COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 10 DECEMBRE 2015
N° 2015/
Rôle N° 14/19960
[C] [A]
[D] [L] épouse [A]
[S] [T]
SA FRUITEX
C/
SA CIC LYONNAISE DE BANQUE
SA OSEO FINANCEMENT
SA FORTIS LEASE
SA BPI FRANCE FINANCEMENT
Grosse délivrée
le :
à :
SCP MAGNAN
Me ALLIO
Me KEITA
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de TARASCON en date du 06 Octobre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 2011-00920.
APPELANTS
Monsieur [C] [A],
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assisté par Me Dominique HOUEL-TAINGUY, avocat au barreau de MARSEILLE
Madame [D] [L] épouse [A],
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée par Me Dominique HOUEL-TAINGUY, avocat au barreau de MARSEILLE
Maître [S] [T]
agissant en sa qualité de mandataire judiciaire de la SA FRUITEX, demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
SA FRUITEX,
dont le siége social est [Adresse 2]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée par Me Dominique HOUEL-TAINGUY, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEES
SA CIC LYONNAISE DE BANQUE,
dont le siége social est [Adresse 6]
représentée par Me Michel ALLIO, avocat au barreau de TARASCON
SA OSEO FINANCEMENT,
dont le siége social est [Adresse 3]
représentée par Me Jean-louis KEITA de l'ASSOCIATION KEITA J L KEITA S., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée par Me Pascal PHILIPPOT, avocat au barreau de NANCY
SA FORTIS LEASE,
dont le siége social est [Adresse 5]
représentée par Me Jean-louis KEITA de l'ASSOCIATION KEITA J L KEITA S., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée par Me Pascal PHILIPPOT, avocat au barreau de NANCY
SA BPI FRANCE FINANCEMENT
Prise en la personne de son Président en exercice domicilé en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Jean-louis KEITA de l'ASSOCIATION KEITA J L KEITA S., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée par Me Pascal PHILIPPOT de la SCP LAGRANGE - PHILLIPOT .P - CLEMENT. C - ZILLIG .B, avocat au barreau de NANCY
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Novembre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Anne DUBOIS, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Madame Catherine DURAND, Conseiller
Madame Anne DUBOIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle MASSON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Décembre 2015
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Décembre 2015,
Signé par Madame Catherine DURAND, Président suppléant pour le Président empêché et Madame France-Noëlle MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DES FAITS :
La SA Fruitex, créée vers 1870, exerce une activité d'expédition/conditionnement de fruits et légumes à [Localité 1] depuis 1958.
Alors florissante, elle a été victime d'un incendie qui a ravagé ses locaux en juillet 1997.
Par jugement du 12/06/1998, le tribunal de commerce de Tarascon l'a placée en redressement judiciaire puis par décision du 7/04/2000 a homologué le plan de redressement par voie de continuation de l'entreprise prévoyant en substance :
le règlement de 100 % du passif échu par dix versements annuels à partir d'avril 2001, le premier d'un montant de 5%, le deuxième d'un montant de 15% et les huit derniers d'un montant de 10% des créances,
l'inaliénabilité, notamment, de l'ensemble immobilier sis [Adresse 7] comprenant un terrain de 12.900 m² et un immeuble alors en construction, de 4.463 m² environ à usage industriel,
la vente à terme de cet ensemble immobilier.
A partir de 2004, les possibilités de sortie du plan ont été envisagées avec les Sociétés Auximurs et Sicomi Rhône-Alpes, devenues respectivement Oseo Financement et Fortis lease, et la banque CIC Lyonnaise de banque, de la manière suivante :
Sicomi et Auximurs acquièrent l'immeuble construit et achevé à l'exception du revêtement goudronné du parking par Fruitex et concèdent à celle-ci un crédit ' bail avec option d'achat, sur 12 années, CIC Lyonnaise de banque contribue à l'opération par'une contre garantie à hauteur de 20% du risque des crédits-bailleurs rémunérée au taux de 1%, un crédit court terme de 300.000 €, Fruitex constitue une avance-preneur de 360.000 €
Ce schéma a été finalement retenu sauf en ce qui concerne le crédit à court terme de 300.000 € non consenti par le CIC.
Sur la présentation de ces engagements mutuels, le Tribunal de Commerce a autorisé la société Fruitex à vendre son patrimoine immobilier à Sicomi et Auximurs.
C'est ainsi que le 17/09/2004, Sicomi Rhône Alpes et Auxicomi - Auximurs, ont acquis l'ensemble immobilier concerné au prix de 1.700.000 € HT outre 333.200 € de TVA au taux de 19,6%.
Simultanément, elles ont consenti à Fruitex un crédit-bail avec option d'achat au prix de 1.760.000 € dans le cadre d'une indivision conventionnelle correspondant au prix du terrain et au montant des travaux restant à réaliser.
Selon les stipulations initiales du contrat, le loyer trimestriel réglé par Fruitex est de 45.846,63€ TTC.
En 2006, la Société Fruitex a usé de l'option conventionnelle de convertir les échéances trimestrielles à taux fixe moyennant le paiement de la commission de conversion de 6.400 € HT.
En raison de ses difficultés financières, les intimées lui ont consenti, mais vainement, diverses restructurations du crédit-bail sous l'égide du «médiateur du crédit» appelé à l'aide par Fruitex.
Le 24 juin 2010, Fortis lease et Oseo Financement ont ainsi délivré au crédit-preneur un commandement de payer la somme de 231.998,68 € faisant jouer la clause résolutoire du contrat de crédit -bail passé entre les parties le 17 septembre 2004.
Le 15 septembre 2010, elles ont fait délivrer un commandement de payer la somme de 150.000 € aux époux [A] en leur qualité de cautions de Fruitex.
Par ordonnance du Tribunal de Commerce de Tarascon du 9 juillet 2010, Fruitex a été placée sous mandat ad hoc afin de négocier la renonciation par les crédits bailleurs au bénéfice de la clause résolutoire.
Suivant exploits des 6 juillet 2010 puis 28 septembre 2010, Fruitex, M et Mme [A] ont saisi le tribunal de Commerce de Tarascon aux fins d'opposition aux commandements et de nullité des commandements, et de constatation des fautes commises par les Crédits-bailleurs et la CIC LB lors de la conclusion du contrat de crédit-bail et lors de la mise en 'uvre de la clause résolutoire les obligeant à réparer tout le préjudice subi par Fruitex.
L'échec de la procédure de conciliation a parallèlement entraîné le placement de la SA Fruitex en redressement judiciaire le 1/04/2011.
Un jugement avant dire droit du 21 novembre 2011 a désigné M. [R] en qualité d'expert afin que soient déterminées «'les conditions dans lesquelles les crédits-bails et prêt litigieux ont été accordés à Fruitex et que soient connus tous éléments de nature à lui permettre d'apprécier si les crédit bailleurs avaient respecté leur devoir d'information et de conseil.».
L'expert a déposé son rapport le 24/10/2013.
Par jugement du 6/10/2014, le tribunal a :
homologué le rapport d'expertise de M. [R],
dit les partie demanderesses mal fondées en leurs exceptions de nullité et les en a déboutées,
constaté la validité du rapport d'expertise de M. [R],
constaté la validité du commandement de payer litigieux,
constaté la résiliation de plein droit du contrat de crédit-bail immobilier,
par conséquent, ordonné l'expulsion de la société Fruitex et de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique,
condamné la société Fruitex à payer aux sociétés Fortis lease et Oseo Financement une indemnité d'occupation trimestrielle de 50.616,94 € soit 48.373,03 € du dossier principal et celle de 2.243,91 € au titre de l'avenant à compter du 1/04/2011et ce, jusqu'à totale libération des lieux,
condamné en outre M. et Mme [A], conjointement et solidairement, à payer aux sociétés Fortis lease et Oseo Financement, les sommes de 150.000 € en exécution de leur engagement de caution solidaire, outre intérêts au taux légal à compter de ce jour, et 3.000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté les parties de leurs conclusions plus amples ou contraires,
condamné la société Fruitex aux entiers dépens.
Par déclaration du 17/10/2014, la SA Fruitex et les époux [A] ont interjeté appel de cette décision.
Dans leurs dernières écritures déposées et notifiées le 21/10/2015 et tenues pour intégralement reprises, ils prient la cour avec Me [M] [N] pris en sa qualité de mandataire judiciaire de la SA Fruitex, au visa des articles 648, 234 341 du code de procédure civile, 111-6 du code de l'organisation judiciaire, L622-21 du code de commerce, 1382, 1116, 1134, 1135, 1147, 1184 du code civil, 1244, 2313 et suivants du code civil, de :
déclarer recevable et bien fondé leur appel,
en conséquence, infirmer purement et simplement le jugement entrepris, et statuant à nouveau :
A titre principal :
déclarer nul et non avenu le rapport de M. [R] déposé le 24 octobre 2013,
dire et juger que le commandement de payer délivré à la société Fruitex le 24 juin 2010 par la SCP [G] [E] et [X] [B], et le commandement de payer délivrés a M. et Mme [A] le 15 septembre 2010 sont nuls et de nul effet comme n'emportant pas l'inteitrerpellation claire requise par la loi des sommes commandées,
mettre Mme [A] hors de cause et débouter les intimés de l'ensemble de leurs demandes à son encontre,
dire et juger nuls et de nul effet les commandements délivrés aux concluants comme ayant été mis en 'uvre de mauvaise foi et en conséquence dire et juger n'y avoir lieu à application de la clause résolutoire du contrat de crédit-bail immobilier,
dire et juger que Fortis lease, aux droits de Sicomi, Oseo et CIC Lyonnaise de banque ont commis une faute en contractant de mauvaise foi puis en n'exécutant pas le contrat de bonne foi ce qui les oblige à en réparer les conséquences,
condamner CIC Lyonnaise de banque à fournir de la totalité du concours bancaire (300.000,00 €) prévu initialement dans l'opération de restructuration par cession bail,
condamner Fortis lease, solidairement avec Oseo Financement et avec CIC Lyonnaise de banque, à réparer le préjudice subi par Fruitex et à lui régler la somme de 2.407.101 € à titre de justes dommages-intérêts se décomposant comme suit :
2.108.483 € : pertes cumulées de Fruitex depuis 2006,
298.617,89 € : abandon de salaire et abandon de comptes courants d'associés de [A],
dire et juger que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de la délivrance de la première assignation, jusqu'à parfait paiement, capitalisés annuellement par application de l'article 1154 du code civil depuis le 6 juillet 2011,
ordonner la compensation entre les dommages-intérêts ci-dessus et les loyers échus et impayés ainsi qu'à échoir dus en vertu du contrat de crédit- bail,
A titre subsidiaire :
ordonner la suspension du jeu de la clause résolutoire jusqu'à la la fourniture par Fortis lease et Oseo Financement, et CIC Lyonnaise de banque de la totalité du concours bancaire (300.000,00 €) prévu initialement dans l'opération de restructuration par cession bail,
constater qu'à la date des commandements délivrés, la créance des crédits-bailleurs doit être réduite des frais indument prélevés, du solde de l'avance preneur, de l'indemnité de résiliation manifestement excessive,
dire et juger que la société Fruitex bénéficiera d'un report des échéances du contrat de crédit-bail immobilier de deux années à compter de la décision à intervenir par application des dispositions de l'article 1244 du code civil,
surseoir à statuer en ce qui concerne les demandes formées contre M et Mme [A] dans l'attente de la décision définitive qui statuera sur le montant de la créance de Fortis lease et Oseo déclarée au passif de Fruitex,
dire et juger que Fortis lease, Oseo et CIC LB ont commis une faute à l'égard des cautions qui les obligent à réparation à hauteur de leur engagement de caution de 150.000 €,
dire et juger qu'il y aura compensation entre les dommages et intérêts ainsi alloués et les engagements des cautions,
en tout état de cause,
dire et juger que les cautions bénéficieront des décharges, reports et délais accordés à la société Fruitex,
débouter Fortis lease, Oseo Financement et CIC Lyonnaise de banque de l'ensemble de leurs demandes, moyens et fins,
condamner solidairement Fortis lease, Oseo Financement et la CIC Lyonnaise de banque, à payer à Fruitex la somme de 8.000,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et celle de 5.000,00 €, sur le même fondement, aux époux [A], ainsi qu'à supporter les entiers dépens dont distraction en application de l'article 699 du CPC au profit de la SCP MAGNAN.
Dans leurs dernières écritures déposées et notifiées le 16/10/2015 et tenues pour intégralement reprises, les sociétés Fortis lease et Oseo Financement prient la cour de :
vu notamment les dispositions de l'article 1134 du Code Civil.
dire et juger recevable mais mal fondé l'appel interjeté par la société Fruitex, M. et Mme [A],
débouter les appelants de leurs demandes,
constater qu'elles n'ont pas manqué à l'obligation de bonne foi,
constater qu'elles n'ont pas manqué à un devoir de conseil ou d'information,
en conséquence, confirmer la décision déférée en ce qu'elle a débouté la société Fruitex, et les époux [A] de l'ensemble de leurs demandes,
constater que le commandement de payer qui a été délivré en juin 2010 à la société Fruitex a entraîné la résiliation du crédit-bail immobilier par le jeu de la clause résolutoire, les causes du commandement n'ayant pas été réglées dans le mois qui était imparti au crédit preneur,
en conséquence, confirmer la décision déférée en ce qu'elle a constaté la résiliation de plein droit du contrat de crédit-bail immobilier, lorsqu'elle a ordonné l'expulsion de la société Fruitex et de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique,
confirmer également le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Fruitex à leur payer une indemnité d'occupation mensuelle de 50.616,94 € soit 48.373,03 € au titre du dossier principal + 2.243,91 € au titre de l'avenant à compter du 1er avril 2011 et ce jusqu'à la totale libération des lieux, et en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame [A] solidairement à leur payer la somme de 150.000 € en exécution de leurs engagements de caution, outre les intérêts de droit du jour de la demande,
dire et juger qu'en toute hypothèse, le fait pour la société Fruitex de n'avoir procédé à aucun règlement depuis l'ouverture de la procédure collective alors qu'elle entend poursuivre le contrat justifie la résiliation à ses torts dudit contrat,
en tant que de besoin, prononcer la résiliation du contrat litigieux aux torts de la société Fruitex,
en ce cas, condamner la société Fruitex à leur verser, au titre des loyers dus depuis l'ouverture de la procédure collective, la somme de 916.445,48 € TTC et fixer l'indemnité d'occupation mensuelle due jusqu'à la totale libération des lieux à 50.616,94 €,
confirmer enfin le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Fruitex à leur payer une indemnité de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
y ajoutant, condamner la société Fruitex, Monsieur et Madame [A] à leur payer une indemnité complémentaire de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
les condamner en tous les dépens de première instance et d'appel et autoriser, pour ceux la concernant, Maître Jean-Louis Keita à en poursuivre directement le recouvrement dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 26/02/2015 et tenues pour intégralement reprises, CIC LYONNAISE DE BANQUE, qui a formé appel incident, demande à la cour de :
confirmer le jugement déféré en ce qu'il a homologué le rapport d'expertise de M. [R] et débouter FRUITEX de ses demandes à son égard,
le réformer pour le surplus et,
vu l'article 1147 du code civil,
condamner solidairement la SA FRUITEX et les époux [A] à lui payer 20.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive.
les condamner solidairement à lui payer 15.000 € pour frais irrépétibles.
ordonner l'exécution provisoire du jugement (sic) à intervenir.
condamner la SA FRUITEX solidairement avec les époux [A] aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 21/10/2015.
***
*
SUR CE :
1)sur la nullité du rapport d'expertise :
Les appelants excipent de la nullité du rapport d'expertise au motif de la partialité de M. [R] qui n'a pas informé les parties que :
il était le client du CIC,
atteint par l'âge de la retraite, il allait poursuivre au travers de la société [R] revisors, dont il était le président, des travaux d'audit et de conseil pour le CRA, groupement de transmission d'entreprises,
celui-ci avait pour importants partenaires financiers et notamment BNP Paribas (société mère de Fortis lease ) et BPI France, qui n'est autre qu'Oseo.
Ils en déduisent un comportement inadmissible de l'expert qui constitue une violation de l'article 341 du code de procédure civile et de la jurisprudence fondée sur le principe du droit au procès équitable.
Ils n'établissent toutefois pas que M. [R] avait un intérêt personnel à la contestation, ni qu'il était créancier ou débiteur de l'une des parties au procès, ni qu'il est parent ou allié de l'une des parties au procès ni qu'il y avait un litige entre lui et l'une des parties au procès, ni qu'il avait connu l'affaire comme conseil de l'une des parties au procès, ni qu'il y avait un rapport de subordination entre lui et l'une des parties au procès, ni d'amitié ou d'inimitié notoire.
Le fait que l'expert ait un compte au CIC et qu'il travaille au sein d'une société fournissant des travaux d'audit et de conseil pour un groupement de transmission d'entreprises ayant notamment pour partenaires financiers BNP Paribas et BPI France, ne saurait caractériser une absence d'impartialité faute de démonstration que M. [R] entretenait ou entretient personnellement avec les sociétés intimées ou leurs dirigeants, des relations de nature à faire naître un doute légitime et actuel sur son impartialité (Cass. Com. 5/10/2004).
Dès lors, les faits allégués au soutien de la demande de nullité ne sauraient caractériser l'existence d'un lien de subordination au sens de l'article 341 du code de procédure civile.
Au demeurant, force est de constater que les appelants qui avaient pourtant annoncé des observations portant sur la situation financière de Fruitex, sont les seuls à n'avoir adressé aucun dire à l'expert après réception de son pré rapport aux fins de critiquer ses conclusions ou de rétablir les erreurs qu'il aurait commises. Il est dommage qu'ils n'aient pas fourni à M. [R] l'étude unilatérale du 5/09/2013 de leur nouvel expert-comptable depuis janvier 2012 qui n'a de ce fait pas pu être débattue contradictoirement par l'expert et les autres parties.
Les appelants n'invoquent le parti pris du rapport définitif de M. [R] que parce qu'il leur est défavorable, alors pourtant que l'analyse expertale ne peut être taxée de partiale uniquement parce que la thèse des consorts [A] sur le nécessaire engagement de la banque, n'est pas confirmée par M. [R].
De surcroît, ce dernier qui a bien relaté les déclarations de chacune des parties, n'a pas retenu l'existence d'un pool bancaire comme l'allèguent les débiteurs mais celle d'un pool de crédit-bailleurs, et a exclu l'intervention de la Lyonnaise de banque au montage de l'opération au regard des courriers échangés entre les parties et des diverses pièces contractuelles fournies.
Enfin, le fait que les appelants contestent le point de vue de l'expert quant au devoir d'information des financiers ne traduit pas pour autant un manque de probité ou d'objectivité de l'auxiliaire de justice.
Par conséquent, la demande de nullité du rapport d'expertise, non fondée, sera rejetée et la décision entreprise confirmée sur ce point.
2)sur la nullité du commandement du 24/06/2010 :
Les appelants soutiennent que le commandement litigieux ne respectant pas les conditions de validité posées par les articles 117 et 648 du code de procédure civile, le tribunal aurait dû juger qu'il ne mentionne pas l'interpellation exacte requise par la loi des sommes qui en sont la cause et est donc nul et non avenu.
Cet acte, qui comporte bien le nom de l'huissier instrumentaire, délivré le 24 juin 2010 à Fruitex et à M. [A] en tant que représentant légal et Mme [A] en tant que caution, enjoint à ces derniers de payer, en vertu du contrat de crédit bail immobilier du 17/09/2004 la somme de 231.998,68 € TTC«'sous déduction des acomptes qui auraient été versés'» ainsi que les intérêt de retard afférents aux sommes dues aux crédits bailleurs ainsi que les frais de procédure dont le décompte définitif sera établi lors de votre règlement.
Il précise qu'à défaut de paiement passé le délai d'un mois à compter de sa date, les demanderesses se prévaudront de la clause résolutoire figurant à l'article 5b du contrat de crédit bail dont il rappelle les termes, et demanderont au juge des référés de constater la résiliation du contrat de crédit-bail et d'ordonner leur expulsion.
Il rappelle également les termes de l'article 8 du chapitre 7 du contrat de crédit bail comportant clause pénale.
Il s'en évince qu'il comporte les mentions exigées par l'article 648 du code de procédure civile.
D'autre part, les appelants ne contestent pas que les loyers réclamés n'ont pas été réglés mais soutiennent que les sommes appelées ne comportent aucune explication et que Fortis lease n'a pas déduit la totalité des loyers réglés à la date du commandement.
Il convient toutefois d'observer que la quasi totalité des sommes commandées dans l'acte correspond aux loyers non payés et que le commandement mentionne expressément que la somme est réclamée sous déduction des acomptes qui auraient déjà été versés. Dans leur assignation aux fins d'opposition à ce commandement, la société Fruitex et les époux [A] avaient d'ailleurs seulement fait valoir qu'il fallait déduire les acomptes versés. À cet égard, alors que le commandement arrête le décompte au 17/05/2010, Fruitex ne précise pas la date à laquelle la somme de 65.724,79 € qu'elle invoque aurait été versée.
D'autre part, contrairement à ce qu'affirment les appelants, cet acte du 24/06/2010 n'inclut pas l'indemnité de résiliation contestée.
Par ailleurs, selon l'article 7 du crédit bail immobilier, ce n'est qu'en cas de résiliation, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire que l'avance constituée par le preneur sera compensée avec toute somme que le preneur devra au bailleur.
Aucune compensation ne pouvant ainsi intervenir lors de la délivrance du commandement, la société Fruitex ne peut donc prétendre qu'en vertu de cette avance, elle était créancière au titre du contrat de crédit bail.
Les appelants invoquent également une application inexacte des taux d'intérêts dans la mesure où :
pendant la phase de pré-loyers, du 17 septembre au 30 septembre 2004, au 3 janvier 2005, Fortis lease a calculé la commission d'engagement au taux de 4,04 % au lieu de 0,20%, soit des pré-loyers de 480 € pour une année entière, facturés 1.943,56 € soit un trop payé de 1.463,86 €.
Lors du passage du contrat à taux fixe pour le calcul du montant des échéances contractuelles, Fortis lease a appliqué un taux effectif de 6,5083331% tout en déclarant un taux de 6,136355062% tandis que Oseo a utilisé un taux de 6,688187% en déclarant un taux de 6,303762530%.
Sur le premier point, les intimées reconnaissent qu'une erreur a été effectivement commise sur la 2ème tranche puisque les commissions d'engagement ont été calculées au taux des pré-loyers de financement. Ainsi, la somme erronée de 2.975,43 € doit venir en déduction du montant réclamé. Sur le second point, elles répondent qu'elles ont bien appliqué le taux calculé selon les termes du contrat.
Cela étant, force est de souligner que le montant des erreurs reprochées aux crédit bailleresses s'élève à 4.3250,69 € selon le calcul établi à la demande de Fruitex par le cabinet AC2F d'audits conseils et formation financière, et ne donc peut aucunement compenser le montant des frais et loyers dus de 231.998,68 € selon décompte arrêté au 17/05/2010 par le commandement querellé.
Il résulte de ce qui précède que malgré son montant erroné, le commandement du 24/06/2010 n'est pas nul.
Sa cause n'a de surcroît pas été intégralement payée dans le mois de sa délivrance de sorte que la clause résolutoire est acquise par application de l'article 4 du crédit-bail selon lequel le contrat sera résilié de plein droit si bn semble au bailleur, et sans aucune formalité, un mois après la notification au preneur d'un commandement de payer ou d'une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception, restés totalement ou en partie sans effet et contenant déclaration par le bailleur de son intention d'user du bénéfice de la présente clause, étant précisé que tout paiement ou exécution fait après l'expiration du délai d'un mois ne sera pas opposable au bailleur.
Pour s'opposer à l'acquisition de la clause résolutoire, la société Fruitex et les époux [A] reprochent aux intimées un comportement fautif.
3)sur le comportement fautif des intimées lors de la conclusion des contrats :
Les appelants considèrent que les intimés intervenus dans le financement de l'opération constituaient un pool bancaire.
Ils indiquent que le directeur de Sicomi Rhône Alpes a piloté seul l'opération de crédit-bail et en a déterminé les contours financiers en négociant avec Fruitex mais aussi avec la CIC qui devait participer sous la forme d'un concours financier à court terme de 300.000 € pour les besoins de son exploitation courante. Ainsi, quand il leur a fait part de l'accord du pool de crédit bailleurs, Fruitex en a, de bonne foi, déduit que toutes les conditions du montage financier incluant la part de la banque à hauteur de 300.000 € de concours à court terme étaient réunies.
Ils insistent sur le fait que ce crédit de 300.000 € était la pierre angulaire de l'opération et que Sicomi Rhône-Alpes a donc manqué à son devoir d'information et de conseil en ne les avertissant pas, avant la signature du crédit bail et avant son approbation par le tribunal, que le CIC n'avait pas consenti le concours à court terme, et ce, d'autant plus qu'elle avait conclu que celui-ci était une condition nécessaire à l'équilibre financier global de l'opération.
Il est toutefois constant que dès janvier 2004 la société Fruitex avait déjà ouvert un compte professionnel dans les comptes du CIC et qu'elle n'est entrée qu'ultérieurement et en parallèle, en relation avec les auteurs de Fortis lease et Oseo Financement ( et seulement eux) en vue de réaliser une opération de lease back immobilier, aucun échange portant sur le crédit bail immobilier n'étant intervenu entre la banque et Fruitex.
Il est exact que lors des premiers pourparlers, il a été envisagé par les crédit-bailleurs que le CIC contribue à l'opération non seulement par une contre garantie à hauteur de 20% du risque des crédits-bailleurs rémunérée au taux de 1% mais aussi par l'octroi d'un crédit court terme de 300.000 €.
Le prévisionnel non daté établi par le cabinet comptable [W] (cabinet présenté par l'un des établissements financiers à la société Fruitex qui deviendra ensuite son expert-comptable), mentionne que « de par la saisonnalité propre à ce secteur d'activité, il est nécessaire de mettre en place une ligne de découvert une fois la sortie du plan réalisée (') » et que «'un soutien financier est à prévoir pour accompagner la réussite de l'opération de restructuration et faire face à la saison basse'».
C'est ainsi que dans un courrier du 5/04/2004 envoyé à Fruitex, Sicomi Rhône-Alpes expose «'le montage envisagé avec vous-mêmes et vos conseils, sous réserve évidemment des accords de chacun de chacun de nos confrères et de notre propre décision'» et mentionnant notamment le concours bancaire 300.000 € de la Lyonnaise de banque.
Par courriel du 20/04/2004, elle sollicite la CIC Lyonnaise de banque pour qu'elle intervienne dans l'opération en contre garantie à hauteur de 20% de 1.760.000 € HT et ajoute que «'votre participation serait souhaitable sous la forme d'un concours financier à court terme de 300.000 € à Fruitex pour les besoins de son exploitation courante (saisonnalité)'».
Le 9/06/2004, Sicomi informe Fruitex de «'l'accord du pool de crédit-bailleurs constitué par Auxicomi-Auximurs et Sicomi Rhône-Alpes pour financer en crédit-bail immobilier, votre immeuble ('). les conditions d'intervention du pool figurent dans la lettre d'accord de financement que vous trouverez ci-jointe(...)'».
La lettre en question, qui détaille avec clarté les modalités du financement du crédit-bail immobilier, ne fait état à aucun moment de l'octroi par le CIC du concours à court terme envisagé et souhaité.
Au demeurant, dans sa requête en modification du plan du 14/06/2004 qu'elle a présentée au tribunal de commerce, la société Fruitex a demandé l'autorisation de conclure avec Sicomi et Auxicomi-Auximurs le crédit bail immobilier prévu à la lettre d'accord de financement, sans faire aucune référence au concours bancaire qu'elle invoque aujourd'hui.
De même, dans le procès verbal de la séance du conseil d'administration de Fruitex du 16/07/2004 auxquelles assistent les consorts [A], l'ordre du jour ne mentionne aucunement le crédit de 300.000 € mais vise à donner pouvoir à [C] [A] représentant la société, de régulariser l'acte de vente du bâtiment à Sicomi ainsi que le contrat de crédit-bail immobilier avec Sicomi et Auximur, de consentir les garanties de nantissement du contrat de crédit-bail immobilier et verser aux crédit-bailleurs une avance-preneur de 360.000 € et de nantir cette avance au profit du crédit-bailleur .
Il s'évince de ce qui précède que':
si le concours à court terme était souhaitable, il n'était pas une condition nécessaire au montage de l'opération prévue,
la correspondance du 20/04/2004 ne saurait instaurer une obligation implicite, pour le CIC, d'accorder un crédit à court terme à la société Fruitex,
le CIC ne s'est à aucun moment engagé à accorder ce crédit, quand bien même il a été envisagé,
le courrier d'accord envoyé par Sicomi à Fruitex précise que le pool des crédits bailleurs n'est pas composé de la banque,
il contient en annexe, une lettre de financement suffisamment claire pour faire comprendre à ses signataires que l'intervention du CIC se limitait à la contre-garantie bancaire de 20% sur le crédit-bail immobilier sans octroi du concours à court terme.
D'ailleurs, alors que les contrats ont été signés et l'opération réalisée en 2004, les appelants ont attendu quatre ans pour réclamer pour la première fois en 2008 ce crédit de 300.000 € qu'ils n'auraient pu manquer d'exiger dès 2004 si celui-ci constituait réellement la pierre angulaire dont ils font état aujourd'hui.
Il faut d'autre part souligner que la SA Fruitex existe depuis des décennies et que ses dirigeants qui la gèrent depuis de nombreuses années, sont des professionnels expérimentés, connaissant par conséquent les comptes de la société ainsi que ses difficultés et son état d'endettement compte tenu de l'ouverture de la procédure collective et du plan de redressement judiciaire adopté.
Au cours des diverses réunions qui se sont tenues, ils ont été assistés de leur expert-comptable, Mme [K], puis, même s'il n'est devenu leur expert comptable qu'après la mise en place du crédit bail immobilier, du cabinet [W] à qui ils ont forcément remis l'ensemble des pièces comptables pour l'établissement du prévisionnel qu'ils n'ont pas discuté.
Ainsi, en mesure d'appréhender l'opportunité de l'opération qu'ils se préparaient à souscrire ainsi que les risques d'endettement en découlant, ils étaient des emprunteurs avertis d'autant qu'il n'est pas prétendu que les crédit-bailleurs auraient eu sur leur situation financière des renseignements que ce dernier aurait ignorés (Cass. Com 12.12.2006 ; 11.04/2012).
Les appelants ne peuvent dès lors soutenir qu'ils ont signé les contrats les yeux fermés sans en avoir analysé précisément le contenu.
Il ne peut donc être reproché à Sicomi d'avoir manqué à son devoir d'information en ne les avertissant pas expressément de l'absence d'octroi du concours bancaire qui n'a jamais constitué une condition nécessaire à l'opération, étant encore souligné que le CIC ne s'est à aucun moment engagé d'une quelconque manière à consentir au crédit de 300.000 €.
L'expert judiciaire a par ailleurs retenu que la cession du bâtiment d'exploitation a permis de rembourser la banque [Y] pour 725.300 € et le Crédit Agricole pour 78.387 € et d'alimenter le compte de Fruitex chez le commissaire à l'exécution du plan à hauteur de 501.996 €.
Il a souligné qu'en l'état des difficultés économiques rencontrées par Fruitex, l'opération de lease back aujourd'hui décriée, était sans aucun doute la seule solution envisageable dès lors que l'entreprise n'était pas en mesure de pratiquer une augmentation de capital ni d'injecter de nouveaux capitaux, même si malheureusement elle n'a pas eu les effets escomptés du fait de la très mauvaise rentabilité et de la baisse d'activité de la société.
Il a précisé que le besoin de financement à court terme a été trouvé non au moyen d'un découvert mais en recourant au factor qui a produit ses effets puisque la trésorerie de Fruitex a été positive jusqu'au 31/12/2007, les documents financiers de l'exercice civil 2007 montrant que la société disposait de valeurs mobilières de placement pour 258.265,35 €.
A cet égard, la société ne peut mettre en avant le coût financier des services d'affacturage qui ne pouvait être ignoré de ses dirigeants, hommes d'affaires avertis et rompus à ces pratiques bancaires.
Monsieur [R] a ajouté, après analyse financière de Fruitex selon la méthode des ratios que la continuité même de Fruitec est gravement menacée puisque les capitaux propres au 31/12/2010 sont négatifs sous la pression de huit années d'exercices déficitaires et de chiffres d'affaires en constante régression ; que ce n'est pas l'obtention de 300.000 € de concours bancaires en 2004 qui aurait changé que que ce soit et que toute banque qui viendrait à lui consentir un quelconque crédit pourrait être poursuivie pour soutien abusif eu égard à la présence de capitaux propres négatifs apparus dès l'année 2005.
D'autre part, les appelants ne peuvent aujourd'hui critiquer le prix de cession de leur immeuble professionnel de 1.700.000 € HT sans rapporter la preuve qu'il n'a pas été librement négocié ou qu'il ne correspondrait pas au coût du marché de l'époque sachant qu'il s'agit de bâtiments de conditionnement et d'expédition de fruits et légumes, étant rappelé que la vente de leur bien s'insérait dans une opération de lease back, leur permettant de conserver leurs locaux et de les récupérer au prix de l'euro symbolique en fin de contrat.
Enfin, il est nécessaire de rappeler que le tribunal de commerce de Tarascon a autorisé cette opération par jugement du 2/07/2004.
L'ensemble de ces éléments conduit à exclure tout manquement des crédits bailleurs à leur obligation de conseil et d'information à l'égard de Fruitex et des consorts [A].
Aucune faute ne peut non plus être reprochée à la CIC Lyonnaise de banque quant au non octroi d'un concours bancaire de 300.000 € en 2004.
La responsabilité des intimées ne peut par conséquent être retenue lors de la souscription de l'opération de lease back.
4)sur le comportement fautif des intimées lors de la mise en 'uvre de la clause résolutoire :
Les appelants reprochent aux crédits bailleurs de ne pas avoir accepté un ré échelonnement suffisamment long pour permettre à l'entreprise de retrouver son souffle financier et d'avoir imposé des conditions annexes qu'elles savaient irréalisables ; notamment des échéances disproportionnées avec les possibilités obérées de Fruitex et l'apurement des loyers impayés accumulés le temps que Fortis (chef de file) veuille bien formuler une offre écrite soit, pendant plusieurs mois.
Les pièces produites établissent que Fruitex a informé Fortis lease le 3/01/2008 qu'une dette fiscale liée au financement de la TVA de la vente de l'immeuble, étalée sur un an après accord du trésor public lui causait des difficultés de trésorerie ne pouvant être résolue que par la suspension de l'exigibilité des loyers.
Le 30/04/2008, son conseil a écrit au CIC pour critiquer les rejets de chèques en dépit des découverts tacites régulièrement consentis et pour la mettre en demeure de reprendre le découvert autorisé et lui permettre de disposer de facilités de caisse de l'ordre de 120.000 € à 150.000 € pendant plusieurs mois le temps de rechercher un autre partenaire bancaire.
Un protocole d'accord transactionnel a ainsi été conclu entre Fruitex et le CIC aux termes duquel la banque a essentiellement accepté de consentir un découvert de 60.000 € pendant 3 mois pour permettre à l'entreprise de trouver un autre établissement bancaire.
En l'état de ses difficultés de trésorerie récurrentes, Fruitex a fait appel à un médiateur sous l'égide duquel les crédits bailleresses ont accepté un rallongement de la durée du crédit bail de 12 à 15 ans et la CIC Lyonnaise de banque a consenti à maintenir ses relations avec la société et à lui accorder un crédit à court terme de 150.000 €.
Des discussions ont également été menées en présence du médiateur sur les questions de délais et de clause de concentration avec la société Factexport concernant son contrat d'affacturage avec Fruitex mais ont échoué.
Néanmoins, les négociations en cours avec Fortis lease et Oseo financement qui réclamaient des garanties de paiement en l'état de la situation financière dégradée de Fruitex et avaient donné lieu à un projet en juin 2009, n'ont pu se concrétiser compte tenu des loyers impayés.
Au regard de l'endettement, Fortis lease a délivré une mise en demeure le 27/04/2010 de payer les frais et loyers impayés arrêtés à 196.273,89 € puis le commandement de payer du 24/06/2010.
Fruitex a alors saisi le tribunal de commerce et obtenu le 9/07/2010 la désignation d'un mandataire ad hoc aux fins d'évaluer la situation financière et d'engager des négociations en vue d'obtenir des crédit-bailleurs la renonciation au bénéfice de la clause résolutoire et la conclusion d'un accord aux fins de signer un avenant.
Les démarches entreprises n'ont cependant pas abouti.
L'ensemble de ces éléments démontre que les intimées n'ont pas mis fin ex abrupto aux relations conventionnelles avec la société débitrice mais ont consenti de nouveaux concours bancaires et reports d'échéances afin de lui permettre de continuer son activité.
De plus, la limitation du concours bancaire à 150.000 € en 2008 n'est pas condamnable sauf à suspecter la CIC de soutien abusif du fait de la très mauvaise rentabilité et de la baisse d'activité de la société relevées par l'expert judiciaire.
De même, le fait de ne pas avoir accordé un rallongement de 12 à 20 ans du crédit-bail immobilier ne saurait être fautif alors que le délai initial de 12 ans est parfaitement habituel pour ce genre de contrat. Vouloir obtenir le paiement des impayés avant d'augmenter la durée à 15 ans du crédit-bail ne peut non plus s'analyser en un manquement compte tenu de l'importance de l'arriéré dû.
Enfin, quand bien même, la débitrice a partiellement exécuté le contrat et payé de nombreux frais, l'économie de l'opération ayant rendu Fortis lease et Oseo propriétaires des locaux remis à disposition du preneur qui en devient à nouveau propriétaire à la fin du contrat à condition qu'il en ait respecté les termes, empêche de reprocher aux crédit bailleresses d'en conserver la propriété en cas de défaillance de leur cocontractant.
Par conséquent, en l'absence de faute susceptible d'être retenue à l'encontre des intimées, la clause résolutoire qui a été invoquée de bonne foi, doit recevoir application.
Subséquemment, l'action en responsabilité introduite par les appelants est infondée et ces derniers seront donc déboutés de leurs demandes indemnitaires d'un montant total de 2.407.101 € et de compensation avec les loyers échus et impayés et à échoir.
5)sur la suspension de la clause résolutoire':
La société Fruitex sollicite subsidiairement la suspension du jeu de la clause résolutoire jusqu'à la fourniture par les trois intimées de la totalité du concours bancaire de 300.000 € initialement prévue dans l'opération de restructuration par cession bail.
Toutefois, comte tenu de ce qui a été jugé précédemment, cette demande ne peut aboutir, le souhait d'un crédit à court terme de 300.000 € n'ayant pas été concrétisé par l'acceptation du CIC ni par la signature d'un contrat.
6) sur la demande de report des échéances du crédit-bail':
La demande de report des échéances du crédit bail est infondée dès lors d'une part, que le jeu de la clause résolutoire a entraîné la résiliation du contrat et rendu exigible l'ensemble des sommes dues et que, d'autre part, la créance en découlant, déclarée à la procédure collective par les intimées doit être réglée dans le cadre du plan de redressement judiciaire.
Fruitex et les époux [A] seront donc déboutés de ce chef.
7) sur la demande de sursis à statuer':
Les appelants sollicitent à tort le sursis à statuer concernant les demandes dirigées à leur encontre dans l'attente de la décision définitive qui statuera sur le montant de la créance de Fortis lease déclarée au passif de Fruitex puisque par ordonnance du 7/12/2011 le juge commissaire a lui-même sursis à statuer compte tenu de la présente instance en cours.
8)sur les conséquences du jeu de la clause résolutoire':
L'application de la clause résolutoire a entraîné la résiliation du crédit-bail immobilier un mois après la délivrance du commandement de payer du 24/06/2010.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a ordonné':
l'expulsion de la société Fruitex et de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique,
condamné la débitrice au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 50.616, € correspondant à 48.373,03 € au tire du dossier principal et 2.243,91 € au titre de l'avenant jusqu'à la totale libération des lieux.
En revanche, il sera infirmé en ce qui concerne le point de départ de l'indemnité d'occupation qui court à compter du 25/07/2010 et non du 1/04/2011 comme indiqué par le premier juge sans explication.
9) sur les engagements de caution':
Les époux [A] font valoir que leur engagement de caution est radicalement nul en l'état':
des fautes commises par les établissements financiers qui sont la cause de la mise en jeu des cautions,
de la date inconnue du point de départ de leur engagement de caution de 5 ans lors de la signature du crédit bail du 17/09/2004
Cependant, en application de l'article 954 al 2 du code de procédure civile la cour n'a pas à statuer sur leurs prétentions tendant à la nullité de leur engagement de caution qui ne sont pas reprises dans le dispositif de leur dernières écritures.
D'autre part, les moyens de la société Fruitex qu'ils reprennent à leur compte pour soutenir l'existence de fautes des intimées à l'origine de la mise en jeu de leur engagement de caution, sont inopérants compte tenu de l'absence de responsabilité retenue par la cour à l'encontre des établissements financiers.
En outre, M. [A], représentant légal de la SA Fruitex et professionnel aguerri ayant de surcroît systématiquement participé à toutes les négociations, et son épouse, associée de la société et connaissant par là-même la situation de son entreprise, sont des cautions averties.
Enfin, ils n'établissent ni même n'allèguent que leur engagement de caution, limité à 150.000 €, serait disproportionné.
La responsabilité des intimées ne peut par conséquent être engagée démonstration non faite que ces dernières détenaient sur la situation financière de leurs clients des informations qu'eux-même ignoraient.
La demande de dommages-intérêts des consorts [A] à hauteur de 150.000 € sera donc rejetée.
10) sur la mise hors de cause de Mme [A]':
Il est indéniable que le commandement délivré le 15 septembre 2010 vise M. et Mme [A] en leur qualité de caution mais n'a été délivré qu'à M. [A].
Les appelants en déduisent que l'engagement de caution de Mme [A] qui n'a pas été valablement mis en 'uvre dans le délai de 5 ans à compter de mise en loyer de la deuxième tranche, est prescrit depuis le 17/09/2010.
Ils ajoutent que l'assignation délivrée par les deux époux pour s'opposer au commandement n'a pu interrompre la prescription comme le prétendent les crédits-bailleresses puisqu'une défense au fond ne saurait être considérée comme une renonciation aux termes de l'article 2248 du Code Civil.
Cependant, comme le relèvent les intimées, l'interpellation faite à l'un des débiteurs solidaires ou au débiteur principal interrompt le délai de prescription contre tous les autres débiteurs solidaires et contre la caution en vertu des articles 2245 et 2246 du Code Civil
Ainsi, le commandement de payer du 24/06/2010 ayant été délivré contre Fruitex débitrice principale, son représentant légal et contre Mme [A] en tant que caution et celui du 15/09/2010 contre M. [A] pris en sa qualité de caution, la fin de non recevoir tirée de la prescription doit être écartée.
11) sur la nullité du commandement de payer délivré aux cautions':
Le commandement délivré le 15/09/2010 enjoint les époux [A] à payer la somme de 150.000 € au titre de leur engagement de caution solidaire du crédit-preneur, en rappelant que le débiteur principal, la société Fruitex, doit la somme de 536.796,08 € et qu'ils se sont engagés en tant que cautions solidaires à hauteur ensemble de 150.000 € et en invoquant les articles du contrat relatifs à la clause résolutoire, à l'indemnité spéciale de résiliation et à l'indemnité d'occupation.
Les cautions reprenant les mêmes moyens que ceux mis en avant pour solliciter la nullité du commandement du payer du 24/06/2010, il sera renvoyé à la motivation supra déboutant les appelants de leur demande de ce chef, sauf à préciser que pouvait être inclus dans ce second acte le montant de l'indemnité de résiliation acquise du fait du jeu de la clause résolutoire contenue dans le commandement de payer non suivi d'effet du 24/06/2010.
Le fait que les appelants en contestent le montant qu'ils estiment excessif ne saurait invalider l'acte querellé.
Peu importe par ailleurs que la créance déclarée par les crédit-bailleresses n'ait pas encore été admise dès lors que le juge commissaire a sursis à statuer dans l'attente de la présente décision et qu'il reste un compte à faire entre les parties compte tenu notamment des règlements intervenus ultérieurement puisque la somme due lors de la délivrance du commandement était largement supérieure à l'engagement de caution de 150.000 €.
C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté la demande tendant à l'annulation du commandement du 15/09/2010.
12) sur les demandes reconventionnelles':
La Cic Lyonnaise de banque ne démontre pas que la procédure engagée par les appelants a dégénéré en abus et sera donc déboutée de sa demande de dommages-intérêts de 20.000 € pour procédure abusive.
La SA Fruitex et les époux [A] qui succombent, supporteront les dépens ainsi que partie des frais irrépétibles qu'ont dû engager les intimées pour se défendre en appel à hauteur de 2.000 € chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition, publiquement,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a fixé le point de départ de l'indemnité d'occupation mensuelle au 1er avril 2011,
Le réformant de ce chef,
DIT que l'indemnité mensuelle d'occupation due par la SA Fruitex court à compter du 25 juillet 2010,
Y ajoutant,
DEBOUTE les appelants de leur demande de sursis à statuer,
DEBOUTE la SA CIC Lyonnaise de banque de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
CONDAMNE in solidum la SA Fruitex et les époux [A] à payer à la SA Fortis lease, la SA Oseo financement et la SA CIC Lyonnaise de banque la somme de 2.000 € chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
LES CONDAMNE in solidum aux dépens distraits au profit des avocats de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT