

Attendu que la lecture du tableau précité fait apparaître que pour la période de juin-juillet, le taux de réussite de [R] [C] a été de 22 %, à comparer avec celui de PACA EST 50 % et celui du sud-ouest 25 % ; que compte-tenu des congés pris, le taux n'est pas significatif ;

Attendu qu'en revanche, s'agissant de la période août-septembre, il y a lieu de constater que les taux de réussite varient de 44 % à 124 %, le taux de 44 % étant imputable à [R] [C], celui du sud-ouest passant à 76 %, et celui de PACA EST à 77 % ;

Attendu qu'enfin au mois d'octobre 2012, [R] [C] ne conteste pas le chiffre de deux nouveaux abonnements pour le mois ; que le nombre de dossiers que lui impute son employeur n'est pas contesté ;

Attendu dès lors, qu'il en ressort une dégradation constante des résultats à des périodes où parallèlement les autres ingénieurs commerciaux réalisaient des scores en nette progression ;

Attendu dans ces conditions, qu'il doit être considéré qu'est rapportée la preuve de l'insuffisance professionnelle reprochée, et qu'il y a lieu d'infirmer sur ce point la décision du conseil de prud'hommes avec les conséquences indemnitaires en résultant,  outre la somme allouée au salarié en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que la charge des dépens ;

C/ sur les frais irrépétibles

Attendu qu'il n'existe pas de considération d'équité justifiant qu'il soit fait droit aux demandes des parties à ce titre ; que les autres demandes de [R] [C] sont rejetées en raison de l'économie du présent arrêt ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Infirme le jugement en ce qu'il a jugé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné la SAS FALGUIERE à payer des dommages-intérêts pour rupture abusive, des frais irrépétibles et a mis à sa charge les dépens de première instance ;

Statuant à nouveau,

Juge que le licenciement de [R] [C] repose sur une cause réelle et sérieusement

Déboute [R] [C] de sa demande en dommages-intérêts pour rupture abusive

Déboute [R] [C] du surplus de ses demandes

Confirme le jugement pour le surplus

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Met les dépens de première instance et d'appel à la charge de [R] [C].

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre c
Numéro d'arrêt : 14/22865
Date de la décision : 22/04/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°14/22865 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-22;14.22865 ?
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