COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
3e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 15 JANVIER 2015
N° 2015/013
Rôle N° 13/17676
SCI SALVADOR
C/
[I] [F]
Grosse délivrée
le :
à :
Me C. TOLLINCHI
Me M. GRANIER
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 24 Juin 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 11/04070.
APPELANTE
SCI SALVADOR
immatriculée au RCS de TOULON sous le n° 514 271 204,
poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié au siège social
[Adresse 2]
représentée par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Nathalie ABRAN, avocat au barreau de TOULON,
INTIME
Monsieur [I] [F]
appelant incident
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1] (PORTUGAL),
demeurant [Adresse 1]
représenté et plaidant par Me Mireille GRANIER, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substituée par Me Régine LEYDIER, avocate au barreau d'AIX EN PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 26 Novembre 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-José DURAND, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
M. Jean-François BANCAL, Président
Madame Patricia TOURNIER, Conseillère
Mme Marie-José DURAND, Conseillère (rédactrice)
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Janvier 2015
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Janvier 2015,
Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Faits et procédure
La SCI Salvador a confié à Monsieur [F] un marché de travaux, comportant uniquement la fourniture de main d'oeuvre, portant sur la construction d'un bâtiment industriel et de logements de fonction à La Seyne sur Mer. Des factures étant restées impayées, Monsieur [F] a suspendu les travaux et a assigné la SCI en paiement du coût des travaux réalisés.
La SCI s'est opposée aux demandes et a sollicité reconventionnellement la condamnation de Monsieur [F] au paiement de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés d'un retard de livraison et d'une mauvaise exécution du contrat, ainsi que la désignation d'un expert, avant dire droit sur la reprise des malfaçons
Décision déférée
Par jugement du 24 juin 2013, le tribunal de grande instance de Toulon a :
- condamné la SCI Salvador à payer à Monsieur [F] la somme de 86 991,70 € outre intérêts à compter de l'assignation,
- débouté Monsieur [F] de sa demande tendant au remboursement d'une facture de 159,97 €,
- débouté la SCI de sa demande de dommages et intérêts et de sa demande d'expertise,
- condamné la SCI à payer les dépens ainsi qu'une somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration du 30 août 2013, la SCI Salvador a interjeté appel.
Demandes des parties
Dans ses conclusions en date du 07 novembre 2014, la SCI appelante demande à la cour de :
réformer le jugement dans son entier,
débouter Monsieur [F] de toutes ses demandes,
à titre principal, le condamner à lui payer la somme de 121 440 € à titre de dommages et intérêts,
à titre subsidiaire, ordonner la compensation de cette somme avec celle éventuellement due par elle,
en toutes hypothèses, écarter des débats les pièces n° 37 et n° 38 'en ce sens qu'elles ont été dictées pour servir les besoins de la cause et sont rédigées dans des termes parfaitement identiques',
condamner Monsieur [F] au paiement d'une somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions en date du 19 mai 2014, Monsieur [F] demande à la cour de :
confirmer le jugement déféré sauf en sa disposition rejetant sa demande en remboursement de la facture d'achat de ciment d'un montant de 159,97 €,
condamner en outre la SCI à lui payer :
la somme de 159,97 €,
une somme de 8 000 € en réparation de son préjudice commercial et financier,
une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,
subsidiairement, si une expertise était ordonnée, l'ordonner aux frais avancés de la SCI,
en toutes hypothèses lui allouer la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est en date du 18 novembre 2014.
MOTIFS DE LA DECISION
$gt; Sur la nature du jugement déféré
Le jugement a été qualifié dans son dispositif de réputé contradictoire alors que le défendeur avait constitué avocat. Il convient de réformer le jugement sur ce point et d'affirmer sa nature contradictoire.
$gt; Sur la demande tendant à ce que soient écartées des débats les pièces n° 37 et 38 produites par l'intimé
Il est vrai que les attestations émanant des deux salariés de Monsieur [F] sont rédigées en termes identiques. Cette circonstance ne suffit pas à établir que les faits relatés n'aient pas été personnellement constatés par les témoins, ainsi que l'exige l'article 202 du code civil. Dès lors il n'y a pas lieu d'écarter ces pièces des débats.
$gt;Sur les demandes en paiement de factures formées par Monsieur [F]
C'est à la suite d'un examen minutieux des pièces produites par les parties et d'une juste analyse de leur contenu, examen et analyse que la cour reprend à son compte, que le tribunal a retenu que le contrat signé le 06 juillet 2010, faisant référence au devis 001 du 26 mai 2010 chiffrant les travaux à 95 700 € HT soit 114 457,20 € TTC, reflétait l'accord des parties. Il sera simplement ajouté que les pièces sont produites en original et qu'il n'est pas démontré que le devis 001 ait été tronqué, dès lors que le nombre total de pages, à savoir 3, est indiqué sur chacune d'elles.
Ainsi que l'a relevé le premier juge, les factures n° 47, 51, 53, 68 et 69 émises par Monsieur [F] et concernant ce chantier s'élèvent à la somme totale de 86 992,50 € TTC, ramenée à 86 991,70 € en fonction de la demande.
La SCI soutient avoir réglé diverses sommes à Monsieur [F]. Cependant :
- il n'est pas démontré que les chèques datés du 21 juillet 2010, pour 4 911 € et 7 435,50 € aient été émis en règlement du chantier litigieux, dès lors qu'ils émanent non pas de la SCI mais de la société Sanchez Terrassements ;
- le virement de 32 531,20 € a été effectué en règlement d'une facture n° 59 correspondant aux points 6, 7 et 8 du devis n° 001, facture dont le paiement n'est pas réclamé par Monsieur [F] ;
- il n'est pas établi que les chèques n° 1368691 pour 10 000 € et 1368693 pour 3 561,20 € aient été émis en faveur de Monsieur [F].
En revanche, il est établi par une attestation du Crédit agricole en date du 1er avril 2011 que tous les incidents chèques survenus sur le compte de la SCI ont été régularisés, de sorte qu'il convient de prendre en considération les chèques n° 1368694 pour 10 000 € et 1368696 pour 15 906,80 €, étant observé que le chèque n° 1368692 du 14 octobre 2010 pour 13 561,20 € correspond manifestement à la somme déjà déduite de la facture n° 47.
Ainsi, la SCI démontre avoir réglé la somme de 25 906,80 €, ce qui ramène sa dette à 61 084,90 €. Il convient de réformer la décision déférée en ce sens, la SCI Salvador étant dès lors condamnée à payer à Monsieur [F] la somme de 61 084,90 € outre intérêts au taux légal à compter du 03 août 2011, date de l'assignation.
Il convient de confirmer le rejet de la demande tendant au paiement de la facture de matériaux de 159,97 €, rien ne démontrant que ces matériaux étaient destinés au chantier litigieux.
$gt; Sur la demande de dommages et intérêts formée par la SCI Salvador
La demande globale de dommages et intérêts formée par la SCI inclut le coût de travaux de reprises et finitions, à hauteur de 77 740 €, le solde de la demande représentant l'indemnisation de pertes locatives.
La SCI ne peut reprocher à Monsieur [F] un retard dans l'exécution des travaux dès lors qu'aucun délai contractuel n'était convenu au devis n° 001 ni au contrat du 06 juillet 2010 qui liaient les parties. Elle ne peut pas non plus lui reprocher de ne pas avoir achevé les travaux dès lors qu'elle-même n'a pas respecté son obligation de paiement des factures présentées par l'entreprise. Enfin, le constat d'huissier établi les 16 mai et 1er juin 2011 et la facture de travaux émise le 11 août 2011 par la SARL Qualit Consult, facture que l'intimée est en droit de produire pour la première fois en appel en application de l'article 563 du code de procédure civile, ne suffisent pas à démontrer que les imperfections relevées ou reprises sont constitutives de manquements de l'entreprise, empêchée de parfaire son ouvrage par le non respect par la SCI de son obligation de paiement.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la SCI de sa demande de dommages et intérêts.
$gt; Sur les autres demandes
La cour constate que la demande formée en application de l'article 32-1 du code de procédure civile est en réalité une demande de dommages et intérêts. En effet, c'est à son profit que Monsieur [F] réclame le paiement.
En application de l'article 566 du code civil, Monsieur [F] est en droit de présenter pour la première fois en appel ses demandes de dommages et intérêts, s'agissant de compléments de sa demande principale en paiement de factures. Cependant, les pièces produites par l'intimé ne suffisent pas à démontrer que cette affaire nuise à sa réputation professionnelle. Par ailleurs l'existence d'un préjudice financier distinct du retard, déjà réparé par les intérêts alloués, n'est pas établie. Enfin, la SCI, dont les arguments ont été partiellement retenus par la cour, n'a pas abusé de son droit de faire appel. Dans ces conditions, les demandes de dommages et intérêts formées par Monsieur [F] seront rejetées.
Il y a lieu de mettre les dépens d'appel à la charge de la SCI, mais de rejeter les demandes formées de part et d'autre en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Réforme partiellement le jugement déféré en ce qu'il est qualifié de réputé contradictoire et en ce que le premier juge a condamné la SCI SALVADOR à payer à Monsieur [I] [F] la somme de 86 991,70 € outre intérêts à compter de l'assignation,
Statuant à nouveau,
Dit que le jugement déféré est contradictoire,
Condamne la SCI Salvador à payer à Monsieur [I] [F] la somme de 61 084,90 € outre intérêts au taux légal à compter du 03 août 2011,
Confirme le jugement déféré pour le surplus,
Y ajoutant,
Déboute la SCI Salvador de sa demande tendant à écarter des débats les pièces n° 37 et 38,
Déboute Monsieur [I] [F] de ses demandes de dommages et intérêts,
Déboute la SCI Salvador et Monsieur [I] [F] de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SCI Salvador à payer les dépens d'appel et accorde le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile à l'avocat de Monsieur [I] [F].
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT