COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT EN MATIERE REGLEMENTAIRE
DU 17 SEPTEMBRE 2015
J.J.B
N° 2015/17D
Rôle N° 14/24094
[E] [M]
C/
CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE NICE
MINISTERE PUBLIC AIX EN PROVENCE
Grosse délivrée le :
à :
Me Thomas D'JOURNO
Décision déférée à la Cour :
Décision du Conseil de l'ordre des avocats au barreau de NICE en date du 01 Décembre 2014.
APPELANT
Monsieur [E] [M]
né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 1]
comparant en personne,
assisté de Me Thomas D'JOURNO, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE NICE,
Palais de justice
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Valentin CESARI, bâtonnier en exercice.
En présence du
LE PROCUREUR GÉNÉRAL
PRÈS LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
[Adresse 2]
représenté par Monsieur Thierry VILLARDO, Avocat général
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue en Chambre du Conseil, les parties n'ayant pas demandé la publicité des débats, le 26 Juin 2015 en audience solennelle tenue dans les conditions prévues par l'article
R 312-9 du code de l'organisation judiciaire devant la Cour composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
M. Jean-Jacques BAUDINO, Conseiller
Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller
Mme Marie-José DURAND, Conseiller
M. Benoît PERSYN, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Septembre 2015.
Ministère Public : Monsieur Thierry VILLARDO, Avocat général, présent uniquement lors des débats
ARRÊT
Contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Septembre 2015.
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. Jean-Jacques BAUDINO, conseiller, est entendu en son rapport,
Me Thomas D'JOURNO, conseil de M. [E] [M], appelant, est entendu en sa plaidoirie,
M. Le bâtonnier [D] [P], représentant le Conseil de l'Ordre des avocats au barreau de NICE et en sa qualité de bâtonnier est entendu en ses observations,
M.Thierry VILLARDO, avocat général, est entendu en ses réquisitions,
M. [E] [M] a eu la parole en dernier.
Sur quoi, les débats sont déclarés clos et l'affaire mise en délibéré, les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe de la cour le 17 septembre 2015.
EXPOSE DU LITIGE
Par lettre en date du premier octobre 2014 , [E] [M] a saisi le Conseil de l'Ordre des avocats du barreau de Nice afin de solliciter son inscription au tableau de l'ordre des avocats sur le fondement de l'article 98 alinéa 3 du décret 91-1197 du 27 novembre 1991.
[E] [M] a exposé être titulaire d'une maîtrise en droit obtenue en 1990 à l'université de Droit de [Localité 2] - [1] et remplir les conditions de l'article 98 alinéa 3 précité , tenant en particulier à la pratique professionnelle d'au moins 8 ans en qualité de juriste d'entreprise au sein de plusieurs entreprises du secteur du Bâtiment et des Travaux publics du 01/01/2001 au 01/09/2011.
Le rapporteur désigné par le conseil de l'ordre a conclu qu'il n'était pas démontré après examen de l'ensemble des pièces fournies de l'existence au sein des entreprises en question d'une activité exclusive de juriste exercée à l'intérieur d 'un service spécialisé.
Le rapporteur a souligné qu'hormis pour la période du 1/10/2007 au 31/08/2011 où [E] [M] a été embauché en qualité de responsable juridique de la filiale SPIE SUD EST ni sur les contrats de travail ni sur les bulletins de salaires , la mention de juriste n'est portée mais celle de 'responsable administratif contrat '.
Par décision du premier décembre 2014 le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Nice a rejeté la demande de [E] [M] comme ne remplissant pas les dispositions de l'article 11 de la loi du 31/12/1971 et plus particulièrement celles dérogatoires de l'article 98 alinéa 3 du décret du 27/11/1991.
Le conseil de l'ordre a constaté que [E] [M] n'avait pas rapporté la preuve d'un exercice pendant huit ans en qualité de juriste au regard des mentions portées sur ses bulletins de salaires et ses contrats de travail pendant la période de référence du 01/01/2001 au 31/07/2011.
Le conseil de l'ordre a ajouté que la mention de 'Responsable Administration Contrat' démontre qu'il n'était pas placé dans un service juridique spécialisé de l'entreprise mais sous l'autorité d'un directeur administratif et financier dépendant de la direction administrative et financière sauf pour la période du 1/10/2007 au 31/08/2011 soit 3 ans et 11 mois au sein de la société SPIE-SUD EST où lafonction de juriste est mentionnée sur les bulletins de salaire et le contrat de travail.
[E] [M] a formé recours le 23/12/2014.
Par conclusions contradictoires en date du 29/01/2015 il demande à la cour de :
- dire et juger que [E] [M] justifie pleinement de sa qualité de juriste d'entreprise pendant une pèriode de 10 ans et 8 mois du 1/01/2001 au 31/08/2011.
- dire et juger que [E] [M] a exercé sa fonction au sein d'un service juridique chargé uniquement au sein des entreprises qui l'ont employé des problèmes juridiques posés par leur activité.
- dire et juger que [E] [M] remplit de ce fait l'intégralité des conditions fixées par l'article 98 alinéa 3 du décret 91-1197 du 27/11/1991.
- annuler la décision du conseil de l'ordre des avocats au barreau de Nice en ce qu'il a rejeté la demande de [E] [M] à être admis à l'exercice de la profession d'avocat
- juger que sous réserve de satisfaire aux conditions posées par l'article 98-1 du décret du 91-1197 du 27/11/1991 [E] [M] est admis à prêter serment et à être inscrit au tableau de l'ordre des avocats au barreau de Nice pour y exercer la profession d'avocat.
Il soutient que la société SPIE-SUD EST comportait bien un Service Juridique Spécialisé au sein duquel il a exercé , en toute autonomie , une fonction exclusive de juriste , du 01/01/2001 au 31/08/2011.
Par conclusions contradictoires en date du 30/04/2015 le Procureur Général prés la Cour d'Appel d'Aix en Provence est d'avis que [E] [M] semble rapporter la preuve , par les multiples documents produits , en particulier les attestations de son employeur , qu'il a exercé pendant au moins huit ans, et à titre exclusif , les fonctions de juriste d'entreprise dans des services spécialisés et structurés, chargés de connaître et de résoudre les problèmes juridiques nés d'une activité plus ample , au sein d'une entreprise et par la voie d'une division rationnelle du travail , et qu'il a exercé des fonctions de responsabilité de niveau cadre.
Le Procureur Général demande à la cour de faire droit à la demande de [E] [M] .
Par conclusions contradictoires en date du 11/06/2015 l'ordre des avocats du barreau de Nice demande à la cour de confirmer la décision de rejet de la demande d'admission à prêter serment de [E] [M] sur le fondement des dispositions de l'article 98 alinéa 3 du décret 91-1187 du 27/1/1991 et de condamner [E] [M] aux dépens.
L'ordre des avocats du barreau de Nice considère qu'hormis pour la période du 1/10/2007 au 31/08/2011 soit un peu moins de 4 ans , [E] [M] ne justifie pas d'une activité juridique dans ses emplois précédents.
Le conseil de l'ordre fait valoir que les attestations rédigées par les supérieurs hiérarchiques de [E] [M] et qui sont produites par celui ci démontrent qu'il dépendait hiérarchiquement , aux termes mêmes de ses contrats de travail , de la direction administrative et financière , mais aucunement d'un service juridique spécialisé tel que le rappelle la cour de cassation notamment dans un arrêt du 10/09/2014.
MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes de l'article 98 alinéa 3 du décret du 27 novembre 1991 , sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les juristes d'entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein du service juridique d'une ou plusieurs entreprises.
Le conseil de l'ordre des avocats du barreau de Nice admet dans ses écritures que [E] [M] remplit les conditions d'exercice prévues par le décret pour la période du 1/07/2007 au 31/08/2011 soit un peu moins de quatre ans.
Pour la période précédente [E] [M] a travaillé au sein de l'entreprise STPE , filiale de SPIE SUD EST du premier janvier 2001 au 31 /12/2003 , puis au sein de l'entreprise SPIE-SUD EST du 1/01/2004 au 30/09/2007.
[E] [M] précise dans sa demande d'admission qu'entre le 1/01/2001 et le 31/12/2003 la dénomination de son emploi sur ses bulletins de salaire est 'cadre administratif'et qu'entre le 1/01/2004 et le 30/09/2007 la dénomination de son emploi sur ses bulletins de salaire est 'responsable administration contrat'.
Les contrats de travail établis pour ces périodes portent la mention de 'responsable administration contrat'.
[E] [M] soutient que ces intitulés ne correspondent pas aux missions spécialisées et spécifiques de juriste qu'il a exercées , s'agissant d'un choix organisationnel de l'entreprise de rattacher hiérarchiquement le service juridique à la direction administrative et financière alors que fonctionnellement il était rattaché au responsable juridique de la filiale sud-est du fait du contenu de ses attributions.
Si les nombreuses attestations produites par [E] [M] émanant de cadres de ses anciennes entreprises et d'avocats établissent que [E] [M] a pu au sein de la direction administrative et financière en tant que responsable administration contrat exercé des missions de nature juridique pour partie durant cette période , elles sont insuffisantes pour établir que [E] [M] justifie avoir exercé au sein du service juridique de ces entreprises pendant la période en litige et ce au vu des contrats de travail et bulletins de paie de [E] [M] .
[E] [M] ne justifiant pas dans ces conditions de huit ans de pratique professionnelle au sein d'un service juridique , le recours qu'il a formé à l'encontre de la décision déféré sera rejeté.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire, publiquement, après débats en chambre du conseil, par mise à disposition au greffe.
Rejette le recours formé par [E] [M] à l'encontre de la décision du premier décembre 2014 du conseil de l'ordre des avocats au barreau de Nice.
Dit la procédure sans dépens.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT