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22/10/2015 | FRANCE | N°14/04247

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre b, 22 octobre 2015, 14/04247


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 22 OCTOBRE 2015



N° 2015/335













Rôle N° 14/04247







Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX





C/



[T] [G]

SAS GAGNERAUD CONSTRUCTION

SA SOCOTEC FRANCE







Grosse délivrée

le :

à :

Me O. LANTELME

Me B. JACQUIER

M. C. VUILLQUEZ

Me L. LEVAIQUE

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 11 Février 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01254.





APPELANTE



Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX

prise en la personne de son représentant légal, sa...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 22 OCTOBRE 2015

N° 2015/335

Rôle N° 14/04247

Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX

C/

[T] [G]

SAS GAGNERAUD CONSTRUCTION

SA SOCOTEC FRANCE

Grosse délivrée

le :

à :

Me O. LANTELME

Me B. JACQUIER

M. C. VUILLQUEZ

Me L. LEVAIQUE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 11 Février 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01254.

APPELANTE

Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX

prise en la personne de son représentant légal, sa Présidente Madame [D] [H], [Adresse 4]

représentée et plaidant par Me Olivier LANTELME, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [T] [G],

demeurant [Adresse 1]

représenté et plaidant par Me Bernard JACQUIER de la SCP SCP JACQUIER & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Anne-Sophie LAMY, avocate au barreau de MARSEILLE

SAS GAGNERAUD CONSTRUCTION

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 402 682 991

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège [Adresse 3]

représentée et plaidant par Me Caroline VUILLQUEZ de la SCP DE ANGELIS-SEMIDEI-VUILLQUEZ-HABART-MELKI-BARDON, avocat au barreau de MARSEILLE

SA SOCOTEC FRANCE

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]

représentée par Me Laurence LEVAIQUE de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocate au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Jean-Pierre TERTIAN de la SCP TERTIAN / BAGNOLI, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Jérôme TERTIAN de la SCP TERTIAN/BAGNOLI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 08 Septembre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Patricia TOURNIER, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-François BANCAL, Président

Mme Patricia TOURNIER, Conseillère (rédactrice)

Mme Marie-José DURAND, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 octobre 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Octobre 2015,

Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige :

Dans le cadre de l'établissement du dossier de demande d'autorisation d'exploiter au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, l'association Société Protectrice des Animaux de [Localité 1] et de sa région, dite la SPA, a confié à la société SOCOTEC, la réalisation d'une étude d'impact pour le refuge [Adresse 4].

La société SOCOTEC a clôturé son rapport le 25 octobre 1999.

La SPA a été autorisée à installer et exploiter le chenil susvisé par arrêté préfectoral en date du 31 mai 2001.

Selon contrat signé le 21 juin 2001, la SPA a confié la réalisation de la mise en conformité de l'aménagement du réseau eaux usées du refuge à la société GAGNERAUD CONSTRUCTION.

Monsieur [T] [G] a été chargé d'une mission de maîtrise d''uvre par la SPA, ainsi que d'une mission d'implantation et repères de nivellement et d'une mission de récolement des plans par la société GAGNERAUD CONSTRUCTION.

Les travaux ont été réceptionnés sans réserves le 6 septembre 2001.

La SPA, arguant de la survenance de désordres (bourrage au niveau des avaloirs, obstruction de la canalisation principale, saturation de la fosse septique), une expertise a été ordonnée par décision de référé en date du 7 juillet 2009.

Par ordonnance de référé en date du 25 mai 2010 les opérations d'expertise initialement limitées à la société GAGNERAUD CONSTRUCTION, à Monsieur [T] [G] et à la société SOCOTEC, ont été étendues à Monsieur [I] [J], qui avait réalisé une étude hydrogéologique le 19 septembre 1997.

L'expert, Monsieur [E], a déposé son rapport le 30 juin 2011.

Par exploits d'huissier en date des 13, 14 et 15 février 2012, la SPA a fait assigner devant le tribunal de grande instance d'Aix en Provence, Monsieur [T] [G], la société GAGNERAUD CONSTRUCTION et la société SOCOTEC aux fins de les voir déclarés responsables des désordres affectant l'installation et condamnés solidairement à lui payer diverses sommes au titre des travaux de reprise, du remboursement des frais annexes et de dommages intérêts complémentaires.

Par jugement en date du 11 février 2014, le tribunal de grande instance d'Aix en Provence a :

- débouté la SPA de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la SPA aux dépens, incluant les frais d'expertise, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement, ainsi qu'à payer à chacun des défendeurs la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SPA a interjeté appel à l'encontre de cette décision par déclaration reçue au greffe le 28 février 2014.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 27 mai 2014, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions, la SPA demande à la cour au visa des articles 1792 et suivants du code civil :

- de réformer la décision déférée,

- de dire y avoir lieu de retenir la responsabilité des intimés dans les désordres et dommages connus sur l'ouvrage et qui le rendent impropre à sa destination,

- de condamner solidairement les intimés à garantir les désordres connus en prenant en charge leur réparation intégrale, soit les travaux confortatifs préconisés par l'expert, consistant en l'installation d'une mini station d'épuration (de traitement des effluents), travaux chiffrés à la somme de 86 612 € TTC, incluant le coût de la maîtrise d'oeuvre,

- de condamner également solidairement les intimés à payer à la concluante :

° la somme de 18 498 € TTC au titre du remboursement des frais occasionnés par les opérations de vidage de la fosse et de curage des canalisations, à parfaire en fonction des nouveaux frais engagés depuis l'expertise et devant être engagés tant que les travaux de réparation n'auront pas été faits,

° la somme de 39 894,48 € TTC au titre du remboursement d'achats de nettoyeurs haute pression, en pure perte,

° la somme de 30 000 € à titre de dommages intérêts en réparation des préjudices matériel et moral subis du fait des désordres connus (conditions de travail subies durant plusieurs années,...),

- de condamner les requis à payer à la concluante la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens, incluant les frais d'expertise,

- 'd'assortir le jugement à intervenir de l'exécution provisoire'.

Par ses dernières conclusions notifiées le 9 juillet 2015, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions, Monsieur [G] demande à la cour :

- de confirmer la décision déférée,

- de rejeter toutes demandes à l'encontre du concluant,

- subsidiairement,

° de rejeter la demande d'indemnisation à hauteur de 30 000 € sollicitée en réparation des préjudices matériel et moral subis,

° de condamner la société SOCOTEC à relever le concluant des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, en application de l'article 1382 du code civil,

- de condamner tout succombant aux entiers dépens, incluant les frais d'expertise, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement, ainsi qu'au paiement de la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société GAGNERAUD Construction, par ses dernières conclusions notifiées le 10 juillet 2014, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions, demande à la cour :

- de juger mal fondé l'appel de l'association SPA de Salon de Provence dirigé contre la concluante en l'absence d'impropriété à destination de l'installation d'assainissement à sa destination, avec un nettoyage au karcher des boxes des animaux,

- subsidiairement,

° de dire que la conception d'une mini station ne relevait pas de la compétence de la concluante,

° de dire que la concluante n'a pas participé à la conception de la filière d'assainissement et n'a pas été informée des évolutions antérieures du projet,

° de dire que les malfaçons mineures du réseau d'évacuation des déchets sont sans lien causal avec les désordres liés au débordement de la fosse obstruée,

° de confirmer la décision déférée en ce qu'elle n'a pas retenu la responsabilité décennale de la concluante et n'est pas entrée en voie de condamnation à son encontre,

° de débouter l'association SPA de Salon-de-Provence et de sa région, de son appel en tant que dirigé à l'encontre de la concluante,

° de débouter de même toute partie qui solliciterait la garantie de ce chef de la concluante, en l'absence de toute faute de la concluante en relation avec les désordres allégués,

-plus subsidiairement,

° de dire injustifiée en son principe et son montant l'indemnisation complémentaire de 30'000€ sollicitée par l'association SPA de Salon-de-Provence et de sa région,

° confirmant le jugement déféré, de rejeter l'appel de l'association SPA de Salon-de-Provence et de sa région de ce chef,

° à tout le moins de juger que cette indemnisation ne saurait excéder la somme de 5000 €,

-très subsidiairement, au visa de l'article 1382 du Code civil, dans l'hypothèse où la cour jugerait l'installation conçue avec nettoyage à haute pression des boxes des animaux, impropre à sa destination,

° de juger que 'la société SOCOTEC et Monsieur [G] auraient alors commis des fautes dans la définition de la filière d'assainissement pour la première du fait manqué à leur obligation de conseil envers le maître de l'ouvrage',

° de juger que ces fautes contractuelles sont constitutives à l'égard de la concluante, de fautes délictuelles,

° de condamner la société SOCOTEC et Monsieur [G] à relever indemne la concluante de toutes condamnations en principal, frais et intérêts, y inclus au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

- de condamner l'association SPA de Salon-de-Provence et de sa région et/ou tout contestant, à payer à la concluante la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement.

Par ses dernières écritures notifiées le 28 juillet 2014, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et des prétentions, la société SOCOTEC France demande à la cour :

' à titre principal au visa des articles 1792 et suivants, 1134 et suivants du code civil :

° de confirmer en toutes ses dispositions la décision déférée,

° de dire que la concluante n'a été missionnée qu'en amont du chantier pour la réalisation d'une étude d'impact environnemental,

° de dire qu'aucune mission ne lui a été confiée au titre du chantier de travaux de 2001, notamment au titre du fonctionnement des installations,

° de dire que les avis formés par la concluante étaient limités aux problématiques environnementales d'exploitation du site sous contrôle de l'autorité administrative,

° de dire que dans ce cadre, la concluante n'est pas liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage,

° de dire irrecevables les demandes formées par la SPA à l'encontre de la concluante sur le fondement décennal,

° de dire que les désordres allégués sont sans rapport avec la mission confiée à la concluante pour le respect des contraintes environnementales,

° de dire que la SPA ne justifie d'aucun préjudice indemnisable,

' subsidiairement, au visa de l'article 1382 du code civil,

de condamner solidairement Monsieur [G] et la société GAGNERAUD CONSTRUCTION à relever la concluante indemne de toutes condamnations,

' en tout état de cause, de condamner la SPA et tout succombant à payer à la concluante la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement.

La clôture de la procédure est en date du 25 août 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La SPA fonde ses demandes sur les articles 1792 et suivants du code civil, ainsi que sur le défaut d'information et de conseil.

L'application de l'article 1792 du code civil suppose un contrat de louage d'ouvrage et des dommages compromettant la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination, en l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement.

La société SOCOTEC fait valoir à juste titre qu'elle n'était pas liée avec la SPA par un contrat de louage d'ouvrage, dès lors qu'elle est intervenue avant la réalisation des travaux, n'a pas participé au chantier et avait pour mission d'analyser l'impact du projet sur l'environnement conformément à l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 alors applicable, en formulant des observations pour supprimer ou réduire le dit impact, son étude constituant un élément nécessaire du dossier de demande d'autorisation d'exploiter présenté par la SPA ;

sa mission n'incluait pas l'analyse des contraintes d'exploitation de la SPA.

Il s'ensuit que sa responsabilité ne peut être recherchée par cette dernière sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, ou sur celui du manquement au devoir d'information et de conseil.

La décision déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a débouté la SPA de ses demandes à l'encontre de la société SOCOTEC.

Il résulte par ailleurs du rapport d'expertise judiciaire, qui comme l'a retenu le tribunal, doit servir de base d'appréciation pour statuer sur les demandes de la SPA, ayant été établi au contradictoire de l'ensemble des parties à la différence du rapport émanant de la société ECTI 13, établi à la demande de la SPA et dont l'analyse, non étayée par d'autres pièces, n'a pas été reprise par Monsieur [E], les éléments suivants :

- le refuge accueille entre 180 et 200 animaux ;

- l'installation d'assainissement est constituée d'un collecteur en PVC de diamètre 125 et d'un dégrilleur manuel par chenil, de deux collecteurs principaux en PVC de diamètre 160, d'un dégrilleur entrée de fosse, d'une fosse toutes eaux de 15 m3 et d'un traitement par épandage classique (5 drains de diamètre 100 mm et de 30 m de longueur unitaire) ;

- il n'a pas été constaté lors des opérations d'expertise, d'engorgement du réseau, ni de résurgence particulière due à une malfaçon du réseau ;

l'inspection vidéo réalisée n'a pas montré de désordres particuliers sur les canalisations, à l'exception de quelques contrepentes dont les conséquences ne peuvent pas justifier les bourrages et colmatages allégués ;

les seuls désordres constatés concernaient un tronçon écrasé en aval d'un regard, écrasement consécutif à une cause extérieure à l'installation ;

- l'étude hydrogéologique de Monsieur [J] prévoyait 14 drains de 30 ml, une fosse de 25 m3, un épandage de 350 m² nécessitant une surface disponible de 850 m² ;

Monsieur [G] a demandé à la SPA d'acquérir des terrains adjacents pour respecter la surface d'épandage préconisée par l'étude de Monsieur [J], mais cette acquisition n'a pas eu lieu ;

dans son étude d'impact, la société SOCOTEC, eu égard à une surface disponible de 300 m² pour l'épandage, a ramené le volume journalier des eaux à traiter de 11 à 3 m3, et a préconisé de nettoyer les chenils par des nettoyeurs haute pression pour respecter ce débit ;

la SPA a procédé à l'achat de tels nettoyeurs selon factures des 30 novembre 1999 et 6 janvier 2000, après avoir transmis les devis au maître d'oeuvre le 17 novembre 1999, mais il n'a pas été possible d'établir si ces nettoyeurs avaient été utilisés avec satisfaction avant le démarrage des travaux ;

le marché de travaux signé avec la société GAGNERAUD Construction concerne une installation d'assainissement dimensionnée pour un volume d'eau à traiter de 3m3 par jour ;

la SPA est cependant revenue à un lavage traditionnel des chenils à l'eau courante, le lavage à l'aide des nettoyeurs n'étant pas adapté au lavage des chenils compte-tenu des contraintes d'hygiène et rendant difficile la circulation des déjections dans les canalisations du fait du faible volume d'eau utilisé pour le nettoyage,

de sorte que le débit mesuré lors de l'expertise est de l'ordre de 13 m3 par jour, soit un volume quatre fois supérieur au dimensionnement de l'installation ;

il en résulte que le temps de séjour dans la fosse est de l'ordre d'une journée, ce qui est insuffisant pour permettre la dégradation des matières par les bactéries et que le rejet des effluents non traités dans l'épandage conduit au colmatage des drains et au débordement de la fosse, d'où la mise en charge régulière des canalisations situées en amont de la fosse et l'obligation de vider régulièrement celle-ci (tous les mois environ au lieu des quatre ans ), ainsi que de procéder à une intervention de curage du réseau ;

- le sous-dimensionnement de l'installation de traitement rend l'ouvrage impropre à sa destination compte tenu du type de lavage employé ;

- pour la surface existante disponible pour l'épandage, il était possible de dimensionner l'installation à son débit actuel, soit 13 m3, à condition d'utiliser une filière qui traite les effluents avant leur rejet dans le sol (micro station et tranchée filtrante ou fosse toutes eaux et lit filtrant non traité), choix qui n'a pas été proposé.

Il se déduit de ces éléments que l'origine des désordres ne réside pas dans un sous-dimensionnement de l'installation, qui est correctement dimensionnée si le nettoyage est effectué avec un jet à haute pression, ni davantage dans un défaut d'exécution des travaux, mais dans un non respect par la SPA des conditions d'utilisation de l'ouvrage réalisé.

Il s'ensuit que les désordres présentés par l'installation ne sont pas imputables à Monsieur [G] et à la société GAGNERAUD Construction, et que la responsabilité de ces deux constructeurs liés avec la SPA par un contrat de louage d'ouvrage ne peut être recherchée sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

Contrairement à ce que soutient la SPA dans ses conclusions, les dates d'achat des nettoyeurs à haute pression (30 novembre 1999 et 6 janvier 2000) établissent qu'elle n'a pas eu recours à ces derniers pour tenter de remédier aux problèmes rencontrés, puisque ces achats ont eu lieu avant le dépôt du dossier de demande d'autorisation d'exploiter le refuge auprès de la préfecture ( l'arrêté préfectoral prescrivant l'ouverture de l'enquête publique en mairie de [Localité 1] étant en date du 8 janvier 2001) et avant la signature du marché de travaux avec la société GAGNERAUD Construction (21 juin 2001) ;

elle a par ailleurs sollicité et obtenu l'autorisation préfectorale sur la base de l'étude d'impact de la société SOCOTEC, qui préconisait la réduction conséquente du volume des eaux de nettoyage du refuge, par l'utilisation d'un système de jet sous pression type karcher, de façon à supprimer ou à défaut limiter et compenser les inconvénients de celui-ci concernant la pollution de l'eau, ce qu'elle ne pouvait ignorer ;

il ne peut cependant en être déduit qu'elle connaissait alors les conséquences sur son exploitation qui allaient résulter de ce type de nettoyage, dont, contrairement à ce que soutient Monsieur [G], aucun élément ne permet de retenir qu'elle l'ait expérimenté avant l'obtention de l'autorisation ;

or, il appartenait à Monsieur [G], dont le contrat de maîtrise d'oeuvre n'a été produit ni en cours d'expertise, ni dans le cadre de l'instance, mais qui ne conteste pas avoir été investi de sa mission avant même l'étude hydrogéologique réalisée par Monsieur [J] à l'origine de laquelle il indique avoir été, comme de l'étude d'impact confiée à la société SOCOTEC, de vérifier avant le dépôt du dossier en préfecture que les préconisations de cette dernière étaient compatibles avec les contraintes d'exploitation de la SPA et dans la négative de rechercher si une autre solution technique était possible, ce que l'expertise a établi ;

Monsieur [G] ne peut utilement soutenir sur ce point avoir satisfait à ses obligations aux motifs qu'il avait sollicité Monsieur [J] et la société SOCOTEC, alors que la spécificité du champ d'intervention de cette dernière ne pouvait le dispenser de la vérification ci-dessus.

Il s'ensuit que la SPA est fondée à rechercher la responsabilité de Monsieur [G] pour manquement au devoir de conseil, en application de l'article 1147 du code civil.

La décision déférée sera en conséquence infirmée en ce qu'elle a débouté la SPA de sa demande de ce chef.

La SPA doit en revanche être déboutée de ses demandes à l'encontre de la société GAGNERAUD Construction, à l'encontre de laquelle aucun manquement à son obligation de conseil n'est caractérisé, les travaux commandés étant conformes à l'autorisation préfectorale accordée, étant techniquement réalisables et utilisables et ayant été avalisés par un maître d'oeuvre.

La décision déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a débouté la SPA de ses demandes à l'encontre de la société GAGNERAUD Construction.

L'expert judiciaire a évalué le coût des travaux de reprise consistant à installer une mini station de traitement des effluents à la somme de 78 739 € TTC, outre le coût de la maîtrise d'oeuvre, soit 7873 € ;

il a par ailleurs retenu que le dysfonctionnement de l'installation avait pour conséquence des opérations très fréquentes de vidage de la fosse et de curage des canalisations pour un montant de 18 498 € TTC, pour la période de septembre 2001 à janvier 2011.

Monsieur [G] sera condamné au paiement de ces sommes, auxquelles il convient d'ajouter le coût d'achat des nettoyeurs haute pression, soit la somme de 39 894,48 € TTC, non contestée par Monsieur [G] et dont les factures ont été produites dans le cadre de l'expertise judiciaire ;

la SPA doit en revanche être déboutée du surplus de sa demande de ce chef concernant les frais à venir jusqu'à réalisation des travaux, frais qu'elle n'a pas chiffrés et pour lesquels la demande est en conséquence indéterminée.

La SPA doit également être déboutée de sa demande de dommages intérêts au titre 'des préjudices matériel et moral subis du fait des désordres connus (conditions de travail subies durant plusieurs années', faute de démontrer la réalité de ces préjudices, les attestations produites décrivant le travail des salariés mais ne caractérisant pas un préjudice en lien avec le choix constructif effectué.

Monsieur [G] doit par ailleurs être débouté de son appel en garantie à l'encontre de la société SOCOTEC, la preuve d'une faute commise par celle-ci n'étant pas rapportée eu égard à la mission qui lui avait été confiée.

Les dépens de première instance incluant les frais d'expertise judiciaire et les dépens d'appel seront mis à la charge de Monsieur [G], qui sera débouté en conséquence de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

il n'est pas inéquitable de le condamner sur ce fondement à payer à la SPA, la somme de 3000 €.

L'équité ne justifie pas l'application de ce texte en cause d'appel, au profit des autres parties.

La cour rappelle que s'agissant d'une instance d'appel, la demande d'exécution provisoire est sans objet, le pourvoi en cassation n'étant pas suspensif d'exécution.

PAR CES MOTIFS :

La cour d'appel, statuant publiquement, contradictoirement,

Infirme la décision du tribunal de grande instance d'Aix en Provence en date du 11 février 2014,

excepté en ce qu'elle a débouté l'association Société Protectrice des Animaux de [Localité 1] et de sa région de ses demandes à l'encontre de la SA SOCOTEC France et de la SAS GAGNERAUD Construction,

et a condamné l'association Société Protectrice des Animaux de [Localité 1] et de sa région à verser à celles-ci une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que Monsieur [T] [G] a manqué à son devoir de conseil à l'égard de l'association Société Protectrice des Animaux de [Localité 1] et de sa région.

Condamne Monsieur [T] [G] à payer à l'association Société Protectrice des Animaux de [Localité 1] et de sa région :

- la somme de 86 612 € TTC au titre des travaux de reprise de l'installation,

- la somme de 18 498 € TTC au titre des sommes exposées pour le vidage de la fosse et le curage des canalisations,

- la somme de 39 894,48 € TTC au titre des sommes exposées pour l'achat des nettoyeurs haute pression.

Déboute l'association Société Protectrice des Animaux de [Localité 1] et de sa région du surplus de ses demandes.

Déboute Monsieur [T] [G] de son appel en garantie à l'encontre de la SA SOCOTEC France.

Condamne Monsieur [T] [G] aux dépens de première instance incluant les frais d'expertise judiciaire, ainsi qu'aux dépens d'appel, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour leur recouvrement.

Condamne Monsieur [T] [G] à payer à l'association Société Protectrice des Animaux de [Localité 1] et de sa région la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit des autres parties.

Dit que le greffe adressera une copie du présent arrêt à l'expert, Monsieur [P] [E].

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre b
Numéro d'arrêt : 14/04247
Date de la décision : 22/10/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3B, arrêt n°14/04247 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-10-22;14.04247 ?
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