COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
3e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 25 JUIN 2015
N° 2015/217
Rôle N° 13/08895
[W] [I]
SA MAAF
C/
[T] [A]
[E] [G] [Z] épouse épouse [A]
[B] [Q] épouse épouse [A]
[D] [C]
Grosse délivrée
le :
à :
Me O. DUFLOT
Me O. TARI
Me WW. LESCUDIER
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 19 Mars 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 11/11001.
APPELANTS
Monsieur [W] [I],
demeurant [Adresse 7]
représenté et plaidant par Me Olivia DUFLOT de la SCP FRANCOIS CARREAU DUFLOT TRAMIER & AUDA, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substituée par Me Claire DER MATHEOSSIAN de la SCP FRANCOIS CARREAU DUFLOT TRAMIER & AUDA, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
SA MAAF
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège [Adresse 6]
représentée et plaidant par Me Olivia DUFLOT de la SCP FRANCOIS CARREAU DUFLOT TRAMIER & AUDA, avocate au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, substituée par Me Claire DER MATHEOSSIAN de la SCP FRANCOIS CARREAU DUFLOT TRAMIER & AUDA, avocate au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [T] [A]
né le [Date naissance 4] 1971 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 2]
représenté et plaidant par Me Olivier TARI de la SCP BBLM, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Anne DOSSETTO, avocate au barreau de MARSEILLE
Madame [E] [G] [Z] épouse [A]
née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 2],
demeurant [Adresse 2]
représentée et plaidant par Me Olivier TARI de la SCP BBLM, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Anne DOSSETTO, avocate au barreau de MARSEILLE
Madame [B] [Q] épouse [A]
née le [Date naissance 3] 1942 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 4]
représentée et plaidant par Me Olivier TARI de la SCP BBLM, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Anne DOSSETTO, avocate au barreau de MARSEILLE
Monsieur [D] [C]
né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 1]
représenté et plaidant par Me Wilfrid LESCUDIER de la SCP W & R LESCUDIER, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Carla SAMMARTANO de la SCP W & R LESCUDIER, avocate au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 22 Avril 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-François BANCAL, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
M. Jean-François BANCAL, Président (rédacteur)
Mme Patricia TOURNIER, Conseillère
Mme Marie-José DURAND, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Juin 2015
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Juin 2015,
Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige :
[T] [A] et son épouse sont propriétaires d'un appartement situé au premier étage d'un immeuble comportant un étage sur rez de chaussée, situé [Adresse 3], pour l'avoir acquis le 1.3.2002.
[B] [Q] épouse [A] est, en vertu d'un acte de donation partage du 5.10.1996, propriétaire des logements situés au rez de chaussée de cet immeuble.
[D] [C], propriétaire de l'immeuble voisin et contigu, situé au [Adresse 1], alors élevé d'un étage sur rez de chaussée, a entrepris de le surélever d'un étage.
Le 7.7.2007, [W] [I], assuré auprès de la S.A. MAAF, a établi pour lui un devis de travaux d'un montant de 83345,38€ TTC., puis fut chargé de les réaliser.
En 2008, en cours de travaux, les consorts [A] se sont plaints d'infiltrations et de fissurations survenues dans leur immeuble, qu'ils ont imputées aux travaux réalisés chez leur voisin.
Le 13.10.2008, [T] [A] a fait dresser par huissier de justice procès-verbal de constat.
Puis, par acte du 18.2.2009, les consorts [A] ont fait assigner en référé [D] [C] devant le président du tribunal de grande instance de Marseille aux fins de désignation d'un expert.
Par ordonnance du 3.4.2009, ce magistrat a ordonné une expertise et commis pour y procéder [K] [F].
L'expert a clôturé son rapport le 20.1.2011.
Saisi par assignations des 26.7.2011 et 4.8.2011, le tribunal de grande instance de Marseille a, par jugement rendu le 19.3.2013 :
- écarté la responsabilité de [D] [C] propriétaire voisin,
- retenu la seule responsabilité de [W] [I] dans la survenance des désordres affectant la maison des consorts [A],
- condamné in solidum [W] [I] et la S.A. MAAF à payer aux consorts [A]:
** 19659,74€ au titre des travaux de réparation des désordres,
** 8000€ 'à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudices confondues',
** 1000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné in solidum [W] [I] et la S.A. MAAF à payer à [D] [C] 1000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire,
- condamné in solidum [W] [I] et la S.A. MAAF aux dépens.
Le 29.4.2013 [W] [I] et la M.A.A.F interjetaient appel.
Par arrêt du 27.11.2014, la cour de ce siège a invité :
1° / les consorts [A] à produire l'original du constat d'huissier du 13.10.2008,
2°/ les parties à s'expliquer sur les fondements juridiques des demandes formulées, notamment, sur la responsabilité pour troubles anormaux de voisinage et son application éventuelle aux faits de la cause, tant à l'égard du propriétaire voisin qu'à l'égard de l'artisan auteur des travaux.
Vu les dernières conclusions avec bordereau de communication de pièces signifiées par le R.P.V.A. le 26.3.2015 par [W] [I] et la S.A. MAAF,
Vu les dernières conclusions avec bordereau de communication de pièces signifiées par le R.P.V.A. le 3.4.2015 par [D] [C],
Vu les dernières conclusions avec bordereau de communication de pièces signifiées par le R.P.V.A. le 3.4.2015 par les consorts [A],
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 7.4.2015,
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le trouble anormal de voisinage et les responsabilités :
Le droit pour un propriétaire de jouir de sa chose de la manière la plus absolue, sauf usage prohibé par la loi ou les règlements, est limité par l'obligation qu'il a de ne causer à la propriété d'autrui, aucun dommage dépassant les inconvénients normaux de voisinage.
Outre le propriétaire du fonds à l'origine du trouble, tout intervenant sur un chantier de construction, entrepreneur ou sous traitant, peut-être tenu au même titre que le maître de l'ouvrage et en dehors de toute faute, des désordres à l'immeuble voisin excédant la mesure des obligations de voisinage, résultant des travaux réalisés par lui.
Les constructeurs à l'origine des nuisances sont responsables de plein droit, vis à vis des voisins victimes, des troubles anormaux de voisinage, étant, pendant le chantier, considérés comme des voisins occasionnels des propriétaires lésés.
Il s'agit d'une responsabilité étrangère à la notion de faute, indépendante des autres régimes de responsabilité civile.
La responsabilité délictuelle des constructeurs peut également être engagée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, si des fautes des constructeurs sont à l'origine de désordres subis par l'immeuble voisin. Peuvent ainsi constituer des fautes à l'égard de tiers, des manquements des locateurs d'ouvrages à leurs obligations contractuelles.
Et le maître de l'ouvrage peut exercer un recours pour le tout à l'égard des constructeurs, s'il a été constaté qu'il n'était pas démontré, que ce maître de l'ouvrage ait été pleinement informé des risques de troubles au voisinage, qu'il ait entendu décharger les entreprises de leurs responsabilités et qu'il ait prescrit dans ces conditions la poursuite du chantier.
En l'espèce, les consorts [A], après l'arrêt avant dire droit rendu par la cour, se fondent désormais sur la responsabilité pour trouble anormal de voisinage, pour former, à titre principal, leurs demandes contre leur voisin, l'artisan chargé des travaux de surélévation et l'assureur de ce dernier.
Si [D] [C] n'a pas produit d'acte de propriété, il n'est contesté par aucune des parties qu'il est bien propriétaire de l'immeuble du [Adresse 1], contigu à celui des consorts [A], et qu'en qualité de maître de l'ouvrage il a entrepris la surélévation de son immeuble pour y créer un second étage, et confié à [W] [I], assuré auprès de la S.A. MAAF les travaux de surélévation.
Il résulte du procès-verbal de constat d'huissier avec photographies, dressé le 13.10.2008, et des recherches de l'expert [F], dont le sérieux, la compétence et l'impartialité ne sont contestés par aucune des parties, que c'est bien en raison des travaux entrepris par [D] [C] et exécutés par [W] [I] en 2008, que dans leur immeuble voisin, les consorts [A] ont subi d'importantes infiltrations d'eau qui se sont répétées, ainsi que des fissurations.
L'expert a notamment indiqué que le faîtage de la toiture à réaliser étant plus élevé que celui de la maison voisine, l'entrepreneur a 'rogné' le mur mitoyen pour édifier le mur en parpaings du pignon de l'étage contre l'axe de mitoyenneté et a réalisé des saignées dans ce mur, au niveau des planchers, pour créer des saignées destinées à asseoir des sommiers en béton devant recevoir les poutrelles des planchers et des chaînages en béton armé à chaque niveau.
Il ajoute que l'entrepreneur a également été obligé de déposer provisoirement les tuiles de la maison des consorts [A] afin de pouvoir bâtir sa pointe du pignon contre l'axe de mitoyenneté.
L'expert a cependant fait remarquer à l'entrepreneur que le pignon en l'état risquait de générer des infiltrations tant qu'il ne serait pas enduit.
Il a relevé en outre que si les travaux pouvaient être considérés comme ayant été réalisés conformément aux règles de l'art, tel n'était pas le cas pour les souches de cheminées de la propriété des consorts [A] qui n'ont pas été rehaussées à 0,40 m au-dessus du faîtage de la toiture de la construction surélevée.
(Page 19 du rapport).
Le technicien commis ajoute que l'eau s'infiltre par la souche de cheminée le plus en aval du versant côté [Adresse 5], qu'elle ruisselle sur le conduit de fumée dans les combles, les malons de couverts et s'écoule au droit de la solive ancrée dans le pignon. Il précise qu'un récipient en matière plastique a été mis en place pour recueillir l'eau. Il indique que des gouttes d'eau apparaissent ensuite sous un spot situé dans une niche de la chambre des époux [A].
(Page 20).
Il précise avoir constaté lui-même, le 1er novembre 2010, des fuites en provenance de la toiture de la propriété des consorts [A].
Il préconise :
- de rehausser les souches et conduits de cheminée situés à proximité du pignon mitoyen, afin qu'ils soient à 40 cm au-dessus du faîtage de la propriété de [D] [C],
- de remanier la couverture de la propriété des consorts [A] sur une largeur de 2 m à partir du pignon mitoyen,
- un traitement fongicide des solives affectées par les infiltrations,
- la remise en peinture des plafonds de la salle de bains et du palier du premier étage,
- ainsi qu'une remise en état de la maçonnerie du mitoyen,
ce qui correspond à des travaux d'un montant total de 19'659,74 € TTC.
Il estime que les travaux de reprise de la toiture et des souches de cheminée devraient durer 10 jours ouvrés et que les travaux de réfection des embellissements devraient durer 6 jours ouvrés (page 15 du rapport).
Si les appelants critiquent l'évaluation expertale, pour autant, il convient de rappeler qu'ils n'ont soumis aucun devis des travaux à réaliser, que ce soit devant l'expert ou devant la cour, et qu'au surplus, ils ne versent aucun rapport ou étude établis par un professionnel de la construction venant contredire l'analyse et l'évaluation faite par l'expert commis.
Au surplus, contrairement à ce qu'ils indiquent, les travaux ainsi décrits et évalués par l'expert ne concernent nullement la réfection de la totalité de la toiture, mais seulement la reprise de désordres ou de non-façons directement imputables aux travaux de surélévation entrepris par le propriétaire voisin et réalisés par [W] [I].
Il est donc clairement établi qu'à la suite des travaux de surélévation réalisés dans l'immeuble voisin du leur, les consorts [A] ont subi des inconvénients anormaux de voisinage imputables tant au propriétaire voisin, maître d'ouvrage de ces travaux, qu'à l'entreprise chargée de les réaliser, qui n'établit l'existence d'aucune cause exonératoire de responsabilité.
Il doit être rappelé, qu'en sa qualité de professionnel de la construction, il appartenait à [W] [I] de réaliser un ouvrage conforme non seulement aux prescriptions contractuelles, mais encore aux règles de l'art et aux prescriptions techniques, concernant notamment la surélévation de cheminées.
Ainsi, le maître de l'ouvrage, l'entrepreneur et son assureur devront être condamnés in solidum à indemniser les victimes du trouble anormal de voisinage.
Et aucune confusion ne doit être opérée avec ce que l'expert commis a appelé 'la conséquence d'un incident de chantier à imputer à l'entreprise [I]', objet d'un constat contradictoire de dégâts des eaux, réglé à l'amiable par les assureurs. (Page 19 du rapport).
En conséquence, le jugement déféré sera partiellement réformé en ce que le premier juge avait mis hors de cause le propriétaire du fonds voisin, pourtant maître de l'ouvrage.
Sur l'indemnisation :
1°/ travaux de reprise :
Comme indiqué précédemment, pour rehausser les souches et conduits de cheminée situés à proximité du pignon mitoyen, afin qu'ils soient à 40 cm au-dessus du faîtage de la propriété de [D] [C], remanier la couverture de la propriété des consorts [A] sur une largeur de 2 m à partir du pignon mitoyen, traiter les solives affectées par les infiltrations, remettre en peinture les plafonds de la salle de bains et du palier du premier étage et remettre en état la maçonnerie du mitoyen, les travaux sont évalués par l'expert à un montant total de 19'659,74€ TTC, somme retenue à juste titre par le premier juge.
2°/ préjudice de jouissance :
L'expert a relevé que lors de chaque précipitation importante, de chaque alerte météo, les époux [A] ont dû être sur le qui-vive pour prendre des précautions afin d'éviter que les infiltrations n'atteignent les pièces situées au rez-de-chaussée. Il ajoute qu'ils n'ont pu également profiter de la cheminée à foyer ouvert de leur salon, le défaut de tirage du conduit de fumée étant dû à la surélévation du pignon de la maison de leur voisin (page 16).
Ainsi, Il n'est pas contesté qu'en raison de ces problèmes d'infiltrations, à chaque épisode pluvieux important, les consorts [A] devaient disposer des récipients, notamment dans les combles.
Il est en outre établi par les recherches de l'expert, que lors des travaux de reprise, ils subiront nécessairement, ou ont déjà subi, si ces travaux sont déjà réalisés, un trouble dans la jouissance de leur bien, les travaux de réfection concernant les souches de cheminées et la toiture ayant une durée prévisible de 10 jours ouvrés et ceux de reprise des embellissements une durée prévisible de 6 jours ouvrés.
Ce préjudice de jouissance concernant des logements à usage d'habitation, subi pendant une durée importante, est établi et justifie donc d'indemniser les victimes des troubles anormaux de voisinage en leur allouant, compte tenu de l'ensemble des éléments de la cause, une indemnité de 10'000 €.
3°/ préjudice moral :
Le premier juge a alloué aux victimes du trouble anormal de voisinage la somme de 8000 € «à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudice confondues», sans pour autant examiner la notion de préjudice moral.
Les explications des consorts [A], formulées dans leurs écritures relativement à ce préjudice (pages 15 et 16), concernent en réalité le préjudice de jouissance précédemment indemnisé.
En conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à leurs demandes d'indemnisation formée à hauteur de 5000 € pour un préjudice moral dont la réalité n'est pas démontrée.
4°/ dommages et intérêts pour procédure dilatoire et abusive :
Les consorts [A] réclament enfin la condamnation in solidum de [W] [I], de la S.A. MAAF et de [D] [C] à leur payer la somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts pour « procédure dilatoire et abusive».
En l'espèce, alors que les conclusions de l'expertise judiciaire étaient particulièrement claires, que le premier juge a justement retenu la responsabilité de l'entreprise et condamné celle-ci in solidum avec son assureur à indemniser les victimes des troubles anormaux de voisinage, que la cour les a condamne également, que l'appel interjeté par [W] [I] et la S.A. MAAF a eu manifestement pour but de chercher à échapper à l'obligation d'indemniser les victimes qui ont donc subi un allongement de la procédure judiciaire engagée par eux depuis l'année 2009, les appelants sont fondés à reprocher à l'entreprise et à son assureur leur comportement dilatoire qui a été directement pour eux à l'origine d'un préjudice qui sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 3000 € à titre de dommages et intérêts.
Par contre, ce comportement fautif ne peut être imputé au propriétaire voisin.
Sur le recours du propriétaire voisin :
Il est clairement établi par les éléments du dossier, notamment par les recherches expertales, que l'entrepreneur auquel le maître de l'ouvrage s'est adressé pour exécuter les travaux de surélévation de son immeuble ne les a pas tous réalisés conformément aux règles de l'art et aux normes applicables, puisqu'il n'a pas respecté les normes concernant le rehaussement des cheminées situées sur l'immeuble contigu.
Pour échapper à ses obligations, alors qu'il est un professionnel de la construction, il ne peut utilement se retrancher derrière le comportement du Maître de l'ouvrage.
En effet, il n'est pas démontré par les appelants, que ce maître de l'ouvrage, qui n'était pas un professionnel de la construction, a été pleinement informé par son entrepreneur des risques de troubles au voisinage, qu'il a entendu décharger l'entreprise de ses responsabilités et qu'il a prescrit dans ces conditions la poursuite du chantier.
Dans le cadre de ce chantier de surélévation, pour une question aussi importante que celle concernant les cheminées de l'immeuble voisin, la seule mention sur le devis de l'entreprise du 7.9.2007, sous l'intitulé « divers » d'un « rehaussement éventuel des souches avoisinantes», ne permet nullement de considérer que l'entrepreneur a exécuté l'ensemble de ses obligations notamment celle d'information et de conseil du maître de l'ouvrage, alors même qu'il a accompagné son devis d'une lettre explicative des travaux où il n'a nullement attiré l'attention de son interlocuteur sur ce problème, alors qu'il le fit pour d'autres et de façon précise.
En outre, l'entrepreneur peut également se voir reprocher un manquement à son obligation de réaliser des travaux conformément aux règles de l'art et aux normes applicables.
Ce comportement fautif ayant été déterminant dans la survenance des dommages, le propriétaire chez qui les travaux ont été réalisés est fondé à exercer un recours à l'encontre de l'entrepreneur et de son assureur à concurrence de 80 % de l''ensemble des condamnations prononcées en principal, intérêts, frais, indemnités et dépens, [D] [C] gardant à sa charge les 20 % restants.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens :
Succombant, [W] [I], la S.A. MAAF et [D] [C], supporteront in solidum les dépens de première instance et d'appel, qui comprendront notamment le coût de l'expertise judiciaire, sauf à ce que [D] [C] soit relevé et garanti dans les conditions précédemment évoquées.
L'équité commande d'allouer aux consorts [A] une indemnité de 5000€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Par contre, l'équité ne commande nullement d'allouer aux autres parties la moindre somme sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS
LA COUR :
Statuant publiquement,
Contradictoirement,
Vu l'arrêt avant dire droit rendu le 27 novembre 2014,
CONFIRME partiellement le jugement déféré en ce que le premier juge a :
- déclaré [W] [I] responsable des désordres subis par [T] [A], [G] [Z] épouse [A] et [B] [Q] épouse [A] dans leur immeuble et l'a condamné in solidum avec son assureur la S.A. MAAF à les indemniser ,
- fixé à 19'659,74 € l'indemnisation au titre des travaux de reprise,
- débouté [W] [I] et la S.A. MAAF de leur demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
LE REFORME pour le surplus,
STATUANT À NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
CONDAMNE in solidum [W] [I], la S.A. MAAF et [D] [C] à payer à [T] [A], [G] [Z] épouse [A] et [B] [Q] épouse [A] :
1°/ 19'659,74 € au titre des travaux de reprise,
2°/ 10000€ à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance,
3°/ 3000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire,
4°/ 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE [T] [A], [G] [Z] épouse [A] et [B] [Q] épouse [A] de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
DÉBOUTE [W] [I], la S.A. MAAF et [D] [C] de leurs demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT que dans les rapports entre d'une part [W] [I] et la S.A. MAAF et d'autre part [D] [C], [W] [I] et la S.A. MAAF supporteront in solidum 80 % du montant de l'ensemble des condamnations prononcées en principal, intérêts, frais, indemnités et dépens, [D] [C] en supportant 20 %,
DIT que le greffe adressera à l'expert une copie du présent arrêt,
CONDAMNE in solidum, sous la réserve précitée, [W] [I], la S.A. MAAF et [D] [C] aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront notamment le coût de l'expertise, et en ordonne la distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT