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10/03/2016 | FRANCE | N°13/14202

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 10 mars 2016, 13/14202


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 10 MARS 2016

jlp

N° 2016/ 142













Rôle N° 13/14202







[J] [B] [P]





C/



[C] [F]

[I] [F]

[S] [F] épouse [X]

[A] [S]

[Y] [Y]

[H] [V]

[K] [F]

[N] [F]

[Z] [F]

SCI LES OLIVIERS DE LA RIPELLE





















Grosse délivrée

le :

à

:



Me [V] DANJARD



SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 04 Février 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 08/04048.





APPELANTE



Madame [J] [B]-[P], tant en son nom personnel, que venant aux droits de sa m...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 10 MARS 2016

jlp

N° 2016/ 142

Rôle N° 13/14202

[J] [B] [P]

C/

[C] [F]

[I] [F]

[S] [F] épouse [X]

[A] [S]

[Y] [Y]

[H] [V]

[K] [F]

[N] [F]

[Z] [F]

SCI LES OLIVIERS DE LA RIPELLE

Grosse délivrée

le :

à :

Me [V] DANJARD

SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 04 Février 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 08/04048.

APPELANTE

Madame [J] [B]-[P], tant en son nom personnel, que venant aux droits de sa mère [D] [C] veuve [P], décédée

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me [V] DANJARD, avocat au barreau de TOULON

INTIMES

Monsieur [C] [F]

demeurant [Adresse 2]

défaillant

Monsieur [I] [F]

demeurant [Adresse 3]

défaillant

Madame [S] [F] épouse [X]

demeurant [Adresse 4]

défaillante

Madame [A] [S],

demeurant [Adresse 5]

défaillante

Monsieur [Y] [Y]

demeurant [Adresse 6]

défaillant

Madame [H] [V]

demeurant [Adresse 6]

défaillante

Monsieur [K] [F]

né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1], demeurant [Adresse 7]

défaillant

Madame [N] [F]

demeurant [Adresse 8]

défaillante

Madame [Z] [F]

demeurant [Adresse 9]

défaillante

SCI LES OLIVIERS DE LA RIPELLE prise en la personne de son représentant légal domiciliéen cette qualité au siège social sis [Adresse 10]

représentée par la SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Eric HOULLIOT, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Alexis KIEFFER, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Janvier 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Luc PROUZAT, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Monsieur Jean-Luc GUERY, Conseiller

Madame Christine LORENZINI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Mars 2016

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Mars 2016,

Signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

[J] [B]-[P] veuve [M] et [D] [C] veuve [P], aujourd'hui décédée, étaient respectivement nue-propriétaire et usufruitière des parcelles cadastrées sur le territoire de la commune d'[Localité 2] (83), lieu-dit « La ripelle », section AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 1], [Cadastre 3] et [Cadastre 3].

La propriété des consorts [P] jouxte les parcelles AB n° [Cadastre 4], [Cadastre 5], dont la société civile immobilière Les Oliviers de la Ripelle est propriétaire, ainsi que la parcelle AB n° [Cadastre 5] appartenant en indivision à cette SCI et à [Y] [Y] et [H] [V] épouse [Y] ; elle confronte également les parcelles AB n° [Cadastre 2], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] des consorts [F] et les parcelles AB n° [Cadastre 1] et [Cadastre 1] de [A] [S].

Après avoir obtenu en référé l'instauration d'une mesure d'expertise confiée à M. [W], dont le rapport a été déposé le 7 février 2008, les consorts [P], revendiquant le bénéfice d'une servitude de passage pour cause d'enclave sur la parcelle AB n° [Cadastre 4], ont fait assigner la SCI Les Oliviers de la Ripelle, les consorts [F], Mme [S] et M. et Mme [Y] devant le tribunal de grande instance de Toulon aux fins de désenclavement de leur fonds.

Mme [C] veuve [P] est décédée en cours d'instance le 2 décembre 2010 et, par jugement du 4 février 2013, le tribunal a notamment:

-constaté que la parcelle de terre appartenant à Mme [B]-[P] est enclavée,

-dit que la voie BC (du plan annexé au rapport d'expertise, à partir de la RN n° 8 de [Localité 3] à [Localité 4]) ne peut servir à l'usage d'une servitude de passage,

-avant dire-droit, désigné M. [Q] en qualité d'expert, aux frais avancés de la SCI, afin de déterminer si un passage peut être aménagé sur le fonds des consorts [F], dont sont issus les parcelles AB n° [Cadastre 3] et [Cadastre 3] en application de l'article 684 du code civil.

Mme [B]-[P] a régulièrement relevé appel de ce jugement en vue de sa réformation.

Par arrêt du 22 mai 2014, la cour a:

-invité les parties à présenter leurs observations sur l'état d'enclave de la parcelle AB n° [Cadastre 1] de Mme [B]-[P], qui jouxte la RN n° 8,

-invité, en tant que de besoin, Mme [B]-[P] à communiquer aux débats un certificat administratif attestant de l'impossibilité ou de l'interdiction de créer un accès sur la route départementale 8 à partir de la parcelle AB n° [Cadastre 1],

-renvoyé la causé et les parties à une audience ultérieure.

La SCI Les Oliviers de la Ripelle a alors invoqué divers moyens d'irrecevabilité des demandes de Mme Calalano-[P] et prétendu que le fonds de celle-ci n'était pas enclavé car disposant d'un accès à la voie publique, la route de la pointe d'[Localité 2].

Par un second arrêt du 9 octobre 2014, la cour a rejeté les exceptions d'irrecevabilité soulevées par la SCI et ordonné, avant dire-droit, un complément d'expertise confiée à M. [W] à l'effet notamment de rechercher si le tènement de Mma [B]-[P], composé des parcelles cadastrées à [Localité 2], section AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 1], [Cadastre 3] et [Cadastre 3], peut être desservi par la route de la pointe d'[Localité 2] en précisant, le cas échéant, la nature et le coût approximatif des travaux à réaliser pour assurer une desserte à partir de cette route.

M. [W] a déposé son rapport complémentaire le 13 mai 2015 aux termes duquel il conclut notamment que :

Cette variante de desserte est présentée sous diverses des dominations :

-chemin de [Localité 5],

[Adresse 11],

-chemin du Gros Cerveau,

-route départementale (RD 20 ou RD 2020).

Les solutions d'accès au fonds appartenant à Mme [B]-[P] sont :

-l'accès carrossable [Cadastre 6]/618 -annexe 6- utilisé depuis 1948 au moins à la desserte de la propriété [B]-[P] veuve [M], sur les parcelles [Cadastre 7] ; il est aujourd'hui contesté par la SCI Les Oliviers de la Ripelle;

-l'accès non carrossable [Cadastre 1]/[Cadastre 2] (BC) -annexe 6- sur les parcelles [Cadastre 8] ([A] [S]) et AB [Cadastre 3] (indivision [F]) ne peut pas être viabilisé suite au refus d'autorisation de voirie portant permission de voirie du 19 juin 2014 (annexe 7.5), confirmant l'avis défavorable du 10 octobre 2012 (annexe 7.4);

-la variante d'accès proposée par la SCI Les Oliviers de la Ripelle dite [Adresse 12], qui présente :

' une dénivelée 230 m environ entre la route départementale et la maison,

' une longueur de voie à créer de 767 ml environ compte tenu de la pente naturelle (de l'ordre de 50 %) dans des éboulis ou du rocher,

' une surface impactée de l'ordre de 15 000 m².

Elle nécessite des travaux « pharaoniques » estimés par l'entreprise SBGC à la requête de la SCI Les Oliviers de la Ripelle dans une fourchette de 325 006 € à 541 776 € TTC et par l'expert, en première approche, de l'ordre de 800 000 € TTC ; elle se situe dans une zone naturelle ND du plan local d'urbanisme et en espace boisé classé (EBC).

Pour desservir une maison R + 1 d'une superficie de 160 m², d'une valeur vénale estimée à 350/360 000 € par l'agence Foncia le 23 mars 2015 (annexe 9) et à 280/300 000 € par l'agence Weber Immobilier le 20 avril 2015, une déclaration préalable à ces travaux ferait assurément l'objet d'une opposition du maire.

La propriété [B]-[P] (...) est dès lors enclavée.

En l'état, Mme [B]-[P], prise également en sa qualité d'ayant-droit de Mme [C] veuve [P], demande à la cour (conclusions reçues par le RPVA le 9 décembre 2015) de :

Vu les articles 682,683 et 685 du Code civil,

-homologuer le rapport d'expertise de M. [W] en date du 7 février 2008,

-dire que l'assiette de la servitude, pour les parcelles cadastrées section AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 2],[Cadastre 1],[Cadastre 3] et [Cadastre 3] lieu-dit « La ripelle », s'étend aux parcelles section AB n° [Cadastre 5] (indivision SCI Les oliviers de la Ripelle et époux [Y] sur 8 mètres : tronçon [Cadastre 6]-[Cadastre 6]), AB n° [Cadastre 4] (SCI Les Oliviers de la Ripelle sur 135 mètres: tronçon [Cadastre 2]-[Cadastre 6]), AB n° [Cadastre 1] (Mme [P] sur 105 mètres: tronçon [Cadastre 2]-[Cadastre 2]) et AB n° [Cadastre 3] (consorts [F] sur 126 mètres: tronçon [Cadastre 1]-[Cadastre 2]),

-condamner la SCI Les Oliviers de la Ripelle à procéder au retrait de tout obstacle au passage (...) et notamment le portail installé irrégulièrement et ce, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir ou, à défaut, à fournir un sytème d'ouverture à tous les utilisateurs du chemin pour leur permettre d'ouvrir le portail depuis leurs domiciles respectifs,

-dire qu'aucune indemnité en application de l'article 682 du Code civil n'est due par elle,

-condamner la SCI Les Oliviers de la Ripelle au paiement de la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI Les Oliviers de la Ripelle demande, pour sa part, à la cour (conclusions reçues par le RPVA le 27 août 2015) de:

A titre principal :

-dire et juger irrecevable la demande de Mme [B]-[P] tendant à la fixation d'une assiette de servitude de passage en l'absence de toute titre établissant à son profit une quelconque servitude,

-dire et juger, à tout le moins, cette demande infondée en l'absence de toute titre établissant à son profit une quelconque servitude de passage et l'en débouter,

-constater, dans l'hypothèse où la cour analyserait la demande en une demande de désenclavement, que la parcelle AB n° [Cadastre 1] de Mme [B]-[P] jouxte directement deux voies publiques, à savoir la RN n° 8 et la route de la route de la pointe à [Localité 2] ou RD n° 20,

-dire et juger que la route de la pointe à [Localité 2] constitue une desserte normale et satisfactoire de la propriété [B]-[P],

-dire et juger que la propriété de Mme [B]-[P] n'est pas enclavée et, en conséquence, la débouter de sa demande de désenclavement,

A titre subsidiaire :

-débouter Mme [B]-[P] de sa demande tendant à ce que son désenclavement s'effectue par passage sur les parcelles AB n° [Cadastre 5] et [Cadastre 4], dont elle est propriétaire propre ou indivise,

-dire que s'il devait être fait droit à une demande de désenclavement, ce dernier devra se faire:

' soit par le tracé CB déterminée par l'expert [W], longeant à la propriété [S] (AB n° [Cadastre 1]-[Cadastre 1]) traversant la propriété [F] (AB n° [Cadastre 3]),

' soit par passage sur la parcelle AB n° [Cadastre 2], actuellement propriété de M. [A], selon l'une des propositions n° 3, 4 ou 5 contenues dans le rapport de Mme [I], produit aux débats, et ordonner, en conséquence, l'appel en cause du propriétaire de cette parcelle AB n° [Cadastre 2],

-dire et juger qu'aucun des fonds, propriété des consorts [F], n'est enclavé,

-débouter, en conséquence, [Z], [S] et [C] [F] de leur demande tendant à desservir leur fonds par le sien,

A titre infiniment subsidiaire :

-confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné l'expertise confiée à M. [Q],

A titre très infiniment subsidiaire :

-dire et juger qu'elle doit être indemnisée dans l'hypothèse où l'enclave de la parcelle [B]-[P] serait retenue et que le désenclavement serait ordonné sur son fonds,

-condamner, dans ce cas, Mme [B]-[P] à lui payer une indemnité de 589 050 € en application de l'article 682 du Code civil,

-ordonner, subsidiairement, une expertise pour chiffrer cette indemnité,

-dire et juger que le chemin de désenclavement devra être utilisé à une fin unique de desserte d'une habitation, à l'exclusion de toute utilisation à des fins de desserte d'une activité commerciale ou artisanale, sous astreinte de 1000 € par infraction constatée.

Elle sollicite, enfin, la condamnation de tout succombant à lui payer la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 dommages et intérêts code de procédure civile.

Les consorts [F] n'ont pas comparu, bien qu'ayant été assignés à personne ([C], [I] et [Z] [F]), à domicile ([S] [F] épouse [X], [K] [F]) ou selon procès-verbal de recherches établi en conformité de l'article 659 du code de procédure civile ([N] [F]).

Mme [S], assignée à personne, n'a pas, non plus comparu.

M. et Mme [Y], cités à domicile, sont également défaillants.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 5 janvier 2016.

MOTIFS de la DECISION:

La SCI Les Oliviers de la Ripelle ne saurait soutenir que la demande de Mme [B]-[P] est, en l'absence de titre établissant au profit de son fonds une servitude de passage, irrecevable ou mal fondée, alors que celle-ci invoque les dispositions de l'article 682 du code civil selon lequel le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue ou une issue insuffisante, peut réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour la desserte normale de ses fonds.

Dans son premier rapport d'expertise en date du 7 février 2008, M. [W] a été amené à examiner deux accès possibles au fonds de Mme [B]-[P], constitué des parcelles AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 1], [Cadastre 3] et [Cadastre 3], sachant que la parcelle AB n° [Cadastre 2] sert d'emprise à une maison d'habitation, à savoir, par rapport au plan d'état des lieux formant l'annexe 5.1 :

-un accès AB, à partir de la RN n° 8 de [Localité 3] à [Localité 4], qui traverse les parcelles AB n° [Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 2];

-un accès CB, à partir de la RN n° 8, qui traverse les parcelles AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 1] et [Cadastre 3].

Il a notamment relevé que l'accès AB, ayant une surface de roulement comprise entre 2 mètres et 2,50 mètres, était utilisé depuis 1948 au moins par la famille [P] pour la desserte de son fonds, tandis que l'accès CB, non carrossable, n'avait jamais été utilisé pour rejoindre la RN n° 8 au moyen de véhicules automobiles, mais à pied ou avec bêtes chargées ou non (sic).

Il résulte, par ailleurs, des énonciations du rapport d'expertise que par acte notarié du 12 avril 1948, [T] [P] a fait l'acquisition auprès de M. et Mme [Z] d'une propriété rurale (') à Ollioulles (') quartier de la Ripelle ou de Sainte Barbe comprenant petite maison élevée d'un rez-de-chaussée sur terre-plein en mauvais état, terrain pour la plus grande partie en nature de rochers broussailles, avec restanques éboulées (') 10 ha 83 a 70 ca, cadastrée section [Cadastre 9] (') confrontant de l'est la route nationale et propriété [G] ('), propriété ayant appartenu à l'origine (1878) à [Q] [U] ; il en ressort également que les consorts [F] ont vendu, par acte du 31 janvier 1997, à M. et Mme [A] les parcelles AB n° [Cadastre 2] et [Cadastre 2] et, par acte du 13 juin 1997, à M. et Mme [P], les parcelles AB n° [Cadastre 3] et [Cadastre 3] et que les propriété [F] et [S] ont pour auteur commun, [B] [O] [A], qui a détaché sa propriété, le 28 août 1890, l'actuelle propriété [S] (parcelles AB n° [Cadastre 1] et [Cadastre 1]), la partie ainsi détachée étant séparée du gros de cette propriété par un chemin partant de la grand' route pour aboutir à la propriété [U], la propriété [U] étant à cette date du 28 août 1890 l'actuelle propriété [P].

Si M. et Mme [P] ont acheté aux consorts [F], le 13 juin 1997, les parcelles AB n° [Cadastre 3] et [Cadastre 3] issues de la propriété d'origine de M. [A], la propriété, qu'ils ont acquise, le 12 avril 1948, n'est pas elle-même issue de cette propriété, M. [G], cité dans l'acte de 1948, étant précisément l'auteur de M. et Mme [F], qui ont donc acquis de [V] [G], par acte du 25 février 1955, une propriété rurale ('), [Adresse 13], sur laquelle existe une maison d'habitation ('), diverses dépendances et terrain attenant en nature de cultures florales, et maraîchères, oliviers et inculte n° 309p-309p313-314p-314p315-317-318-314p-314p.

Des investigations de M. [W], il ressort encore que l'accès à la propriété [P] n'est pas décrit dans les titres de propriété successifs, que la bastide apparaît sur le plan cadastral napoléonien de 1830, que l'accès BC depuis la RN n° 8 existait déjà en 1890, mais seulement à pied ou pour bêtes chargées ou non, et que la mise en état de viabilité du chemin litigieux AB remonte à une période comprise entre 1927 et 1948.

Le complément d'expertise confiée à M. [W] aux termes de l'arrêt du 13 mai 2015 a permis d'établir que la nouvelle solution de desserte, proposée par la SCI Les Oliviers de la Ripelle, par la RD n° 20, le chemin du Gros cerveau, la voie communale de Sainte-Barbe ou la route de la Pointe à Olioules était manifestement irréalisable, compte tenu de la dénivelé (230 mètres environ) entre la RD n° 20 et la maison, de la longueur de la voie à créer (767 mètres environ) compte tenu de la pente naturelle (de l'ordre de 50%) dans des éboulis ou du rocher, de la surface impactée (15 000 m² environ) et du coût des travaux, qualifiés par l'expert de « pharaoniques » (près de 800 000 € TTC) et de la situation de l'accès envisagé en zone naturelle ND et en espace boisé classé (EBC).

L'accès BC s'effectuerait, à partir de la RN n° 8, au niveau d'une ouverture de faible largeur pratiquée dans un mur de soutènement bordant la route, envahie par la végétation, accès qui n'a jamais été emprunté par des véhicules automobiles, l'expert relevant à cet égard que le garage construit sur la parcelle AB n° [Cadastre 1] de Mme [S] est implanté de telle façon que les véhicules ne peuvent venir que par le nord, à l'opposé de cet accès, lequel présente, en outre, une pente importante (51% sur 8 mètres) par rapport à la route; il apparaît surtout impossible à viabiliser en l'état du refus d'autorisation de voirie opposé, aux termes d'une décision du 19 juin 2014, par le président du conseil général du Var à une demande de Mme [B]-[P] veuve [M], aux motifs que la section de route (du PR 20+0500 au PR 20+0580, comprise entre la sortie de la ville d'[Localité 2] et [Localité 6] d'[Localité 7], ne permet pas la création d'accès nouveaux, ceux existant étant déjà très dangereux, que la dénivelé de ces accès, qui débouchent à proximité de virages où la visibilité est insuffisante, représente un danger pour les riverains ainsi que pour les usagers de la route et que, de plus, le plan d'occupation des sols de la commune d'[Localité 2] interdit tout nouvel accès sur cette section de route.

Cette décision fait suite à un courrier du 10 octobre 2012 par lequel le responsable du pôle technique du conseil général indiquait à Mme [E], émettre un avis défavorable à la création d'un accès débouchant sur la route départementale N8.

Le refus d'autorisation de voirie opposé par l'administration, qui interdit tout désenclavement par les parcelle AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 1] et [Cadastre 3] de Mme [S] et des consorts [F],vaut mutatis mutandis pour un désenclavement par la parcelle AB n° [Cadastre 2] de M. [A], dont la situation, en bordure de la RN n° 8, est identique, alors qu'il n'est pas allégué que cette parcelle dispose d'un accès autorisé à la route ; la mise en cause de l'intéressé n'apparaît donc pas utile à la solution du litige et la demande en ce sens, présentée subsidiairement par la SCI, s'avère dilatoire.

Le fonds de Mme [B]-[P] doit être considéré comme enclavé en raison du fait que la SCI Les Olivers de la Ripelle, devenue propriétaire, le 8 décembre 2005, des parcelles AB n° [Cadastre 4] et [Cadastre 5] en propre et de la parcelle AB n° [Cadastre 5] en indivision avec M. et Mme [Y], s'oppose désormais au passage par l'accès AB utilisé jusqu'alors par tolérance des propriétaires concernés ; la SCI n'est pas fondée à prétendre que Mme [B]-[P] ne peut réclamer un droit de passage, tenant le fait que la maison implantée sur la parcelle AB n° [Cadastre 2] aurait été construite en violation des règles d'urbanisme, alors que la maison, qui était alors à simple rez-de-chaussée et en mauvais état, a été acheté en 1948 par [T] [P] et qu'il existait une bastide sur le plan cadastral napoléonien de 1830.

Rien ne permet d'établir que les parcelles AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 1] et [Cadastre 3] proviennent de la même propriété d'origine, incluant les AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 1], [Cadastre 3] et [Cadastre 3] de Mme [B]-[P] en sorte que les dispositions de l'article 684 du code civil seraient applicables ; en toute hypothèse, en l'état du refus d'autorisation de voirie opposé par l'administration, aucun accès à la voie publique ne peut être aménagé, selon le tracé BC, tel que défini par l'expert sur lesdites parcelles AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 1] et [Cadastre 3].

Il convient, en conséquence, de considérer que le tracé le plus court et le moins dommageable doit être fixé selon la solution d'accès AB correspondant, sur le plan annexe 6 du rapport déposé le 13 mai 2015 par M. [W], au chemin déjà matérialisé, affectant les parcelles section AB n° [Cadastre 5] (indivision SCI Les oliviers de la Ripelle et M. et Mme [Y]), AB n° [Cadastre 4] (SCI Les Oliviers de la Ripelle) et AB n° [Cadastre 2] (consorts [F]), soit le tronçon [Cadastre 6]-618 dudit plan ; le jugement entrepris doit en conséquence être infirmé.

Il a été indiqué plus haut que la mise en état de viabilité du chemin litigieux AB remonte à une période comprise entre 1927 et 1948 ; l'expert a, en outre, relevé qu'un portail aménagé au [Adresse 14] est commun à la SCI Les Oliviers de la Ripelle et à Mme [B]-[P] et que le départ du chemin « [P] » est soutenu par un mur de pierres, ayant la même apparence que les pierres qui encadrent le portail ; l'affirmation de Mme [B]-[P] selon laquelle sa famille utilise, à l'exclusion de tout autre itinéraire, le chemin AB pour accéder en voiture à sa maison depuis l'acquisition de celle-ci en 1948, est corroborée par de nombreuses attestations de voisins, d'amis et d'autres personnes, tels médecin, infirmière, fournisseurs, sapeurs-pompiers, empruntant régulièrement le chemin ; il s'ensuit que l'assiette et le mode d'exercice de la servitude de passage se trouvent, en l'occurrence, déterminés par trente ans d'usage continu et que l'action en indemnité de la SCI Les Oliviers de la Ripelle est donc prescrite, conformément à l'article 685 du code civil.

Il ne peut être imposé, par avance, au propriétaire du fonds enclavé auquel est reconnu un passage sur les fonds de ses voisins, de restrictions à l'exercice de ce passage, conforme à l'utilisation normale du fonds; la demande de la SCI Les Oliviers de la Ripelle, tendant à ce qu'il soit jugé que le chemin de désenclavement ne pourra être utilisé que pour la desserte d'une habitation unique, ne peut dès lors qu'être rejéte ; de même, en dépit du remplacement par la SCI du portail d'entrée, installé au niveau du 1489, route des Gorges, rien n'établit que Mme [B]-[P] ait été empêchée d'accèder à son fonds, étant précisé que la reconnaissance d'un droit de passage n'interdit pas au propriétaire du fonds servant de se clore, sous réserve de remettre au bénéficire de la servitude la clé ou le dispositif d'ouverture du portail; la demande présentée par Mme [B]-[P] aux fins de suppression des obstacles au passage doit donc être rejetée en l'état.

Eu égard à la nature du litige, les dépens de première instance et d'appel, y compris les frais et honoraires de l'expert, doivent être partagés par moitié entre Mme [B]-[P], d'une part, et la SCI Les Oliviers de la Ripelle, d'autre part, sans toutefois que l'équité commande l'application, au profit de l'une ou l'autre des parties, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Dit que le fonds de [J] [B]-[P] veuve [M], constitué des parcelles cadastrées sur le territoire de la commune d'[Localité 2] (83), lieu-dit « La ripelle », section AB n° [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 1], [Cadastre 3] et [Cadastre 3], est enclavé au sens de l'article 682 du code civil,

Dit qu'il sera désenclavé selon la solution d'accès AB correspondant, sur le plan annexe 6 du rapport déposé le 13 mai 2015 par M. [W], au chemin déjà matérialisé, affectant les parcelles section AB n° [Cadastre 5] (indivision SCI Les oliviers de la Ripelle et M. et Mme [Y]), AB n° [Cadastre 4] (SCI Les Oliviers de la Ripelle) et AB n° [Cadastre 2] (consorts [F]), soit le tronçon [Cadastre 6]-618 dudit plan,

Rejette les autres demandes des parties, notamment celle en paiement d'une indemnité,

Fait masse des dépens et dit qu'ils doivent être partagés par moitié entre Mme [B]-[P], d'une part, et la SCI Les Oliviers de la Ripelle, d'autre part, les dépens d'appel étant recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à l'application, au profit de l'une ou l'autre des parties, des dispositions de l'article 700 du même code,

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 13/14202
Date de la décision : 10/03/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°13/14202 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-10;13.14202 ?
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