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29/10/2015 | FRANCE | N°14/10585

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 29 octobre 2015, 14/10585


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 29 OCTOBRE 2015



N°2015/444













Rôle N° 14/10585







[K] [Y]

[Z] [Y]





C/



[T] [S]

[Q] [M]

SAS CLINIQUE [Établissement 1]





































Grosse délivrée

le :

à :

Me Mesellem

Me Juston
r>Me Imperatore







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 17 Avril 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00579.





APPELANTS



Monsieur [K] [Y]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 2], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Ouarda MESELLEM, avocat au barreau...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 29 OCTOBRE 2015

N°2015/444

Rôle N° 14/10585

[K] [Y]

[Z] [Y]

C/

[T] [S]

[Q] [M]

SAS CLINIQUE [Établissement 1]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Mesellem

Me Juston

Me Imperatore

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 17 Avril 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00579.

APPELANTS

Monsieur [K] [Y]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 2], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Ouarda MESELLEM, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté de Me Patrice CHICHE de la SELARL CHICHE R, COHEN S, CHICHE P, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Ouarda MESELLEM, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

Monsieur [Z] [Y]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 2], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Ouarda MESELLEM, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté de Me Patrice CHICHE de la SELARL CHICHE R, COHEN S, CHICHE P, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Ouarda MESELLEM, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

INTIMES

Monsieur [T] [S], demeurant Clinique [Établissement 1] - - [Adresse 2]

représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté de Me François ROSENFELD de la SCP F. ROSENFELD- G. ROSENFELD & V. ROSENFELD, avocat au barreau de MARSEILLE,

Monsieur [Q] [M], demeurant Clinique [Établissement 1] - [Adresse 2]

représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté de Me François ROSENFELD de la SCP F. ROSENFELD- G. ROSENFELD & V. ROSENFELD, avocat au barreau de MARSEILLE,

SAS CLINIQUE [Établissement 1] prise en la personne de son représentant légal en exercice [Adresse 1]

représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Bruno ZANDOTTI de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Mathilde CHADEYRON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Septembre 2015 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christiane BELIERES, Présidente, et Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller, chargées du rapport.

Madame Christiane BELIERES, Présidente, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Christiane BELIERES, Présidente

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Mme Anne VELLA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Octobre 2015.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Octobre 2015.

Signé par Madame Christiane BELIERES, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé des faits et procédure

Le 24 novembre 2009 M. [I] [Y] a subi à la Clinique [Établissement 1] à [Localité 1] une intervention de néphro-urétérectomie gauche pratiquée par M. [S] et M. [M], chirurgiens urologues ; placé dans l'unité de surveillance continue, il est décédé dans la nuit du [Date décès 2] 2009.

M. [K] [Y] et M. [Z] [Y], ses deux fils, ont saisi le juge des référés qui par ordonnance du 18 mai 2010 a prescrit une mesure d'expertise confiée au docteur [C] qui a déposé son rapport le 17 juillet 2012 en écartant toute faute ou négligence médicale.

Par actes du 21 et 22 janvier 2013 ils ont fait assigner M. [S], M. [M] et la Sa Clinique [Établissement 1] devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en déclaration de responsabilité et réparation des préjudices subis.

Par jugement du 17 avril 2014 cette juridiction a

- rejeté la demande d'annulation de l'assignation

- débouté les consorts [Y] de leur demande d'indemnisation envers les deux chirurgiens et la clinique et de celle fondée sur l'article 700 du code de procédure civile

- débouté M. [S] et M. [M] et la clinique de leur demande au titre de leurs propres frais irrépétibles exposés

- condamné les consorts [Y] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par acte du 26 mai 2014, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, les consorts [Y] ont interjeté appel général de cette décision.

Moyens des parties

Les consorts [Y] demandent dans leurs conclusions du 11 Août 2014 de

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de l'assignation

- le réformer pour le surplus

- dire que M. [S], M. [M] et la Sa Clinique [Établissement 1] ont manqué à leur obligation contractuelle de suivi médical et d'organisation dans la surveillance et les soins apportés au patient

- dire que M. [I] [Y] est décédé des suites d'un défaut de suivi médical lors de son hospitalisation au sein de la Sa Clinique [Établissement 1]

- dire que les chirurgiens et la clinique sont conjointement et solidairement tenus à réparation envers eux

- les condamner conjointement et solidairement à payer à chacun d'eux les sommes de

* 20.000 € en réparation du préjudice moral subi

* 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- ordonner l'exécution provisoire du jugement.

- condamner conjointement et solidairement M. [S], M. [M] et la Sa Clinique [Établissement 1] à supporter les entiers dépens avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Ils font valoir que si le rapport d'expertise médicale exclut toute faute en relation avec le décès de M. [I] [Y], le juge n'est pas lié par les constatations ou conclusions de l'expert et apprécie souverainement leur valeur et leur portée, en application de l'article 246 du code de procédure civile.

Ils rappellent qu'ils ont pris soin de délivrer une sommation interpellative auprès d'un témoin des faits , M. [U], patient hospitalisé à la même date dans le même établissement de santé qui a indiqué 'qu'à plusieurs reprises les infirmières sont venues calmer M. [I] [Y], que, n'y parvenant pas, elles l'ont attaché sur le lit avec brutalité à l'aide de sangles, qu'il a vu passer une infirmière avec une seringue sur une gaze, qu'instantanément après M. [I] [Y] s'est calmé et qu'il ne l'a plus entendu, que quelques temps plus tard une infirmière est venue dans la chambre, s'est penchée sur ce malade et a tout de suite quitté la pièce, à la suite de quoi quatre infirmières sont arrivées, l'une d'elle étant venue avec un paravent qu'elle a installé entre deux lits, qu'elles ont retiré les draps et évacué le lit avec le paravent qui suivait le lit dans son déplacement, que 30 minutes plus tard le lit est revenu en chambre vide, que le lendemain matin quand les infirmières sont arrivées dans la chambre pour les soins elles n'ont rien dit sur l'absence de M. [I] [Y] , que l'une d'elle est venu trouver M. [U] et lui a dit 'vous n'avez rien vu ni entendu'.

Ils estiment que ce témoignage précis et circonstancié suffit à établir une surveillance médicale inadéquate, d'autant qu'aucun document émanant du réanimateur de garde et/ou du médecin de garde concernant le suivi médical de M. [I] [Y] dans la nuit du 30 novembre 2009 au [Date décès 1] 2009 n'a été fourni, ce qui corrobore le fait qu'il n'a pas été examiné par un médecin avant son décès, malgré son état de santé des plus inquiétants.

Ils soulignent que toutes les demandes de l'expert sur le point de savoir si le patient était monitoré, si une présence médicale a été assurée lors de la phase d'agitation, à la suite de l'appel de l'infirmière, quelle était la prescription médicale exacte (nom de la spécialité, voie d'administration, consigne particulière) , si la prescription était téléphonique ou contresignée, si une réanimation par MCE a été effectuée, en présence de quel médecin, sa durée, quel médecin a constaté le décès, qui a rempli la fiche de décès.. sont restées sans réponse

Ils estiment que la défaillance des défendeurs témoigne du défaut de surveillance médicale adéquate dont M. [I] [Y] a fait l'objet au sein de l'établissement de santé.

M. [S] et M. [M] sollicitent dans leurs conclusions communes du 10 octobre 2014 de

Vu l'article L 1142-1 du code de la santé publique et l'article 1147 du code civil

- confirmer le jugement

- condamner solidairement les consorts [Y] à leur payer la somme de 3.000 € à chacun d'eux sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- les condamner solidairement aux entiers dépens avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Ils font valoir que les observations d'un médecin expert judiciaire spécialiste et indépendant ne peuvent être mises sur un pied d'égalité au plan médical avec les dires d'un patient profane ni avec celles d'un médecin conseil mandaté par l'une des parties.

Ils soulignent que l'expert [C] a validé la démarche diagnostique proposé à un patient symptomatique (saignement urinaire franc et répété) après réalisation d'un scanner contributif et d'un prélèvement endoscopique, a validé l'indication opératoire a priori compte tenu de la symptomatologie et a posteriori compte tenu des résultats de l'examen anatomo-pathologique confirmant le diagnostic de cancer, loué la réalisation du geste opératoire, complet, montrant l'absence d'envahissement ganglionnaire, validé le transfert en unité de surveillance continue, apprécié le contenu de l'information prodiguée tout au long de la relation médicale et formalisée par la signature d'un formulaire de consentement éclairé, préalablement à l'intervention chirurgicale

Ils estiment que les conclusions de l'expert [C], exhaustives, claires et documentées ne laissent sur ces points aucune place à l'interprétation.

Ils ajoutent que M. [U] a, pour sa part, évoqué des actes de maltraitance imputés aux infirmières de la clinique et non aux chirurgiens qui y exercent à titre libéral et que si l'expert judiciaire a insisté sur l'incomplétude du dossier médical et sur la nécessité de disposer de documents émanant du réanimateur de garde, il n'a jamais questionné l'indication ou la réalisation du geste chirurgical dont il a même précisé ne pas contester la nécessité et la pertinence.

Ils font remarquer que les lacunes du dossier ont été constatées après le transfert de M. [I] [Y] vers l'unité de soins continus où la surveillance médicale incombait au seul médecin responsable de cette unité.

Ils en déduisent que les consorts [Y] ne peuvent rapporter la preuve d'une faute commise par eux ni se prévaloir d'un lien causal entre le décès de leur père et les interventions des praticiens dont ils sollicitent la condamnation.

La Sa Clinique [Établissement 1] demande dans ses conclusions du 10 octobre 2014 de

Vu l'articles L 1142-1 du code de la santé publique

A titre principal,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions

A titre infiniment subsidiaire,

- réduire à de plus justes proportions les sommes sollicitées par les consorts [Y]

- débouter les consorts [Y] de leurs demandes formulées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens

- les condamner à lui payer une indemnité de 1.000 € au titre des frais irrépétibles exposés et à supporter les entiers dépens avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle indique qu'elle ne saurait être tenue pour responsable des éventuels manquements des médecins qui exercent dans son établissement à titre libéral et estime que l'organisation et le suivi médical par son personnel n'encourt aucune critique.

Elle affirme qu'un médecin de garde était bien présent la nuit du 30 novembre 2009 pour tenter de réanimer M. [I] [Y] ainsi qu'en atteste le compte rendu d'hospitalisation, qu'aucun défaut de surveillance n'a été commis et qu'aucune prétendue maltraitance ne peut être retenue à son encontre, le recours à une contention par sangles en raison de la très forte agitation de ce patient n'étant pas critiquable au dires de l'expert et le décès n'étant pas en relation directe, exclusive et certaine avec cet élément.

Elle dénie toute valeur probante au témoignage de M. [U], voisin de chambre âgé de 72 ans et très affaibli au point que sa déclaration à l'huissier a du être prise à l'aide d'un ordinateur portable compte tenu de son état de faiblesse post opératoire, qui déclare que M. [I] [Y] aurait été maltraité parce qu'il a vu des infirmières tourner autour de lui et s'agiter.

Motifs de la décision

Sur les responsabilités et leurs incidences

Les consorts [Y] exercent leur action en responsabilité tant à l'encontre du chirurgien que de la clinique.

En vertu de l'article L 1142-1 I du code de la santé publique le professionnel ou l'établissement de santé n'est responsable des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute de sa part.

Sur les données de l'expertise

L'expert [C] indique que M. [Y] 'a été hospitalisé du 24 novembre 2009 au 27 novembre 2009 en chirurgie pour un examen endoscopique de l'uretère gauche avec recherche de cellule cancéreuse sus jacente qui permettra de visualiser une tumeur de la vessie et de recueillir des prélèvements qui renforceront la suspicion d'un cancer du rein et sera ainsi opéré pour ablation du rein et uretère gauche avec curage ganglionnaire, diagnostic qui sera confirmé par l'examen anatomo-pathologique.'

Il précise que 'les suites opératoires ont été simples, que ce patient a été confié à l'unité de surveillance continue dans la même clinique du 27 novembre 2009 au [Date décès 1] 2009, sans incident post-opératoire type hémorragique, ni hémodynamique, ni cardiaque, que seul est précisé un patient anxieux selon la famille, un peu confus selon l'infirmière à l'admission, que l'état de M. [Y] s'aggravera de façon continue au plan neurologique par une agitation résistante à l'Atarax per os motivant un traitement par Atarax 100 et attaches le 30 novembre 2009 à 20 heures, que le patient est calmé à 22 heures et présentera un arrêt cardiorespiratoire le [Date décès 1] 2009 à 1 h 45.'

Il estime 'qu'en l'absence de faute chirurgicale retrouvée, de modification des paramètres des grandes fonctions vitales, d'autopsie souhaitée par la famille, d'éléments médicaux précis transmis autour de la période de 20 h à 0 h 45 (autres que ceux de l'infirmière) les deux hypothèses les plus probables du décès de M. [Y], en l'état des donnée portées à notre connaissance sont

- celle d'une embolie pulmonaire comme proposé dans le compte rendu d'hospitalisation, le maître symptôme aurait été l'anxiété (signe classique) puis la mort subite irrécupérable

- un accident vasculaire cérébral chez un patient multi vasculaire (arthéromateuse diffuse carotidienne, sous Kardegix au long cours, HTA traitée...), le patient ayant fait un ACR subit révélé par le bruit du scope'

Sur la responsabilité des chirurgiens

Les consorts [Y] ne critiquent nullement la pertinence du diagnostic posé, la nécessité de l'intervention chirurgicale et la qualité de la réalisation du geste opératoire mais invoquent une insuffisance de suivi post-opératoire.

Aucune donnée de la cause ne permet d'étayer un quelconque manquement des deux chirurgiens, M. [S] et M. [M], dans cette phase médicale.

En l'absence de complications chirurgicales propres aux deux gestes opératoires d'utéroscopie gauche avec résection de polype de vessie puis de néphro-urétectomie gauche et curage lymphatique aortique, il a été confié le 27 novembre 2009 par les deux chirurgiens au service de réanimation de la clinique pour surveillance et soins, comme ils le font systématiquement pour toutes les néphrectomies, d'autant que M. [I] [Y] avait de sérieux problèmes cardiaques antérieurs.

A cet égard l'expert a souligné que l'indication de séjour en unité de soins continus était pertinente puisqu'il a été retenu la nécessité de soins et d'une surveillance de façon continue.

Au cours de la soirée et de la nuit du décès ce patient était dans le service de réanimation de la clinique sous la responsabilité des médecins qui y exerçaient et notamment le médecin réanimateur de garde.

Aucune faute personnelle de l'un ou l'autres des deux chirurgiens n'est démontrée ni d'ailleurs explicitée à leur encontre, alors que la charge de la preuve pèse sur celui qui l'invoque.

Sur la responsabilité de la clinique

Les consorts [Y] invoquent une défaillance de la Sa Clinique [Établissement 1] dans la prise en charge de M. [I] [Y].

L'expert considère que la contention par sangle ne peut être assimilée à de la maltraitance 'face à un opéré récent, porteur transitoirement de drains, de pansements, agité malgré les traitements usuels, dans un service comportant d'autres patients ayant eux aussi des risques vitaux, qu'il a été logique d'opposer un bénéfice fort face à un risque faible pour le patient et que par ailleurs le décès n'est pas en relation directe et certaine avec cet élément' (page 21)

Aucune donnée d'ordre médical ne vient contredire cet avis motivé ; les consorts [Y] ne produisent pas le moindre élément contraire à cet égard.

L'expert ne critique pas davantage la prescription d'Atarax 100, le [Date décès 1] 2009 au soir, soit quelques heures avant son décès, se bornant à noter qu'elle était 'de nature à apporter une réponse symptomatique mais non étiologique'.

Au demeurant, elle est déclarée faite par le médecin réanimateur de garde qui exerce à titre libéral dans l'établissement de santé et qui ne peut engager que sa responsabilité personnelle, à l'exclusion de celle de la clinique, limitée uniquement aux agissements fautifs de ses préposés dont elle doit répondre vis à vis du patient.

A la lecture de la déclaration manuscrite de l'infirmière qui mentionne '20 heures, patient agité, agressif, veut se lever, des hallucinations ; allo médecin de garde, consignes, 100 mg d'Atarax en flash + attaches ; 1 h 20 le scope de M. [Y] sonne en asystolie. Nous sommes allées directement dans la chambre, le patient était en effet en asystolie. Je commence le massage cardiaque ; je demande à l'aide soignante d'apporter le chariot d'urgence et de téléphoner au médecin de garde pour le prévenir. Le temps que le médecin arrive, l'aide soignante massait le patient pendant que je le ventilais. Le médecin de garde est arrivé dans les 5 mns sur place et nous avons continué la réanimation. La réanimation a duré environ 30 minutes au bout desquelles le médecin a décidé d'arrêter la réanimation. 2 h le patient est déclaré décédé', aucun manquement du personnel aux pratiques habituelles d'une unité de surveillance continue ne peut être retenue, ainsi que souligné par l'expert lui-même à la page 25 de son rapport.

La seule donnée apportée par les consorts [Y] destiné à contredire les dires de l'infirmière est le témoignage d'un patient, M. [U], qui partageait la même chambre que M. [I] [Y] le soir des faits, recueilli par voie de sommation interpellative en date du 23 février 2010 qui relève l'état de grande faiblesse physique de l'intéressé au point d'être dans l'impossibilité de signer ses déclarations.

Sa lecture confirme l'état d'agitation de M. [I] [Y] et la pose de sangles, la médication donnée, la venue d'une infirmière plus tard qui en a appelé trois autres ; la mise en place d'un paravent entre les deux lits, ainsi que mentionné par ce patient lui-même, ne permet pas de donner valeur probante à ses dires pour la suite dont il n'a pu être le témoin visuel ; l'expert souligne à cet égard 'qu'on peut comprendre les interrogations de témoins non médicaux à des pratiques infirmières réalisées dans l'urgence qui ont pu leur paraître agressives, en l'absence de toute présence physique médicale initiale'.

Ainsi, rien ne permet de retenir que la mise en oeuvre et le suivi par le personnel soignant salarié de l'établissement de santé des prescriptions médicales n'ont pas été conformes aux règles de bonnes pratiques.

Le fait que le séjour de M. [I] [Y] au service de soins continus n'ait pas toujours été documenté dans son dossier médical est sans lien de causalité direct avec le décès de ce patient et le préjudice d'affection réclamé.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens doivent être confirmées.

Les consorts [Y], qui succombent dans leur voie de recours, supporteront la charge des dépens d'appel et doivent être déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles exposés.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [S], de M. [M] ou de la Sa Clinique [Établissement 1].

Par ces motifs

La Cour,

- Confirme le jugement.

Y ajoutant

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

- Condamne M. [K] [Y] et M. [Z] [Y] aux entiers dépens d'appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 14/10585
Date de la décision : 29/10/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°14/10585 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-10-29;14.10585 ?
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