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11/06/2015 | FRANCE | N°13/24612

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre b, 11 juin 2015, 13/24612


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre B



ARRÊT MIXTE

DU 11 JUIN 2015



N° 2015/197













Rôle N° 13/24612







SA ALLIANZ





C/



SAS THALES ALENIA SPACE FRANCE

SAS ETABLISSEMENTS JEAN GRANIOU

SNC INEO PROVENCE ET COTE D'AZUR

Société SYLUMIS VENANT INTEGRALEMENT AUX DROITS DE LA STE SOUDURES ET APPLICATIONS ELECTRIQUES S.E.A.E





Grosse délivrée

le :

à :

Me P. VIVIANI>
Me J-M JAUFFRES

Me P-L SIDER

Me P-P VALLI

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 09 Décembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2012F00366.





APPELANTE



SA ALLI...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre B

ARRÊT MIXTE

DU 11 JUIN 2015

N° 2015/197

Rôle N° 13/24612

SA ALLIANZ

C/

SAS THALES ALENIA SPACE FRANCE

SAS ETABLISSEMENTS JEAN GRANIOU

SNC INEO PROVENCE ET COTE D'AZUR

Société SYLUMIS VENANT INTEGRALEMENT AUX DROITS DE LA STE SOUDURES ET APPLICATIONS ELECTRIQUES S.E.A.E

Grosse délivrée

le :

à :

Me P. VIVIANI

Me J-M JAUFFRES

Me P-L SIDER

Me P-P VALLI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 09 Décembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2012F00366.

APPELANTE

SA ALLIANZ,

[Adresse 5]

représentée et assistée par Me Pierre VIVIANI, avocat au barreau de NICE

INTIMEES

SAS THALES ALENIA SPACE FRANCE

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège [Adresse 2]

représentée par Me Jean-Marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Jean DAMERVAL, avocat au barreau de PARIS

SAS ETABLISSEMENTS JEAN GRANIOU

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège [Adresse 3]

représentée par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Fabien GUERINI de la SELARL CONSULTIS AVOCATS, avocat au barreau de TOULON,

SNC INEO PROVENCE ET COTE D'AZUR

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège [Adresse 1]

représentée par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Fabien GUERINI de la SELARL CONSULTIS AVOCATS, avocat au barreau de TOULON,

Société SYLUMIS venant intégralement aux droits de la Société SOUDURES ET APPLICATIONS ELECTRIQUES (S.E.A.E) par suite de tramission universelle de son patrimoine

immatriculée au RSC de Melun sous le n° 785 520 115,

[Adresse 4]

représentée par Me Pierre-Paul VALLI, avocat au barreau de NICE

plaidant par Me Nicolas DALMAYRAC, avocat au barreau de TOULOUSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 08 Avril 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-José DURAND, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-François BANCAL, Président

Mme Patricia TOURNIER, Conseillère

Mme Marie-José DURAND, Conseillère (rédactrice)

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Juin 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Juin 2015,

Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Faits et procédure

La société Alcatel Space, aujourd'hui Thales Alenia Space France (société Thales), agissant en qualité de maître d'ouvrage, a confié aux sociétés Etablissements Jean Graniou (société Graniou) et GTMH, aujourd'hui Ineo Provence et Côte d'Azur (société Ineo), constituant un groupement d'entreprises dont le mandataire est la société Graniou, la réalisation de travaux d'installation de luminaires pour ses salles blanches d'assemblage de satellites dans son établissement de [Localité 2]. Elle a contracté une police dommages ouvrage auprès de la société Allianz.

Elle a confié la rédaction des CCTP aux sociétés Setac et Ingerop, qui ne sont pas dans la cause.

La société Graniou a acheté les luminaires auprès de la société Montalux qui s'est fournie auprès du fabricant, la société SEAE, aujourd'hui société Sylumis.

Les réceptions sont intervenues le 30 septembre 2002 pour la zône Production, et le 20 juin 2002 pour la zône Assemblage Intégration Thermique (AIT).

Les luminaires ont rapidement présenté des défauts dans leur mode de fonctionnement, qui n'ont pu être résolus malgré expertise amiable diligentée à l'initiative de l'assureur du fabricant, de sorte que par ordonnance de référé du 06 juillet 2004, une expertise judiciaire a été ordonnée.

Selon l'expert, les luminaires présentent des défauts de conception constituant un vice caché, il faut les remplacer.

Le maître d'ouvrage a fait assigner devant le tribunal de commerce de Nice les entreprises Graniou et Ineo, le fabricant des luminaires ainsi que l'assureur dommages ouvrage d'ores et déjà partiellement subrogé.

Décision déférée

Par jugement contradictoire du 09 décembre 2013, le tribunal de commerce de Nice a :

débouté la société Thales de l'ensemble de ses demandes contre les sociétés Graniou et Ineo,

débouté la société Graniou de l'ensemble de ses demandes contre la SEAE,

débouté la société Allianz de sa demande de condamnation contre les sociétés Graniou et Ineo,

rejeté les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société Thales aux dépens.

Par déclaration du 27 décembre 2013, la société Allianz a interjeté appel en intimant toutes les parties.

***

Vu les conclusions de la société Allianz en date du 21 mars 2014, par lesquelles elle demande à la cour, au visa des articles L 242-1, A 243-1 et L 121-12 alinéa 1 du code des assurances, 1792 et suivants du code civil de :

infirmer le jugement,

la déclarer subrogée dans les droits et actions de la société Thales à hauteur de 183 847,01 €,

condamner in solidum la société Ineo et la société Graniou à lui payer la somme de 183 847,01 €,

condamner les sociétés Ineo et Graniou au paiement de la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la société Thales en date du 27 mars 2014, par lesquelles elle demande à la cour, au visa des articles 1792 et suivants, 1145 et suivants et 1382 du code civil de :

infirmer le jugement,

condamner in solidum des sociétés Graniou et Ineo au paiement des sommes de :

206 712,11 € HT à titre principal,

914,69 € et 15 600 € au titre des frais d'expertise avancés par elle,

50 000 € à titre de dommages et intérêts,

25 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

dire la société Allianz subrogée à hauteur de ses paiements dans les droits de la société Thales ;

Vu les conclusions des sociétés Graniou et Ineo en date du 21 mai 2014 aux termes desquelles elles demandent à la cour, au visa des articles 1792 à 1792-4, 1145 et suivants et 1382 du code civil de :

réformer le jugement,

au besoin condamner la société Sylumis à garantir la société Graniou des condamnations qui seraient prononcées contre elle,

en tout état de cause, condamner la société Sylumis au paiement des sommes de :

83 059,61 € en remboursement des frais et débours avancés au bénéfice de la société Thales,

50 000 € à titre de dommages et intérêts,

25 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la société Sylumis en date du 18 juillet 2014, par lesquelles elle demande à la cour, au visa des articles 1315, 1641 et suivants, 1792 et suivants du code civil de :

à titre principal,

confirmer le jugement en ce que le premier juge l'a mise hors de cause,

déclarer à toutes fins les demandes présentées par les sociétés Graniou et Ineo irrecevables en ce qu'elles sont fondées sur l'article 1792-4 du code civil et forcloses au visa des articles 1641 et suivants du code civil,

à titre subsidiaire rejeter les demandes formées contre elle,

à titre infiniment subsidiaire rejeter les demandes indemnitaires formées contre elle,

en tout état de cause lui allouer la somme de 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 24 mars 2015.

MOTIFS DE LA DECISION

A/ Sur les demandes formées par la société Allianz et par la société Thales contre les sociétés Graniou et Ineo

En vertu de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est, sauf preuve d'une cause étrangère, responsable de plein droit, envers le maître de l'ouvrage, des dommages qui, affectant l'ouvrage dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Le rapport d'expertise confirme qu'une proportion importante des luminaires installés initialement se sont avérés défaillants, et que les luminaires de même conception mis en place pour les remplacer ne se sont pas non plus avérés fiables.

La société Thales précise que les luminaires étaient pour l'essentiel installés dans des salles blanches de fabrication de satellites, et il est certain que le travail de haute technologie ainsi effectué, délicat et précis, requiert un environnement optimum, notamment s'agissant de l'éclairage. Or dans le cadre d'un constat effectué le 16 avril 2003, Maître [K], huissier de justice à [Localité 1], a décrit de façon détaillée les dysfonctionnements alors observés et pour finir leurs conséquences, en observant :

'Dans chacune de ces pièces, plusieurs spots ne fonctionnent pas.

Dans certaines, lorsque l'on éteint et que l'on rallume le circuit, des points lumineux ne se rallument pas, dans d'autres seules les ampoules de préchauffage s'allument mais ne déclenchent pas au bout de deux à trois minutes l'éclairage des ampoules 400 watts.

Je constate également, notamment dans la salle N01102 que les lampes de préchauffage restent allumées alors que les lampes de 400 watts fonctionnent également.

Lorsque le rallumage se fait il est très long pour arriver à un niveau optimum et de toutes façons plusieurs points lumineux restent éteints, laissant la pièce dans une semi-obscurité ou semi-luminosité insuffisante pour le travail des techniciens présents sur place.'

Il est ainsi démontré que l'ouvrage réalisé par les sociétés Graniou et Ineo, liées à la société Thales par un contrat de louage d'ouvrage, s'est avéré, en raison des dysfonctionnements des luminaires dont elles sont équipées, impropre à sa destination, et ce dans le délai de dix ans qui a suivi la réception. Il convient par ailleurs de souligner que l'absence de faute de leur part, mise en avant par les sociétés Graniou et Ineo, ne suffit pas à les exonérer de la responsabilité de plein droit pesant sur elles, et que l'éventuel vice caché des luminaires qu'elles ont commandés et installés n'est pas susceptible de constituer une cause étrangère. Elles doivent dès lors être déclarées responsables des désordres et condamnées, in solidum, à en réparer les conséquences dommageables.

En définitive, les luminaires fabriqués par la société Sylumis ont été intégralement remplacés en cours d'expertise par des lampes modèle Lopak de marque Thorn qui ont donné satisfaction. L'expert a chiffré le coût de ce remplacement, maîtrise d'oeuvre comprise, à 187 387,61 € HT.

Par ailleurs, ainsi que le relève l'expert, le maître d'ouvrage a dû faire face au coût d'installation des platines provisoires, réglé à la société Graniou, soit les sommes de 4 582 € HT et 14 742,50 € HT. Ainsi, le préjudice matériel subi par la société Thales doit être chiffré à la somme totale de 206 712,11 € HT.

La société Allianz démontre, par la production des quittances subrogatives, avoir réglé à la société Thales au titre de ce sinistre, en sa qualité d'assureur dommages ouvrage, les sommes de :

- 12 360 € et 4 180 € le 17 mai 2006,

- deux fois 14 000 € le 19 février 2007,

- deux fois 7 800 € le 15 mai 2008,

- 30 497,33 € et 93 209,68 € le 18 novembre 2009,

soit un total de 183 847,01 €.

Dans ces conditions, les sociétés Graniou et Ineou seront condamnées in solidum à payer à la société Thales la somme de 22 865,10 € et à la société Allianz, subrogée dans les droits de la société Thales, la somme de 183 847,01 €.

Les désagréments occasionnés par la défaillance des luminaires, constatée quelques mois seulement après leur installation, et le délai de plusieurs années qui s'est avéré nécessaire pour obtenir leur remplacement satisfaisant, caractérisent un préjudice annexe qui sera indemnisé par l'allocation d'une somme de 25 000 €, les sociétés Graniou et Ineo étant condamnées in solidum à payer cette somme à la société Thales.

Les frais d'expertise suivront le sort des dépens puisque, en vertu de l'article 695 du code de procédure civile, ils y sont inclus.

B/ Sur les demandes formées par les sociétés Graniou et Ineo contre la société Sylumis

La cour observe que les sociétés Graniou et Ineo n'ont pas conclu sur l'application éventuelle, en l'espèce, des dispositions des articles 1641 et suivants du code civil, pourtant mises dans le débat par la société Sylumis. Il convient de rouvrir les débats sur ce point.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement,

S'agissant des demandes formées par les sociétés Allianz et Thales Alenia Space France contre les sociétés Etablissements Jean Graniou et Ineo Provence et Côte d'Azur,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Déclare la société Etablissements Jean Graniou et la société Ineo Provence et Côte d'Azur responsables à l'égard de la société Thales Alenia Space France des dommages résultant des dysfonctionnements des luminaires, en application de l'article 1792 du code civil,

Fixe le préjudice matériel subi par la société Thales Alenia Space France à la somme de 206 712,11 €,

Condamne in solidum la société Etablissements Jean Graniou et la société Ineo Provence et Côte d'Azur à payer à la société Thales Alenia Space France la somme de 22 865,10 € en réparation de son préjudice matériel,

Condamne in solidum la société Etablissements Jean Graniou et la société Ineo Provence et Côte d'Azur à payer à la société Allianz, partiellement subrogée dans les droits de la société Thales Alenia Space France, la somme de 183 847,01 €,

Condamne in solidum la société Etablissements Jean Graniou et la société Ineo Provence et Côte d'Azur à payer à la société Thales Alenia Space France la somme de 25 000 € en réparation de ses préjudices annexes,

Dit que les frais d'expertise suivront le sort des dépens,

Sursoit à statuer sur l'application des dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile,

S'agissant des demandes formées par les sociétés Etablissements Jean Graniou et Ineo Provence et Côte d'Azur contre la société Sylumis,

Ordonne la réouverture des débats,

Invite les sociétés Etablissements Jean Graniou et Ineo Provence et Côte d'Azur à conclure sur l'application des articles 1641 et suivants du code civil et la société Sylumis à conclure en réplique si elle l'estime nécessaire,

Renvoie l'affaire à l'audience du Mardi 3 Novembre 2015 à 14h00 - Salle D Palais Verdun

Dit que l'ordonnance de clôture interviendra le 20 octobre 2015.

Réserve les dépens.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/24612
Date de la décision : 11/06/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3B, arrêt n°13/24612 : Réouverture des débats


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-11;13.24612 ?
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