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26/06/2015 | FRANCE | N°15/05322

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15e chambre a, 26 juin 2015, 15/05322


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 26 JUIN 2015



N° 2015/ 529













Rôle N° 15/05322







CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE





C/



[Z] [C]

[E] [M]

SCP [M]





















Grosse délivrée

le :

à : Me Sébastien BADIE



Me Romain CHERFILS



Me Philippe KLEIN
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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 17 Mars 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/00092.





APPELANTE



CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE prise en la personne de son représent...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 26 JUIN 2015

N° 2015/ 529

Rôle N° 15/05322

CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE

C/

[Z] [C]

[E] [M]

SCP [M]

Grosse délivrée

le :

à : Me Sébastien BADIE

Me Romain CHERFILS

Me Philippe KLEIN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 17 Mars 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/00092.

APPELANTE

CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Hélène JOUREAU, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [Z] [C]

né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 2], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Aude VAISSIERE, avocat au barreau de MARSEILLE

Maître [E] [M]

né en à , demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SCP [M], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 27 Mai 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier COLENO, Président

Madame Françoise BEL, Conseiller

Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller (rédacteur)

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Juin 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Juin 2015,

Signé par Monsieur Olivier COLENO, Président et Madame Ingrid LAVIGNAC, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte authentique du 30 mars 2010, la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE a consenti à M. [C] d'un prêt de 263'800 € remboursable en 300 mensualités avec une phase de différé total de remboursement de 2 ans, au TEG de 5,10 % , destiné à l'acquisition d'un appartement à [Localité 2] ayant donné lieu à inscription de privilège de prêteur de deniers et d'hypothèque conventionnelle.

Le 4 février 2014, la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE a fait délivrer à M. [C] , défaillant dans le règlement du prêt depuis le 5 avril 2012, un commandement de payer valant saisie immobilière portant sur l'appartement acquis ainsi que sur un deuxième appartement voisin du précédent, en recouvrement de la somme de 19'031,60 € restant due après que M. [C] ait procédé courant 2014 à deux paiements de 319'999,97 € sur les sommes provenant de la vente d'un autre bien.

Par acte du 10 avril 2014, la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE a fait assigner M. [C] à l'audience d'orientation du juge de l'exécution pour voir ordonner la vente forcée, M. [C] opposant à cette action la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels à raison du caractère erroné du TEG, le constat de l'absence de créance liquide et exigible détenue par la banque à son encontre, l'annulation et la mainlevée de la procédure de saisie immobilière et , reconventionnellement, la condamnation de la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE à lui rembourser la somme de 49'640,56 € versée indûment ainsi qu'à lui allouer celle de 25'000 € en réparation de son préjudice moral, la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE concluant au débouté de ces demandes ainsi qu'au rejet du rapport technique produit de façon non contradictoire par M. [C].

Par le jugement dont appel du 17 mars 2015 , le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Marseille a :

- prononcé la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels de l'acte de prêt du 30 mars 2010 et dit que cette nullité entraîne la substitution de l'intérêt légal au taux contractuel à compter de la date du prêt

- ordonné, en conséquence, la mainlevée du commandement valant saisie immobilière et sa radiation au fichier immobilier

- condamné la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE à restituer à M. [C] la somme de 49'640,56 € avec intérêts au taux légal à compter de la décision

- dit que le maintien de l'inscription au FICP n'avait plus lieu d'être

- débouté M. [C] de sa demande de dommages-intérêts

- condamné la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE à payer à M. [C] la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- déclaré les dépens frais privilégiés de vente

Le juge de l'exécution a retenu :

- que le paiement effectué le débiteur ne caractérise pas sa renonciation tacite à opposer au créancier la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels, cette renonciation devant revêtir un caractère exprès , certain et non équivoque pour produire effet

- que l'article 16 du code de procédure civile n'interdit pas de tenir compte des documents produits par les parties lorsque celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement, le rapport [L] communiqué par M. [C] ayant été soumis à la libre discussion

- que le TEG est irrégulier pour ne pas tenir compte des frais d'inscription des garanties à hauteur de 1306 € , celui-ci s'établissant à 5,15 % et non à 5,10 % comme indiqué à l'acte authentique de prêt

- que l'annulation du TEG et la substitution du taux d'intérêts conventionnels par le taux légal qui en est la sanction depuis l'origine du prêt rend débitrice la banque d'une somme de 49'640,56 € en trop versée par M. [C] à l'occasion des règlements qu'il a effectués courant 2014 à hauteur de 319'999,97 €

- que la sanction par la majoration de trois points du taux du prêt contractuellement prévu ne peut s'appliquer en présence d'un TEG erroné et sanctionnable en tant que tel.

- que M. [C] n'établit pas l'intention de nuire de la banque alors qu'il a cessé d'honorer les mensualités et que la déchéance du terme du prêt a été régulièrement prononcée le 3 octobre 2012, cette dernière ayant agi en se conformant à ses strictes obligations s'agissant de l'inscription au FICP.

Le 31 mars 2015, la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE a interjeté appel de ce jugement.

Le 7 avril 2015, la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE a déposé requête aux fins d'être autorisée à assigner à jour fixe.

Le 8 avril 2015, il a été fait droit à cette demande , l'assignation étant déposée au greffe le 27 avril 2015 suivant contre récépissé.

PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 26 mai 2015 , la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE demande à ce que l'arrêt à intervenir soit déclaré commun à Me [M] et à la société notariale à laquelle il appartient.

Elle soutient la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande indemnitaire de M. [C] et son infirmation pour le surplus.

Elle sollicite :

À titre principal :

- le rejet de la contestation relative à la nullité des intérêts conventionnels

- la fixation du montant de sa créance à la somme de 68'672,06 € (49'640,56 € au titre des intérêts restitués et 19'031,50 € selon le décompte arrêté au 10 octobre 2014)

À titre subsidiaire :

- la limitation à la somme de 1000 € de la sanction éventuellement prononcée au titre du caractère erroné du TEG

En tout état de cause :

- la vente forcée des biens saisis

- la condamnation de M. [C] aux entiers dépens et en paiement de la somme de 2000 €

sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE fait valoir :

- que l'ordre irrévocable de paiement donné par M. [C] au notaire chargé de la vente de l'un de ses biens consistant à verser , en deux fois, la somme arrondie de 320'000 € à la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE au titre du prêt et des intérêts courus empêchent que ceux-ci puissent être ultérieurement contestés, l'éventuelle inexactitude du taux d'intérêt appliqué ne pouvant concerner que la période postérieure au 17 septembre 2013, date du dernier décompte établi après ces paiements

- que le rapport d'expertise produit par M. [C] n'est pas contradictoire et doit être écarté des débats

- que l'inexactitude relevée du TEG se situe dans la limite admissible d'une décimale, la faiblesse de l'erreur de taux n'étant pas susceptible d'en provoquer l'invalidation

- que le calcul de ce taux sur une année de 360 ou 365 jours n'est pas de nature à le modifier pas plus que le taux de période qui est exact

- que la majoration du taux de l'intérêt légal due en cas de non-paiement à l'échéance est sans lien pris avec l'éventuelle fausseté du TEG

- qu'elle n'a commis aucune faute contractuelle pouvant donner lieu à un engagement de sa responsabilité

- que l'appel en déclaration d'arrêt commun du notaire rédacteur de l'acte de prêt est nécessaire dès lors que le jugement a prononcé la nullité des intérêts conventionnels mentionnés dans l'acte authentique pour non prise en compte des frais d'inscription de garantie pourtant déterminables.

**

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 27 mai 2015, M. [C] sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté sa demande en réparation de son préjudice moral, prétendant à l'octroi d'une somme de 25'000 € à ce titre.

Il sollicite, en tout état de cause, la condamnation de la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE aux entiers dépens et en paiement de la somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Subsidiairement, il conclut au report de la date d'adjudication et à l'octroi des plus larges délais de paiement pour s'acquitter de la dette

M. [C] fait valoir :

- que l'ordre irrévocable de paiement ne le prive pas de la possibilité de contester judiciairement l'objet de la créance

- que le rapport de l'expert qu'il a mandaté pour s'assurer de la régularité du TEG pratiqué

a été soumis à la discussion contradictoire des parties et n'a pas lieu d'être écarté

- que le TEG est affecté d' anomalies notamment la non intégration du coût des garanties qui entraînent sa fausseté

- que l'erreur de calcul est au moins égale à une décimale et encourt la sanction

- que la marge d'erreur d'une décimale a pour seul objet de déterminer le degré de précision dans l'expression du TEG

- que le taux de période du TEG sur 360 jours est erroné et par conséquent sanctionnable nonobstant grief, le principe étant que le taux d'intérêt conventionnel doit être calculé sur la base d'une année civile

**

Par conclusions déposées et notifiées le 22 mai 2015, Me [E] [M] et la SCP [M] soutiennent l'irrecevabilité de la demande en déclaration d'arrêt commun, le débouté de la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE de ses demandes et la condamnation de cette banque aux dépens et en paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Me [E] [M] et la SCP [M] font valoir, au visa de l'article 555 du code de procédure civile, qu'il n'existe aucune évolution du litige impliquant leur mise en cause pour la première fois devant la cour d'appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1° La CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE demande à ce que soit écarté des débats le rapport établi par M [L] produit par M. [C] à raison de son caractère non contradictoire.

Cependant, l'article 16 du code de procédure civile dispose que le juge doit tenir compte des moyens, des explications et des documents produits par les parties à la seule condition que celles-ci ait été à même d'en débattre contradictoirement.

Le rapport communiqué par M. [C], qui n'a pas le caractère d'une expertise judiciaire, a été communiqué à la banque et soumis à la libre discussion des parties et , ainsi , la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE a pu en apprécier la teneur et en contester les conclusions. Cette seule circonstance suffit à rendre recevable ce document.

2° La CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE PROVENCE ALPES CORSE fait valoir que l'ordre de paiement donné par M. [C] à son notaire à hauteur d' un montant de 320'000 € emporte acquiescement à la dette et renonciation, de sa part, à la contester.

Cependant en donnant à son notaire l'ordre de procéder au remboursement du prêt, M. [C] a seulement consenti au règlement d'une dette dont il reconnaît le principe afin ne pas être contraint sous pression à s'exécuter par les voies de droit et au prix de la vente forcée de son bien immobilier.

Il ne s'évince pas de ce paiement qu'il ait aussi entendu abandonner son droit de contester l'étendue de la dette à travers son mode de calcul et l'exactitude du taux d'intérêt appliqué, lequel , du reste , est soumis à la réglementation protectrice du code de la consommation favorable aux intérêts des usagers.

M. [C] ne critique pas la motivation du premier juge tenant au caractère certain, exprès et non équivoque que doit revêtir la renonciation à un droit, fût-elle tacite, et le jugement sera confirmé en ce qu'il a considéré que le simple paiement ne suffisait pas à la sous entendre.

3° Aux termes de de l'article L 313-1 du code de la consommation :

« Dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que se soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels.

Toutefois, pour l'application des articles L. 312 - 4 à L 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers publics ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.

Pour les contrats de crédit entrant dans le champ d'application du chapitre premier du cours présent titre, le taux effectif global, qui est dénommé' taux annuel effectif global' , ne comprend pas les frais d'acte notarié.

En outre, pour les prêts qui font l'objet d'un amortissement échelonné, le taux effectif global doit être calculé en tenant compte des modalités de l'amortissement de la créance. »

Aux termes de l'annexe d de l'article R 313-1 du code de la consommation :

' le calcul est exprimé avec une exactitude d'au moins une décimale. Lorsque le chiffre est arrondi à une décimale particulière, la règle suivante est d'application : si le chiffre de la décimale suivant cette décimale particulière est supérieur ou égal à 5, le chiffre de cette décimale particulière sera augmenté de 1"

M [C] produit aux débats un rapport d'analyse financière établi par M. [H] [L], expert en analyse mathématique et financière auprès de la chambre de commerce et d'industrie de [Localité 1], dont il ressort que les frais liés à la garantie hypothécaire du prêt n'ont pas été intégrés par la CAISSE D'ÉPARGNE dans le calcul du TEG . Ces frais sont d'un montant de 1306 € et étaient déterminables au moment où l'acte authentique a été dressé.. En intégrant cette somme de 1306 € dans le calcul du TEG , le TEG réel s'élève à 5,15 % contre 5,10 % celui mentionné à l' acte.

La banque , qui ne discute pas ce fait, soutient que l' erreur qui en résulte se situe cependant dans la fourchette de tolérance admissible d'une décimale dont il est fait état à l'annexe d de l'article R 313-1 du code de la consommation.

La question posée est par conséquent celle du seuil d'inexactitude à partir duquel le TEG doit être sanctionné par l'annulation de la convention d'intérêts conventionnels avec pour conséquence l'application du taux d'intérêt légal en ses lieu et place.

L'annexe de l'article R 313-1 du code de la consommation répond à cette question en précisant que le résultat du calcul est exprimé avec une exactitude d'au moins une décimale.

En l'espèce , le taux qui figure dans l'acte authentique est de 5,10 % , soit un chiffre d'un degré de précision de deux décimales après la virgule.

Les calculs effectués par M.[L] portent ce taux à 5,15 % après comptabilisation des frais de garantie omis . La banque ne contredit pas cette analyse en se prévalant d'un avis documenté contraire ou simplement différent si bien qu'il y a lieu de tenir cette valeur pour exacte comme effectuée par un spécialiste reconnu en la matière.

La réponse à la question sur le niveau de l'erreur admissible au centre du débat est donnée par le deuxième alinéa de l'annexe d de l'article R 313-1 du code de la consommation.

Celui-ci précise que lorsque le chiffre est arrondi à une décimale particulière, la règle veut que ce chiffre soit augmenté de 1 lorsqu'il est suivi d'une décimale supérieure ou égale à 5 . Cette dernière disposition est illustrée par des exemples fournis par l'annexe du décret numéro 2002 -928 du 10 juin 2002 . Il ressort des nombreux exemples présentés dans cette annexe , que le prêteur doit choisir, avec un minimum d'une décimale après la virgule, le taux appliqué au prêt.

Dans le cas d'espèce, la CAISSE D'ÉPARGNE a retenu cette valeur à 5,10 %, soit avec une précision de deux décimales après la virgule.

En appliquant les dispositions relatives à l'arrondi de l'annexe d du deuxième alinéa de l'article R 313-1 du code de la consommation , alors que le taux réellement appliqué par la banque ressort à 5,15 %, le taux affiché par celle-ci aurait dû s'établir à 5, 20 %.

En effet, la deuxième décimale après la virgule étant de 5, celle qui la précédait devait être augmentée de 1 et être ainsi portée à 2 , le taux d'intérêt appliqué ressortant à 5,20 % puisqu'il était réellement de 5,15 % et que la règle de l'arrondi imposait de le fixer à 5,20 %.

En tout état de cause, la banque , en choisissant le taux d'intérêt appliqué avec un degré de précision de deux décimales après la virgule, répond encore de l'inexactitude de cette deuxième décimale de 0,00 alors qu'elle devait être de 0,05 , l'erreur étant, dans ce cas, de cinq décimales

L'erreur dans le calcul du TEG est par conséquent au moins égale à une décimale, que l'on prenne pour référence la première décimale ou la deuxième décimale après la virgule, de sorte que cette erreur se situe au-delà du seuil admissible justifiant l'annulation du TEG, ceci ayant pour conséquence sa substitution par le taux légal, les intérêts majorés du taux légal n'ayant pas vocation à s'appliquer en présence d'un taux conventionnel inexact , le juge pouvant, en effet, aux termes de l'article R 313-3 du code de la consommation , exonérer en toutes circonstances le débiteur de cette majoration ou en réduire le montant , surtout et spécialement lorsque le taux conventionnel pratiqué par la banque se révèle inexact au détriment de l'emprunteur.

Par ailleurs , le taux de période du TEG retenu par la banque d'une année dite' lombarde' de 360 jours méconnaît la règle d'ordre public posée par les articles L313-1 et R 313-1 du code de la consommation d'un taux devant être calculé sur la base d'une année civile de 365 jours règle à laquelle il ne peut être dérogé par convention nouée entre les parties.

À cet autre titre, le TEG tel que mentionné à l'acte notarié pour une valeur de '5,10 % l'an', alors qu'il a été calculé par la banque sur 360 jours, est erroné.

Le jugement sera confirmé de ce chef, l'annulation du taux d'intérêt conventionnel et son remplacement par le taux d'intérêt légal entraînant remboursement par la banque des sommes indûment prélevées pour un montant, selon le décompte non contesté de M. [C], de 49'640,56 €.

Le jugement sera encore confirmé en ce qu'il a condamné la CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES CORSE à restituer à M. [C] cette somme et en ce qu'il a ordonné la mainlevée et la radiation d'un commandement de saisie immobilière dépourvu d' objet, la créance de M. [C] à l'encontre de la banque excédant celle revendiquée par cette dernière à son égard.

4° M [C] sera débouté de sa demande en dommages-intérêts à l'encontre de la banque qui a normalement engagé la procédure de saisie immobilière après que plusieurs mensualités n'aient pas été réglées par l'emprunteur entre avril et septembre 2012, les paiements postérieurs effectués par ce dernier pour régulariser la situation , intervenus tardivement en août et septembre 2014 et qui se sont révélés , après coup, suffisants à éteindre la dette une fois recalculée, n'étant pas de nature à caractériser la faute de la banque qui a agi , ou l'a fait, dans le respect des procédures applicables ainsi que l'a rappelé le premier juge dont le jugement sera confirmé de ce chef.

5° Les autres dispositions du jugement seront confirmées à l'exception de la charge des dépens qui seront intégralement supportés par la CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES CORSE qui succombe à l'action.

6° La CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES CORSE a appelé en déclaration d'arrêt commun le notaire rédacteur de l'acte authentique de prêt et la société notariale à laquelle il appartient sans toutefois formaliser de demande à leur encontre . En pareil cas, l'article 555 du code de procédure civile prévoit que cet appel en cause ne peut être envisagé que lorsque l'évolution du litige l'implique. Or, la circonstance que le TEG ait été erroné dans l'acte établi par le notaire était une donnée préexistante au litige , connue des parties, et dont la prise en considération n'est pas apparue à la seule faveur du prononcé du jugement de première instance. Cet appel en déclaration d'arrêt commun qui n'est pas justifié par l'évolution du litige sera rejeté.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions à l'exception de la charge des dépens et, statuant à nouveau de ce chef, condamne la CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES CORSE aux dépens de première instance.

Y ajoutant,

- déclare irrecevable la demande en déclaration d'arrêt commun formée par la CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES CORSE à payer à M. [C] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-condamne la CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES CORSE à payer à Me [E] [M] et la SCP [M] M. [C] ensemble la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples

-condamne la CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES CORSE aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 15e chambre a
Numéro d'arrêt : 15/05322
Date de la décision : 26/06/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 5A, arrêt n°15/05322 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-26;15.05322 ?
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