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20/11/2014 | FRANCE | N°13/10523

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 20 novembre 2014, 13/10523


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 20 NOVEMBRE 2014

FG

N° 2014/633













Rôle N° 13/10523







[J] [Q]

[G] [I] épouse [H]





C/



SA DE LA VILLA GAL

[E] [P]





















Grosse délivrée

le :

à :



Me Philippe- laurent SIDER



SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD



Me Frédéric

DE BAETS





Sur saisine de la Cour d'appel d'Aix en Provence suite au jugement d'incompétence du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 18 Février 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 11/1170.







DEMANDEURS



Monsieur [J] [Q],

né le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 1] (Royaume Uni...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 20 NOVEMBRE 2014

FG

N° 2014/633

Rôle N° 13/10523

[J] [Q]

[G] [I] épouse [H]

C/

SA DE LA VILLA GAL

[E] [P]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Philippe- laurent SIDER

SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD

Me Frédéric DE BAETS

Sur saisine de la Cour d'appel d'Aix en Provence suite au jugement d'incompétence du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 18 Février 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 11/1170.

DEMANDEURS

Monsieur [J] [Q],

né le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 1] (Royaume Uni)

demeurant [Adresse 3] ROYAUME UNI, pris en sa qualité de liquidateur de la société OAKLAND FINANCE LIMITED

représenté par la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Emmanuel BRANCALEONI, de la SCP DELSOL-LORENZI- BRANCALEONI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Anne-Claire AUNE, avocat au barreau de NICE.

Madame [G] [I] épouse [H]

née le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 3] (Thaïlande)

demeurant [Adresse 4] (TH), venant aux droits de la Société OAKLAND FINANCE LIMITED

représentée et assistée par Me Frédéric DE BAETS, avocat au barreau de NICE

DEFENDEURS

SA DE LA VILLA GAL

dont le siège social est sis C/O PRESTIGE IMMOBILIER [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès-qualités audit siège.

représentée par Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Pascal NEVEU de la SELARL NEVEU- CHARLES & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE.

Monsieur [E] [P]

né le [Date naissance 3] 1938 à [Localité 2] (RUSSIE),

demeurant [Adresse 5] (ANTILLES)

représenté par Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Pascal NEVEU de la SELARL NEVEU- CHARLES & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 Octobre 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Gisèle SEGARRA.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2014.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2014,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,

Le 2 février 2011, le greffier en chef du tribunal de grande instance de Nice a établi une déclaration de reconnaissance en France, en application des articles 38 et suivants du règlement CE n°44/2001 du 22 décembre 2000, de la décision judiciaire rendue le 19 novembre 2010 par

la High Court of Justice of London entre M.[E] [P], la société anonyme de la Villa Gal et M.[J] [Q] en sa qualité de liquidateur de la société Oakland Finance Ltd, la succession de feu [S] [A] [H], [D] [Y], [Z] [M] [L].

Cette décision de la Haute Cour de Justice de Londres en date du 19 novembre 2010 dit que: (i) aucune somme n'est due à ce jour par SAVG ( société anonyme de la Villa Gal) à la société Oakland Finance Limited ..ou au deuxième défendeur ( que ce soit à titre personnel ou en tant qu'ayant droit du premier défendeur ou d'Oakland) que ce soit au titre des contrats de prêt en date du 23/08/2000, 01/01/1999, 08/07/1998 ou autrement, (ii) en outre et en tout état de cause, Oakland ou tout successeur de ce dernier, en ce compris le deuxième défendeur, est irrecevable ou empêché de prétendre qu'une quelconque somme est due à ce jour par SAVG, (iii) l'émission des obligations (telle que définie au paragraphe 74 des motifs de la requête re-modifiée) était nulle et de nul effet et aucune somme n'est due à ce jour par Oakland ou deuxième défendeur ou à tout successeur de ce dernier$gt;$gt;.

Le 2 mars 2011, M.[J] [Q] agissant en qualité de liquidateur de la société Oakland Finance Limited et Mme [G] [I] épouse [H] ont fait assigner M.[E] [P] et la Sa de la Villa Gal devant le tribunal de grande instance de Nice sur le fondement des articles 27 et suivants de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968,

34 et suivants du règlement européen n° 44.201 et 32 et suivants de la convention de Lugano du 16 septembre 1988, aux fins de voir prononcer l'annulation du certificat de reconnaissance en France de la décision britannique établi le 2 février 2011 par le greffier en chef du tribunal de grande instance de Nice.

Par un premier jugement, rendu le 4 septembre 2012, le tribunal de grande instance de Nice a invité les parties à fournir leurs explications sur l'incompétence de la juridiction au profit de la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour statuer sur le recours contre la décision rendue par le greffier en chef du tribunal de grande instance de Nice le 2 février 2011.

Par jugement en date du 18 avril 2013, le tribunal de grande instance de Nice s'est déclaré incompétent au profit de la cour d'appel d'Aix en Provence, a réservé les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile et dit que le dossier serait transmis à la cour d'appel d'Aix-en-Provence par les soins du greffe, conformément à l'article 97 du code de procédure civile.

Le tribunal a dit que l'action s'analysait en un recours contre la déclaration de reconnaissance par le greffier en chef du tribunal de grande instance de Nice, justiciable de la cour d'appel. Il a dit que cette action ne pouvait pas non plus être considérée comme une tierce opposition contre ce certificat.

Le dossier a été transmis directement du greffe du tribunal de grande instance de Nice au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Par arrêt mixte en date du 19 juin 2014, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a :

- déclaré recevable le recours formé par M.[J] [Q], ès qualités de liquidateur de la société Oakland Finance Limited et par Mme [G] [I] épouse [H]

contre la déclaration de reconnaissance en France le 2 février 2011 par le greffier en chef du tribunal de grande instance de Nice, d'une décision judiciaire rendue le 19 novembre 2010 par la High Court of Justice of London entre M.[E] [P], la Sa de la Villa Gal et M.[J] [Q] en sa qualité de liquidateur de la société Oakland Finance Ltd, la succession de feu [S] [A] [H], [D] [Y], [Z] [M] [L],

- constaté que M.[E] [P] et la Sa de la Villa Gal ont produit un certificat prévu à l'article 54 du règlement CE 44/2001,

- avant dire droit au fond, révoqué la clôture, ordonné la réouverture des débats,

- enjoint à M.[E] [P] et à la Sa de la Villa Gal de :

- produire l'original du certificat du 'Registrar in bankruptcy of High Court of Justice' avec la signature de l'autorité qui a établi ce certificat,

- s'expliquer sur l'éventuel défaut de concordance de date entre la date de la décision portée sur ce certificat et la date de la décision dont la reconnaissance est demandée,

- produire une traduction de la décision dont la reconnaissance est demandée établie par un traducteur habilité soit en France soit au Royaume Uni, avec une preuve de l'habilitation s'il s'agit d'un traducteur du Royaume Uni,

-renvoyé l'examen du recours au fond à l'audience du 23 octobre 2014 à 14h30,

avec clôture avant les débats.

Des documents ont été produits le 5 septembre 2014.

Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 23 octobre 2014, M.[J] [Q], ès qualités de liquidateur de la société Oakland Finance Limited, demande à la cour d'appel, au visa des articles 27 et suivants de la Convention de Bruxelles, des articles 34 et suivants du Règlement n° 44.2001 du 22 décembre 2000, de la Convention de Lugano de 2007, de :

- annuler la déclaration de reconnaissance en ce qu'elle a été obtenue à l'issue d'une procédure irrégulière,

- dire que le jugement du 19 novembre 2010 rendu par la Haute Cour de Londres est en contradiction avec la décision définitive rendue le 10 décembre 2007 par le tribunal de Nice,

- dire n'y avoir lieu a reconnaissance en France de la décision rendue le 19 novembre 2010 par la Haute Cour de Londres si mieux n'aime la cour annuler la déclaration de reconnaissance du 2 février 2011,

- dire irrecevable l'argumentation présentée par la société Villa Gal au titre des prêts des 8 juin et 3 juillet 1998 et de l'hypothèque du 23 août 2000 en ce qu'elle contredit son argumentation précédemment développée devant une juridiction française et ayant donné lieu au jugement du 10 décembre 2007,

- au besoin, juger inopposable en France le jugement rendu par la Haute Cour de Londres le 19 novembre 2010,

- condamner la SA de LA VILLA GAL ainsi que M.[E] [P] aux entiers dépens de l'instance, ceux d'appel distraits au profit de la SCP ERMENEUX LEVAIQUE, outre au paiement d'une somme de 90.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M.[Q] fait observer que le document produit serait relatif à une simple demande d'ajournement du procès. Il estime que le certificat du greffier en chef a été établi sur la base de renseignements erronés.

Il considère que le greffier en chef ne pouvait pas délivrer de certificat sur la base des éléments fournis de sorte que ce certificat délivré sur cette base devra être annulé.

En tout état de cause, il estime que la décision de la High Court of Justice contrarie directement une décision rendue en France le 10 décembre 2007, décision qui a été reconnue en Grande-Bretagne. Il considère que la société Villa Gal a instrumentalisé la justice anglaise pour obtenir ce qu'elle ne pouvait plus obtenir en France.

Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 7 octobre 2014, Mme [G] [I] épouse [H] demande à la cour d'appel, au visa des dispositions des articles 32 et suivants de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, des articles 27 et suivants de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, des articles 34 et suivants du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, des dispositions des articles 509-3 et suivants du code de procédure civile, de :

- dire que la décision du 19 novembre 2010 rendue par la Haute Cour de Londres est manifestement contraire à la conception française de l'ordre public international,

- dire que la décision du 19 novembre 2010 rendue par la Haute Cour de Londres est inconciliable avec le jugement rendu le 10 décembre 2007 par le tribunal de grande instance de Nice entre les mêmes parties,

- dire n'y avoir lieu à reconnaissance en France de la décision rendue le 19 novembre 2010 par la Haute Cour de Londres,

- condamner conjointement et solidairement la SA de LA VILLA GAL et M.[E] [P] à payer à Mme [G] [H] une somme de 15.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner conjointement et solidairement la SA de LA VILLA GAL et M.[E] [P] aux entiers dépens de l'instance et dire que Me DE BAETS, avocat, pourra recouvrer ceux dont il aura fait l'avance par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Mme [I] épouse [H] expose qu'une luxueuse villa au bord de la mer à [Localité 4] a été acquise par la société anonyme de la Villa Gal, possédée par des sociétés de droit anglais, et au moyen de différents prêts, et notamment d'un prêt de 50 millions de francs de la société EG Acquisition Inc. Elle précise que cette dernière société a cédé sa créance sur la Sa de la Villa Gal à la société Oakland Finance, laquelle a inscrit une hypothèque sur le bien immobilier

Mme [I] épouse [H] expose qu'elle vient aux droits de la société en liquidation Oakland Finance, elle précise qu'un jugement du tribunal de grande instance de Nice du 10 décembre 2007 a confirmé la cause des reconnaissances de dettes des 8 juin 2000 et 23 août 2000 par la Sa de la Villa Gal envers Oakland Finance et que ce jugement a été exequaturé au Royaume Uni, par décision de la Haute Cour de Justice du 10 novembre 2010.

Mme [I] épouse [H] expose que la société Oakland Finance lui a cédé sa créance, que cette société avait été mise en liquidation et que M.[J] [Q] a été nommé liquidateur et que ce dernier lui avait cédé la créance, cette cession étant signifiée à la société de la Villa Gal. Elle précise que la société de la Villa Gal conteste cette cession de créance et que c'est dans ces conditions qu'un procès a eu lieu au Royaume Uni.

Mme [I] épouse [H] fait observer que le document produit ne se rattache pas à la décision du 19 novembre 2010 dont la reconnaissance est demandée.

Elle fait remarquer que plusieurs décisions ont été rendues et qu'il est fait état de décisions des 12 novembre 2010, 19 novembre 2010 et 7 décembre 2010.

Elle fait observer que l'attestation de régularité émane du propre conseil de la société de la Villa Gal et que le caractère exécutoire de la décision britannique n'est pas établi.

Elle fait observer que la décision heurte l'ordre public français alors qu'il a été interdit aux défendeurs d'en interjeter appel et que les frais de procédure rendent impossible l'accès à la justice. Elle fait remarquer que la décision du 19 novembre 2010 n'est pas motivée et que n'est pas visée la décision du 7 décembre 2010.

Elle expose que la décision du 19 novembre 2010 est inconciliable avec une décision judiciaire française précédente.

Par leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 21 octobre 2014,

M. [E] [P] et la SA Villa Gal demandent à la cour d'appel de :

- leur donner acte de ce qu'ils ont satisfait à la communication de pièces sollicitée par la cour et dans la limite des points restant à juger :

- vu l'article 36 du règlement CE numéro 44/2001, vu l'article 1351 du code civil

- vu l'article 122 du code de procédure civile,

- débouter les demandeurs de leur action visant à leur faire déclarer inopposable la reconnaissance du jugement du 19 novembre 2010 établie par le greffier en chef du tribunal de grande instance de Nice le 2 février 2011,

- dire en tant que de besoin que ce jugement produira en France tous ses effets à l'égard des défendeurs,

- sur la demande reconventionnelle, constater que la demande relève d'un concert frauduleux,

- vu l'article 32-1 du code de procédure civile et sans préjudice d'une amende civile,

- condamner solidairement Mme [H] et M.[Q] à payer solidairement a la

SA Villa Gal et M.[P] la somme de 100.000 € à titre de dommages intérêts et celle de 30.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au dépens de l'instance.

M.[P] et la société de la Villa Gal exposent que lorsque les parts de la société Villa Gal ont été cédées le prix de cession avait été fixé à 80 millions de francs comprenant l'achat des actions et la reprise du passif. Ils estiment que le prix n'a jamais été de 130 millions de francs et qu'il s'agit d'un montage frauduleux pour faire apparaître un manque de 50 millions de francs.

Ils affirment qu'il y a eu une manipulation des comptes de la société de la Villa Gal. Ils exposent que c'est ainsi qu'un long contentieux a opposé la société Villa Gal à la société Oakland, à son liquidateur, M.[Q] et à Mme [H] au sujet de cette prétendue créance.

Ils exposent qu'une plainte pénale en France a abouti à une décision d'incompétence au profit des autorités britanniques, que plusieurs décisions seront rendues en Grande Bretagne.

Ils précisent que le liquidateur de la société Oakland a lancé une procédure de saisie immobilière qui a été annulée.

M.[P] et la société Villa Gal estiment le recours irrecevable. Ils considèrent que le tribunal de grande instance de Nice ne s'est pas prononcé à ce sujet.

M.[P] et la société Villa Gal font observer que Mme [H] n'a pas qualité à agir alors que M.[Q] fait valoir que le prix de cession de la créance n'a pas été versé. Ils estiment qu'il y a eu un concert frauduleux entre Mme [H] et M.[Q].

Ils demandent des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Ils exposent avoir produit l'original du certificat du 20 janvier 2011 du Registrar in bankruptcy of High Court of Justice concernant le jugement du 12 novembre 2010, sa traduction, le jugement du 12 novembre 2010 avec sa traduction, l'original du certificat du 20 janvier 2011 du Registrar in bankruptcy of High Court of Justice concernant le jugement du 19 novembre

2010, sa traduction, la traduction établie par M..[C], expert honoraire, de la décision du 19 novembre 2010, la traduction de la motivation de ce jugement.

Ils complètent leur communication par la production du certificat concernant la décision du 19 novembre 2010.

Ils font observer que la décision du 19 novembre 2010 est très motivée et que le juge anglais a pris en considération le jugement français paraissant inconciliable et dit que l'affaire, de nature purement contractuelle, quant à la persistance d'une dette exigible, relevait du droit anglais et de la compétence du juge anglais et a jugé que le jugement français n'emportait pas condamnation.

L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 23 octobre 2014.

MOTIFS,

-I) rappel des règles applicables :

L'article 33 du règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000, en section I. du chapitre III dudit règlement, dispose:

1. Les décisions rendues dans un Etat membre sont reconnues dans les autres Etats membres, sans qu'il soit nécessaire de recourir à aucune procédure.

2. En cas de contestation, toute partie intéressée qui invoque la reconnaissance à titre principal peut faire constater, selon les procédures prévues aux sections 2 et 3 du présent chapitre, que la décision doit être reconnue.

3. Si la reconnaissance est invoquée de façon incidente devant une juridiction d'un Etat membre, celle-ci est compétente pour en connaître.

La procédure suivie était celle de l'article 33 paragraphe 2 de l'article 33 du règlement CE 44/2001, qui permet de faire constater, selon les procédures prévues aux sections 2 et 3 du présent chapitre, que la décision doit être reconnue.

La section 2 instaure la procédure applicable à la déclaration de force exécutoire.

Le renvoi par l'article 33 § 2 aux procédures prévues aux sections 2 et 3 permet de se référer à la procédure fixée à la section 2 en cas de refus et en cas de contestation et notamment à la procédure prévue à l'article 43 pour les déclarations de force exécutoire.

La procédure prévue à la section 2 du chapitre 3 du règlement CE 44/2001 prévoit la requête à une autorité et le recours devant une juridiction.

En France cette autorité est le greffier en chef du tribunal de grande instance et la juridiction est la cour d'appel.

Toute décision judiciaire exécutoire rendue par une autorité judiciaire d'un Etat membre est de droit exécutoire dans les autres Etats de l'Union européenne.

Le contrôle de l'autorité judiciaire de l'Etat dans lequel il est demandé la reconnaissance a trait à la réalité de la décision judiciaire, à son caractère exécutoire dans l'Etat d'origine, à la vérification de ce que les parties à la déclaration sont bien concernées.

Il n'appartient pas à l'autorité judiciaire française de procéder à une vérification de compatibilité de la décision dont s'agit avec l'ordre public interne, lequel est par principe identique avec celui de tout Etat de l'Union européenne.

-II) La décision dont reconnaissance est demandée et les documents produits :

La décision dont il est demande de déclarer la reconnaissance est :

Un 'order' c'est à dire une 'décision' rendue le 19 novembre 2010 par le Juge [W], 'in the High Court of Justice, Chancery Division, Companies Court ', devant la Haute Cour de Justice, division Chancellerie, juridiction des sociétés dans l'affaire n°4920 de 2002 Oakland Finance Limited (en liquidation) et 'in the matter of the insolvency act 1986", dans le cadre de la loi de 1986 sur les faillites.

Il est présenté :

-1° une décision préparatoire du 12 novembre 2010 du juge [W] qui refuse le renvoi, et sa traduction,

-2° un certificat du 'Registrar in bankruptcy of High Court of Justice' ou greffier en matière de faillites de la Haute Cour de Justice, du 20 janvier 2011 relatif à cette décision du 12 novembre 2010,et sa traduction,

-3° la décision sur le fond dont reconnaissance est demandée, du 19 novembre 2010 du juge [W], et sa traduction,

-4° un certificat 'Registrar in bankruptcy of High Court of Justice' du 20 janvier 2010 relatif à la décision du 19 novembre 2010, et sa traduction,

-5° un jugement approuvé du 7 décembre 2010 qui contient les motivations du juge [W] dans cette affaire, et sa traduction,

-6° une ordonnance du 25 mai 2010 du juge [N], et sa traduction,

-7° un courrier du juge [W] du 16 octobre 2014 et sa traduction.

Les cinq premiers documents qui étaient déjà une première fois traduits par Mme [U] [X] [F] épouse [C], née en 1924, demeurant [Adresse 2], expert honoraire près la cour d'appel de Paris et figurant bien à ce titre sur la liste des experts près la cour d'appel de Paris, ont fait l'objet d'une nouvelle traduction par Mme [O] [V], expert en exercice près la cour d'appel de Paris, laquelle a également traduit les deux dernières pièces.

Le courrier du juge [W] permet d'éclairer sur l'ordre et le sens des décisions.

L'audience s'est déroulée devant ce juge de la Haute Cour de Justice les 11 et 12 novembre 2010.

Le 11 novembre 2010, le renvoi a été demandé et rejeté par décision du 12 novembre 2010.

Le 12 novembre 2010 s'est déroulée l'audience sur le fond, qui a abouti à la décision du 19 novembre 2010 dont les motivations figurent dans le jugement approuvé du 7 décembre 2010.

La décision du 12 novembre 2010, avec certificat du greffier 20 janvier 2011, est un simple refus d'une demande de renvoi.

La décision dont la reconnaissance est demandée est celle du 19 novembre 2010 du juge [W] devant la Haute Cour de Justice, division Chancellerie, juridiction des sociétés dans l'affaire n°4920 de 2002 Oakland Finance Limited (en liquidation) dans le cadre de la loi de 1986 sur les faillites.

Cette décision du 19 novembre 2010 est prise dans l'affaire n°4920 de 2001 entre :

-M.[E] [P], 1er demandeur,

-la société anonyme de la Villa Gal (SAVG) 2ème demandeur,

et :

- M.[J] [Q], en sa qualité de liquidateur de la société Oakland Finance Limited, 1er défendeur,

- la succession de [S] [A] [H] (décédé) 2ème défendeur,

- [D] [Y], 3ème défendeur,

- [Z] [M] [L], 4ème défendeur.

Cette décision précise :

Concernant les requêtes exposées aux paragraphes 1(b), 1(c) et 1(d) d la demande au fond et aux paragraphes (5), (6A), (7) et (8) du dispositif des motifs de la requête re-modifiée, il est déclaré par les présentes que :

(i) aucune somme n'est due à ce jour par SAVG à la société Oakland Finance Limited ('Oakland') ou au deuxième défendeur (que ce soit à titre personnel ou en tant qu'ayant droit du premier défendeur ou d'Oakland) que ce soit au titre des contrats de prêt en date du 23 août 2000, 1 janvier 1999, 8 juillet 1998 ou autrement,

ii) en outre et en tout état de cause, Oakland ou tout successeur de ce dernier, en ce compris le deuxième défendeur, est irrecevable ou empêché de prétendre qu'une quelconque somme est due à ce jour par SAVG,

(iii) l'émission des obligations (telle que définie au paragraphe 74 des motifs de la requête re-modifiée) était nulle et de nul effet et aucune somme n'est due à ce jour par Oakland ou deuxième défendeur ou à tout successeur de ce dernier.$gt;$gt;.

Il est également produit un 'Approved judgment' ou jugement approuvé du 7 décembre 2010 affaire n°4920 de 2002 qui contient les motivations du juge [T] [W].

Celui explique notamment sur la question 1, relative à une prétendue contrariété avec une décision judiciaire française du tribunal de grande instance de Nice :

il existait une différence fondamentale entre la procédure française et la présente requête. La procédure française comprenait une requête en vue de la levée des deux hypothèques inscrites au nom d'Oakland sur la villa au bureau des hypothèques compétent en France et portait sur des biens immobiliers en France. ...

Par contre la requête dans la présente demande est limitée uniquement aux contrats de prêt et à la question de savoir s'il existe une quelconque dette due par SAVG à Oakland. Cette question ne concerne pas les hypothèques et par conséquent la procédure est fondamentalement différente .................

Le dispositif du jugement français de 2007 dans la mesure où il concerne le contrat de prêt d'août 2000 fait uniquement référence au fiat que ce contrat repose sur une 'cause'. ....La 'cause objective' est similaire mais non identique à la notion anglaise de contrepartie (consideration) en droit des contrats. La 'cause subjective' est la cause subjective de la transaction et celle-ci ne doit pas être illicite. Ceci n'a aucun lien avec la décision sur le fait de savoir si une somme est exigible au titre de ce contrat ou plus généralement avec l'exécution du contrat.

4. Bien que le liquidateur ait eu l'intention de plaider l'inverse, le jugement français de 2007 ne prend aucune décision quant au montant dû (le cas échéant) par SAVG à Oakland et, en effet, aucune partie ne demandait une telle décision. Le point crucial est que le dispositif ne fait référence à aucun montant et par conséquent aucun montant n'a été fixé. Chacun des contrats de prêt fait référence à l'endettement en question comme étant 'à hauteur' d'un montant spécifié. Ils ne font pas mention de l'endettement comme étant ces montants maximums. $gt;$gt;.

Par l'arrêt mixte du 19 juin 2014, la cour d'appel a déjà dit que la déclaration concernait les parties à la présente procédure, alors que M.[J] [Q], ès qualités de liquidateur de la société Oakland Finance Limited et que Mme [G] [I] épouse [H] étaient bien recevables à former un recours.

Le certificat du greffier M.[B], greffier en matière de faillite de la Haute Cour de Justice du 20 janvier 2011 atteste du caractère exécutoire de la décision dont s'agit contre les quatre défendeurs, M.[J] [Q], en sa qualité de liquidateur de la société Oakland Finance Limited, 1er défendeur, la succession de [S] [A] [H] (décédé) 2ème défendeur,

-[D] [Y], 3ème défendeur, et [Z] [M] [L], 4ème défendeur.

Il n'appartient pas à l'autorité judiciaire de l'Etat établissant la déclaration de reconnaissance de porter une appréciation sur les règles de procédure de recours dans l'Etat d'origine.

La question de la contrariété prétendue avec une décision judiciaire française a été longuement analysée par le juge [W] dans sa motivation. Il n'appartient pas à l'autorité chargée de la reconnaissance de porter une appréciation sur la pertinence de la décision, sauf à remettre en cause le principe de l'applicabilité de droit de toute décision judiciaire rendue dans un Etat membre de l'Union européenne. Cela concerne les juridictions qui seront éventuellement saisies du fond du litige.

Rien ne s'oppose à la déclaration de reconnaissance de la décision dont s'agit.

M.[Q] ès qualités de liquidateur de la société Oakland Finance Limited, soutient que la déclaration du greffier en chef n'ayant pas été accordée sur la base d'éléments réguliers suffisants, elle doit être annulée.

M.[P] et la Sa de la Villa Gal demandent que soit reconnue en France la décision britannique.

Il est vrai que le greffier en chef n'avait pas tous les éléments pour procéder à la déclaration de reconnaissance. Ces éléments ont été fournis devant la cour. La saisine de la cour aura été utile pour procéder à toutes les vérifications indispensables.

Au vu de cette vérification, la cour est en mesure de confirmer la déclaration de reconnaissance.

-III) sur la demande de dommages et intérêts, les frais irrépétibles, les dépens :

A l'occasion de cette procédure d'appel sur la déclaration de reconnaissance, les intimés demandent la condamnation des appelants à leur payer 100.000 € à titre de dommages et intérêts et 30.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il ne peut être dit que l'appel ait été fautif et dolosif alors qu'il aura été utile pour procéder à plusieurs vérifications.

Chaque partie conservera en conséquence ses dépens et ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Vu l'arrêt de cette cour n°2014/401 du 19 juin 2014 déclarant recevable le recours formé par M.[J] [Q], ès qualités de liquidateur de la société Oakland Finance Limited et par Mme [G] [I] épouse [H] contre la déclaration de reconnaissance en France le 2 février 2011 par le greffier en chef du tribunal de grande instance de Nice, d'une décision judiciaire rendue le 19 novembre 2010 par la High Court of Justice of London entre M.[E] [P], la Sa de la Villa Gal et M.[J] [Q] en sa qualité de liquidateur de la société Oakland Finance Ltd, la succession de feu [S] [A] [H], [D] [Y], [Z] [M] [L],

Confirme la déclaration de reconnaissance en France en application des articles 38 et suivants du règlement CE n°44/2001 du 22 décembre 2000, d'une décision judiciaire rendue le 19 novembre 2010 par la Haute Cour de Justice, division Chancellerie, juridiction des sociétés, juge [W], dans l'affaire n°4920 de 2002 Oakland Finance Limited (en liquidation) dans le cadre de la loi de 1986 sur les faillites entre M.[E] [P], 1er demandeur, la société anonyme de la Villa Gal (SAVG) 2ème demandeur, et M.[J] [Q], en sa qualité de liquidateur de la société Oakland Finance Limited, 1er défendeur, la succession de [S] [A] [H] (décédé) 2ème défendeur, [D] [Y], 3ème défendeur, et [Z] [M] [L], 4ème défendeur, disant notamment que : (i) aucune somme n'est due à ce jour par SAVG ( société anonyme de la Villa Gal) à la société Oakland Finance Limited ..ou au deuxième défendeur ( que ce soit à titre personnel ou en tant qu'ayant droit du premier défendeur ou d'Oakland) que ce soit au titre des contrats de prêt en date du 23/08/2000, 01/01/1999, 08/07/1998 ou autrement, (ii) en outre et en tout état de cause, Oakland ou tout successeur de ce dernier, en ce compris le deuxième défendeur, est irrecevable ou empêché de prétendre qu'une quelconque somme est due à ce jour par SAVG, (iii) l'émission des obligations (telle que définie au paragraphe 74 des motifs de la requête re-modifiée) était nulle et de nul effet et aucune somme n'est due à ce jour par Oakland ou deuxième défendeur ou à tout successeur de ce dernier$gt;$gt;,

Dit ne pas y avoir lieu à condamnation à dommages et intérêts,

Dit que chaque partie conservera ses dépens et ses frais irrépétibles.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 13/10523
Date de la décision : 20/11/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°13/10523 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-20;13.10523 ?
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