COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
4e chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 4 JUIN 2015
N° 2015/250
Rôle N° 14/12078
[B] [V] épouse [H]
[L] [H]
C/
[J] [E] épouse [Y]
Société MJL INVESTISSEMENT
SA COMPAGNIE DE FINANCEMENT FONCIER
[C] [Q]
[L] [K]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP BADIE
Me AUBRY
Me DRUJON D'ASTROS
SCP COHEN
Me VOLAND
Me DUHAMEL
Décision déférée à la Cour :
Tierce opposition concernant un arrêt n°306 en date du 3 septembre 2010 rendu par la 4e chambre section A de cette cour enregistré au répertoire général sous le n° 08/9667.
DEMANDEURS À LA TIERCE OPPOSITION
Madame [B] [V] épouse [H]
née le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 3], demeurant [Adresse 6]
Monsieur [L] [H]
né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 3],
demeurant [Adresse 6]
représentés par LA SCP BADIE/SIMON THIBAUD/JUSTON, avocats au barreau d'Aix-en-Provence
assistés de Me Jocelyne VOLTO-PASCUAL, avocat au barreau de Marseille, plaidant
DÉFENDEURS À LA TIERCE OPPOSITION
Madame [J] [E] épouse [Y]
née le [Date naissance 4] 1970 à [Localité 3], demeurant [Adresse 5]
représentée et assistée par Me Mireille AUBRY substituée par Me Arnaud BILLIOTTET, avocats au barreau de Draguignan, plaidant
LA SOCIÉTÉ MJL INVESTISSEMENT
dont le siège est [Adresse 4]
représentée par Me Marie-Lorraine VOLAND, avocat au barreau d'Aix-en-Provence
assistée par Me Lakhdar BOUMAZA, avocat au barreau de Marseille
LA SA COMPAGNIE DE FINANCEMENT FONCIER
venant aux droits du Crédit Foncier de France, dont le siège est [Adresse 1]
représentée et assistée par Me Bertrand DUHAMEL substitué par Me Florence ADAGAS-CAOU, avocats au barreau de Draguignan
Monsieur [C] [Q]
agissant en qualité d'actuel mandataire liquidateur de Monsieur [A] [Y], désigné à cette fonction aux lieu et place de M° [T], demeurant [Adresse 2]
représenté et assisté par Me François DRUJON D'ASTROS, avocat au barreau d'Aix-en-Provence
Monsieur [L] [K], sur intervention forcée
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 3], demeurant [Adresse 3]
représenté par la SCP COHEN/GUEDJ/MONTERO/DAVAL GUEDJ, avocats au barreau d'Aix-en-Provence
assisté par Me Thomas DJOURNO, avocat au barreau de Marseille, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 avril 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Muriel Vassail, vice-présidente placée, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Odile MALLET, président
Madame Hélène GIAMI, conseiller
Madame Muriel VASSAIL, vice-présidente placée
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 4 juin 2015
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 4 juin 2015,
Signé par Madame Odile MALLET, président et Madame Danielle PANDOLFI , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS PROCÉDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
M. [X] [Y] et Mme [J] [E], mariés sous le régime de la séparation de biens, ont acheté un terrain situé à [Localité 1] sur lequel ils ont fait construire leur maison d'habitation. L'opération était financée au moyen de prêts consentis par le CREDIT FONCIER DE FRANCE (LE CREDIT FONCIER).
Par ordonnance du 27 mars 2002, le juge commissaire a autorisé le liquidateur de M. [Y], maître [T], à engager une procédure pour provoquer le partage de l'indivision existant entre les époux [Y].
Par jugement du 11 février 2003, le tribunal de grande instance de MARSEILLE a ordonné le partage judiciaire et, à cette fin, la licitation de la parcelle indivise sise à [Localité 1] cadastrée section H n° [Cadastre 1] lieudit [Localité 2].
Le 16 octobre 2003 l'immeuble a été adjugé à la société MJL INVESTISSEMENT pour le prix de 116 000 €.
Par acte d'huissier du 11 mai 2004, Mme [E] a assigné maître [T], liquidateur judiciaire de M. [Y], la société MJL INVESTISSEMENT et le CREDIT FONCIER devant le tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN en nullité de la vente de ses droits immobiliers et subsidiairement condamnation de maître [T] au paiement de dommages et intérêts.
Par jugement du 30 avril 2008 le tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN s'est déclaré territorialement compétent et a :
- déclaré recevable l'intervention volontaire de maître [Q] en qualité de mandataire liquidateur de M. [Y],
- débouté Mme [E], épouse [Y], de toutes ses demandes,
- condamné Mme [E] aux dépens et à payer à maître [Q] et à la société MJL INVESTISSEMENT 1 500 € chacun du chef de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Mme [E] a fait appel de ce jugement le 29 mai 2008.
Parallèlement, le 22 mai 2007, la société MJL INVESTISSEMENT a divisé la parcelle cadastrée section H [Cadastre 1] en deux parcelles :
- une parcelle cadastrée H n° [Cadastre 2] correspondant à un terrain de 1 210 m² sur lequel
est édifiée la maison construite par M. et Mme [Y],
- une parcelle cadastrée H [Cadastre 3] correspondant à un terrain nu de 1 798 m².
Selon acte reçu le 3 août 2007 par maître [O], elle a vendu la parcelle H [Cadastre 2] à M. et Mme [H].
Par arrêt contradictoire du 3 septembre 2010 la cour de céans a :
- ordonné la disjonction de l'instance du chef de maître [T] et sa radiation,
- infirmé le jugement,
- annulé la procédure de saisie immobilière et le jugement d'adjudication de l'immeuble commun appartenant à M. [Y] et Mme [E] en indivision à concurrence de la moitié chacun,
- rejeté toutes autres demandes,
- condamné maître [Q] ès qualités aux dépens avec distraction s'agissant des dépens d'appel.
Par actes du 23 mai 2014, enrôlés le 13 juin 2014, Mme [B] [V], épouse [H], et M. [L] [H] (M. et Mme [H]) ont fait citer M. [Y], Mme [E], la société MJL INVESTISSEMENT, le CREDIT FONCIER et maître [Q], ès qualités de liquidateur de M. [Y], en tierce opposition à l'encontre de l'arrêt du 3 septembre 2010.
Par acte du 16 juillet 2014, ils ont assigné maître [L] [O] en intervention forcée.
Dans leurs dernières écritures, communiquées le 30 mars 2015, ils demandent à la cour, au visa du jugement du tribunal de grande instance de MARSEILLE du 11 février 2003 et des articles 582 à 592, 1271 à 1281 et 1377 du Code de Procédure Civile, de:
- déclarer leur tierce opposition recevable,
- rétracter l'arrêt du 3 septembre 2010 en ce qu'il a annulé la procédure de saisie immobilière et le jugement d'adjudication de l'immeuble indivis de M. [Y] et Mme [E],
- débouter Mme [E] de sa demande en nullité de la procédure de saisie immobilière et d'adjudication de l'immeuble,
- confirmer le jugement rendu le 30 avril 2008 par le tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN en toutes ses dispositions,
- condamner M. et Mme [Y] aux dépens avec distraction et à leur payer
2 500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dans leur dernières conclusions, déposées le 13 mars 2015, M. [Y] et Mme [E] demandent à la cour, au visa des articles 582, 673 et 674 du Code de Procédure Civile et de l'ancien article 2217 du Code Civil, de :
- déclarer la tierce opposition irrecevable,
- confirmer l'arrêt du 3 septembre 2010,
- condamner tout succombant aux dépens avec distraction et à leur payer 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dans ses dernières écritures, signifiées le 12 février 2015, la société MJL INVESTISSEMENT demande à la cour, au visa de l'article 582 du Code de Procédure Civile, de :
- lui donner acte de ce qu'elle s'associe aux prétentions de M. et Mme [H],
- rétracter l'arrêt du 3 septembre 2010,
- débouter Mme [E] de sa demande d'annulation de la procédure de saisie immobilière et du jugement d'adjudication concernant l'immeuble indivis,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN le 30 avril 2008 en toutes ses dispositions,
- dire et juger que la présente décision est indivisible à l'égard de l'ensemble des parties au litige,
- condamner tout succombant aux dépens avec distraction et à lui payer 2 500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dans ses dernières conclusions, communiquées le 2 avril 2015, maître [Q], demande à la cour de :
- dire bien fondée l'assignation aux fins de tierce opposition,
- lui donner acte de ce qu'en qualité de liquidateur de M. [Y] il s'associe aux demandes de M. et Mme [H],
- dire qu'en vertu de l'indivisibilité attachée aux demandes sur le fondement de l'article 584 du Code de Procédure Civile la rétractation de l'arrêt sur tierce opposition s'imposera à toutes les parties par application de l'article 591 du même code,
- statuer ce que de droit sur les dépens.
Dans ses dernières conclusions, déposées le 5 mars 2015, la compagnie de Financement Foncier, venant aux droits du CREDIT FONCIER, demande à la cour, au visa des articles 583 et 586 du Code de Procédure Civile de :
- statuer ce que de droit sur la recevabilité de la tierce opposition,
- lui donner acte de ce qu'aucune demande n'est formée à son encontre et de ce qu'elle s'associe aux prétentions de M. et Mme [H] tendant à obtenir la rétractation de l'arrêt du 3 septembre 2010,
- condamner tout succombant aux dépens avec distraction et à lui payer 2 000 € du chef de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dans ses dernières écritures, déposées le 22 décembre 2014, maître [O] demande à la cour de :
- lui donner acte de ce qu'aucune demande n'est formulée à son encontre,
- lui donner acte qu'il s'associe aux prétentions de M. et Mme [H],
- condamner tout succombant aux dépens avec distraction.
L'avis de fixation pour plaidoiries a été adressé aux parties le 11 mars 2015 et la procédure a été clôturée le 2 avril 2015.
Conformément à l'article 455 du Code de Procédure Civile, il conviendra de se référer aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens de fait et de droit.
MOTIFS
En raison de sa liquidation judiciaire, M. [Y] est privé de qualité pour intervenir en défense à la tierce opposition et il est représenté par maître [Q]. Il conviendra de le souligner.
Sur la révocation de l'ordonnance de clôture
Au vu de l'accord unanime des parties sur ce point, il convient d'ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture et de prononcer la clôture de la procédure à l'audience.
Sur la recevabilité de la tierce opposition
Comme le rappelle l'article 583 du Code de Procédure Civile toute personne qui y a intérêt est recevable à former tierce opposition à condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée à la décision qu'elle attaque.
Le fait que M. et Mme [H] aient été mis au courant de l'existence de la procédure dans leur acte d'achat et qu'ils n'aient pas jugé utile d'y intervenir volontairement ne saurait les priver de leur droit de contester l'arrêt rendu le 3 septembre 2010 par la cour de céans qui leur cause manifestement grief puisqu'il remet en cause la validité de leur acquisition et pourrait servir de fondement à leur expulsion.
Par ailleurs, malgré leur communauté d'intérêts, Mme [E] ne saurait valablement soutenir que M. et Mme [H] ont été représentés par la société MJL INVESTISSEMENT qui en sa qualité d'adjudicataire puis de vendeur du bien a manifestement des intérêts distincts à défendre, notamment parce que, à l'inverse des opposants, ses conditions de vie et d'habitation ne sont pas remises en cause.
Enfin, dans la mesure où ils justifient d'un droit propre à faire valoir, il est inopérant pour faire obstacle à la recevabilité de la tierce opposition que l'argumentaire de M. et Mme [H] soit identique à celui déjà développé par l'une ou l'autre des parties dans le cadre de l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 3 septembre 2010.
Il s'ensuit que la tierce opposition est recevable.
Au fond
Nul ne conteste que, du fait de la liquidation judiciaire de M. [Y], maître [T] avait qualité, en application de l'article 629 du Code de Commerce, pour provoquer la partage des biens et droits immobiliers indivis de M. [Y] et de Mme [E].
Dans une telle occurrence, y compris antérieurement à la réforme du 20 décembre 2007, comme l'a précisé le tribunal de grande instance de MARSEILLE dans son jugement du 11 février 2003, c'est la procédure en vigueur en matière de partage et de licitation qui doit s'appliquer.
Il en résulte que conformément à l'ancien article 972 du Code de Procédure Civile, la licitation était soumise aux formes et conditions prévues aux articles 1271 à 1281 du Code de Procédure Civile.
Ainsi que le soutiennent les demandeurs à la tierce opposition, la signification d'un commandement aux fins de saisie-vente n'était donc pas requise pour la validité de la vente.
Il s'ensuit que, aucun moyen n'étant développé par Mme [E] pour contester la validité de la procédure de licitation, l'arrêt du 3 septembre 2010 doit être rétracté sur ce point.
Par application des dispositions combinées des articles 584 et 591 du Code de Procédure Civile, il convient de rappeler que le litige est indivisible à toutes les parties appelées en la cause.
L'arrêt attaqué sera confirmé en ses autres dispositions qui ne sont pas remises en cause par les parties.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Il n'y a pas lieu de rétracter l'arrêt du 3 septembre 2010 en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
Mme [E] sera condamnée aux dépens de la tierce opposition. Elle se trouve, ainsi, infondée en ses prétentions au titre des frais irrépétibles.
Eu égard aux circonstances de l'espèce, aucune considération d'équité n'impose de faire application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au bénéfice de l'une quelconque des autres parties.
Elles seront toutes déboutées de leur demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Révoque l'ordonnance de clôture rendue le 2 avril 2015 et prononce la clôture de la procédure à l'audience ;
Dit la tierce opposition de M. et Mme [H] recevable ;
Dit M. [Y], régulièrement représenté par maître [Q], irrecevable en sa défense à titre personnel ;
Rétracte l'arrêt rendu par la cour de céans le 3 septembre 2010 mais seulement en ce qu'il a annulé la procédure de saisie immobilière et le jugement d'adjudication de l'immeuble sis commune de [Localité 1] (VAR) cadastré section H n° [Cadastre 1] lieudit [Localité 2], pour une contenance de 30a 08ca, appartenant à M. [Y] et Mme [E] en indivision à concurrence de la moitié chacun et adjugé à la société MJL INVESTISSEMENT par jugement du tribunal de grande instance de MARSEILLE du 16 octobre 2003 ;
Statuant à nouveau du chef rétracté et y ajoutant :
Déboute Mme [E] de sa demande d'annulation de la procédure de saisie immobilière et du jugement d'adjudication de l'immeuble sis commune de [Adresse 6] (VAR) cadastré section H n° [Cadastre 1] lieudit [Localité 2], pour une contenance de 30a 08ca, appartenant à M. [Y] et Mme [E] en indivision à concurrence de la moitié chacun et adjugé à la société MJL INVESTISSEMENT par jugement du tribunal de grande instance de MARSEILLE du 16 octobre 2003 ;
Dit que le litige est indivisible et que la présente décision produira ses effets à l'égard de l'ensemble des parties ;
Dit Mme [E] infondée en ses prétentions au titre des frais irrépétibles ;
Déboute les autres parties de leur demande en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Laisse les dépens de la tierce opposition à la charge de Mme [E] avec distraction au profit des avocats constitués dans les intérêts de M. et Mme [H], de la compagnie de FINANCEMENT FONCIER, venant aux droits du CREDIT FONCIER, de la société MJL INVESTISSEMENT et de maître [O].
La greffière, La présidente,