COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 25 FEVRIER 2016
N° 2016/ 169
Rôle N° 13/15972
[D] [V]
C/
[E] [Y]
[Z] [M]
[V] [I] [M]
MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD
M.M.A IARD ASSURANCES MUTUELLES
CAISSE DE GARANTIE DES ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES ET MANDATAIRES JUDICIAIRES
Grosse délivrée
le :
à :
SCP BADIE
SCP LEVAIQUE
SCP GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 02 Juillet 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 10/00017.
APPELANT
Monsieur [D] [V]
né le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assisté par Me Pierre CHAMI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Pierre-vincent LAMBERT, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Maître [E] [Y] ,
es qualités d'administrateur provisoire de l'Etude de Maître [N] [M]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Laurence LEVAIQUE de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assisté par Me Jean-Pierre FABRE de la SCP FABRE M., FABRE J.P., GUEUGNOT D., FABRE H SAVARY-BASTIANI C., avocat au barreau de PARIS substituée par Me Ivan MATHIS, avocat au barreau de PARIS,
Mademoiselle [Z] [M]
née le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 2], demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Michel LOPRESTI, avocat au barreau de GRASSE
Monsieur [V] [I] [M]
né le [Date naissance 3] 1939 à [Localité 2], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Michel LOPRESTI, avocat au barreau de GRASSE
SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD 'M.M.A IARD'
venant aux droits de la SA COVEA RISKS, demeurant [Adresse 4]
dont le siége social est [Adresse 5]
représenté par Me Laurence LEVAIQUE de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assisté par Me Jean-Pierre FABRE de la SCP FABRE M., FABRE J.P., GUEUGNOT D., FABRE H SAVARY-BASTIANI C., avocat au barreau de PARIS substituée par Me Ivan MATHIS, avocat au barreau de PARIS,
M.M.A IARD ASSURANCES MUTUELLES
venant aux droits de la SA COVEA RISKS, demeurant [Adresse 4]
dont le siége social est [Adresse 6]
représenté par Me Laurence LEVAIQUE de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assisté par Me Jean-Pierre FABRE de la SCP FABRE M., FABRE J.P., GUEUGNOT D., FABRE H SAVARY-BASTIANI C., avocat au barreau de PARIS substituée par Me Ivan MATHIS, avocat au barreau de PARIS,
CAISSE DE GARANTIE DES ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES ET MANDATAIRES JUDICIAIRES,
demeurant [Adresse 7]
représenté par Me Laurence LEVAIQUE de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assisté par Me Jean-Pierre FABRE de la SCP FABRE M., FABRE J.P., GUEUGNOT D., FABRE H SAVARY-BASTIANI C., avocat au barreau de PARIS substituée par Me Ivan MATHIS, avocat au barreau de PARIS,
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 20 Janvier 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Catherine DURAND, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Madame Catherine DURAND, Conseiller
Madame Anne CHALBOS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle MASSON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Février 2016
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Février 2016,
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame France-Noëlle MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur [D] [V], PDG de la SA Serel, devenue la société Sitael, a déposé plainte avec constitution de partie civile le 12 novembre 1991 à l'encontre de Messieurs [D], [U], Mesdames [D] et [S] pour abus de biens sociaux, complicité et recel.
Une seconde information judiciaire a été ouverte des chefs d'abus de biens sociaux, corruption active et passive, faux et usage de faux, complicité et recel d'abus de biens sociaux dans le cadre de laquelle Monsieur [D] [V], Madame [G] épouse [P], Madame [L] [G] divorcée [V], Monsieur [C] [I], [O][W], [S] [H] et Monsieur [V] [E] étaient mis en examen.
Sont intervenus un jugement du Tribunal correctionnel de Grenoble le 3 août 1995 et un arrêt de la Cour des appels correctionnels de Grenoble du 12 janvier 1996 ayant prononcé des condamnations du chef d'abus de biens sociaux, corruption active et passive à l'encontre notamment de [D] [V], condamné à 5 ans d'emprisonnement avec sursis, une amende de 2,5 Millions de francs, 5 ans d'interdiction de droits civiques et de [V] [E], ce dernier étant condamné à deux ans d'emprisonnement, une amende de 1 million de francs et 5 ans d'interdiction de droits civiques.
Monsieur [Q] [D] a été condamné aux peines de 2 ans d'emprisonnement avec sursis, 300.000 francs d'amende, 5 ans d'interdiction des droits civiques et Monsieur [S] [H] d'1 an d'emprisonnement avec sursis et 100.000 francs d'amende.
Mesdames [L] [G] et [K] [G], [J] [A], [M] [S], Messieurs [A] [U], [O] [W] et [Y] [K] ont également été définitivement condamnés par le tribunal correctionnel de Grenoble du 3 août 1995 pour des faits d'abus de biens sociaux, complicité et recel d'abus de biens sociaux.
La société Sitael alors représentée par Monsieur [V] ne s'est pas constitué partie civile dans les instances pénales pour obtenir réparation du préjudice résultant de ces infractions.
Sur procédure d'alerte lancée par le commissaire aux comptes le tribunal de commerce de Nice, sur saisine d'office, a ouvert le 24 mai 1996 une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Sitael, désignant Me [X] en qualité d'administrateur et Me [M] [M] en qualité de représentant des créanciers.
Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire le 5 juin 1997, Me [M] [M] étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire.
La société Sitael, représentée par Monsieur [V], les 19 novembre, 13 et 18 décembre 1996 a assigné devant le TGI de Nice Messieurs [Q] [D], [S] [H], [A] [U] et Madame [S] [S] en réparation du préjudice subi par la société du fait des agissements délictueux ayant entrainé leur condamnation pénale
Me [M] [M], ès qualités, est intervenue volontairement dans cette instance le 19 février 1998.
Par jugement du 16 avril 2002, l'assignation délivrée par la société Sitael représentée par son seul PDG en exercice à l'exclusion de l'administrateur judiciaire chargé d'une mission d'assistance été déclarée nulle et de nul effet et irrecevable en conséquence l'intervention volontaire du liquidateur judiciaire.
Me [M] [M], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sitael, a alors engagé les 12,18 et 24 juin 2002 une action tendant aux mêmes fins à l'encontre des personnes précitées devant le TGI de Nice, qui par jugement du 7 janvier 2004 a déclaré l'action prescrite, cette décision étant confirmée par la cour d'appel de céans le 25 octobre 2005.
Par exploit du 17 juin 1998 Me [M] [M], ès qualités, a assigné Monsieur [D] [V] en réparation du préjudice subi par la société du fait des délits pour lesquels il a été définitivement sanctionné.
Monsieur [D] [V] a été condamné par jugement du TGI de Grasse du 2 mars 2004 à verser à Me [M] [M], ès qualités, la somme de 3.096.581,10 euros, décision confirmée par arrêt du 16 février 2006.
Cette somme correspondait à :
- 15.202.300 francs de détournements de trésorerie,
- 2.479.482 francs représentant la position débitrice de comptes courants de la société,
- 2.080.072 francs de dépenses personnelles de Monsieur [V],
- 550.387 francs de travaux effectués dans des villas appartenant à Monsieur [V].
Me [N] [M] [M] est décédée le [Date décès 1] 2009.
Me [Y] a été désigné en qualité d'administrateur provisoire de l'Etude de Me [M] [M].
Par exploit du 4 décembre 2009 Monsieur [D] [V] a assigné Me [Y], administrateur provisoire de l'étude de Me [M] [M], la Caisse de garantie des Administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires, en paiement de la somme de 3.000.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de fautes commises par le liquidateur judiciaire de la société Sitael, puis, par exploit du 1er avril 2011, a assigné Monsieur [I] [M] et Mademoiselle [Z] [M] en leurs qualités d'héritiers de Madame [M] [M], et la société Covea Risks, assureur responsabilité civile.
Me [F] [Q] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sitael par jugement du 27 juillet 2010.
Par ordonnance du juge de la mise en état du 14 mars 2011 Monsieur [V] a été invité à préciser en quelle qualité il agissait et le fondement juridique de sa demande.
Par jugement du 2 juillet 2013 le TGI de Nice a :
Mis hors de cause Me [Y], ès qualités, et la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires,
Déclaré Monsieur [D] [V], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de dirigeant de la société Sitael, irrecevable dans l'ensemble de ses demandes à l'encontre de Monsieur [I] [M] et Mademoiselle [Z] [M] en leurs qualités d'héritiers de Madame [M] [M] et de la société Covea Risks,
Débouté Monsieur [I] [M] et Mademoiselle [Z] [M] de leur demande de dommages et intérêts,
Condamné Monsieur [D] [V] à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires la somme de 3.000 euros, à Me [Y], celle de 2.500 euros à Monsieur [I] [M] et Mademoiselle [Z] [M] celle de 8.000 euros, à Covea Risks celle de 4.000 euros,
Ordonné l'exécution provisoire,
Condamné [D] [V] aux entiers dépens.
Le tribunal a dit que Monsieur [V] n'avait aucune qualité à agir pour le compte de la société Sitael en liquidation judiciaire en vertu de l'article 1844-7 7ème du code civil et L 622-9 du code de commerce en vigueur au jour de l'ouverture de la procédure collective, la société étant représentée par son liquidateur judiciaire, et que s'agissant d'une action en responsabilité civile contre le liquidateur judiciaire de nature patrimoniale elle ne peut être exercée avant la clôture des opérations de liquidation judiciaire.
Il a ajouté que Monsieur [V] ne démontrait pas bénéficier de la subrogation légale dont il se prévalait en qualité de caution alléguée, non démontrée.
Par acte du 31 juillet 2013 Monsieur [D] [V] a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions récapitulatives déposées et notifiées le 19 janvier 2016, tenues pour intégralement reprises, Monsieur [D] [V] demande à la cour de :
Révoquer l'ordonnance de clôture compte tenu de la signification de conclusions et de pièces nouvelles postérieurement à celle-ci,
Déclarer irrecevables les conclusions des Mutuelles du Mans Assurances IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, qui n'étant pas intimées ne justifient pas de leurs droits en intervention volontaire,
Les condamner in solidum au paiement de la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens,
Déclarer Monsieur [V] recevable en son appel et son action,
Infirmer le jugement attaqué,
Vu l'article 1382 du code civil,
Condamner in solidum la société Covea Risks, Monsieur [I] [M] et Mademoiselle [Z] [M] à payer à la société Sitael la somme de 3 millions d'euros à titre de dommages et intérêts,
Débouter Me [Y] ès qualités et la Caisse de garantie de leur demande de mise hors de cause et des prétentions qui en découlent,
Condamner in solidum Covea Risks, Monsieur [I] [M] et Mademoiselle [Z] [M] au paiement d'une somme de 6.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
Très subsidiairement, pour autant qu'il soit justifié qu'elles viennent aux droits de la société Covea Risks,
Prononcer toutes les condamnations sollicitées contre Covea Risks in solidum contre les sociétés Mutuelles du Mans Assurances IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles.
Il fait valoir être l'actionnaire très largement majoritaire de la société Sitael et par ailleurs être recherché en qualité de caution hypothécaire de la société.
Il soutient avoir qualité à exercer l'action ut singuli contre l'ancien liquidateur judiciaire au profit de la société Sitael, la règle 'Nul ne plaide par procureur' ne lui étant pas opposable.
Il fait valoir que Me [M] [M] a commis trois fautes :
- En tardant à assigner devant le TGI Messieurs [Q] [D], [S] [H], [A] [U] et Madame [S] [S]
- En s'abstenant purement et simplement d'attraire les autres personnes concernées par les condamnations pénales définitives de manière arbitraire,
- En s'abstenant de faire la moindre recherche de solvabilité des personnes condamnées à quelque titre que ce soit.
Il évalue le préjudice subi par la société en raison des faits d'abus de biens sociaux et recel d'abus de biens sociaux à la somme de 3 millions d'euros.
Par conclusions déposées et notifiées le 27 décembre 2013, tenues pour intégralement reprises, Monsieur [I] [M] et Mademoiselle [Z] [M] demandent à la cour de :
Dire Monsieur [V] irrecevable et mal fondé en son appel,
Confirmer le jugement attaqué, sauf en ce qu'ils ont été déboutés de leur demande de dommages et intérêts,
Dire [D] [V] irrecevable en l'ensemble de ses demandes par application des dispositions des articles 31 et 122 du code de procédure civile en vertu du principe 'Nul ne plaide pas procureur',
Dire que l'action en responsabilité civile engagée contre le liquidateur judiciaire de nature patrimoniale ne peut être engagée avant la clôture de la procédure de liquidation judiciaire,
Dire qu'en vertu du principe du dessaisissement de l'article L 622-9 ancien du code de commerce et celui du monopole du liquidateur judiciaire quant à l'exercice des actions patrimoniales, Monsieur [V] est irrecevable en toutes ses demandes,
Infiniment subsidiairement, si la recevabilité était admise,
Dire Monsieur [V] mal fondé et le débouter de l'intégralité de ses demandes,
Dire qu'aucun manquement fautif susceptible d'être imputé à Me [M] [M] n'est démontré,
Dire qu'il ne rapporte pas la preuve de la réalité d'un préjudice et/ou d'une perte de chance et d'un lien de causalité susceptible d'exister entre les manquements allégués et la perte de chance invoquée,
En toute hypothèse, réformant et ajoutant au jugement entrepris,
Les dire recevables en leur demande reconventionnelle,
Condamner [D] [V] au paiement de la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée, et de celle de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par conclusions n° 3 déposées et notifiées le 14 janvier 2016 la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD dite MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, venant aux droits de Covea Risks, demandent à la cour de :
Vu le Journal officiel du 16 décembre 2015
Constater qu'elles viennent aux droits de la compagnie Covea Risks,
Vu l'article 783 du code de procédure civile,
Dire les conclusions régularisées dans les intérêts des sociétés MMA IARD assurances Mutuelles et MMA IARD, venant aux droits de Covea Risks recevables,
En tant que de besoin révoquer l'ordonnance de clôture,
Confirmer le jugement,
En tout état de cause,
Constater que le jugement n'est entaché d'aucune nullité,
Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,
Vu les articles 46, 152 de la loi du 25 janvier 1985, (L 622-9 du code de commerce)
Dire que Monsieur [V] ne rapporte pas la preuve d'une qualité à agir ni d'un intérêt à agir,
Déclarer en conséquences ses demandes irrecevables,
En tout état de cause,
Le débouter de toutes ses demandes,
Condamner Monsieur [V] à leur verser 4.000 euros de frais irrépétibles et aux dépens.
Par conclusions déposées et notifiées le 30 décembre 2013 la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires demande à la cour de :
Confirmer le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Condamner Monsieur [V] au paiement de la somme de 3.700 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
En tout état de cause,
Vu les articles L 814-3 et L 814-4 anciennement articles 34 et 35 de la loi n ° 85-99 de janvier 1985,
Constater que la garantie 'détournement de fonds' n'est pas applicable,
Constater qu'en matière de responsabilité civile la loi a uniquement mis à la charge de la caisse de garantie l'obligation de souscrire une police d'assurance responsabilité civile pour le compte de ses membres,
En conséquence,
Prononcer sa mise hors de cause,
Condamner Monsieur [V] au paiement de la somme de 3.700 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par conclusions déposées et notifiées le 30 décembre 2013 Me [Y] mandataire judiciaire, administrateur provisoire du Cabinet de Me [N][M] [M], demande à la cour de
Confirmer le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Condamner Monsieur [V] au paiement de la somme de 3.700 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Prononcer sa mise hors de cause pure et simple en sa qualité d'administrateur provisoire de l'Etude de Me [N] [M] [M],
Condamner Monsieur [V] aux entiers dépens.
L'affaire a été clôturée en dernier lieu le 20 janvier 2016, aprés révocation d'accord des parties de l'ordonnance du 13 janvier 2016.
MOTIFS
Sur l'intervention volontaire de la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD, dite MMA IARD, et MMA IARD Assurances Mutuelles :
Attendu que selon décision n° 2015 C 83 de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution en date du 22 octobre 2015, publiée au Journal officiel du 16 décembre 2015, ont été approuvés dans les conditions prévues à l'article L 324-1 du code des assurances, les transferts d'une partie des portefeuilles de contrats, avec les droits et obligations qui s'y rattachent, de la société Covea Fleet, de la société Covea Caution, et de la société Covea Risks, à la société MMA IARD Assurances Mutuelles, ainsi que les transferts par voie de fusion-absorption des portefeuilles de contrats, avec les droits et obligations qui s'y rattachent, de la société Covea Fleet, de la société Covea Caution, et de la société Covea Risks à la société MMA IARD ;
Attendu que les sociétés Mutuelles du Mans Assurances IARD, dite MMA IARD, et MMA IARD Assurances Mutuelles sont en conséquence recevables en leurs interventions volontaires aux droits et obligations de la société Covea Risks ;
Sur la mise hors de cause de Me [Y], ès qualités d'administrateur provisoire de l'Etude de Me [M] [M], décédée le [Date décès 1] 2009 et de la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires :
Attendu que par Monsieur [V] recherche la responsabilité civile personnelle de Me [M] [M], lui reprochant des fautes pendant le cours de son mandat de liquidateur judiciaire de la société Sitael ;
Attendu que cette action est étrangère au mandat d'administrateur provisoire de l'Etude [M] [M] de Me [Y], n'intéressant que la succession de Me [M] [M] ;
Attendu qu'elle n'entre pas dans le champ des faits garantis par la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires, alors qu'il n'est reproché aucun détournement de fonds à l'ancien liquidateur judiciaire et que la responsabilité civile professionnelle de Me [M] [M] était assurée auprès de Covea Risks ;
Attendu que le maintien de leur mise en cause en appel ne se justifie absolument pas alors qu'aucune prétention n'est présentée à leur encontre par Monsieur [V] qui se contente d'affirmer que leur mise en cause était indispensable pour connaître tant la succession de Me [M] [M] que l'assureur responsabilité civile ;
Attendu qu'il convient en conséquence de prononcer leur mise hors de cause ;
Attendu que Monsieur [V] est condamné à verser tant à Me [Y], ès qualités, qu'à la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et liquidateurs judiciaires une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et de défaut d'intérêt de Monsieur [V] à agir :
Attendu que Monsieur [V] indique qu'une société en liquidation judiciaire peut néanmoins subir un préjudice dont elle est fondée à demander à réparation et précise que Me [M] [M] a 'bien évidemment pas agi au nom de la société Sitael contre elle-même au titre de sa responsabilité professionnelle de mandataire judiciaire' ;
Attendu qu'il revendique la qualité 'd'actionnaire très majoritaire' de la Sa Sitael et précise exercer l'action ut singuli à l'encontre de l'ancien liquidateur de la société Sitael ; qu'il demande la condamnation de Monsieur [M] et de sa fille [Z] [M] en leurs qualités d'héritiers de Me [M] [M] à payer à la société Sitael la somme de 3.000.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Attendu que s'il se plaint d'être recherché en qualité de caution hypothécaire personnelle de la société, il ne présente aucune demande à titre personnel, mais seulement au nom de la société Sitael ;
Attendu que les intimés font valoir que du fait de la procédure de liquidation judiciaire ouverte sous l'égide de la loi du 25 janvier 1985, Monsieur [V] ne peut agir ni en qualité d'ancien mandataire social, ni de créancier, ni d'actionnaire majoritaire ni même en qualité de caution s'agissant d'un engagement librement souscrit ;
Attendu qu'il est rappelé que l'action ut singuli est prévue, s'agissant des sociétés anonymes, par l'article L 225-252 du code de commerce qui dispose 'Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par une association répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120 soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, intenter l'action sociale en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société, à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués.' ;
Attendu que cette action est en conséquence ouverte aux actionnaires à l'encontre des dirigeants de la société ;
Attendu que Monsieur [V] fait valoir que l'action visant l'ancien liquidateur judiciaire de la SA Sitael est parfaitement recevable, en se prévalant d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 11 septembre 2014 ayant déclaré recevable l'action ut singuli engagée par un associé à l'encontre du liquidateur amiable d'une SARL, aprés avoir dit que les dispositions de la loi sur les sociétés s'appliquaient aux dirigeants au sens large, que cette notion recouvrait tous les mandataires sociaux et donc le liquidateur amiable ;
Attendu toutefois que le mandataire judiciaire liquidateur judiciaire n'est pas le dirigeant de la société mise en liquidation judiciaire, ni un mandataire social, mais exerce les pouvoirs qui lui sont dévolus par la loi dans la défense de l'intérêt collectif des créanciers ;
Attendu que l'action ut singuli engagée par Monsieur [V] en sa qualité d'actionnaire à l'égard du liquidateur judiciaire est donc irrecevable ;
Attendu que les premiers juges ont rappelé à bon droit que la société Sitael ayant été placée en redressement judiciaire le 24 mai 1996 et en liquidation judiciaire le 5 juin 1997, seul le liquidateur judiciaire peut exercer les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine ;
Attendu qu'il a seul qualité pour demander, dans l'intérêt collectif des créanciers, la réparation du préjudice subi par la société, en vertu de l'ancien article L 622-9 du code de commerce applicable à la procédure collective de la société Sitael ;
Attendu en outre, qu'eu égard à la date d'ouverture de la procédure collective, la publication du jugement ordonnant la liquidation judiciaire de la société a emporté sa dissolution en application de l'article 1844-7, 7° du Code civil alors en vigueur, sa personnalité morale subsistant toutefois pour les besoins de la liquidation ;
Attendu que l'action en réparation du préjudice subi par la société ne peut donc être engagée que par le liquidateur judiciaire et Monsieur [V] n'a pas appelé en la cause Me [Q], nouveau liquidateur judiciaire de la société Sitael aux fins de reprise d'instance, ni d'ailleurs demandé la désignation d'un mandataire ad hoc à cette fin ;
Attendu en conséquence que l'action engagée par Monsieur [V] en qualité revendiquée d'actionnaire majoritaire au bénéfice de la société Sitael est rejetée comme étant irrecevable ;
Sur les demandes de Monsieur [I] [M] et Madame [Z] [M] :
Attendu que si l'action engagée par Monsieur [V] est manifestement irrecevable, elle n'a pas pour autant dégénéré en abus du droit d'ester ;
Attendu que les consorts [M] sont en conséquence déboutés de leur demande de dommages et intérêts d'un montant de 30.000 euros ;
Attendu que Monsieur [V] est condamné à leur verser une indemnité de 6.000 euros à titre de frais irrépétibles d'appel ;
Attendu que partie perdante, il est condamné aux entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et publiquement,
Déclare recevables les interventions volontaires en appel de la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD dite MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, venant aux droits de Covea Risks,
Confirme le jugement attaqué,
Y ajoutant,
Dit irrecevable l'action ut singuli exercée par Monsieur [D] [V] à l'encontre des héritiers de Me [M] [M], ancien liquidateur judiciaire de la SA Sitael, au bénéfice de la société Sitael,
Déboute Monsieur [I] [M] et Madame [Z] [M] de leur appel incident,
Condamne Monsieur [D] [V] à verser la somme de 2.000 euros à la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et des liquidateurs judiciaires, la somme de 2.000 euros à Me [Y] ès qualités d'administrateur provisoire de l'Etude de Me [M] [M], la somme de 6.000 euros à Monsieur [M] et Madame [M], ès qualités d'héritiers de Me [M] [M], en application de l'article 700 du code de procédure civile à titre de frais irrépétibles d'appel,
Condamne Monsieur [D] [V] aux entiers dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT