La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/12/2015 | FRANCE | N°14/07714

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre a, 10 décembre 2015, 14/07714


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 10 DECEMBRE 2015



N° 2015/401













Rôle N° 14/07714







[Y] [J] ÉPOUSE [Z]

[D] [Z]





C/



[I] [A]

[W] [C]

[F] [C]

ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE ZAC DU ROUDAI





















Grosse délivrée

le :

à :



Me Françoise MICHOTEY



Me Hervé B

OULARD



Me Jean-Marie JAUFFRES



Me Corine SIMONI





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 18 Décembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2013/513.





APPELANTS



Madame [Y] [J] ÉPOUSE [Z], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Fr...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 10 DECEMBRE 2015

N° 2015/401

Rôle N° 14/07714

[Y] [J] ÉPOUSE [Z]

[D] [Z]

C/

[I] [A]

[W] [C]

[F] [C]

ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE ZAC DU ROUDAI

Grosse délivrée

le :

à :

Me Françoise MICHOTEY

Me Hervé BOULARD

Me Jean-Marie JAUFFRES

Me Corine SIMONI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 18 Décembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2013/513.

APPELANTS

Madame [Y] [J] ÉPOUSE [Z], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Françoise MICHOTEY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Philippe-Bernard FLAMANT, avocat au barreau de NICE

Monsieur [D] [Z], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Françoise MICHOTEY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaoidant par Me Philippe-Bernard FLAMANT, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [I] [A], demeurant à l'enseigne [Adresse 2]

représenté et plaidant par Me Hervé BOULARD, avocat au barreau de NICE substitué par Me Julie BRAU VANOT, avocat au barreau de NICE

Monsieur [W] [C], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Jean-Marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Emmanuel PLATON, avocat au barreau de TOULON,

Madame [F] [C], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Jean-Marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Emmanuel PLATON, avocat au barreau de TOULON,

ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE ZAC DU ROUDAI, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Corine SIMONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Vincent MARQUET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 01 Octobre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Sylvie CASTANIE, Présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Sylvie CASTANIE, Présidente (rédacteur)

Monsieur Martin DELAGE, Conseiller

Mme Béatrice MARS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Novembre 2015 et prorogé au 10 Décembre 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Décembre 2015,

Signé par Madame Sylvie CASTANIE, Présidente et Madame Jocelyne MOREL, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure, moyens et prétentions des parties :

Les époux [Z] sont propriétaires sur la commune de [Localité 1], d'une villa qu'ils ont fait construire courant 1988, sur un terrain leur appartenant, constituant le lot numéro [Cadastre 1] de l'ensemble immobilier dépendant de la ZAC du [Localité 2], organisé sous la forme d'une association syndicale libre (ASL). Cette villa située au point le plus bas du versant d'une colline est desservie par une voie privée du lotissement en forte pente.

À la suite d'inondations survenues en septembre 1992, les époux [Z] provoquent la désignation de l'expert [G], selon ordonnance de référé en date du 17 février 1993. Le rapport d'expertise est déposé le 9 mars 1997.

Par jugement en date du 9 décembre 1999, confirmé en toutes ses dispositions par arrêt de cette cour en date du 6 septembre 2004, le tribunal de grande instance de Draguignan, saisi par les époux [Z], selon assignations en date des 8 et 12 Août 1997 :

-déclare responsables du sinistre la Société de Promotion du Domaine de Barbaroux et l'ASL ZAC du Roudai, à hauteur de 70 %,

-fixe le préjudice des époux [Z] à la somme de 581'741 Fr,

-condamne in solidum la Société de Promotion du Domaine de Barbaroux, l'ASL de la Zac du Roudai et la compagnie AGF, prise en sa qualité d'assureur responsabilité civile de l'ASL à réparer ce préjudice à hauteur de 70 %,

-dit que dans les rapports entre eux, la Société de Promotion du Domaine de Barbaroux supportera 50 % de cette somme (70 % de 581'741 Fr.) et l'ASL de la ZAC du Rouday et la compagnie AGF, 50 % de cette même somme,

-déboute les époux [Z] du surplus de leur demande de ce chef,

-déboute les époux [Z] de leur demande à l'encontre de l'association sportive du golf de Barbaroux,

-condamne les époux [Z] à supprimer la canalisation d'évacuation des eaux pluviales qu'ils ont mise en place sur le terrain de l'association sportive du golf de Barbaroux,

-déboute l'ASL de la Zac du Roudai et les époux [Z] de leur demande à l'encontre de la compagnie AGF, en tant qu'assureur dommage-ouvrage et décennal,

-dit que l'appel en garantie de l'association sportive du golf de Barbaroux à l'encontre de la compagnie AGF est devenu sans objet,

-condamne l' ASL de la ZAC du Roudai à exécuter les travaux préconisés par l'expert [G] en page 50 de son rapport, seulement en ce qui concerne les travaux «à l'amont», dans un délai de six mois à compter de la signification de la présente décision,

-dit qu'à défaut d'exécution par l'ASL de la ZAC du Roudai des travaux «en amont» dans ce délai, les travaux seront exécutés à la requête des demandeurs par une entreprise de leur choix, l'ASL de la ZAC du Roudai en supportant le coût,

-déboute les époux [Z] du surplus de leur demande au titre des travaux et de leur demande en paiement de dommages-intérêts,

-condamne in solidum la société de Promotion du Domaine de Barbaroux, l'ASL de la ZAC du Roudai et la compagnie AGF à payer aux époux [Z] la somme de 15'000 Fr. au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Dans la nuit du 6 au 7 juillet 2006, une nouvelle inondation endommage gravement la villa des époux [Z] qui provoquent, selon ordonnance de référé en date du 20 décembre 2006, la désignation de l'expert [F], au contradictoire de l'ASL ZAC du Roudai. Celle-ci met en cause, selon actes 17 septembre 2008 et 16 septembre 2009 les époux [C], leurs voisins et [I] [A], chargé de l'entretien du réseau hydraulique, en vertu d'un contrat annuel conclut avec l' ASL.

Le rapport d'expertise est déposé le 18 janvier 2011.

Les époux [Z] assignent en réparation de leur préjudice, selon acte du 29 juin 2011, sur le fondement des articles 1382 et 1384 du Code civil, les époux [C], l'ASL et [I] [A].

Statuant par jugement en date du 18 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Draguignan :

-constate que le second litige est consécutif au défaut d'exécution des décisions précédentes,

-prononce un partage de responsabilité dans la réalisation du dommage,

-dit que les époux [Z] supporteront 60 % du préjudice consécutif à l'inondation de 2006, l'ASL et [I] [A] exploitant à l'ancienne Décoflor supportant le surplus, à concurrence de 50 %, chacun,

-condamne in solidum l'ASL et [I] [A] au paiement de la somme de 26'009,19 €,

-condamne l'ASL de la ZAC du Roudai au paiement de la somme de 26'009, 19 € correspondant aux condamnations mises à sa charge par les décisions de 1999 et du 16 septembre 2004,

-constate la carence des époux [Z] dans l'administration de la preuve du préjudice subi du fait de la perte du mobilier et des vêtements et rejette en conséquence leur demande en l'état,

-met hors de cause les époux [C],

-condamne les époux [Z], l'ASL et [I] [A] à payer la somme de 1500 € aux époux [C], en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-déboute pour le surplus,

-condamne les époux [Z], l'ASL et [I] [A] aux entiers dépens.

Les époux [Z] relèvent appel de ce jugement, selon déclaration au greffe en date du 15 avril 2014.

Dans leurs dernières écritures en date de du 2 septembre 2015, les époux [Z] concluent à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'ASL à leur payer la somme de 22'999 € TTC correspondant aux condamnations mises à sa charge par les décisions du 9 décembre 1999 et du 16 septembre 2004, l'ASL devant être condamnée à leur rembourser ladite somme avec intérêts au taux légal à compter du règlement de la facture correspondante. Ils demandent que le jugement rendu soit confirmé, concernant le règlement par eux des factures relatives au nettoyage, au traitement des sols, aux travaux de peinture et de nettoyage du mobilier, pour un montant de 62'022,98 euros, et ce, à compter du 20 décembre 2006, date de l'ordonnance de référé ayant désigné l'expert [F]. Ils concluent à l'infirmation du jugement dont appel en ce qu'il leur a imputé une responsabilité à hauteur de 60 % du sinistre dont ils ont été victimes, en ce qui a mis hors de cause les époux [C] et en ce qu'il les a déboutés, pour absence de preuve, de leur demande en réparation du préjudice constitué par la perte du mobilier et des vêtements. Le rapport de l'expert [F] doit être homologué et les intimés, déclarés entièrement responsables du préjudice qu'ils ont subi, doivent être condamnés solidairement à leur payer au titre de la perte du mobilier et des vêtements la somme de 415'197,25 euros. L'ensemble des condamnations à intervenir doit être assorti des intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance de référé en date du 20 décembre 2006. Les époux [C], l'ASL ZAC du Roudai et [I] [A], exerçant sous l'enseigne Decoflor doivent enfin être condamnés à leur payer la somme de 30'000 € à titre de dommages et intérêts et celle de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures en date du 24 septembre 2015, l'Association Syndicale Libre ZAC du Roudai conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a constaté l'apparence des époux repos aussi dans l'administration de la preuve du préjudice subi du fait de la perte du mobilier et des vêtements et en ce qu'il a rejeté leur demande en l'état et à son infirmation pour le surplus. Les époux [Z], en ne réalisant pas les travaux prescrits par les décisions antérieures, ont commis une faute à l'origine de l'ensemble de leur préjudice et doivent en conséquence, elle-même n'ayant commis aucune faute, être déboutés de toutes leurs demandes indemnitaires. Il doit être jugé subsidiairement que les fautes respectivement commises par les époux [C], d'une part et par [I] [A], d'autre part, étant à l'origine du sinistre survenu en juillet 2006, ceux-ci doivent être condamnés in solidum à la relever et garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au bénéfice des époux [Z]. Il doit être jugé très subsidiairement que les époux [Z], en s'abstenant de produire le moindre élément de preuve sont non fondés en leur demande en paiement de dommages et intérêts. Il doit lui être donné acte de ce qu'elle est disposée, sous réserve de la production des justifications, à rembourser aux époux [Z] le coût des travaux exécutés en mars 2007. Les époux [C] et [I] [A] doivent être déboutés de toutes leurs demandes incidentes formées à son encontre. Les succombants seront enfin condamnés à lui payer la somme de 6000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, pour l'instance d'appel, outre les entiers dépens de l'instance.

Dans ses dernières écritures en date du 9 octobre 2014, [I] [A], exerçant sous l'enseigne Decoflor conclut, au principal, à la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il a mis hors de cause les époux [C], ceux-ci devant supporter 20 % des responsabilités et en ce qu'il a retenu sa propre responsabilité, à hauteur de 20 %, toutes demandes formées à son encontre par les époux [Z] devant être rejetées. Subsidiairement, les demandeurs devront être déboutés de toutes leurs prétentions à son encontre. Tout succombant devra enfin et en tout état de cause être condamné à lui payer la somme de 2000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans leurs dernières écritures en date du 10 septembre 2015, les époux [C] concluent à la confirmation du jugement dont appel. Subsidiairement, les époux [Z] qui ne rapportent pas la preuve de leur préjudice immobilier et mobilier et de leur trouble de jouissance doivent être déboutés de toutes leurs demandes et condamnés, ainsi, en tant que de besoin, que tout succombant, à leur payer la somme de 5000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture est en date du 25 septembre 2015.

SUR CE

L'expert judiciaire [G], désigné à la suite d'inondations survenues dans la villa des époux [Z], le 22 septembre 1992, indiquait dans son rapport d'expertise déposé le 9 mars 1997 que lors des précipitations exceptionnelles qui se sont produites ce jour-là, les eaux pluviales, en provenance à la fois du bassin versant extérieur (voie d'accès) et de l'emprise de la propriété, se sont accumulées sous le porche d'entrée, point le plus bas de la construction, pour atteindre, en l'absence d'évacuation, un niveau de 50 à 60 cm. Une jarre vide en métal disposée dans cette entrée a été soulevée, s'est mise à flotter et, a, à la manière d'un bélier, défoncé la porte de la maison en inondant tout le rez-de-chaussée et en causant à l'ameublement et aux décorations intérieures, presque neufs, des dommages considérables.

L'expert estimait que ce sinistre avait deux causes : une cause «amont», principale, l'eau étant arrivée en surabondance, par rapport à une prévision hydraulique normale et une cause «aval», l'eau ne s'étant pas évacuée par les exécutoires prévus à cet effet, d'importance moindre. Il précisait que, pour établir les détails des origines et les imputabilités, il était nécessaire d'examiner trois niveaux hydrauliques :

-le bassin versant amont, c'est-à-dire toutes les provenances topographiques situées au-dessus de l'entrée des véhicules de la villa et en particulier la voirie secondaire de la ZAC et ses réseaux d'écoulement pluviales, qui sont des parties communes,

-le bassin versant et les réseaux intermédiaires situés dans l'emprise de la propriété, sous régime privatif,

-et enfin l'exutoire aval, comprenant à la fois une partie privative et des fossés d'évacuation situés dans l'emprise des parties communes.

L'expert indiquait que le dispositif amont comprenait notamment un fossé de cantonnier, entonné, à gauche en descendant, vers une buse, sans aucun ouvrage de dégrillage susceptible d'empêcher les dépôts minéraux et végétaux de pénétrer dans la buse. L'expert dénonçait «l'incohérence» des sections successives des canalisations pluviales busées, la discontinuité des pentes de la buse et enfin son mauvais entretien.

L'expert décrivait ensuite le dispositif médian ainsi : une fois franchi le portail d'accès, une rampe en pente assez raide vers l'Ouest permet d'accéder à une cour patio, avec une dénivellation de 6,60 m, soit une déclivité de l'ordre de 11 %. L'eau pluviale de cette cour est évacuée par deux regards. L'expert considérait que ce dispositif ne participait pas à la causalité du sinistre.

Le dispositif aval, enfin, était décrit comme comprenant des réseaux d'évacuation constitués par un tube drainant le réseau médian et débouchant latéralement sur un fossé en pleine terre servant de collecteur pluvial à la villa [Z] et aux villas voisines, côté Ouest et Est. L'expert constatait alors que le caniveau général était mal ou pas entretenu, jamais curé et qu'il était devenu le siège d'une végétation importante.

S'agissant des travaux de reprise, l'expert [G] préconisait, en page 50 de son rapport, pour la partie amont, l'installation d'un ouvrage de dégrillage, l'ajout de regards sur la buse et la création d'un caniveau latéral à la buse et, pour la partie aval, le busage du petit fossé, tenant lieu de trop-plein, afin d'éviter des accidents aux praticiens du golf passant par là.

Par jugement en date du 9 décembre 1999, entièrement confirmé par la cour, le tribunal de grande instance de Draguignan jugeait que l'ASL de la ZAC du Roudai, dès lors qu'elle supporte une obligation d'entretien de la voirie et des réseaux, devait être tenue responsable du défaut d'entretien concernant le dispositif amont, à l'origine pour partie du sinistre et la condamnait in solidum avec la société promotrice, à réparer les préjudices en découlant, à hauteur de 70 %, chacune des deux supportant, dans les rapports entre elles, 50 % des 70 %.

Le tribunal considérait ensuite que la cause secondaire en aval, consistant dans le défaut d'entretien des fossés ayant occasionné le colmatage progressif du caniveau, était imputable aux époux [Z], eux-mêmes tenus en application de l'article 640 du Code civil d'évacuer leurs eaux sur leur propre terrain, sans aggraver l'écoulement naturel des eaux pesant sur les fonds inférieurs.

Le tribunal, au bénéfice de l'ensemble de ces observations, entre autres dispositions, condamnait les époux [Z] à supprimer la canalisation d'évacuation des eaux pluviales qu'ils avaient mise en place, débouchant sur le terrain de l'association sportive du golf de Barbaroux, condamnait l'ASL de la ZAC du Roudai à exécuter les travaux préconisés par l'expert [G] en page 50 de son rapport, seulement en ce qui concerne les travaux «en amont», dans un délai de six mois à compter de la signification du jugement et disait qu'à défaut de l'exécution par l'ASL de la ZAC du Roudai des travaux «en amont», dans ce délai, les travaux seraient exécutés, à la requête des demandeurs, par une entreprise de leur choix, l'ASL en supportant le coût.

Il est acquis que les travaux ainsi préconisés par l'expert n'ont été exécutés ni par l'ASL ZAC du Roudai ni par les époux [Z], avant la survenance, dans la nuit du 6 au 7 juillet 2006, date à laquelle de nouvelles inondations endommageaient une fois encore la villa des époux [Z].

L'expert judiciaire [F] désigné dans le cadre de la présente procédure, selon ordonnance du 20 décembre 2006, rappelle dans son rapport déposé le 18 janvier 2011 que le réseau général d'eaux pluviales de surface est constitué par un fossé situé sur la voirie, busé sur certains tronçons et singulièrement sur la partie la plus proche de la propriété [Z]. Selon l'expert, le jour du premier accedit, le 21 février 2007, les tronçons busés n'étaient pas bien entretenus.

L'expert a observé par ailleurs que les époux [C], propriétaires du lot N° [Cadastre 2], situé au-dessus du lot [Z], de l'autre côté de la voirie, avaient construit, courant 2004, un mur de soutènement en bordure de leur propriété et que les terres du terrassement avaient été déposées dans le fossé. Selon l'expert, le tronçon du fossé, ainsi obturé au droit de la propriété [C], a provoqué le détournement des eaux pluviales cheminant dans le fossé en amont de cette zone et celles-ci, transformées en eaux pluviales de surface sur la chaussée, sont parvenues, du fait de la forme de la voirie, sur l'entrée de l'aire d'accès au chemin privé [Z] et se sont engouffrées depuis le chemin privé, jusqu'à la villa.

Selon l'expert, le sinistre survenu le 7 juillet 2006 provient, outre un défaut d'entretien du réseau d'eau pluvial, de l'obstruction du fossé, sur une longueur significative, depuis la construction du mur de soutènement et de l'inexécution par l' ASL de la ZAC du Roudai des ouvrages préconisés par l'expert [G].

Outre le curage du fossé, ces travaux et en particulier la reprise des écoulements du réseau pluvial et la réalisation de caniveaux à grille, parallèles au caniveau préexistant, devant le portail [Z] et d'un caniveau à grille à l'entrée, à la liaison avec la voirie collective seront finalement exécutés par les époux [Z], courant 2007, selon facture établie par l'entreprise Trotin le 30 mars 2007, pour un montant de 22'999 € TTC (21'800 € hors-taxes), et donc bien après le délai de six mois prévu par le tribunal de grande instance de Draguignan, dans son jugement du 9 décembre 1999, en cas de carence de l'ASL de la ZAC du Roudai. Cette facture vise la réalisation d'un caniveau à l'entrée de la propriété, la reprise du caniveau existant, la remise en forme de l'entrée villa côté garage et la reprise des écoulements des tuyaux d'évacuation d'eaux pluviales derrière le garage.

L'expert considère en revanche que le défaut affectant la conception du réseau pluvial général du lotissement, sur la voirie en amont de la propriété [Z], consistant dans la présence d'une contre-pente sur un tronçon busé n'a pas joué un rôle causal dans la survenance du sinistre du mois de juillet 2006. Il précise à cet égard avoir constaté, durant ses opérations d'expertise, dont il convient de rappeler qu'elles se sont déroulées de 2007 à janvier 2011 et donc sur plus de quatre ans, que la propriété [Z] n'a plus subi d'inondations, malgré la survenue d'épisodes pluvieux intenses, sur la région, pendant cette période, ce qui prouve l'efficacité des travaux effectués en mars 2007 et du curage du fossé.

Il est établi enfin par les factures en date des 31 décembre 2005, 31 mars 2006, 30 juin 2006 et 30 septembre 2006, d'un montant moyen trimestriel de l'ordre de 941 € que l'ASL ZAC du Roudai a confié à [I] [A], exerçant à l'enseigne Decoflor, les travaux d'entretien des espaces verts.

Il résulte des éléments objectifs qui précèdent, non utilement combattus, que l'ASL de la ZAC du Roudai, sur laquelle pèse une obligation générale et statutaire d'entretien du réseau pluvial et de la voirie du lotissement, a, en ne s'assurant pas du nettoyage régulier des fossés et des caniveaux, en ne procédant pas, pendant plus de deux ans, au curage du fossé obstrué par les terres issues du terrassement effectué, courant 2004, sur le fonds [C] et enfin en n'exécutant pas les ouvrages prescrits par le jugement du 9 septembre 1999, commis des fautes engageant sa responsabilité civile.

Les époux [C], en n'assurant pas le dégagement du fossé au droit de leur propriété, pendant plus de deux ans, après que celui-ci ait été obturé sur une quarantaine de mètres linéaires lors des travaux exécutés de leur chef, ont également commis une faute ayant contribué au préjudice subi par les époux [Z].

[W] [C] a d'ailleurs envoyé à l'entreprise Carrière, chargée de l'exécution des travaux de terrassement, dans le cadre de la construction du mur de soutènement, le 31 juillet 2006, une lettre recommandée avec accusé de réception la mettant en demeure de terminer les travaux et en particulier de creuser le caniveau dans les plus brefs délais. Il est rappelé dans ce courrier que le 6 juillet dernier, un violent orage a éclaté à la suite duquel «des inondations, partiellement occasionnées par l'obturation du caniveau, ont causé d'importants dégâts dans une villa située à côté du chemin». Dans le cas où il serait constaté que l'obturation est partiellement la cause de cette inondation, il la tiendrait responsable.

[I] [A], dont la mission consistait, au vu des factures produites, dans l'entretien des espaces verts, à l'exclusion de toute autre prestation, ne peut en revanche se voir attribuer une part de responsabilité dans le sinistre du 7 juillet 2006. Le devis descriptif et estimatif en date du 15 mars 2014 concernant la remise en état des parcelles de terrain, secteur golf et route des Anglais et secteur villas et portant sur le débroussaillage, le ramassage l'enlèvement et l'évacuation, le jour même, des feuilles mortes et des détritus et sur le nettoyage de tous les caniveaux, ainsi que la facture en date du 17 octobre 2006 intitulée «entretien ponctuel», prévoyant le même type de prestations que celles figurant sur le devis portent en effet sur deux périodes précises, printemps 2014 et octobre 2006, différentes de celle des faits survenus en juillet 2006, époque à laquelle [I] [A] était simplement tenu d'entretenir les espaces verts.

Les époux [Z], enfin, en n'effectuant pas, à l'expiration du délai de six mois à compter de la signification du jugement du 9 décembre 1999, malgré la carence de l'ASL de la ZAC du Roudai, les travaux prescrits par l'expert [G] et en attendant la survenance d'un nouveau sinistre pour s'exécuter, ont contribué à leur propre préjudice, dans une proportion de l'ordre, au regard des éléments objectifs figurant au dossier, de 20 %.

L'ASL de la ZAC du Roudai, d'une part, et les époux [C], d'autre part, doivent en conséquence être condamnés in solidum à réparer le préjudice subi par les époux [Z] à hauteur de 80 %, étant précisé dans les rapports entre eux que l'ASL supportera 65 % des 80 % et les époux [C], 35 % des 80 %.

Il est établi par les pièces versées aux débats et en particulier par les factures concernant le nettoyage, le traitement des sols, les travaux de peinture et le nettoyage du mobilier que le préjudice subi par les époux [Z] de ces chefs doit être fixé à la somme globale de 65'022,98 euros.

Il apparaît par ailleurs au vu des éléments du dossier caractérisant l'importance des inondations ayant envahi le rez-de-chaussée de la villa des époux [Z] et du procès-verbal de constat d'huissier en date du 7 juillet 2006, c'est-à-dire le jour des faits, assorti de 34 photographies mettant en évidence la qualité de l'ameublement et des éléments décoratifs ornant les pièces endommagées que les époux [Z] qui démontrent par ailleurs avoir été confrontés à un refus de garantie de la part de leur assureur, lors du premier sinistre survenu en 1992, ont subi un préjudice du chef de la détérioration des meubles, tentures, tapisseries et objets de décoration, qui sera justement réparé par l'octroi de la somme de 250'000 €, à titre de dommages et intérêts.

Le préjudice global subi par les époux [Z] s'établit en définitive à la somme de 315'022,98 €, dont 20 % , soit la somme de 63'004,59 €, doit demeurer à leur charge.

L'ASL de la ZAC du Roudai et les époux [C] doivent être condamnés in solidum à payer aux époux [Z] la somme de 252'018,39 €.

Les époux [C] doivent être condamnés à relever et garantir l'ASL ZAC du Roudai de la condamnation qui précède, à hauteur de la somme de 86'206,43 euros.

L'ASL ZAC du Roudai, condamnée par le jugement définitif du 9 décembre 1999 à effectuer les ouvrages prescrits par l'expert [G] et à en supporter le coût, doit être condamnée à payer aux époux [Z] la somme de 22'999 € TTC, dont ils ont fait l'avance.

Les époux [Z] qui ne justifient pas de la réalité d'un préjudice non réparé par l'effet des condamnations qui précèdent, doivent être déboutés de leur demande en paiement de la somme de 30'000 € à titre de dommages intérêts complémentaires.

Les époux [Z] doivent enfin se voir allouer, eu égard à la solution apportée au litige en appel, la somme de 4500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, soit 1500 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et 3000 € au titre de ceux exposés en appel.

Toutes les autres demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile doivent être rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,

Infirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

Dit que l'ASL ZAC du Roudai et les époux [C] sont responsables du préjudice subi par les époux [Z] à la suite des inondations survenues dans la nuit du 6 au 7 juillet 2006, dans la proportion de 80 %, les époux [Z] ayant contribué à leur propre préjudice à hauteur de 20 %,

Fixe le montant du préjudice global subi par les époux [Z] à la somme de 315'022,98 euros,

En conséquence, condamne in solidum l'ASL ZAC du Roudai et les époux [C] à payer aux époux [Z] la somme de 252'018,39 €,

Dit que dans les rapports entre l'ASL ZAC du Roudai et les époux [C], l'ASL ZAC du Roudai doit supporter 65 % des 80 % et les époux [C] doivent supporter 35 % des 80 %,

Condamne les époux [C] à relever et garantir l'ASL ZAC du Roudai de cette condamnation, à hauteur de la somme de 86'206,43 euros

Condamne l'ASL ZAC du Roudai à payer aux époux [Z] la somme de 22'999 € TTC, correspondant au coût des travaux prescrits par l'expert [G],

Déboute les époux [Z] de leur demande en paiement de la somme de 30'000 € à titre de dommages intérêts complémentaires,

Condamne in solidum l'ASL ZAC du Roudai et les époux [C] à payer aux époux [Z] la somme de 4500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel,

Rejette toutes les autres demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum l'ASL ZAC du Roudai et les époux [C] aux dépens de première instance, en ce compris les frais de référé et d'expertise et d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats de la cause,conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, étant précisé, dans les rapports entre l'ASL ZAC du Roudai et les époux [C] que les condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens sont prononcées à hauteur de 65 % à la charge de l'ASL ZAC du Roudai et 35 % à la charge des époux [C].

LA GREFFIERELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre a
Numéro d'arrêt : 14/07714
Date de la décision : 10/12/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3A, arrêt n°14/07714 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-10;14.07714 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award