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20/03/2015 | FRANCE | N°13/15473

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre b, 20 mars 2015, 13/15473


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 20 MARS 2015



N° 2015/













Rôle N° 13/15473





SA INTRAMAR





C/



GRAND PORT MARITIME DE [Localité 1]

BUREAU CENTRAL DE LA MAIN D'OEUVRE BCMO

[A] [V]

M° [Y], Liquidateur judiciaire de UPA

M° [D], Liquidateur amiable de la SA SOMOTRANS

AGS - CGEA DE [Localité 1] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST









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Grosse délivrée

le :

à :

Me Michel FRUCTUS

Me Arnaud CLERC

Me Eric SEMELAIGNE

Me Cyril MICHEL

Me Frédéric MARCOUYEUX



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement d...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 20 MARS 2015

N° 2015/

Rôle N° 13/15473

SA INTRAMAR

C/

GRAND PORT MARITIME DE [Localité 1]

BUREAU CENTRAL DE LA MAIN D'OEUVRE BCMO

[A] [V]

M° [Y], Liquidateur judiciaire de UPA

M° [D], Liquidateur amiable de la SA SOMOTRANS

AGS - CGEA DE [Localité 1] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST

Grosse délivrée

le :

à :

Me Michel FRUCTUS

Me Arnaud CLERC

Me Eric SEMELAIGNE

Me Cyril MICHEL

Me Frédéric MARCOUYEUX

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de [Localité 1] - section CO - en date du 12 Juin 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 10/2857.

APPELANTE

SA INTRAMAR, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Frédéric MARCOUYEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

GRAND PORT MARITIME DE [Localité 1], demeurant [Adresse 2]

ni comparant, ni représenté, ayant constitué Me Nicolas FALQUE

BUREAU CENTRAL DE LA MAIN D'OEUVRE BCMO, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Frédéric MARCOUYEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [A] [V], demeurant [Adresse 8]

représenté par Me Albert HINI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Cyril MICHEL, avocat au barreau de MARSEILLE

M° [Y], Liquidateur judiciaire de UPA, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Frédéric MARCOUYEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

M° [D], Liquidateur amiable de la SA SOMOTRANS, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Eric SEMELAIGNE, avocat au barreau de MARSEILLE

AGS - CGEA DE [Localité 1] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST, demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Michel FRUCTUS, avocat au barreau de [Localité 1] substitué par Me François ARNOULD, avocat au barreau de [Localité 1], Me Pierre CAPPE DE BAILLON, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 Janvier 2015 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Présidente de chambre

Madame Christine LORENZINI, Conseiller

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Priscille LAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2015.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2015.

Signé par Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Présidente de chambre et Mme Priscille LAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Monsieur [A] [V] a travaillé pour le compte de la société Intramar sur le port de [Localité 1] du 2 février 1962 au 30 avril 1993.

Il a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille le 11 octobre 2010 aux fins de réparation de son préjudice d'anxiété et du préjudice lié au bouleversement dans les conditions d'existence à l'encontre :

- du Grand Port maritime de [Localité 1] (ci-après GPMM), établissement public,

- de la [Adresse 4] (ci-après CCCP) à titre personnel et aux droits du Service Auxiliaire de la manutention (SAM),

- de la société Industrielle de Trafic Maritime (Intramar).

Par jugement de départage en date du 13 juin 2013, mentionnant en outre et par erreur les sociétés Upa, Somotrans, le BCMO et le CGEA, le conseil de prud'hommes de Marseille, après avoir pris acte du désistement de Monsieur [A] [V] à l'égard du GPMM, du BCMO et de la CCCP, a :

- rejeté les exceptions d'incompétence au profit de tribunal des affaires de sécurité sociale et au profit du FIVA,

- rejeté les fins de non-recevoir,

- constaté que Monsieur [A] [V] démontre avoir travaillé pour la société Intramar,

- mis les sociétés Upa et Somotrans hors de cause,

- constaté que le BCMO ne possède pas les attributs d'un employeur à l'égard des dockers,

- mis le BCMO hors de cause,

- constaté que Monsieur [A] [V] a été exposé à l'inhalation de fibres d'amiante à l'occasion de son travail pour la société Intramar,

- constaté qu'il rapporte la preuve du manquement commis par cette société en matière d'obligation de sécurité de résultat,

- condamné la société Intramar à payer à Monsieur [A] [V] :

* 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice d'anxiété,

* 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié au bouleversement dans ses conditions d'existence,

- dit ce jugement commun et opposable à Maître [D], en qualité de mandataire liquidateur de la société Somotrans, à Maître [Y], en qualité de mandataire liquidateur de la société Upa, et au CGEA,

- rappelé que la société Intramar est in bonis et que le CGEA n'est pas tenu à garantie,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice du BCMO, de Maître [D] et de Maître [Y], ès qualités,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société Intramar aux dépens.

La société Intramar a interjeté appel de cette décision le 15 juillet 2013, en intimant uniquement Monsieur [A] [V]. Les autres parties mentionnées dans le jugement ont néanmoins été convoquées et ont comparu, à l'exception du GPMM qui n'était ni présent, ni représenté à l'audience.

Prétentions et moyens des parties :

' Dans ses écritures déposées et soutenues oralement à l'audience, communes à plusieurs affaires inscrites au rôle, la société Intramar, concluant à l'infirmation du jugement, soulève à titre liminaire l'incompétence rationae materiae de la juridiction prud'homale en faisant valoir que l'anxiété alléguée est une pathologie trouvant son origine dans l'exercice des fonctions de docker et demande à la cour de renvoyer les salariés à mieux se pourvoir devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône, en application des articles L. 451-1 et L. 452-1 à L. 452-5 du code de la sécurité sociale et L. 1411-4 al. 2 du code du travail, et au visa de la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, le cas échéant après qu'ils aient sollicité la reconnaissance du caractère professionnel de leur pathologie auprès du service compétent, à savoir la caisse d'assurance maladie, et demande que l'intégralité des bulletins de salaire soient écartés des débats, les requérants n'identifiant pas ceux produits avant le 16 janvier 2015.

A titre subsidiaire, sur le fond, elle conclut au rejet de l'ensemble des demandes formées par Monsieur [A] [V], qui a connu une multiplicité d'employeurs et qui ne justifie nullement :

- de la qualité d'employeur de la société Intramar à son égard, ne produisant aucune feuille de paie en ce sens,

- de son exposition à l'amiante du fait de celle-ci,

- d'une quelconque faute de sa part et d'un lien entre cette prétendue faute et son préjudice,

- de la réalité de ce préjudice, que ce soit en son principe ou en son quantum.

Elle demande en outre qu'il soit constaté qu'elle justifie d'un cas de force majeure exonératoire de responsabilité et qu'il ne peut exister aucune obligation solidaire ou in solidum.

Elle sollicite sa condamnation à lui verser la somme de 500 euros en compensation de ses frais irrépétibles.

' Monsieur [A] [V] a fait déposer et soutenir oralement à l'audience des conclusions écrites, communes à plusieurs des affaires du rôle, dans lesquelles il demande à la cour de :

- lui donner acte de son désistement à l'encontre du BCMO, de la CCCP et du GPMM,

- vu l'article 11 du code de procédure civile, avant dire droit, en tant que de besoin,

ordonner aux sociétés intimées la production de leurs DADS entre 1977 et 1993 ou à défaut, à la CCCP,

sur le fond, confirmant le jugement déféré,

- constater qu'il a été employé par la société Intramar, qu'elle n'a pas respecté les dispositions du décret n°77-949 du 17 août 1977 et qu'elle l'a exposé aux poussières d'amiante sans protection,

en conséquence,

- déclarer la société Intramar responsable des préjudices qu'il subit,

- la condamner à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice d'anxiété ainsi que celle de 15 000 euros en réparation du préjudice résultant directement de la violation de son obligation de sécurité de résultat, outre celle de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Il fait principalement valoir qu'il a été employé pour le compte de la société Intramar du r 2 février 1962 au 30 avril 1993 ; que la juridiction prud'homale est compétente pour statuer sur sa réclamation ; que l'employeur est tenu à une obligation de sécurité de résultat ; que parmi les acconiers ayant réalisé la majorité des déchargements d'amiante figurent notamment la société Intramar mentionnée sur la liste établie par la direction générale du port de [Localité 1] dans une lettre adressée au ministère de l'équipement et des transports le 21 décembre 1999 ; que même s'il est en mesure de justifier de ses relations contractuelles avec cette société par la communication d'un certificat de travail et d'attestations émanant notamment d'anciens collègues, valables et probantes, il appartient à la cour, eu égard à l'impasse probatoire dans laquelle il se trouve, de procéder à l'aménagement de la charge de la preuve par analogie avec la jurisprudence de la Cour de cassation concernant les victimes d'une contamination d'origine transfusionnelle ayant subi des transfusions sanguines multiples, en considérant que le seul fait pour un docker, par ailleurs bénéficiaire de l'ACAATA, d'avoir travaillé sur le port de [Localité 1] pendant la période visée à l'arrêté suffit à caractériser l'existence du préjudice subi, en raison de l'impossibilité dans laquelle il se trouve d'apporter tant la preuve de sa relation de travail avec l'une ou l'autre société du fait des modalités d'organisation du travail de l'époque que celle de son exposition à l'amiante sans aucune protection, fait non mentionné sur les documents en sa possession et dont seul l'employeur détient la preuve ; qu'il convient en conséquence d'imputer à la société mise en cause la charge de prouver qu'elle ne l'a pas employé, ni exposé à l'amiante sans protection ; que la cour pourra ordonner si nécessaire, avant dire droit, à celle-ci de produire les DADS entre 1977 et 1993 et, à défaut, en tirer les conséquences, voire enjoindre à la CCCP de les communiquer ; que, dans le cadre de son activité pour le compte de la société Intramar, il a été mis en contact avec l'amiante sans protection efficace, en méconnaissance de la législation applicable (loi du 12 juin 1893 concernant l'hygiène et la sécurité des travailleurs dans les établissements industriels, décret du 10 juillet 1913 modifié le 13 décembre 1948, le 6 mars 1961 et le 15 novembre 1973, décret du 17 août 1977) et que ce faisant, les employeurs - qui ne pouvaient ignorer les dangers de l'amiante - ont délibérément maintenu leurs salariés dans l'ignorance de la dangerosité des particules d'amiante et du risque mortel qu'il représentait, les privant ainsi d'une chance de s'y soustraire, et n'ont pas respecté leur obligation de sécurité de résultat, ce qui lui fait nécessairement subir un préjudice qu'il convient d'indemniser ; que l'indemnisation du préjudice autonome d'anxiété est ouverte à tout salarié ayant travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel, pendant une période où étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante ; qu'il n'existe aucune corrélation entre la durée d'exposition et la probabilité de développer une pathologie, en sorte que le préjudice d'anxiété doit être indemnisé de manière forfaitaire et équivalente pour l'ensemble des demandeurs ; que la prescription n'a pas couru tant que son droit ne lui a pas été révélé et que la publication de l'arrêté du 7 juillet 2000 ayant classé le port de [Localité 1] comme 'établissement amiante' a été le premier élément générateur de son anxiété.

' Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience, communes à l'ensemble des affaires inscrites au rôle, la société Somotrans, représentée par Monsieur [Z] [D], demande à la cour, confirmant le jugement déféré, de :

à titre liminaire

- constater l'irrecevabilité de la demande dirigée à tort contre la société Somotrans en ce qu'elle n'a pas été employeur de dockers,

- constater en outre l'irrecevabilité de la demande en ce qu'elle est dirigée à tort contre la société Somotrans, Monsieur [A] [V] ne produisant aucun bulletin de salaire mentionnant une seule journée de travail pour le compte de la société Somotrans et ne faisant pas la preuve d'un contrat de travail avec cette société, notamment en ce que les attestations produites ne constituent pas une preuve acceptable,

- dire bien fondée et justifiée la mise en cause du BCMO de [Localité 1], venant aux droits des BCMO de [Localité 3] et de [Localité 2] dès lors que ceux-ci ont exercé les prérogatives d'employeurs à l'égard des dockers pendant la période 1957-1993 visée dans l'arrêté du 7 juillet 2000,

- en conséquence, mettre la société Somotrans hors de cause, d'une part en ce qu'elle n'a pas revêtu la qualité d'employeur de Monsieur [A] [V] pendant la période d'exposition potentielle à l'amiante et d'autre part, en raison de sa dissolution du fait de la cession totale de ses actifs, puis de la clôture subséquente de la procédure collective dont elle a fait l'objet ; il observe à ce sujet que, faute pour la société Somotrans d'avoir été l'employeur du demandeur, celui-ci ne pourrait invoquer à son encontre qu'une créance étrangère au contrat de travail, laquelle aurait dû alors faire l'objet d'une déclaration entre les mains du représentant des créanciers, et que toutefois, si la cour considère qu'elle a bien été l'employeur, la demande en réparation devrait être présentée au CGEA-AGS de [Localité 1], le jugement d'ouverture de la procédure collective de Somotrans en date du 18 avril 1996 étant postérieur à la période d'exposition éventuelle à l'amiante.

Subsidiairement sur le fond, Monsieur [D], ès qualités, demande à la cour de dire et juger que le demandeur ne démontre pas avoir travaillé régulièrement pour la société Somotrans, ni que cette société a commis une faute, ni qu'il a subi un préjudice et d'écarter la solidarité de même que la responsabilité in solidum entre les sociétés manutentionnaires.

Il fait valoir que l'exposition à l'amiante, lorsqu'elle constitue une maladie professionnelle, est indemnisée par la sécurité sociale et, lorsque tel n'est pas le cas, par l'ACAATA ; que si le port de [Localité 1] a été classé comme 'port amiante', la situation des dockers doit être distinguée de celle des salariés ayant travaillé dans un établissement nommément identifié et inscrit sur une liste établie par arrêté, ce qui n'est pas le cas de la société Somotrans ; que le demandeur ne prouve pas que cette société lui ait demandé de manipuler des produits amiantés ou même qu'elle ait réalisé la manutention de tels produits, ni en conséquence qu'elle l'ait exposé à l'amiante ; que les attestations versées aux débats, établies longtemps après les faits, par des proches ou par d'autres dockers demandeurs, en termes quasiment identiques, à partir d'un modèle préétabli produit de manière probablement fortuite dans l'un des dossiers, et qui ne mentionnent aucune date de début ni de fin de contrat, ni ne rapportent aucun fait précis, sont dépourvues de force probante ; que l'attestation établie par Mme [I] est purement mensongère et a d'ores et déjà été jugée inopérante ; que la société Somotrans n'était pas tenue de conserver les DADS, qu'elle est dans l'incapacité de produire ces documents et que les salariés renversent la charge de la preuve en demandant d'ordonner cette production si nécessaire, alors même qu'il leur appartient de produire leurs bulletins de paie afin de prouver une activité régulière pour le compte de cette société ; qu'à supposer même qu'une exposition à l'amiante du fait de la société Somotrans soit démontrée, elle n'aurait pu être en tout état de cause que très marginale et irrégulière et ne serait intervenue qu'en plein air ou dans un espace très aéré, ce qui limiterait ou exclurait le risque de contamination ; que le demandeur ne précise d'ailleurs pas les moyens de protection dont il aurait dû bénéficier ; qu'il ne démontre pas que la société Somotrans ait été consciente du danger, ni qu'elle ait enfreint la réglementation alors applicable ; que le risque a été évoqué pour la première fois lors de la réunion du CHSCT du port autonome de [Localité 1], tenue le 22 décembre 1999 ; que l'obligation de sécurité de résultat résulte de la loi n°91-1414 du 31 décembre 1991, dont l'appréciation relèverait en tout état de cause de la compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale, qu'elle n'est pas rétroactive, qu'elle ne saurait donc générer un droit à une indemnisation sans que celui qui y prétend rapporte la preuve du manquement à celle-ci sur une période antérieure à son entrée en vigueur, que par ailleurs celui-ci ne rapporte pas la preuve d'un préjudice personnel, né, actuel et certain, distinct du préjudice d'anxiété ; que le préjudice d'anxiété invoqué est purement éventuel, que le lien de causalité avec une faute imputable à Somotrans n'est pas établi, et qu'au surplus le demandeur ne justifie d'aucun suivi médical.

A titre infiniment subsidiaire, Monsieur [D], ès qualités, demande à la cour d'apprécier le préjudice réellement subi par le demandeur, imputable à la société Somotrans, d'ordonner une expertise afin de déterminer tout à la fois les préjudices subis par le demandeur et la part de responsabilité de la société Somotrans, et de dire et juger que le CGEA AGS devra garantir toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre.

Enfin, il sollicite la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens.

' Le CGEA délégation régionale du Sud-Est a fait développer oralement à l'audience des conclusions écrites, communes à l'ensemble des affaires du rôle et qui concernent certaines sociétés non dans la cause, aux termes desquelles il demande à la cour, infirmant le jugement déféré, de :

à titre liminaire,

- prononcer sa mise hors de cause concernant la société Somotrans pour laquelle sa garantie ne peut intervenir dès lors qu'après avoir été placée en redressement judiciaire par jugement du 18 avril 1996 et suite à la cession de ses actifs, cette société a fait l'objet d'un jugement de clôture des opérations de la procédure, prononcé le 21 novembre 2007, suivi d'un procès-verbal de décision de l'actionnaire unique en date du 14 décembre 2007, désignant Me [Z] [D] en qualité de 'liquidateur sociétaire',

- prononcer sa mise hors de cause pour cette société en ce qu'elle n'a jamais été l'employeur de certains demandeurs,

- prononcer sa mise hors de cause concernant la société Upa, en ce qu'elle n'a jamais été l'employeur de certains demandeurs,

- prononcer sa mise hors de cause en ce que certains demandeurs ne démontrent pas avoir travaillé pour une société aujourd'hui en liquidation judiciaire,

- prononcer sa mise hors de cause pour les demandes dirigées contre les sociétés Socoma et Intramar, sociétés in bonis,

- déclarer irrecevables les demandes de condamnation solidaire à l'encontre de sociétés dont l'une est en liquidation judiciaire,

- se déclarer incompétente au profit du tribunal des affaires de sécurité sociale de Boulogne sur Mer, seul compétent pour statuer sur les demandes des salariés bénéficiaires de l'ACAATA, qui tendent à contester le montant de l'allocation,

- déclarer les demandes des autres salariés irrecevables au motif qu'elles doivent être portées devant le fonds spécifique créé par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;

- dire et juger que le préjudice d'anxiété ne peut pas naître avant que les salariés aient eu connaissance de l'arrêté ministériel d'inscription de la société sur la liste des établissements permettant la mise en oeuvre de l'arrêté ACAATA, que ceux-ci n'apportent pas la preuve d'avoir eu connaissance de cet arrêté avant l'ouverture de la procédure collective de la société, que les créances au titre du préjudice d'anxiété sont nées postérieurement à l'ouverture de la procédure collective et ne sont donc pas garanties par l'AGS, et en conséquence, déclarer ces créances non susceptibles de garantie,

sur le fond,

- débouter le salarié de sa demande d'indemnisation du chef d'un préjudice d'anxiété, faute d'en rapporter la preuve au titre des articles 6 et 9 du code de procédure civile, lequel ne résulte pas du dispositif légal ni d'une simple relation de travail avec les sociétés concernées, mais du fait d'avoir travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi de 1988 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, et qu'il ne justifie pas avoir subi des contrôles et examens médicaux réguliers,

- le débouter de sa demande d'indemnisation du préjudice d'anxiété découlant du bénéfice de l'ACAATA, un dispositif légal n'entraînant pas de préjudice moral,

- rejeter la demande nouvelle de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, les demandeurs ne qualifiant pas ce préjudice, n'expliquant pas de quoi il est constitué ni quand il serait né, et bénéficiant déjà d'une indemnisation dans le cadre de l'ACAATA au titre du préjudice d'anxiété,

- dire et juger que le préjudice découlant du manquement à l'obligation de sécurité de résultat n'est autre que le préjudice spécifique d'anxiété et que la demande formulée à ce titre fait double emploi avec celle en réparation de ce préjudice,

- dire et juger que l'obligation de sécurité de résultat n'était pas applicable à l'époque des faits puisqu'elle découle de dispositions de la loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991, aujourd'hui codifiées à l'article L.4121-1 du code du travail et que la jurisprudence des tribunaux des affaires de sécurité sociale n'est pas applicable et, en tout état de cause, toute réparation de ce chef serait inopposable à l'AGS ; que l'adhésion à l'ACAATA n'implique pas la faute de l'employeur ; que le Conseil d'Etat a reconnu la responsabilité de l'Etat pour ses carences dans la prévention des risques liés à l'exposition des travailleurs aux poussières d'amiante,

- dire et juger que la faute de l'employeur n'est pas établie et que le salarié ne démontre pas la violation d'une règle par les sociétés, démonstration qui lui incombe, la jurisprudence relative au sang contaminé n'étant pas applicable, et le débouter faute de démontrer avoir été personnellement victime de la violation d'une règle de protection liée à l'amiante, ni même des dispositions d'hygiène et de sécurité alors en vigueur, ni de prouver l'existence d'un lien de causalité direct entre une telle faute et le préjudice allégué,

en tout état de cause,

- à ce que ne soit pas retenu à la charge de l'employeur une obligation de sécurité de résultat de plein droit, non conforme aux dispositions du droit communautaire, du droit constitutionnel et au principe de séparation des pouvoirs, la faute de l'employeur étant présumée par la jurisprudence de la Cour de cassation,

- à l'absence d'opposabilité à l'AGS des créances revendiquées qui sont nées postérieurement à l'ouverture des procédures collectives des sociétés Upa et Somotrans, les salariés ne démontrant pas avoir eu connaissance des dangers de l'amiante avant l'arrêté ministériel d'inscription du site sur le liste des établissements permettant la mise en oeuvre de l'ACAATA,

- à la réduction des dommages et intérêts susceptibles d'être alloués, à l'application des dispositions du code du travail fixant les règles et limites de la garantie légale et à l'arrêt du cours des intérêts au jour de l'ouverture de la procédure collective en application de l'article L 622-28 du code de commerce, ces intérêts n'ayant pu courir avant la mise en demeure conformément à l'article 1153 du code civil,

- à ce qu'il soit statué ce que de droit quant aux frais d'instance sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'UNEDIC AGS et à la condamnation des demandeurs aux entiers dépens.

' Dans ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience, communes à plusieurs des affaires inscrites au rôle, Maître [Y], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Upa, soulève à titre liminaire'irrecevabilité de l'appel formé à son encontre par Monsieur [A] [V] alors qu'elle n'était pas régulièrement dans la cause devant la juridiction de première instance. Toujours à titre liminaire, elle soulève l'incompétence rationae materiae de la juridiction prud'homale au motif que l'anxiété alléguée est une pathologie trouvant son origine dans l'exercice des fonctions de docker et demande à la cour de renvoyer les salariés à mieux se pourvoir devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône, en application des articles L. 451-1 et L. 452-1 à L. 452-5 du code de la sécurité sociale et L.1411-4 al. 2 du code du travail, et au visa de la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, le cas échéant après qu'ils aient sollicité la reconnaissance du caractère professionnel de leur pathologie auprès du service compétent, à savoir la caisse d'assurance maladie.

Subsidiairement sur le fond, Maître [Y] conclut au débouté des salariés de leurs prétentions et à leur condamnation à lui payer chacun la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, soutenant que les arrêtés portant liste des ports dans lesquels les personnels peuvent bénéficier de l'ACAATA ne suffisent pas à justifier de la qualité d'employeur de la société Upa, ni de l'exposition au risque par celle-ci et que les salariés ne démontrent pas avoir travaillé pour celle-ci, ou alors à de très rares occasions ; que les attestations qu'ils produisent ont été établies pour les besoins de la cause, qu'elles sont imprécises et sans valeur probante ; qu'ils ne démontrent pas avoir été exposés à l'amiante par la société Upa, ni que cette société a commis une faute, ni qu'il existe un lien de causalité entre cette prétendue faute et le préjudice allégué, d'autant que l'amiante a représenté une part infime des marchandises manutentionnées sur l'ensemble du port de [Localité 1] (moins de 0.1 % des volumes hors liquides répartis sur plus de quatre-vingts entreprises employant des dockers) et que les acconiers ne peuvent être considérés comme des professionnels, voire des utilisateurs de l'amiante, aucune entreprise de manutention n'étant visée dans les listes établies par décret relatives aux entreprises et établissements où étaient fabriqué ou traité de l'amiante ; que si la cour venait à retenir la qualité d'employeur de la société Upa, celle-ci justifie d'un cas de force majeure exonératoire de responsabilité, en ce qu'elle n'était nullement renseignée sur le risque auquel elle pouvait exposer ses salariés alors qu'elle s'était entourée de l'ensemble des institutions ayant pour mission de l'alerter qui étaient invitées à chacune des réunions du CHSCT, qu'elle n'a jamais fait l'objet d'un rappel à la loi, ni d'une injonction et encore moins d'une sanction en raison d'un défaut dans la prise en compte et la gestion d'un risque professionnel, qu'elle avait l'obligation réglementaire de manutentionner les navires, et qu'en tout état de cause, aucune mesure utile ne pouvait être prise en l'état d'un travail en plein air et de l'absence de moyen utile de protection individuelle à l'époque des faits.

A titre infiniment subsidiaire, Maître [Y] soutient que le préjudice d'anxiété allégué n'est pas indemnisable ni justifié, à défaut de preuve tant d'un suivi spécifique aux allocataires ACAATA que de l'absence d'un comportement à risque (tabagisme...). Il fait encore valoir qu'il n'existe en l'espèce aucune obligation solidaire ou in solidum.. Enfin, il demande à ce qu'il soit dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

' Aux termes de ses écritures développées à la barre, le BCMO, exposant que le Conseil d'Etat l'a, dans une décision de principe, qualifié de 'section professionnelle du service départemental de la main d'oeuvre', demande à la cour de constater qu'il n'a pas la personnalité juridique et ne peut donc faire l'objet d'aucune condamnation, qu'il n'est pas l'employeur des ouvriers dockers, qu'aucune demande de condamnation n'est formulée à son encontre, et en conséquence, de déclarer irrecevable la demande formulée par la société Somotrans à son encontre aux fins de lui voir reconnaître la qualité d'employeur.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le désistement de Monsieur [A] [V] de ses demandes formées à l'encontre du BCMO, de la CCCP et du GPMM a déjà été acté par le premier juge. Il est inutile de lui en donner acte une nouvelle fois.

A titre liminaire, il convient de mettre hors de cause la société Upa, la société Somotrans et le CGEA, parties qui n'étaient régulièrement dans la procédure devant la juridiction du premier degré et contre lesquelles par ailleurs aucune demande n'a jamais été formulée.

Sur l'exception d'incompétence :

Selon l'article L.1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes est compétent pour connaître des différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions de ce code entre les employeurs ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient.

Dès lors que les demandes en réparation d'un préjudice extra-patrimonial formées par Monsieur [A] [V] sont fondées sur l'inexécution par le ou les employeurs de l'obligation de sécurité de résultat dérivant du contrat de travail qui les aurait liés, que le préjudice d'anxiété correspond non pas à une maladie professionnelle répertoriée mais à l'inquiétude de déclencher à tout moment une maladie en rapport avec une exposition à l'amiante et que ni le droit au bénéfice du dispositif prévu par l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, ni le montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité, dont on ignore s'il en a été attributaire, ne sont contestés, la juridiction prud'homale est compétente pour connaître du litige et le jugement sera confirmé à ce titre.

Sur le fond :

Monsieur [A] [V] invoque une impasse probatoire devant conduire selon lui et par analogie avec la jurisprudence de la Cour de cassation sur la contamination transfusionnelle à faire peser la charge de la preuve sur la société en cause, tant de son absence de la qualité d'employeur que du fait qu'il a été exposé à l'amiante par son fait. Cependant, il doit être relevé qu'il :
 - ne conteste pas avoir reçu en contrepartie de son activité de docker des bulletins de salaire qu'il lui appartenait de conserver ; 

- ne produit aucun élément de nature à établir que la manutention de l'amiante a constitué une part significative de l'activité des sociétés de manutention au cours de la période pendant laquelle il a été employé sur le port de laquelle on pourrait déduire qu'il a été nécessairement exposé à l'amiante par le fait de l'une d'entre elles.

En conséquence, il appartient à Monsieur [A] [V] de justifier tout à la fois de l'existence d'une relation de travail avec la société Intramar et du fait qu'elle l'a exposé à l'amiante.

Sur la qualité d'employeur de la société Intramar à l'égard de Monsieur [A] [V]

Pour faire la preuve de l'existence d'une relation de travail avec la société Intramar Monsieur [A] [V] communique :

- un certificat de travail établi le 10 janvier 2000 par la CCCP qui mentionne qu'il a été inscrit en qualité de docker professionnel le 1er février 1962 et radié le 1er mai 1993 pour bénéficier d'un congé conversion le 1er mai 1993,

- un certificat établi par la SA Intramar le 3 mai 1993 certifiant que Monsieur [A] [V] a été employé par elle-même et ses prédécesseurs du 2 février 1962 au 30 avril 1993 en qualité de pointeur chef.

En l'état de ces documents, il est établi que Monsieur [A] [V] a travaillé de manière régulière pour la société Intramar.

Sur les préjudices allégués

L'obligation de sécurité de résultat qui pèse sur l'employeur n'exclut pas toute cause d'exonération de responsabilité. Elle n'est donc pas contraire aux dispositions du droit communautaire, du droit constitutionnel et au principe de la séparation des pouvoirs.

Il doit être rappelé que si le site du port de [Localité 1] est inscrit sur la liste des ports permettant aux dockers de bénéficier de l'allocation anticipée des salariés de l'amiante, liste fixée par arrêté du 7 juillet 2000, modifié, la société Intramar ne figure sur la liste des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, qu'elle ne faisait pas partie des établissements de fabrication, flocage et calorifugeage à l'amiante, ni des établissement de construction et de réparation navales et ne fabriquait ni ne traitait l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante et ne peut en conséquence être considérée comme une entreprise utilisatrice d'amiante.

Monsieur [A] [V] qui invoque l'existence d'une prime de salissure accordée au titre de la manipulation de l'amiante ne justifie nullement avoir perçu une telle prime de la société Intramar, prime qui en tout état de cause correspondait à la manipulation de très nombreux produits non différenciés.

En l'espèce, pour preuve de son exposition fautive à l'amiante par cette société, il produit :

- trois attestations établies par d'autres dockers professionnels (Messieurs [T] [X], [E] [R] et [S] [U]) certifiant brièvement qu'ils ont travaillé au sein de la société Intramar avec Monsieur [A] [V], et 'avoir été en contact avec l'amiante et ne pas avoir été informé sur le dangers de l'amiante et sans aucune protection' ; il sera immédiatement observé que ces attestations sont particulièrement imprécises et rédigées en des termes identiques, ce qui permet de retenir qu'elles ont été préétablies ; elles sont donc dépourvues de toute sincérité et en conséquence, de toute valeur probante, et ne peuvent permettre d'établir une exposition habituelle de Monsieur [A] [V] à l'amiante du fait de la société en cause.

- la lettre du directeur général du port de [Localité 1] au Ministère de l'équipement, des transports et du logement, datée du 21 décembre 1999, et la fiche annexe relative à l'activité de chargement ou déchargement d'amiante entre 1966 et 1993, mentionnant notamment :

'(...) Entreprises concernées : L'ancienneté des périodes concernées ne permet pas de déterminer les acconiers ayant participé à ces opérations, nombre de professionnels pouvant intervenir sans qu'aucun soit spécialisé dans ce type de trafic. Par ailleurs, le paysage de la manutention a notablement évolué et certaines entreprises ont disparu de notre environnement ou fusionné avec d'autres.

Après consultation des archives du Port, une liste non exhaustive des entreprises ayant pu opérer des trafics d'amiante a été établi : - Société Industrielle de Trafic Maritime (INTRAMAR) - Union Phocéenne d'Acconage (Upa) - Société Moderne de Transbordements (SOMOTRANS) - Société MANUCAR - Etablissements MAIFFREDY - Société CARFOS.

Nombre de dockers concernés encore en activité : Les personnels exécutant les manutentions travaillent aussi bien à bord des navires qu'à l'air libre et les marchandises sont conditionnées sous des formes variables. Vu la multiplicité des chantiers et le caractère intermittent et journalier du personnel affecté, il n'est pas possible d'établir avec certitude quels ouvriers (intermittents, complémentaires, permanents) ont été exposés au produit en cause, avec quelle fréquence et pendant quelle durée (...)', étant observé que les tableaux relatifs aux modes de conditionnent indiquent : 'vrac' en 1973 et 1974, 'autres conditionnements' de 1966 à 1990"et 'conteneurs' à partir de 1991,

- les attestations de Madame [I], assurant avoir été informée, en tant que taxatrice intérimaire employée par la société Somotrans, du 21/01/1980 au 11/03/1981, que cette société 'manipulait de l'amiante en grande quantité', que ce produit était 'bien entendu déchargé par les dockers' et qu'il arrivait 'soit en sac, soit en vrac dans une poussière quasi-permanente', et de Monsieur [F] déclarant, en qualité d'ancien chef d'équipe et contremaître au service des sociétés Intramar et Somotrans, de 1956 à 1988 (sans autre précision sur ses périodes d'emploi au sein de cette dernière société), qu'il inhalait des poussières d'amiante lors des opérations de déchargement d'amiante en vrac ou en sacs (de jute ou en papier), sans protection particulière, comme les dockers qu'il dirigeait, du fait que ces sacs se déchiraient et que la poussière était ensuite balayée pour être mise en benne, étant observé qu'aucun de ces témoins ne mentionne le nom de Monsieur [A] [V] et que la société Somotrans conteste que Madame [I] ait pu voir depuis son poste les faits qu'elle allègue, exposant, en produisant le procès-verbal du CE du 12 avril 1996, que jusqu'à cette date, les bureaux dédiés à la facturation ne se trouvaient pas sur les quais.

Ces diverses pièces sont insuffisantes à établir tout à la fois qu'une part significative de l'activité de la société Intramar a concerné le transbordement de l'amiante, que Monsieur [A] [V] a été amené à en manipuler de façon régulière pour le compte de celle-ci et en conséquence, qu'il a été exposé de manière habituelle à l'amiante de son fait, pendant la période concernée par l'arrêté susvisé alors même qu'il ne conteste pas que l'amiante manipulé sur le port, pendant cette même période, n'a pas représenté plus de 0.1 % de l'activité de manutention globale de solides du port.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a fait droit à ses demandes à l'encontre de la société Intramar. En l'absence d'exposition fautive à l'amiante établie, il sera par ailleurs débouté de sa demande nouvelle au titre de l'indemnisation d'un préjudice qui résulterait de la seule violation par cette société de son obligation de sécurité de résultat.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Les demandes formulées à ce titre seront rejetées et Monsieur [A] [V], qui succombe, supportera les entiers dépens de l'instance. Le jugement sera infirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière prud'homale, par arrêt réputé contradictoire,

MET hors de cause la société Upa, la société Somotrans et le CGEA,

INFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté les exceptions d'incompétence,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DÉBOUTE Monsieur [A] [V] de l'ensemble de ses demandes,

REJETTE toutes les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [A] [V] aux entiers dépens de l'instance.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/15473
Date de la décision : 20/03/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-20;13.15473 ?
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