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05/11/2015 | FRANCE | N°14/14831

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre b, 05 novembre 2015, 14/14831


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 05 NOVEMBRE 2015



N° 2015/563













Rôle N° 14/14831







[H] [T]

[Y] [T]





C/



[Q] [I]

[K] [I]





















Grosse délivrée

le :

à :



ME SCHREYER

ME JAUFFRES













Décision déférée à la Cour :
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Jugement du Tribunal d'Instance de CANNES en date du 13 Mars 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 000888.





APPELANTS



Monsieur [H] [T]

né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Michaela SCHREYER, avocat au barreau de GRASSE, plaidant



Madame [Y] [T]

née le [Date naissance...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 05 NOVEMBRE 2015

N° 2015/563

Rôle N° 14/14831

[H] [T]

[Y] [T]

C/

[Q] [I]

[K] [I]

Grosse délivrée

le :

à :

ME SCHREYER

ME JAUFFRES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de CANNES en date du 13 Mars 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 000888.

APPELANTS

Monsieur [H] [T]

né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Michaela SCHREYER, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

Madame [Y] [T]

née le [Date naissance 2] 1953 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Michaela SCHREYER, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTIMES

Monsieur [Q] [I]

né le [Date naissance 3] 1937 à [Localité 3],

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Jean-marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assisté par Me Alexandre MEYRONET, avocat au barreau de GRASSE,

Madame [K] [I]

née le [Date naissance 4] 1944 à [Localité 4],

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Jean-marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assisté par Me Alexandre MEYRONET, avocat au barreau de GRASSE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Septembre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Brigitte PELTIER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre

Mme Brigitte PELTIER, Conseiller

Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Anaïs ROMINGER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Novembre 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Novembre 2015,

Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Les époux [T] ont acquis le 7 mars 2006 un terrain à bâtir sis à [Localité 5] (parcelles cadastrées BB 288, 146, 147), libre de toute occupation, sur lequel ils ont obtenu la délivrance d'un permis de construire le 3 janvier 2007.

Le 24 avril 2008, ils ont fait l'acquisition « d'une petite propriété rurale, comprenant une maison d'habitation, deux remises, avec terrain attenant en nature de jardin » jouxtant ce terrain, cadastrée BB [Cadastre 1] et [Cadastre 2], dite dans l'acte de vente « libre de toute occupation (') observation étant ici faite que la maison est actuellement occupée par M. et Mme occupants sans titre depuis plus de 30 ans [moyennant] le versement d'un loyer mensuel de 260 euros (...) » ; ils ont, ce même jour, régularisé un bail, avec M. [I], portant sur la maison d'habitation, moyennant paiement d'un loyer de 260 euros.

Par courrier du 27 septembre 2010, ils leur ont donné congé en vue de reprendre le logement pour leur fils et ont pris acte de l'opposition des époux [I] fondée sur l'article 15-III de la loi du 06 juillet 1989 ;

Par courrier du 27 octobre 2010, ils ont notifié au locataire qu'il ne pourrait plus à compter du 1er novembre 2010, faire entrer, ni stationner son véhicule sur le terrain, la réalisation d'une entrée indépendante constituée d'un portillon piéton étant prévue.

Par courrier du 9 novembre 2010, M. [I], rappelant qu'il était handicapé ainsi que son épouse et son fils et qu'il utilisait l'accès depuis 40 ans, a demandé que l'installation d'un portail permettant l'accès de sa voiture soit envisagé, travaux dont il acceptait de prendre à sa charge le surcoût ; sur intervention d'un médiateur, un parking leur a été mis à disposition à compter du mois d'avril 2011 moyennant un loyer de 60 euros par mois.

Par courrier du 10 mai 2012, les époux [T] ont notifié à M. [I] qu'ils mettaient fin « au titre d'occupation tacite de l'emplacement de parking » situé sur une parcelle différente de celle concernant le bail d'habitation.

Par acte du 24 août 2012, les époux [I] ont fait assigner les époux [T] à fin de les entendre condamnés sous astreinte à leur restituer la jouissance de la propriété cadastrée Section BB n° [Cadastre 3],[Cadastre 2],[Cadastre 1] et ont saisi le juge des référés par acte du 28 août 2012 pour obtenir la destruction de la clôture entourant leur location et libre accès au terrain cadastré BB [Cadastre 2] ;

Par ordonnance en date du 25 janvier 2013, le juge des référés du tribunal d'instance de Cannes les a débouté en les renvoyant au principal.

Par courrier du 20 juin 2013, les époux [T] ont donné un nouveau congé en vue d'une reprise pour eux mêmes, pour le 23 avril 2014 et ont assigné les époux [I] à fin d'expulsion par acte d'huissier de justice en date du 2 mai 2014, litige actuellement pendant devant le tribunal d'instance de Cannes.

Par jugement en date du 13 mars 2014 le Tribunal d'instance de Cannes a dit que le contrat de bail du 24 avril 2008 est inopposable à Mme [I] et condamné les époux [T] à leur payer une somme de 1 300 € à titre de dommages et intérêts outre 900 € au titre de l'article 700 du du Code de procédure civile.

Les époux [T] ont relevé appel de cette décision le 28 juillet 2014 ;

Aux termes de leurs écritures en date du 5 août 2015, les appelants concluent à la réformation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré inopposable à Mme [I] le bail du 24 août 2008 et les a condamnés au paiement de dommages et intérêts ; à sa confirmation en ce qu'il a retenu que les époux [I] ne sont locataires que de la parcelle [Cadastre 1] ; au paiement d'une somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils soutiennent au visa de l'article 1751 du Code civil que les époux sont co-titulaires du bail dès lors qu'il s'agit du logement familial ; qu'ils n'étaient occupants que de la petite maison à l'exclusion de la parcelle [Cadastre 2] attenante, qui n'était plus entretenue depuis de nombreuses années ; qu'il ressort des courriers échangés entre les parties que Mme [I] avait donné mandat tacite à son époux pour régulariser le bail du 24 août 2008 ; qu'en tout état de cause, ce bail a été ratifié par Mme [I] ; que la simple utilisation d'une partie de terrain qui ne fait pas partie des locaux donnés à bail ne peut être génératrice d'un droit du locataire et ce malgré une tolérance du bailleur pendant plusieurs années.

Aux termes de leurs conclusions en date du 5 décembre 2014, les époux [I] concluent à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré inopposable à Mme [I] le bail du 24 août 2008 et réclament condamnation des époux [T] à leur restituer la jouissance du parking sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et leur payer une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts, outre 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir que par application de l'article 51 de la loi N° 86-1290 du 23 décembre 1986, leur bail s'est renouvelé par période de 3 ans à compter du 24 juin 1983, puis pour une durée de 6 ans par application de l'article 10 de la loi du 6 juillet 1989 (troisième alinéa) car la société Astoria, société commerciale, était propriétaire du bien à cette époque ; que la signature d'un bail par M. [I], qui n'avait absolument pas connaissance de ce qu'il renonçait à un bail de 6 ans, n'a pas eu d'effet à l'égard de Mme [I] ; que par application de l'article 2 de la loi du 6 juillet 1989, l'emplacement de parking constituait un accessoire à l'habitation principale, bénéficiant dès lors de la même durée et du même régime que le logement principal ; que la demande en dommages et intérêts est fondée.

SUR CE

Sur l'opposabilité du bail du 24 avril 2008 à Mme [I] :

Par application de l'article 1751, dans sa rédaction contemporaine à la date du bail régularisé le 24 avril 2008 : « Le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l'habitation de deux époux est, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire, et même si le bail a été conclu avant le mariage, réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux. » de sorte qu'un avenant de prorogation de bail signé par le mari seul est inopposable à l'épouse dès lors que celle-ci, cotitulaire du bail, ne l'a pas ratifié ou que la renonciation de l'un aux dispositions générales de la loi du 1er sept. 1948 par la signature d'un second contrat de location n'est pas opposable à l'autre qui n'a pas signé ce contrat, en l'absence de preuve de l'accomplissement d'un acte positif de renonciation.

Les époux [I] soutiennent que le bail du 24 avril 2008 n'a été régularisé que par M. [I] et qu'il n'est en conséquence pas opposable à Mme [I] ; toutefois et comme soutenu par les époux [T], l'existence d'un mandat tacite apparent et à tout le moins d'une ratification de Mme [I] résulte des débats ainsi que des pièces du dossier dès lors d'une part que la location concerne le logement familial des époux [I], d'autre part que les courriers ultérieurs, comportant parfois une double signature (comme celui sus visé du 22 décembre 2010) émanaient des deux époux ; il en résulte que le nouveau bail a incontestablement été exécuté par les deux époux, en ce compris du chef de la clause d'indexation ; les époux [I], ne sont en conséquence pas fondés à soutenir qu'il n'est pas opposable à Mme [I] ; le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef.

Sur les demandes relatives à l'emplacement du parking :

En application de l'article 2 de  la loi du 6 juillet 1989 : « Les dispositions du présent titre sont d'ordre public. Elles s'appliquent aux locations de locaux à usage d'habitation principale ou à usage mixte professionnel et d'habitation principale ainsi qu'aux garages, places de stationnement, jardins et autres locaux, loués accessoirement au local principal par le même bailleur. »

Les époux [I] soutiennent qu'ils ne pouvaient se voir priver de l'emplacement de parking dont ils jouissaient à la suite de l'accord du mois d'avril 2011, qualifié d'accessoire à l'habitation principale par application de l'article 2 sus visé ; de fait, il ressort des échanges produits au dossier que l'accord du mois d'avril 2011, moyennant paiement d'un loyer de 60 euros, concerne « le loyer affecté au parking du logement de la famille [I] » (cf courriel du médiateur en date du 11 mars 2011) ; les époux [I] sont dès lors fondés à soutenir que cette location, qui n'a de surcroît pas fait l'objet d'un bail spécifique, était l'accessoire de leur habitation principale, privée de l'accès dont ils avaient bénéficié jusqu'au 1er novembre 2010, et bénéficiait dès lors de la même durée et du même régime que le bail principal ; les moyens développés par les appelants, tirés de la résiliation de la convention d'occupation du parking étant inopérants, c'est à bon droit que le premier juge a retenu, qu'en mettant un terme à la mise à disposition de cet emplacement, les époux [T] ont incontestablement causé un préjudice de jouissance aux époux [I], âgés respectivement de 77 et 70 ans et dont le statut d'handicapés, justifié par les pièces du dossier, n'est au demeurant pas contesté ; au regard du congé qui leur a été délivré le 20 juin 2013, pour le 23 avril 2014, il n'y a pas lieu à condamnation du chef du rétablissement sous astreinte de cet emplacement mais il leur sera alloué une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Les dépens, ainsi qu'une somme de 1.500 euros seront supportés par les époux [T].

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement

Réforme le jugement déféré et l'infirme en ce qu'il a déclaré le bail du 24 avril 2008 non opposable à Mme [I] et statuant de nouveau,

Dit ce bail opposable à Mme [I].

Condamne les époux [T] à payer aux époux [I] une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts outre celle de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne les époux [T] aux entiers dépens.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre b
Numéro d'arrêt : 14/14831
Date de la décision : 05/11/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence B1, arrêt n°14/14831 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-05;14.14831 ?
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