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12/03/2015 | FRANCE | N°14/01759

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre b, 12 mars 2015, 14/01759


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 12 MARS 2015



N° 2015/154













Rôle N° 14/01759







SA [Adresse 5]





C/



[B] [G]

[D] [K]

[B] [X]

[A] [E]

[Y] [N]





















Grosse délivrée

le :

à :



SCP BADIE

ME ALLIGIER













Décisi

on déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 06 Janvier 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01455.





APPELANTE



SA [Adresse 5] Pris en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié,

demeurant [Adresse 8]

représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au ba...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 12 MARS 2015

N° 2015/154

Rôle N° 14/01759

SA [Adresse 5]

C/

[B] [G]

[D] [K]

[B] [X]

[A] [E]

[Y] [N]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP BADIE

ME ALLIGIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 06 Janvier 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01455.

APPELANTE

SA [Adresse 5] Pris en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié,

demeurant [Adresse 8]

représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Jan-Jack SEBAG, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [B] [G] Agissant en sa qualité de représentant du syndicat dés propriétaires [Adresse 6]

né le [Date naissance 1] 1926 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me John RISTAINO, avocat au barreau de GRASSE,

Madame [D] [K] Agissant en sa qualité de représentant du syndicat des propriétaires [Adresse 6] à [Localité 1]

née le [Date naissance 5] 1944 à [Localité 1], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me John RISTAINO, avocat au barreau de GRASSE

Monsieur [B] [X] Agissant en sa qualité de représentant du syndicat des propriétaires [Adresse 6] à [Localité 1]

né le [Date naissance 3] 1936 à [Localité 3], demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me John RISTAINO, avocat au barreau de GRASSE

Monsieur [A] [E] Agissant en sa qualité de représentant du syndicat des propriétaires [Adresse 6] à [Localité 1]

né le [Date naissance 4] 1934 à [Localité 1], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me John RISTAINO, avocat au barreau de GRASSE

Monsieur [Y] [N] Agissant en sa qualité de représentant du syndicat des propriétaires [Adresse 6] à [Localité 1]

né le [Date naissance 2] 1946 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me John RISTAINO, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Février 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Catherine COLENO, Présidente de Chambre a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre

Mme Anne CAMUGLI, Conseiller

M. Jean-Jacques BAUDINO, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Anaïs ROMINGER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mars 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mars 2015,

Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La SA [Adresse 5] preneur et les consorts [G] et autres bailleurs sont liés par un bail conclu le 25 janvier 1928 par lequel M.[R], [O], [S], [C] [J] agissant en qualité de syndics du syndicat des copropriétaires indivis de la [Adresse 6] ont loué la place dite du Masque de fer située à l'extrémité sud de la presqu île de la croisette pour une durée de 99 ans et un loyer annuel de un franc pour 'contribuer à la prospérité de la ville de [Localité 1] et particulièrement à la création d'un Casino d'été'.

Par acte du 3 août 2011 les consorts [G] et autres, bailleurs ont sollicité la révision du loyer en demandant la fixation du loyer annuel à la somme de 4.200.000 euros

Le juge des loyers commerciaux a été saisi et par jugement du 3 septembre 2013 a sursis à statuer dans l'attente de la décision du Tribunal de Grande Instance de Grasse quant au caractère du bail litigieux.

Par jugement du 6 janvier 2014 le Tribunal de Grande Instance de Grasse après avoir analysé les clauses du bail a dit qu'il s'agissait d'un bail emphytéotique puisqu'il en avait toutes les caractéristiques: bail de longue durée, loyer modique, ensemble des charges transférées au preneur

Le premier juge a également constaté le caractère commercial de ce bail l'exploitation du casino étant la condition d'effectivité du bail, dit au visa de l'article L 145-3 du code de commerce que le loyer peut être révisé par le juge des loyers commerciaux et condamné la SA [Adresse 5] aux dépens;

La SA [Adresse 5] a relevé appel de cette décision par acte du 28 janvier 2014.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SA [Adresse 5] par conclusions déposées et signifiées le 29 avril 2014 demande de dire que le bail n'est pas soumis aux dispositions de l'article L 145-3 du code de commerce de débouter les consorts [G] et autres de leur demande de révision et de les condamner au paiement de la somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Elle expose que le bail portait sur un terrain nu exclu par nature du champ d'application des articles l 145-1 du code de commerce, elle soutient qu'il s'agit d'un bail à construction, qu'en effet la construction du casino était la condition essentielle du contrat , l'absence de construction constituant une clause résolutoire et qu'à la date de la signature du contrat aucun fonds de commerce n'était exploité dans les lieux même à titre potentiel puisqu'elle dépendait d'une autorisation donnée discrétionairement par les autorités administratives

Elle relève qu'en tout état de cause la jurisprudence récente de la cour de cassation exclut l'application des article L 145-3 et L 145-33 en cas de bail emphytéotique.

(Arrêt du 19 février 2014 décidant que les dispositions des article l 145-3 et L 145-33 du code de commerce ne s'appliquent pas au loyer du bail emphytéotique prévu à l 'article L 451-3 du code rural)

Les consorts [G] et autres agissant en qualité de représentant du syndicat des propriétaires [Adresse 6] à Nice par conclusions déposées et signifiées le 19 juin 2014 concluent à la confirmation de la décision, au rejet des prétentions de l'appelante et à sa condamnation à leur payer 12.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

Ils soutiennent que la notion de bail à construction est très postérieure à la convention, qu'il s'agit d'un bail emphytéotique qu'il a été qualifié de tel par la preneuse elle même, que son affectation commerciale résulte de sa finalité consistant dans la construction d'un casino ce qui rend recevable la demande en révision du loyer

Ils qualifient d'incompréhensible la jurisprudence de la cour de cassation invoquée par l'appelant.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 janvier 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la qualification du bail

La qualification qu'ont pu donner les parties à l'acte ne peut suffire à constituer un aveu qui leur soit opposable par application de l'article 1354 du code civil car l'aveu ne peut porter que sur un point de fait et non un point de droit.

Le bail conclu entre les parties porte sur un terrain mais stipule que la SA [Adresse 5] aura la 'faculté' de faire édifier sur la place tous immeubles à sa convenance et notamment un immeuble à usage de casino ... il précise en page 2 en compensation des avantages que les propriétaires de la [Adresse 6] retireront de l'a construction 'éventuelle' d'un casino d'été ... et plus loin encore ...il est convenu que les immeubles que la société locataire pourra 'éventuellement' construire sur le terrain loué devront être assurés à ses frais contre l'incendie.

Le choix de ces termes exclut de considérer que le bail mettait à la charge de la SA [Adresse 5] une obligation de construction.

La dernière clause du bail stipule 'dans le cas où la ville de [Localité 1] de donnerait pas à la SA [Adresse 5] les autorisations nécessaires à l'exploitation d'un Casino il est entendu que le présent bail n'aura aucun effet.'

Cette clause qui n'est pas une clause résolutoire mais une clause qui réglemente les conditions de prise d'effet du contrat concerne les conditions d'exploitation du Casino, elle n'édicte pas davantage une obligation de construction, de sorte que la qualification de bail à construction ne peut être retenue.

Le bail est un bail de longue durée, qui confère un droit un droit réel au locataire il prévoit le bénéfice de l'accession au propriétaire sans indemnité de toutes les constructions qui pourraient être faites par le locataire et compte tenu de cette particularité le loyer est fixé à une somme symbolique.

Dans ces conditions, la convention conclue entre les parties doit être qualifiée de bail emphytéotique telle que prévu à l'article L 451-3 du code rural et de la pêche maritime et la décision déférée sera confirmée sur ce point.

Sur les possibilités de révision par le juge des loyers commerciaux

Le preneur emphytéote, titulaire d'un droit réel pendant la durée du bail ne bénéficie d'aucun droit au renouvellement ni à indemnité d'éviction quand bien même il exploiterait sur le terrain un fonds de commerce, de sorte que la considération d'une commercialité découlant de l'autorisation du bailleur de construire est inopérante, le bail restant en tout état de cause exclu du statut.

Les consorts [G] et autres qui ne discutent pas ce principe de l'exclusion du bénéfice du statut ne peuvent utilement revendiquer l'application de l 'article L 145-3 du code de commerce selon lequel les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables aux baux emphytéotiques sauf en ce qui concerne la révision du loyer.

D'une part la redevance due par l'emphytéote n'est pas un loyer mais un canon emphytéotique.

En outre les dispositions de l'article L 145-33 du code de commerce qui énoncent que le loyer est fixé à la valeur locative et précisent les modalités de détermination de cette valeur locative ne peuvent s'appliquer au bail emphytéotique.

En effet la valeur locative est étrangère à l'économie du contrat emphytéotique, la contrepartie de la jouissance du preneur étant pour le bailleur, non le paiement du loyer fixé à un montant symbolique, mais l'absence de renouvellement et l'accession sans indemnité en fin de bail de tous travaux et améliorations faits par le preneur , de sorte que les bailleurs ne peuvent prétendre saisir le juge des loyers commerciaux d'une demande de révision du 'loyer' pour le faire correspondre à la valeur locative fut ce en invoquant une évolution favorable des facteurs locaux de commercialité.

En conséquence la décision déférée qui dit que le loyer peut être révisé par le juge des loyers commerciaux sera infirmée.

Les consorts [G] et autres, parties perdantes seront condamnés aux dépens sans qu'il y ait lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS

la Cour statuant contradictoirement

Confirme la décision déférée en ce qu'elle a dit que le bail litigieux est un bail emphytéotique

l'infirme pour le surplus et statuant à nouveau,

dit que la redevance due pour le preneur emphytéote ne peut pas être révisée par le juge des loyers commerciaux

dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

condamne les consorts [G] et autres aux entiers dépens.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre b
Numéro d'arrêt : 14/01759
Date de la décision : 12/03/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence B1, arrêt n°14/01759 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-12;14.01759 ?
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