COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 08 JANVIER 2016
N°2016/12
Rôle N° 13/22491
[Q] [S]
C/
EURL SODEVAL
SAS BRESCIA INVESTISSEMENT
Grosse délivrée le :
à :
Me Cedric PORIN, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Géraldine LESTOURNELLE, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Michel DOSSETTO, avocat au barreau de MARSEILLE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section CO - en date du 26 Septembre 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 11/1171.
APPELANT
Monsieur [Q] [S], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Cedric PORIN, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEES
EURL SODEVAL, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Géraldine LESTOURNELLE, avocat au barreau de MARSEILLE
SAS BRESCIA INVESTISSEMENT, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Michel DOSSETTO, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Souhila CANALE, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 30 Novembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Pascale MARTIN, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller
Monsieur David MACOUIN, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Janvier 2016
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Janvier 2016
Signé par Madame Pascale MARTIN, Conseiller faisant fonction de Président et Mme Nadège LAVIGNASSE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Le 2 janvier 1999, [Q] [S] a été embauché par la S.A.R.L. SODEVAL. Le 24 avril 2009, le contrat de travail a été transféré à la société MPR.
Le 15 mars 2011, [Q] [S] a poursuivi la S.A.R.L. SODEVAL et la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT devant le conseil des prud'hommes de MARSEILLE. En cours d'instance, il a fait savoir qu'il n'agissait plus contre la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT et a demandé qu'elle soit mise hors de cause. Il a réclamé le paiement d'heures supplémentaires, des dommages et intérêts pour discrimination et une indemnité au titre des frais de procédure.
Par jugement du 26 septembre 2013, le conseil des prud'hommes a :
- mis hors de cause la société BRESCIA INVESTISSEMENT,
- débouté les parties de leurs demandes,
- condamné [Q] [S] aux dépens.
Le jugement a été notifié le 25 octobre 2013 à [Q] [S] qui a interjeté appel le 5 novembre 2013.
Par conclusions visées au greffe le 30 novembre 2015 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [Q] [S] :
- précise qu'il dirige son appel contre la S.A.R.L. SODEVAL et contre la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT et qu'il demande leur condamnation solidaire,
- au soutien de la recevabilité de son action, observe que la transaction a été conclue avec la société MPR à laquelle son contrat a été transféré en 2009 et ne concerne pas les sociétés intimées,
- prétend qu'il a subi une discrimination en raison des activités syndicales de son frère, relève l'absence d'évolution de sa carrière alors que ses évaluations étaient excellentes et que ses collègues embauchés en même temps que lui ont connu une progression dans leur carrière, affirme que des responsables ont déclaré à plusieurs reprises qu'il n'évoluerait pas à cause de son frère et réclame la somme de 125.000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination en raison de sa situation de famille, pour discrimination syndicale et pour exécution fautive du contrat de travail,
- expose qu'il a accompli de nombreuses heures supplémentaires et que les heures de travail résultant des fiches de pointage sont fausses et réclame au titre de la période ayant couru de janvier 2006 à juillet 2008 la somme de 13.619,92 euros, outre 1.361,99 euros de congés payés afférents,
- sollicite la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation des intimées aux dépens.
Par conclusions visées au greffe le 30 novembre 2015 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.R.L. SODEVAL qui interjette appel incident :
- au principal, explique que le contrat de travail unissant [Q] [S] à la société MPR a été rompu et que les parties ont signé le 8 mars 2011 une transaction et soulève l'irrecevabilité de l'action,
- au subsidiaire, conteste toute discrimination et relie l'évolution de la carrière du salarié à la faible qualité de son travail,
- demande le rejet des prétentions du salarié et sa condamnation à lui verser la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à acquitter les dépens.
Par conclusions visées au greffe le 30 novembre 2015 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT :
- au principal, soulève l'irrecevabilité de l'appel dirigé à son encontre au motif qu'en première instance le salarié a renoncé à toute action contre elle,
- au subsidiaire, invoque l'irrecevabilité des demandes au regard de la transaction conclue entre le salarié et la société MPR,
- plus subsidiairement sur le fond, objecte qu'elle n'a jamais été l'employeur de [Q] [S] et demande le rejet de ses prétentions,
- au reconventionnel, sollicite la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de [Q] [S] aux dépens.
A l'audience, la S.A.R.L. SODEVAL, par la voix de son conseil, s'associe au moyen de la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT tiré de l'irrecevabilité de l'appel dirigé contre cette dernière. [Q] [S], par la voix de son conseil, reconnaît que son appel dirigé contre la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT est irrecevable.
Mention en a été portée sur la note d'audience signée par le conseiller rapporteur et le greffier.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'appel dirigé contre la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT :
Le 4 juillet 2011, le conseil de [Q] [S] a adressé au conseil des prud'hommes de MARSEILLE un courrier ainsi libellé :
«J'ai initialement fait citer deux sociétés dans cette affaire : les sociétés SODEVAL et BRESCIA Investissements S.A.S..
Cependant, j'ai appris en cours de procédure que la société SODEVAL qui était jusqu'alors une des sociétés du groupe BRESCIA venait de quitter son giron et appartenait désormais directement au groupe Mac Donald's France situé à [Localité 1].
Il n'y a plus désormais aucun intérêt à solliciter la présence de la société BRESCIA Investissements S.A.S. dans cette affaire.
En conséquence, je sollicite la mise hors de cause de la société BRESCIA Investissements et vous demande de bien vouloir le constater lors de l'audience de conciliation du 5 juillet.».
Aux termes de ses conclusions déposées devant le conseil des prud'hommes, [Q] [S] a demandé la condamnation de la seule société SODEVAL.
[Q] [S] qui, en première instance, a renoncé à agir contre la société BRESCIA Investissements ne peut quereller une décision conforme à ses demandes. Les parties s'accordent, d'ailleurs, pour admettre que l'appel formé par [Q] [S] contre la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT est irrecevable.
En conséquence, l'appel interjeté par [Q] [S] contre la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT doit être déclaré irrecevable.
Sur la recevabilité de l'action à l'encontre de la S.A.R.L. SODEVAL :
L'article 2052 du code civil dispose en son premier alinéa que «les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort». L'article 122 du code de procédure civile érige la chose jugée en fin de non recevoir.
Le 2 janvier 1999, [Q] [S] a été embauché par la S.A.R.L. SODEVAL. Le 24 avril 2009, le contrat de travail a été transféré à la S.A. MAC DONALD'S PROVENCE RESTAURANTS. [Q] [S] a été licencié le 25 février 2011.
Le 8 mars 2011, [Q] [S] et la S.A. MAC DONALD'S PROVENCE RESTAURANTS ont conclu une transaction aux termes de laquelle la société versait au salarié la somme de 53.000 euros nette «incluant tous dommages et intérêts dus à quelque titre que ce soit ainsi que toute indemnité se rapportant à la conclusion, à l'exécution et à la rupture du contrat de travail». Il était énoncé : «[Q] [S] déclare avoir reçu toutes les sommes auxquelles il pouvait prétendre au titre de l'intégralité de sa collaboration au sein de la société MPR, notamment tous les salaires quelle qu'en soit la dénomination, primes d'ancienneté, primes d'expatriation, bonus, primes et indemnités diverses, comme tous les remboursement de frais qu'il a exposés pour ladite collaboration et considère que les dispositions prévues ci-dessus le remplissent de ses droits relatifs à la conclusion, l'exécution et à la cessation du contrat de travail».
Il s'évince de termes de la transaction que celle-ci englobait les dommages et intérêts pour discrimination ou pour exécution déloyale du contrat de travail et le paiement d'heures supplémentaires.
L'article L. 1224-2 du code du travail qui régit le transfert du contrat de travail dispose :
«Le nouvel employeur est tenu, à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification, sauf dans les cas suivants :
1° Procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ;
2° Substitution d'employeurs sans qu'il y ait eu de convention entre ceux-ci.
Le premier employeur rembourse les sommes acquittées par le nouvel employeur, dues à la date de la modification, sauf s'il a été tenu compte de la charge résultant de ces obligations dans la convention intervenue entre eux.».
Il résulte de ce texte que le transfert du contrat de travail a pour conséquence que la transaction conclue avec le second employeur fait obstacle à l'action contre le premier employeur.
L'action formée par [Q] [S] contre la S.A.R.L. SODEVAL doit donc être déclarée irrecevable.
Le jugement entrepris doit être infirmé.
Sur les frais de procédure et les dépens :
L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais de procédure et de débouter les parties de leurs demandes présentées en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
[Q] [S] qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel. Le jugement entrepris doit être confirmé.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,
Déclare irrecevable l'appel interjeté par [Q] [S] contre la S.A.S. BRESCIA INVESTISSEMENT,
Infirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions relatives aux frais de procédure et aux dépens,
Statuant à nouveau et ajoutant,
Déclare irrecevable l'action formée par [Q] [S] contre la S.A.R.L. SODEVAL,
Déboute les parties de leurs demandes présentées en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne [Q] [S] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Pascale MARTIN faisant fonction