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28/01/2015 | FRANCE | N°13/17589

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14e chambre, 28 janvier 2015, 13/17589


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

14e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 28 JANVIER 2015



N°2015/45





Rôle N° 13/17589





SAS PONTICELLI FRERES



C/



[J] [K]

Société SOLLAC GROUPE ARCELOR

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE

[M] [Z]



MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE





Grosse délivrée le :





à :



Me Michel MOATTI, avocat au barreau de MARSEILLE



M

e Claire FLAGEOLLET, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Isabelle RAFEL, avocat au barreau de MARSEILLE



CPCAM DES BOUCHES DU RHONE



Monsieur [M] [Z]





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cou...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

14e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 28 JANVIER 2015

N°2015/45

Rôle N° 13/17589

SAS PONTICELLI FRERES

C/

[J] [K]

Société SOLLAC GROUPE ARCELOR

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE

[M] [Z]

MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE

Grosse délivrée le :

à :

Me Michel MOATTI, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Claire FLAGEOLLET, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Isabelle RAFEL, avocat au barreau de MARSEILLE

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE

Monsieur [M] [Z]

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des BOUCHES DU RHONE en date du 08 Juillet 2013,enregistré au répertoire général sous le n° 20901431.

APPELANTE

SAS PONTICELLI FRERES, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Michel MOATTI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [J] [K], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Claire FLAGEOLLET, avocat au barreau de MARSEILLE

Société SOLLAC GROUPE ARCELOR, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Isabelle RAFEL, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Olivia SETBON, avocat au barreau de MARSEILLE

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 3]

non comparant

Monsieur [M] [Z] Agissant es qualité de Liquidateur Judiciaire de l'Association QUIETUDE ASSISTANCE, Association régie par la loi du 1er Juillet de 1901, dont le siège est [Adresse 5], demeurant [Adresse 1]

non comparant

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE, demeurant [Localité 1]

non comparant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 17 Décembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. Gérard FORET-DODELIN, Président

Madame Martine MATHIEU-GALLI, Conseiller

Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Janvier 2015

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Janvier 2015

Signé par M. Gérard FORET-DODELIN, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[J] [K] a saisi le Tribunal des affaires de Sécurité Sociale (TASS) des Bouches du Rhône d'un recours tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, société PONTICELLI, dans le cadre de l'accident du travail subi le 22 février 2006.

Le Tribunal par jugement en date du 8 juillet 2013, a fait droit au recours, l'employeur étant désigné comme étant « la SARL B.C.S. PANETA », mention erronée et corrigée après procédure de rectification d'erreur matérielle, ordonné la majoration de la rente à son maximum, et diligenté une expertise aux fins de détermination des préjudices complémentaires.

La société PONTICELLI a relevé appel de cette décision, le 13août 2013.

Le conseil de l'appelant expose que la société SOLLAC aux droits de laquelle vient désormais la société ARCELOR MITTAL, a souhaité confier certains travaux à des entreprises tierces, notamment la société PONTICELLI dont un salarié est Monsieur [J] [K], avec pour mission, une opération métallurgique de découpage et de soudure ; que l'accident en date du 22 février 2006 ne saurait s'inscrire dans le cadre d'une faute inexcusable, car la cause de l'accident est indéterminée entraînant une exclusion de toute conscience du danger qu'aurait pu avoir l'employeur ; qu'en tout état de cause, et subsidiairement, la prise en charge de l'accident par l'organisme social doit être déclarée inopposable à la société PONTICELLI pour défaut de respect du principe du contradictoire.

Elle sollicite une somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société ARCELOR MITTAL expose qu'elle n'a jamais été employeur de [J] [K], et sollicite qu'il lui soit donné acte du fait que [J] [K] et son organisme social ne formulent aucune demande à son encontre.

[J] [K] sollicite la confirmation du jugement entrepris, la faute inexcusable étant précisément établie par le rapport de l'inspection du travail, et demande que l'analyse de la liquidation des préjudices fasse l'objet d'un renvoi devant le premier juge, selon le principe du double degré de juridiction.

Il sollicite une somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

De son côté la Caisse s'en rapporte à justice sur la détermination éventuelle de la faute inexcusable, et dans cette hypothèse, demande que l'employeur soit condamné à lui rembourser les sommes dont elle serait amenée à faire l'avance ; que les éléments du dossier démontrent que la prise en charge de l'accident doit être déclarée opposable à la société PONTICELLI.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer aux écritures des parties reprises oralement à l'audience.

La DRJSCS régulièrement convoquée n'a pas comparu.

SUR CE

Attendu que [J] [K] est embauché par la société PONTICELLI depuis le 4 septembre 2000 en qualité de monteur ;

Que la société SOLLAC aux droits de laquelle vient désormais la société ARCELOR MITTAL, a souhaité confier certains travaux à des entreprises tierces, en l'espèce la société PONTICELLI ayant pour salarié notamment Monsieur [J] [K], avec pour mission, une opération métallurgique de découpage et de soudure ;

Attendu que le 22 février 2006, [J] [K] procédait dans les ateliers de la SOLLAC au remplacement de deux tubes plongeurs d'un bas de cuve, lorsque ces deux tubes se sont brusquement désolidarisés, l'un d'eux venant écraser la jambe du salarié ;

Que [J] [K] était grièvement blessé, devant subir une amputation au niveau de son tibia droit ;

Attendu que le salarié souhaite voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur, société PONTICELLI, dans le cadre de la survenance de cet accident du 22 février 2006 ;

Attendu, concernant la faute inexcusable, que l'employeur est tenu en vertu du contrat de travail le liant à son salarié d'une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne la santé et la sécurité de ses salariés du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise ou de l'activité confiée à celui ci ;

Que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;

Qu'il importe de rappeler que pour faire retenir la faute inexcusable de l'employeur, le salarié doit nécessairement établir de manière circonstanciée, d'une part l'imputabilité de l'accident à son activité au sein de l'entreprise et donc qualifier l'exposition au risque et d'autre part la réalité de la conscience du danger auquel l'employeur l'exposait, ne l'ayant pas malgré cela amené à prendre les mesures de prévention utiles ;

Attendu en l'espèce que l'imputabilité de l'accident à l'activité au sein de l'entreprise n'est pas contestée, l'employeur fondant précisément ses démonstrations sur les conditions de fonctionnement « des jambes de la cuve », selon sa propre expression ;

Attendu que la conscience du danger que l'employeur aurait dû avoir, doit être précisément analysée ;

Attendu que [J] [K] estime que les conditions de cette conscience du danger sont réunies, notamment relevées par le rapport de l'inspection du travail ;

Que ce rapport est en date du 19 septembre 2006, et fait ressortir en conclusion que « l'analyse de risques d'interférence entre les activités, les installations et les matériels de SOLLAC et PONTICELLI n'avait pas été conduite de manière fine ' le dernier plan de coordination communiqué a été établi en 2002 ' » ;

Qu'il n'est pas inintéressant de relever qu'il a été précisé à la barre de la cour, qu'une instance pénale était engagée, mais que celle-ci se prolongeait sans développement procédural notable à ce jour, et que d'un commun accord, les parties ne souhaitaient pas qu'il soit sursis à statuer par la juridiction de sécurité sociale en attente d'une éventuelle issue à ce titre ;

Attendu que c'est ainsi à bon droit que [J] [K] rappelle que le juge doit rechercher si l'employeur a satisfait à son obligation de se renseigner sur les dangers courus par le salarié, et s'il a mis en 'uvre, le cas échéant, en coopération avec les organes de l'entreprise tierce, des mesures propres à préserver le salarié ;

Que selon l'article L 412-6 du code de la sécurité sociale, toute personne que l'utilisateur de travail temporaire se substitue dans la direction du salarié mis à disposition est considérée comme substituée à l'employeur ; qu'ainsi, après avoir constaté qu'un salarié a été victime d'un accident du travail en suivant les consignes du responsable d'une entreprise tierce (en l'espèce entreprise SOLLAC), doit être retenue la faute inexcusable de l'employeur (en l'espèce entreprise PONTICELLI) ; qu'en effet, il ne saurait être admis que l'accident résulte des négligences fautives d'un personnel sur lequel ni l'employeur de la victime, ni la société utilisatrice, n'exerçaient de pouvoir de surveillance ou de contrôle ;

Attendu en conséquence qu'il doit être recherché si la société PONTICELLI a satisfait à son obligation de se renseigner sur les dangers courus par [J] [K] ;

Qu'à ce titre, il apparaît que le salarié avait une réelle expérience et une parfaite connaissance des travaux à réaliser, et ce, selon un mode opératoire défini en accord entre SOLLAC et PONTICELLI ;

Qu'en effet, [J] [K] déclare lui-même : « il s'agissait pour moi, et je le fais depuis 10 ans, de remplacer à l'aciérie au service RH deux jambes de la cuve ' je suis chaudronnier monteur employé par la société PONTICELLI et depuis 10 ans je travaille à la SOLLAC sur plusieurs secteurs ' je ne comprends pas ce qui a pu se produire ' je n'ai jamais personnellement eu d'incident de ce type ' » ;

Attendu, sur la conscience du danger, qu'il doit être rappelé que lorsque les circonstances de l'espèce démontrent que l'entreprise pouvait ne pas avoir conscience du danger, par référence à ce qui peut être attendu d'un employeur normalement diligent, la faute inexcusable n'est pas caractérisée ;

Qu'il doit être considéré que tel est le cas en l'espèce, l'entreprise PONTICELLI travaillant de longue date avec l'entreprise SOLLAC, sans qu'aucun accident ne se soit produit dans le cadre des activités précisément confiées à [J] [K] notamment ;

Qu'en outre il doit être rajouté que l'interprétation est désormais stricte du champ d'application de l'article L 452-1 susvisé ; que cette interprétation provient notamment des décisions rendues dans les matières dans lesquelles l'accident peut être considéré comme extérieur à la sphère d'exercice du pouvoir de direction de l'employeur ;

Que la conscience du danger reste nécessairement indispensable pour fonder le manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur ;

Qu'en l'espèce, la preuve n'est pas rapportée que l'employeur [D] était informé d'une éventuelle anomalie du matériel utilisé ; que cette conscience du danger est ainsi écartée, et partant, la faute inexcusable ne peut pas être caractérisée ;

Attendu qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ensemble des demandes subséquentes des parties devient sans objet ;

Qu'il convient en conséquence de considérer que le premier juge n'a pas fait une juste appréciation des faits de la cause et que sa décision doit être infirmée;

Attendu qu'eu égard aux circonstances de la cause, il est équitable de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que la procédure devant les juridictions de la sécurité sociale est gratuite et sans frais conformément aux dispositions de l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale, il n'y a pas lieu de statuer sur les dépens ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant en audience publique, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale,

Déclare recevable l'appel de la société PONTICELLI,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Dit que les éléments de la faute inexcusable de l'employeur, société PONTICELLI, ne sont pas réunis dans le cadre de l'accident du travail subi par [J] [K] le 22 février 2006, et ce, avec toutes conséquences de droit,

Rejette toutes les autres demandes des parties,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 13/17589
Date de la décision : 28/01/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°13/17589 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-01-28;13.17589 ?
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