COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
11e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 07 AVRIL 2015
N° 2015/ 209
Rôle N° 13/16456
SAS BABOU
C/
SOCIETE DE GESTION ET D'EXPLOITATION DU PLAN (SGEP)
Grosse délivrée
le :
à :
Me Pierre LIBERAS
SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 09 Juillet 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2012011702.
APPELANTE
SAS BABOU prise en la personne de son représentant légal en exercice d omicilié ès qualité au siège social sis, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Pierre LIBERAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Philippe COLLET, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND substitué par Me Anne-Laure GAY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMEE
SOCIETE DE GESTION ET D'EXPLOITATION DU PLAN (SGEP) Pris en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée par Me Lucien SIMON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Elsa SCHEIDER TRUPHEME, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Mars 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Sylvie PEREZ, conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Mme Véronique BEBON, Présidente
Madame Frédérique BRUEL, Conseillère
Madame Sylvie PEREZ, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Avril 2015.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Avril 2015,
Signé par Mme Véronique BEBON, Présidente et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant acte authentique dressé le 26 avril 2000 par Maître [L], notaire à [Localité 1], la SARL Société de Gestion et d'Entretien du Plan dénommée SGEP, a consenti à la SAS BABOU un bail de sous-location commercial à effet du 30 juin 2000, renouvelé le 1er juillet 2009, d'une durée de neuf années, portant sur des locaux d'une surface d'environ 5000 m², situés dans un bâtiment C à Plan de Campagne soumis au régime de la copropriété.
Par avenant de renouvellement du bail commercial signé les 23 janvier et 8 février 2012, les parties sont convenues, à titre transactionnel, de fixer le montant du loyer annuel dû à compter du 1er juillet 2009, à la somme de 380 000 euros HT, TVA et charges payables en sus.
Suite au refus de la SAS BABOU de s'acquitter d'une facture datée du 17 février 2012 d'un montant de 132 834,83 euros correspondant à un appel de fonds, la SARL SGEP a saisi le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence en paiement de la dite somme, demande à laquelle il a été fait par jugement en date du 9 juillet 2013, assorti de l'exécution provisoire.
La SAS BABOU a interjeté appel du jugement.
Par conclusions notifiées le 29 octobre 2013, la SAS BABOU conclut à l'infirmation du jugement, au débouté de la SARL SGEP de ses demandes et reconventionnellement à sa condamnation à la restitution de la somme de 31.940,40 euros indûment payée, au paiement de celle de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 5 000 euros à titre d'indemnité pour frais de procès.
La SAS BABOU fait observer qu'au regard de l'exécution provisoire dont le jugement querellé est assorti, elle a acquitté la somme de 136 449,05 euros.
Selon l'appelante, les prestations dont le coût lui est réclamé excèdent largement les travaux de réparation d'entretien et de maintenance auxquels elle est tenue et rappelle que la mise en conformité des lieux par rapport aux travaux imposés par l'administration doit être mise à la charge du bailleur comme étant la conséquence de son obligation de délivrance.
Elle fait valoir que, sur le montant de la facture réclamée, lui sont réclamées des sommes étrangères aux problèmes de sprinklage et de sécurité.
Par conclusions signifiées le 5 décembre 2013, la SARL SGEP conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la SAS BABOU au paiement de la somme de
132 834,83 euros TTC, correspondant aux charges de copropriété de l'année 2011, avec intérêts de droit à compter du 17 février 2012, au débouté de la SAS BABOU de l'ensemble de ses demandes et à sa condamnation au paiement de la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure.
Elle rappelle que les travaux réalisés ont été imposés à la copropriété par la Direction Départementale des Services d'Incendie et de Secours des Bouches-du-Rhône, s'agissant de l'installation de spinklers de tout le bâtiment.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
La SARL SGEP expose que la facture d'un montant de 132 834,83 euros TTC dont elle réclame le paiement est afférente à des charges de copropriété pour l'année 2011et concerne des travaux qui ont été imposés par la Direction Départementale des Services d'Incendie des Bouches Du Rhône qui, suite à une vérification les 23 décembre 2008 et 12 mai 2009 du système d'extinction automatique à eau, a établi l'absence de conformité du système sprinkleurs dans un procès-verbal daté du 12 mars 2010.
Dans une lettre du 10 avril 2012, la SARL SGEP précisait à la SAS BABOU que toute installation sprinkler devait faire l'objet d'une remise en conformité tous les 30 ans avec la dernière règle en vigueur.
L'appel de fonds concerne également la réfection et l'aménagement des aires de stationnement dont les travaux ont été votés lors d'une assemblée générale de la copropriété le 11 juillet 2011.
Le bail comporte deux chapitres relatifs aux charges :
- un premier intitulé 'CHARGES LOCATIVES' ;
- un second intitulé ' CHARGES ET CONDITIONS',
libellés comme suit :
CHARGES LOCATIVES
I / Charges refacturées mensuellement par le bailleur :
Le sous-locataire remboursera au sous-bailleur les charges locatives auxquelles les locataires sont ordinairement tenus et notamment celles comprises dans les charges de copropriété, ainsi que celles afférentes aux prestations fournies par le sous-bailleur à savoir :
- contrat de vérification d'installation R. I. A (robinet d'incendie armé) ;
- surveillance des détecteurs de fumée, vérification des trappes de désenfumage ;
- nettoyage des allées et parkings ;
- fourniture d'eau par le Canal de Provence et la SEM pour les parties communes ;
- électricité des parties communes ;
- gardiennage des parkings... ;
- maintenance et contrats se rapportant au système commun du sprinklage à savoir les pompes électriques et diesel ainsi que l'installation se trouvant dans ce même local ;
- surveillance de l'alarme incendie ...
Il convient de s'arrêter à l'expression 'les charges locatives auxquelles les locataires sont ordinairement tenus et notamment celles comprises dans les charges de copropriété'.
Le statut des baux commerciaux ne comporte aucune disposition spécifique relative aux charges locatives.
La référence au décret du 26 août 1987 par la SAS BABOU ne peut être retenue dans la mesure où les parties n'en sont pas expressément convenues.
Par contre, il est traditionnellement admis que les charges récupérables sur le locataire sont les charges courantes et de menu entretien et qu'en présence d'une énumération limitative figurant au bail, le bailleur ne peut obtenir le remboursement de charges qui n'y sont pas mentionnées.
Il ressort de l'énumération figurant au chapitre du bail ci-dessus, que sont prévues la vérification des robinets incendie armés et la maintenance et contrats se rapportant au système commun du sprinklage, mais aucunement les travaux de mise en conformité relative au système d'incendie et à la réfection des parkings.
II / Charges directement supportées et prises en compte par le sous locataire:
Le sous locataire prendra directement à sa charge les contrats se rapportant à toutes les missions des organismes de sécurité propres à la surface objet des présentes, relatifs aux vérifications électriques, entretien et réparation des installations de climatisation, de chauffage, des extincteurs, des sprinklages, des RIA, des détecteurs de fumée et de l'ascenseur ainsi que les contrats de maintenance qui les concernent, et plus généralement toutes charges supplémentaires de sécurité et personnel y afférent ou autres rendues nécessaires par l'activité du sous locataire au sein du bâtiment.
Le sous locataire devra effectuer à ses seuls frais tous travaux rendus nécessaires sur ces installations, il devra plus généralement prendre à sa charge directe tous travaux, personnel, installation de matériel ou contrats tant de vérification que d'entretien rendus nécessaires par l'exercice de son activité dans les lieux loués.
Cette disposition concerne uniquement les obligations du sous locataire au regard de l'activité développée dans les lieux loués, sauf à relever, au regard de l'énumération de ces obligations, que celui-ci n'est tenu, au titre des sprinklages et des RIA, que d'une obligation d'entretien et de réparation dans le cadre des contrats de maintenance qu'il a souscrits, la référence faite par le sous bailleur aux charges supplémentaires de sécurité, relevant de l'exécution des dits contrats et non des travaux de mise en conformité de ces éléments dont celui-ci sollicite le remboursement.
CHARGES ET CONDITIONS
Le sous locataire reconnaît que les locaux lui sont livrés « coque sécurité » et en conséquence fera son affaire personnelle de toutes les prescriptions qui pourraient être édictées par les services de sécurité civile quant aux travaux éventuels, même dits de gros oeuvre, à réaliser sur ces locaux, afin de mise en conformité avec la réglementation afférente aux établissements recevant du public.
Il s'agit des prescriptions de sécurité concernant les locaux exploités par la SAS BABOU en ce qu'ils accueillent du public. Le procès-verbal dressé le 12 mars 2010 par la Direction Départementale des Services d'Incendie et de Secours des Bouches du Rhône n'a relevé à l'encontre de la SAS BABOU qu'un problème d'éclairage sur une partie du magasin de la sous locataire mais a conclu à la poursuite de l'exploitation de l'établissement.
Il en ressort que les travaux engagés par les différents copropriétaires, par leur nature, ne relèvent pas des obligations de prise en charge de la SAS BABOU au titre de la clause ci-dessus.
Au regard des développements qui précèdent, le jugement du tribunal de commerce sera infirmé en ce qu'il a mis le coût des travaux litigieux à la charge de la SAS BABOU.
Celle-ci forme une demande reconventionnelle en remboursement de la somme de
31 940,40 euros HT qu'elle indique avoir été mise en demeure de payer en référence à la clause résolutoire du bail, précisant que cette somme ne correspondait pas à des travaux de simple entretien de sorte qu'elle n'y était pas tenue.
L'appel de fonds adressé à la SAS BABOU le 1er mars 2011 pour la somme ci-dessus concerne des charges de copropriété, non détaillée dans le document.
Dans la lettre du 22 août 2011 de mise en demeure visant la clause résolutoire, la SARL SGEP indiquait qu'il s'agissait de travaux de conformité, votés en assemblée générale par les copropriétaires.
Il s'en déduit, compte tenu des éléments ci-dessus développés, que le coût de ces travaux n'étaient pas récupérable sur le sous locataire, la SARL SGEP devant être condamnée au remboursement de la dite somme.
La SAS BABOU sollicite des dommages et intérêts pour procédure abusive justifiée selon l'appelante par la persistance de la SARL SGEP à lui réclamer des sommes auxquelles elle ne peut prétendre, cette initiative procédurale du sous bailleur, laquelle a été favorablement accueillie devant le premier juge, ne constituant que l'exercice de ses droits par le plaideur.
Il y a lieu de condamner la SARL SGEP à payer à la SAS BABOU la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement, par décision contradictoire, en dernier ressort,
Infirme le jugement du tribunal de commerce d'Aix-en-Provence prononcé le 9 juillet 2013 ;
Statuant à nouveau :
Déboute la SARL SGEP de sa demande ;
La condamne à payer à la SAS BABOU la somme de 31 940,40 HT ;
Y ajoutant :
Déboute la SAS BABOU de sa demande de dommages et intérêts ;
Condamne la SARL SGEP à payer à la SAS BABOU la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne la SARL SGEP aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,