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26/05/2015 | FRANCE | N°13/04886

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14e chambre, 26 mai 2015, 13/04886


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

14e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 26 MAI 2015



N°2015/383







Rôle N° 13/04886





MONSIEUR LE DIRECTEUR MSA ILE DE FRANCE





C/



[V] [B]



ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS)









Grosse délivrée le :



à :

Me Christophe RAMOGNINO, avocat au barreau de PARIS



Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE



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Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du VAR en date du 05 Février 2013,enregistré au répertoire général sous le n° 21200344.





APPELAN...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

14e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 26 MAI 2015

N°2015/383

Rôle N° 13/04886

MONSIEUR LE DIRECTEUR MSA ILE DE FRANCE

C/

[V] [B]

ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS)

Grosse délivrée le :

à :

Me Christophe RAMOGNINO, avocat au barreau de PARIS

Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du VAR en date du 05 Février 2013,enregistré au répertoire général sous le n° 21200344.

APPELANTE

MONSIEUR LE DIRECTEUR MSA ILE DE FRANCE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Christophe RAMOGNINO, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

Madame [V] [B], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Olivia PARISOT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

PARTIE INTERVENANTE

ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS), demeurant [Adresse 3]

non comparant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Avril 2015 en audience publique devant la Cour composée de :

M. Gérard FORET-DODELIN, Président

Madame Martine MATHIEU-GALLI, Conseiller

Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Mai 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Mai 2015

Signé par M. Gérard FORET-DODELIN, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [B] [V] a procédé à deux reprises au rachat de cotisations retraite pour les périodes suivante:

-vacances scolaires des années 1965 et 1966,

-Du1 janvier au 31 mars 1967,

-Du 1 janvier au 30 mars 1983 ;

Madame [B] [V] a fourni à l'appui de sa demande deux attestations émanant de Mr [W] et de Mme [J] attestant que Madame [B] [V] avait travaillé en qualité de saisonnière agricole dans l'exploitation de Mr [E] à [Localité 1] en Côte d'Or.

Madame [B] [V] a dés lors procédé au rachat de 10 trimestres de cotisations pour une somme totale de 1460,51€.

Après vérification et contrôle la MSA a, par courrier du 14 novembre 2011, avisé Madame [B] [V] qu'elle procédait à l'annulation du rachat compte tenu de l'usage de fausses attestations.

Madame [B] [V] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la MSA.

Madame [B] [V] a formé devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale du Var un recours à l'encontre de la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de la MSA d'Ile de France.

Par jugement en date du 5 février 2013 le Tribunal des affaires de sécurité sociale du Var a :

-Annulé la décision de la MSA d'Ile de France du 14 novembre 2011 annulant le rachat de 10 trimestres de cotisations de retraite pour la période du 1 juillet 1965 au 30 avril 1983 par Madame [B] [V].

-Condamné la MSA à reprendre le paiement des prestations de vieillesse de Madame [B] [V] pour la période considérée, sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter de la signification de ce jugement, l'astreinte courant pendant deux ans.

-Déboute Madame [B] [V] de sa demande de dommages et intérêts,

-Débouté la MSA de ses demandes reconventionnelles,

-Condamné la MSA d'Ile de France à payer à Madame [B] [V] la somme de 2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-Ordonné l'exécution provisoire du jugement.

La MSA d'Ile de France a interjeté appel de ce jugement dont elle sollicite réformation.

Elle demande à la Cour de :

-Débouter Madame [B] [V] de ses demandes,

-Confirmer la décision de la MSA d'Ile de France du 14 novembre 2011par laquelle la MSA d'Ile de France a procédé à l'annulation du rachat par Madame [B] [V] de 10 trimestres de cotisations,

-Condamner Madame [B] [V] à payer à la MSA la somme de 35730,91€ à titre de remboursement des pensions vieillesses perçues du 1 janvier 2008 au 31 décembre 2011,

-Condamner Madame [B] [V] au paiement de la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que Madame [B] [V] a produit à l'appui de sa demande de rachat deux attestations sur l'honneur du 24 novembre 2006 et du 10 avril 2007 aux termes desquelles elle certifie sur l'honneur 'avoir travaillé en tant que saisonnière agricole ' d'une part ' pendant les vacances scolaires des années 1965et 1966 d'autre part , du 1er janvier 1967 au 31 mars 1967 et du 1er janvier 1983 au 30 avril 1983.Que ces deux attestions comportent deux contreseings de Mr [W] et de Mme [J].

La MSA indique que ces deux personne sont des collègues de travail de Madame [B] [V] qui n'ont pas été témoins de l'activité alléguée de Madame [B] [V] et qui ont elles mêmes procédé à des régularisations de cotisations arriérées.

La MSA souligne que Mr [H] est 'témoin ' dans le dossier de Mr [W], ce dernier étant 'témoin' de Madame [B] [V].

Elle ajoute que Madame [B] [V] a reconnu que les témoins n'étaient pas des témoins oculaires de son activité mais de simples collègues de bureau qui n'étaient pas de la Côte d'Or et qui ne l'avaient pas connue lorsqu'elle travaillait.

La MSA d'Ile de France considère que cette démarche délibérée est constitutive d'une fraude qui fait des attestations sur l'honneur de fausses déclarations faisant obstacle non seulement, à toute régularisation postérieure, mais encore à l'application du principe de l'intangibilité des pensions de retraites et à la prescription.

Madame [B] [V] conclut à la confirmation du jugement entrepris et demande à la Cour de condamner la MSA d'Ile de France à lui payer la somme de 5000€ à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices moral et matériel soufferts et la somme de1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle réplique qu'elle a constitué son dossier de demande de rachat de cotisations conformément à ce que lui avait indiqué le collaborateur de la MSA qui lui avait indiqué que le témoignage de deux personnes de confiance qui étaient informées des travaux réalisés à la ferme était suffisant.

Elle fait valoir que la décision d'annulation ne comporte aucun motif recevable et qu'au défaut de motivation s'ajoute la violation du principe du contradictoire.

Elle ajoute que la demande de remboursement de la MSA se heurte aux principes de l'intangibilité des pensions et à celui de la prescription biennale de l'article L355-3 du code de la sécurité sociale.

Elle soutient en tout état de cause ne pas s'être rendue coupable de fraude et produit de nouvelles attestations émanant de témoins oculaires attestant l'avoir vue pendant les périodes considérées travailler chez Mr [E].

Pour plus ample exposé du litige, des faits, de la procédure et des moyens des parties il y a lieu de se référer au jugement critiqué et aux écritures développées oralement à l'audience.

SUR CE

Sur la motivation de la décision de la MSA

Attendu que Madame [B] [V] soutient que la décision de la MSA est insuffisamment motivée.

Attendu cependant que la lettre du 14 novembre 2011indique'Les rapports de contrôle nous conduisent à procéder à l'annulation du rachat que vous avez effectué pour la période 1 juillet 1965 au 30 avril 1983 pour le motif suivant; 'les témoins de la déclaration sur l'honneur ne sont pas oculaires'.

Attendu que cette lettre comporte une motivation suffisante permettant à l'assurée de connaître la cause de la décision d'annulation du rachat de cotisations.

Attendu que ce moyen sera rejeté.

Sur le respect du principe du contradictoire

Attendu que les contrôles réalisés par la MSA ont été diligentés par des contrôleurs assermentés qui ont été chargés de procéder aux vérifications et aux enquêtes administratives nécessaires en application de l'art L114-10 du code de la sécurité sociale.

Attendu que Madame [B] [V] a été entendue au cours de cette enquête et a elle même reconnue que le témoins étaient des collègues de travail auxquels elle avait raconté 'sa jeunesse'mais qu'il ne s'agissait pas de témoins oculaires.

Attendu qu'en tout état de cause le principe du contradictoire n'a pas à s'appliquer à la phase d'enquête.

Attendu que les contrôles ne sont pas entachés d'irrégularité.

Sur la régularisation des cotisations prescrites

Attendu que l'article L351-2 du code de la sécurité sociale fixe le principe selon lequel la durée d'assurance correspond aux périodes cotisées ;

Attendu que la loi Fillon du 21 août 2003 portant réforme des retraites octroie à compter du 1er janvier 2004 le bénéfice d'une retraite aux assurés âgées de 56 à 59 ans réunissant des conditions de durée d'assurance équivalentes non cotisées, des durées d'assurance cotisées, et une date de début d'activité ;

Attendu que les assurés dont le relevé de carrière ne satisfait pas l'ensemble des conditions mais qui ont travaillé aux périodes considérées vont pouvoir compléter la durée prise en compte au moment de la liquidation de leur retraite, en recourant au dispositif de régularisation de cotisations arriérées lorsque des périodes ont été travaillées sans donner lieu à paiement de cotisations ;

Attendu que l'article R 351-11 du code de la sécurité sociale autorise à effectuer des versements rétroactifs de cotisations pour régulariser des périodes d'activité salariée n'ayant pas donné lieu à cotisations en temps opportun en vue de parfaire les droits à pension de retraite ;

Que toutefois cette opération est subordonnée à la condition de faire la preuve de l'activité salariée revendiquée

Sur la preuve de l'activité salariée de Madame [B]

Attendu que la circulaire de 1975 a allégé les modes de preuve et prévoit :

'Toutefois, afin de ne pas pénaliser les salariés dont les employeurs ont disparu ou refusent d'effectuer la régularisation qui leur incombe, il convient d'admettre à titre exceptionnel les demandes et les versements de cotisations arriérées émanant de salariés. Dans ce cas le salarié devra fournir la preuve de son activité pendant la période considérée' ;

Attendu ainsi que les organismes de sécurité sociale ont accepté les déclarations sur l'honneur en l'absence de tout élément matériel permettant d'accréditer la réalité de l'activité salariée ;

Attendu que s'agissant plus particulièrement du régime de protection sociale agricole plusieurs circulaires MSA ont été éditées avant et après l'adoption de la loi du 21 août 2003.

Qu'une circulaire en date du 19 novembre 2001 précise que le salarié doit faire la preuve de l'exercice effectif de son activité à l'époque considérée et que les témoins doivent être en âge de connaître l'intéressé et l'avoir vu travailler à l'époque des faits.

Que toutefois, les organismes soulignent que fin 2008, du fait du nombre important de dossiers de régularisation de cotisations prescrites, et du risque de fraude lié aux conditions de justification des activités salariées par attestations sur l'honneur, les pouvoirs publics ont été alertés, et une mission de contrôle a été confiée à l'inspection générale des Finances et des Affaires sociales ;

Attendu que Madame [B] [V] a demandé le rachat de cotisations des années 1965 1966 1967 1983 au motif qu'elle aurait travaillé sur l'exploitation agricole de Mr [E] à [Localité 1].

Attendu qu'elle a attesté sur l'honneur avoir travaillé pendant cette période chez cet employeur , ladite attestation étant également signée par deux témoins Mr [W] et Mme [J].

Attendu que l'établissement d'une attestation implique nécessairement que le témoin a personnellement assisté aux faits qu'il rapporte.

Attendu que suite à une enquête diligentée par un de ses agents assermenté, Madame [B] [V] a elle même reconnu que les deux témoins étaient des collègues de bureau qui ne l'avaient pas vu travailler pendant la période litigieuse en Côte d'Or.

Attendu qu'il est établi que Madame [B] [V], en sollicitant les attestations de deux témoins de complaisance qui n'étaient pas en mesure d'attester des faits invoqués a commis une fraude manifeste.

Sur le moyen tiré du principe d'intangibilité des retraites et de la prescription

Attendu que compte tenu de la fraude retenue le principe d'intangibilité des retraites posé par l'article R351-10 du code de la sécurité sociale de même que la prescription biennale applicable à l'action intentée parc les organismes payeurs en recouvrement de prestations ne peuvent trouver application.

Sur la régularisation a posteriori de la demande de rachat

Attendu que Madame [B] [V] verse en cause d'appel de nouvelles attestations qui émaneraient de témoins oculaires l'ayant vu travailler à l'époque des faits chez Mr [E].

Attendu cependant que la fraude corrompant tout empêche Madame [B] [V] de régulariser sa situation.

Attendu en effet que la fraude dont s'est rendue coupable Madame [B] [V] entache d'irrégularité la demande de rachat et ne peut lui permettre de rectifier ladite irrégularité.

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le jugement entrepris sera réformé et Madame [B] [V] déboutée de ses demandes.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement contradictoirement,

déclare l'appel recevable en la forme,

Réforme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Confirme la décision en date du 14 novembre 2011 par laquelle la MSA a annulé le rachat de 10 trimestres de cotisations,

Condamne Madame [B] [V] à payer à la MSA d'Ile de France la somme de 35730,91€ à titre de remboursement des pensions vieillesse perçues du 1 janvier 2008 au 31 décembre 2011,

déboute Madame [B] [V] de ses demandes,

Condamne Madame [B] [V] à payer à la MSA d'Ile de France la somme de 800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le GREFFIERLe PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 13/04886
Date de la décision : 26/05/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°13/04886 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-26;13.04886 ?
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