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31/10/2014 | FRANCE | N°13/00507

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre c, 31 octobre 2014, 13/00507


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C



ARRÊT AU FOND



DU 31 OCTOBRE 2014



N°2014/ 592















Rôle N° 13/00507







[U] [V]

M° [I], Liquidateur judiciaire de la SARL MARSEILLE PAIN FRAIS





C/



AGS - CGEA DE [Localité 1] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST











Grosse délivrée le :



à :



- Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-E

N-PROVENCE



- Me Michel FRUCTUS, avocat au barreau de MARSEILLE





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE - section I - en date du 13 Décembr...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 31 OCTOBRE 2014

N°2014/ 592

Rôle N° 13/00507

[U] [V]

M° [I], Liquidateur judiciaire de la SARL MARSEILLE PAIN FRAIS

C/

AGS - CGEA DE [Localité 1] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST

Grosse délivrée le :

à :

- Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

- Me Michel FRUCTUS, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE - section I - en date du 13 Décembre 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/3762.

APPELANTS

Monsieur [U] [V], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

M° [I], Liquidateur judiciaire de la SARL MARSEILLE PAIN FRAIS, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Michel FRUCTUS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Julie GRIMA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

AGS - CGEA DE [Localité 1] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Michel FRUCTUS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Julie GRIMA, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 16 Septembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Catherine VINDREAU, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrat ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Président de Chambre qui a rapporté

Madame Catherine VINDREAU, Conseiller

Madame Laurence VALETTE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Octobre 2014

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Octobre 2014

Signé par Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur [V] a été embauché en qualité de responsable d'usine par la société MARSEILLE PAIN FRAIS selon contrat à durée indéterminée en date du 1° juin 2004.

Au dernier état de la relation contractuelle, le salaire brut mensuel de base de Monsieur [V] était de 2300, 00 € outre prime de 500 €, pour 151, 67 heures mensuelles.

Cet emploi est soumis à la convention collective de la Boulangerie Pâtisserie industrielle.

Une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'encontre de la société MARSEILLE PAIN FRAIS le 15 février 2008.

Un plan de sauvegarde était adopté par jugement du 21 novembre 2008.

La liquidation judiciaire de la société est intervenue par jugement du 6 août 2010.

M° [I] a été désigné comme mandataire liquidateur.

Le 6 août 2010, Monsieur [V] a été convoqué à un entretien préalable et, le 17 août 2010, un licenciement lui a été notifié pour motif économique.

-----------------------------------------------

Le 20 décembre 2010, Monsieur [V] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Marseille pour contester cette mesure et demander à l'encontre de son employeur le règlement des sommes dues à ce titre et au titre du non paiement de divers chefs de demandes ( reclassement, heures supplémentaires , travail de nuit, travail dissimulé).

-------------------------------------------------

Par jugement de départage en date du 13 décembre 2012, le Conseil de Prud'hommes de Marseille a statué comme suit :

- Fixe la créance de Monsieur [V] au passif de la liquidation de la société MARSEILLE PAIN FRAIS représentée par son liquidateur judiciaire Maître [M] [I] aux sommes suivantes:

*104,80 € à titre de rappel sur le salaire minimum conventionnel

*10,48 € pour les congés payés qui s'y rapportent,

*1.000 € au titre des dommages et intérêts pour défaut d'information sur les droits acquis au titre du droit individuel à la formation,

- Dit que la garantie de l'AGS s'applique et que le CGEA devra avancer les sommes correspondant aux créances ainsi fixées dans les conditions prévues par les dispositions du code du travail qui s'y rapportent,

- Enjoint au mandataire liquidateur de la Société MARSEILLE PAIN FRAIS de remettre au demandeur un bulletin de salaire rectificatif récapitulant les rappels de rémunération fixés judiciairement et une attestation Pôle Emploi rectifiée conformément aux dispositions de la présente décision, dans le délai d'un mois à compter de la présente décision.

- Déboute le demandeur de toutes ses autres prétentions,

- Condamne la société MARSEILLE PAIN FRAIS représentée par son liquidateur judiciaire Maître [M] [I] à payer à Monsieur [V] une indemnité de procédure de 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit qu'il sera procédé pour les dépens selon les conditions prévues par le code de commerce.

------------------------------------

Monsieur [V] a interjeté appel de cette décision.

----------------------------------------

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, Monsieur [V] demande :

- CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a dit y avoir lieu à indemnité pour inobservation des dispositions relatives au droit individuel à la formation.

- L'INFIRMER pour le surplus.

- DIRE que l'emploi occupé par le concluant relevait de la qualification de «Cadre, Directeur d'Exploitation, niveau 7 ».

- DIRE y avoir lieu à rappel d'heures supplémentaires et accessoires.

- DIRE qu'ont été violées les dispositions légales et conventionnelles relatives aux amplitudes de travail.

- DIRE que la Société MARSEILLE PAIN FRAIS a eu recours au travail dissimulé.

- DIRE le licenciement litigieux dépourvu de cause réelle et sérieuse.

- FIXER en conséquence ainsi que suit ses créances:

- 38820,25 € à titre de rappel de salaire minimum conventionnel,

- 3882,03 € à titre d'incidence congés payés sur rappel précité,

- 135426,49 € à titre de rappel d'heures supplémentaires,

- 13 542,65 € à titre d'incidence congés payés sur rappel précité,

- 14477,50 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, en deniers ou quittance,

- 1447,75 € à titre d'incidence congés payés sur indemnité précitée, en deniers ou quittance,

- 17 011,06 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, en deniers ou quittances.

- ENJOINDRE à Maître [I], ès qualité de liquidateur judiciaire de la Société MARSEILLE PAIN FRAIS, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du jugement à intervenir, d'avoir à établir et à délivrer à Monsieur [V] les documents suivants:

. Bulletins de salaire rectifiés du chef de la qualification judiciairement reconnue ainsi que des rappels de salaire judiciairement fixés,

. Attestation destinée à POLE EMPLOI rectifiée de même,

. Certificat de travail visant la qualification réellement occupée.

- FIXER en outre aux sommes suivantes les autres créances de Monsieur [V] :

-92221,72 € à titre de dommages-intérêts compensatoires des repos compensateurs et des contreparties obligatoires en repos non pris du fait de l'employeur,

-1 500,00 € à titre d'indemnité pour inobservation des dispositions de l'Article L.3132-1 du Code du Travail, relatives au repos hebdomadaire,

-1500,00 € à titre d'indemnité pour inobservation des dispositions de l'Article L.3121-36 du Code du Travail, relatives aux durées hebdomadaires maximales de travail,

-45 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, en application des dispositions de l'Article L.1235-3 du Code du Travail,

-1000,00 € à titre d'indemnité pour inobservation des dispositions relatives à l'information sur le droit individuel à la formation, à raison de la violation des dispositions de l'Article L.6323-19 du Code du Travail,

- 43 432,50 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, en application des dispositions de l'Article L.8223-1 du Code du Travail.

- DIRE le jugement à intervenir opposable au CGEA et ce dernier tenu à garantie.

- STATUER ce que de droit du chef des dépens.

----------------------------------------

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, M° [I] et le CGEA AGS de [Localité 1] demandent de :

Vu la mise en cause du CGEA en application de l'article L.625-1 du Code de Commerce,

Vu l'article L 625-4 du code de commerce.

- Dire et juger que la garantie du CGEA est acquise.

- Confirmer le jugement ce qu'il a débouté Monsieur [V] de ses demandes sauf en ce qu'il a alloué des dommages et intérêts au titre DIF.

En conséquence,

- débouter Monsieur [V] de la totalité de ses prétentions

- Déclarer inopposable à l'AGS - CGEA la demande formulée au titre de l'article 700 du CPC.

En conséquence,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a alloué des indemnités au titre de l'article 700 du CPC.

- Débouter le salarié de sa demande formulée à l'encontre du CGEA pour la demande relative à la condamnation sous astreinte.

- Dire et juger que le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels en vertu de l'article L.643-7 du Code de Commerce.

Constater et fixer en deniers ou quittances les créances des salariés selon les dispositions de articles L 3253 -6 à L 3253-21 et D 3253 -1 à D 3253-6 du Code du Travail.

- Dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées à l'article L 3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et L 3253-17 du Code du Travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail, et payable sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judicaire, et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L 3253-20 du Code du Travail.

A titre infiniment subsidiaire,

- Diminuer le montant des sommes réclamées à titre de dommages et intérêts en l'état des pièces produites.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rappel de salaire sur la qualification

Se prévalant des dispositions de la convention collective relatifs aux critères de qualification, Monsieur [V] soutient que ses fonctions effectives relevaient du statut de Cadre, Directeur d'exploitation, Niveau 7, dès lors que, dès son embauche, il avait en charge, de parfaite autonomie, la gestion du personnel, de la clientèle ainsi que des stocks de l'Entreprise, et exerçait en pratique un pouvoir d'initiative dans l'organisation du travail du site et la coordination des différentes activités, comme en attestent les pièces versées aux débats, et notamment:

-des fiches de visite médicale établies par le Médecin du travail mentionnant le poste de 'Directeur d'Exploitation',

-des différents contrats de travail stipulant expressément que le salarié recruté 'sera sous les directives de Monsieur [V] [U] chargé de la Direction et de l'Organisation du site',

-d'un grand nombre d'attestations décrivant ses fonctions au sein de l'Entreprise, l'intéressé étant unanimement considéré comme le Directeur de l'exploitation,

-du pouvoir donné au concluant par Monsieur [C], Gérant de la Société employeur, pour le représenter lors des entretiens préalables à d'éventuels licenciements, étant précisé que Monsieur [V] était également chargé du recrutement des salariés ,

Il estime, en cause d'appel, produire de nouveaux éléments démontrant que les responsabilités qui lui était dévolues excédaient le « Niveau 5 », dans la mesure où était exigée de lui une 'poly compétence' :

- il disposait d'une carte de visite au nom de la Société, indiquant le titre de 'Responsable d'Exploitation',

-il était détenteur d'une procuration générale pour toutes les opérations concernant LA POSTE,

-il effectuait de nombreux déplacements pour le compte de l'employeur et établissait à ces occasions des notes de frais,

-il était l'interlocuteur unique de la « société s'ur» GERMINAL,

-il organisait les plannings du personnel,

-il était en charge de la gestion des incidents de toutes sortes ;

Monsieur [V] invoque en contrepartie la carence totale de l'employeur, à qui incomberait , en matière d'organisation du travail, dont il est le maître, et singulièrement pour la définition des postes, la charge de faire la preuve du contenu de ces derniers ;

Toutefois, c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte expressément sans les paraphraser inutilement que le premier juge a analysé et répondu à ces moyens sur lesquels Monsieur [V] n'apporte pas en cause d'appel d'éléments nouveaux de nature à remettre en cause la décision querellée ;

La qualification professionnelle est en effet déterminée par les fonctions réellement exercées par le salarié ; ainsi les dispositions de la convention collective s'apprécient au regard de la mise en oeuvre par ce dernier des diplômes et qualification qu'il invoque dans son emploi effectif ; or en l'espèce les pièces dont se prévaut Monsieur [V] ne constituent que des éléments soient factuels, soit subjectifs, s'agissant de l'appréciation des salariés, soit inopérants quant aux agendas produits qui n'apportent aucun élément exploitable, étant rappelé qu'il n'est pas discuté que Monsieur [V] exerçait des fonctions d'autorité, sans que pour autant, ainsi que l'a analysé le premier juge, l'intéressé démontre qu'elles dépassaient le cadre du niveau 5 ;

Le jugement entrepris est en conséquence confirmé ;

Sur le licenciement

Le contenu de la lettre de licenciement en date du 17 août 2010 qui fixe les limites du litige repose précise ce qui suit:

« Par jugement en date du 6 août 2010 le Tribunal de Commerce de TARASCON a prononcé la liquidation judiciaire du patrimoine de la société MARSEILLE PAIN FRAIS et j'ai été désigné en qualité de liquidateur judiciaire. A la suite de cette décision votre employeur doit cesser définitivement son activité.

Je suis contraint de procéder à votre licenciement pour motif économique. Vous êtes dispensé d'effectuer le préavis.

Vous bénéficiez d'une priorité de réembauchage pendant un an à compter de la date de la rupture de votre contrat de travail, qui interviendra à la date de la présente, si vous manifestez le désir d'user de cette priorité dans un délai de quatre mois à compter de cette date.

Je vous ai remis au cours de l'entretien préalable au licenciement le document d'information relatif à la Convention de Reclassement Personnalisé (CRP). Vous disposez d'un délai de 21 jours à compter de la date de l'entretien préalable pour manifester votre intention d'accepter cette convention. Si vous usez de cette faculté, la rupture de votre contrat de travail interviendra à l'issue du délai de réflexion. En cas de refus ou d'absence de réponse dans le délai imparti, la présente vaut notification de licenciement à effet de sa date d'envoi.

Je vous ai remis également, un imprimé de déclaration de créance qui doit comporter les sommes qui vous sont dues à la suite de la rupture de votre contrat de travail, que je vous demande de bien vouloir compléter, dater, signer et me retourner dans les meilleurs délais. »

Est soulevé par Monsieur [V] l'absence de reclassement dont témoigne la célérité avec laquelle le mandataire liquidateur l'a convoqué le jour même du jugement de liquidation judiciaire ;

M° [I] et le CGEA opposent que le mandataire liquidateur est précisément tenu d'agir rapidement, dés le Jugement de liquidation judiciaire, dès lors qu' il est tenu de licencier les salariés dans un délai de 15 jours à compter dudit Jugement afin que ceux-ci puissent éventuellement bénéficier de la garantie des AGS ;

Qu'en outre, aucune possibilité de reclassement n'était possible tant en interne, qu'au sein du Groupe, lequel est uniquement composé de la société GERMINAL et de la société MARSEILLE PAIN FRAIS, ces deux sociétés ayant fait l'objet d'une procédure de sauvegarde par Jugement du Tribunal de Commerce de TARASCON du 28 novembre 2008 ;

S'agissant de la société GERMINAL ils soulignent qu'elle avait pour activité la préparation des pâtes industrielles qui étaient par la suite transformées en viennoiserie et en pains par la société MARSEILLE PAINS FRAIS, laquelle a été liquidée par Jugement du Tribunal de Commerce de TARASCON du 06 août 2010, et qu'il s'agit d'une petite structure qui employait environ une trentaine de personnes ;

Qu'il n'existait aucune possibilité de reclassement dans cette structure, puisque cette dernière fait l'objet depuis le 21 novembre 2008 d'une procédure de sauvegarde et a même procédé à des licenciements ;

Cependant doit être rappelé que :

Selon l'article L.1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ; les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

Le manquement par l'employeur à son obligation de reclassement préalable au licenciement prive celui-ci de cause réelle et sérieuse et ouvre droit au profit du salarié au paiement de dommages-intérêts.

C'est à l'employeur de démontrer qu'il s'est acquitté de son obligation de reclassement, laquelle est de moyens.

L'employeur doit ainsi rechercher et proposer au salarié les postes disponibles avant tout licenciement économique et le reclassement doit être tenté avant la notification du licenciement.

En l'espèce il n'est allégué d'aucune recherche de ce type, la procédure de licenciement ayant du reste été immédiatement mise en oeuvre sans que M° [I] justifie de la composition du groupe en cause et d'une quelconque démarche au sein de ce groupe, le mandataire liquidateur étant manifestement acquis à l'idée, développée dans ses conclusions, que cette démarche était vouée à l'échec ; or, s'agissant de la société GERMINAL, il n'est pas avéré que, à l'époque du licenciement, aucun poste n'eût pu être recherché en son sein ;

Le jugement est en conséquence infirmé ;

Sur les incidences indemnitaires

En application de l'article L 622-21 du code de commerce les instances poursuivies ou engagées après le redressement judiciaire par jugement ne peuvent tendre qu'à la constatation et à la fixation des créances salariales.

- indemnité de préavis et indemnité de licenciement : les sommes réclamées ne sont pas en elles-mêmes discutée ;

Il est en conséquence fait droit à la demande ;

- indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Au visa de l'article L 1235-5 du code du travail applicable en l'espèce, et tenant à l'ancienneté du salarié, à son âge, sa qualification, et à sa rémunération, ainsi qu'aux circonstances de la rupture, et de tous éléments de préjudice soumis à appréciation, il convient de fixer l'indemnité à la somme de 30 000 euros;

Sur les heures supplémentaires et le travail de nuit

Monsieur [V] , à l'instar d'un certain nombre de salariés de l'entreprise, soutient que les horaires de travail n'étaient jamais respectés et qu'il était contraint à des heures supplémentaires non payées , ce que contestent les intimés ;

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Le juge statue au vu des éléments de preuve ainsi soumis au débat.

Pour étayer ses dires, Monsieur [V] produit notamment : un décompte, deux rapports de l'inspection du travail, des attestations ;

Il s'ensuit que le salarié produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.

M° [I] et le CGEA exposent que ces listings informatiques, établis pour les besoins de la cause, sont dénués de portée et ne sauraient constituer un commencement de preuve, lors que le salarié n'avait jamais présenté de réclamation sur ses horaires ;

Ils ne produisent aucune pièce ;

Cependant , si les moyens tenant à l'absence de réclamation ou de demande spécifique, ou encore de preuve à soi même sont totalement inopérants, au vu des éléments produits, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que Monsieur [V] ne justifie pas de ces demandes;

Force est en effet de souligner que selon les plannings établis par l'appelant, la majorité des heures querellées relève d'un dépassement permanent s'établissant à 30 heures chaque semaine sans justifier des horaires précis réellement effectués ; cette permanence et cette globalité peuvent se comprendre pour des salariés affectés à des postes de travail spécifiques et des dépassements permanents, mais non de leur responsable envers qui, en l'espèce, l'exigence d'un décompte précis est d'autant plus grande qu'il mentionne lui-même être responsable des plannings ;

Les attestations, pour celles qui procèdent de constatations directes des faits, ne donnent que des indications ponctuelles sur les horaires de Monsieur [V] ;

Quant aux moyens tenant à la production un courrier du contrôleur du travail du 6 avril 2004, adressé au directeur de la société MARSEILLE PAIN FRAIS duquel il ressort:

- que la durée des repos, fixée à deux jours et non un seul, n'est pas respectée,

- que le temps de chargement des chauffeurs est exclu de la durée effective de travail ce qui est illégal,

- que les pauses médianes au cours d'une même Journée ne sont pas relevées alors qu'Il est interdit d'occuper les salariés plus de six heures consécutives,

- que la tenue des relevés individuels d'horaires est faite au crayon de papier ce qui est à proscrire définitivement ;

et à une correspondance de même nature a été adressée par le contrôleur du travail le 8 octobre 2009 pour faire valoir de nouvelles observations relatives au temps de travail:

-aucun document de décompte du temps de travail pour les salariés travaillant notamment aux services transport.

-le contrôleur du travail mettait solennellement en garde l'employeur en ces termes:

« Cette omission a pour conséquence l'absence de traçabilité sur les horaires de travail effectués par votre personnel, l'absence de contrôle possible par nos services ainsi qu'une forme d'insécurité juridique en cas de contentieux éventuel pour vous-même.

Il convient donc d'établir un document de pointage journalier et hebdomadaire des heures de travail accomplies. (. . .) Vous voudrez bien me faire parvenir un duplicata des documents de décompte horaire pour le premier mois de leur réalisation. »

Pour ce qui concerne le repos compensateur pour travail de nuit :

« vous m'avez indiqué qu'un certain nombre d'ouvriers travaillaient de nuit sur la base de vacations horaires relativement fixes au poste production et plus variable au service de livraison/ transport (Tl de 3h à 8h30, T2 et 3 de 4h30 à 9h30).

Au-delà de la majoration salariale de 25 % que vous appliquez j' attire votre attention sur l'existence d'un repos compensateur qui vient se rajouter pour les salariés considérés comme travailleurs de nuit.

Sont ainsi considérées comme tels les salariés qui accomplissent au moins deux fois par semaine selon leur horaire habituel de travail au moins trois heures consécutives dans la plage horaire de 21 heures à six heures ou qui cumulent au cours d'une année civile au moins 270 heures dans la plage horaire précitée.

Les plages horaires de service précitées font rentrer les salariés concernés dans la catégorie des travailleurs de nuit et, par voie de conséquence, dans l'obtention de ce repos compensateur dans les conditions énoncées à l'article quatre de l'annexe de ouvriers de votre convention collective.

Votre convention collective prévoit un repos compensateur annuel calculé en fonction du nombre d'heures de nuit effectuées au cours de l'année: un jour de repos pour 270 heures de nuit par an, deux jours pour 540 heures de nuit, trois jours pour 800 heures, quatre jours pour 1075 heures, cinq jours pour 1350 heures, six jours pour 1600 heures.

(. . .)

Vous voudrez bien me faire part des dispositions prises sur ce point. » :

Ces documents soulignent de fait la propre carence de Monsieur [V] lui-même, et, partant, sa propre faute dans l'établissement de pièces qui viendraient justifier sa propre demande ;

Le jugement entrepris est en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [V] de l'ensemble de ses demandes consécutives au non respect du temps de travail ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour défaut d'information sur les droits acquis au titre du droit individuel à la formation

Il est alloué à Monsieur [V] , du fait du préjudice nécessairement subi par cette carence, et que ne peut palier la proposition d'une CRP,la somme de 300 euros ;

Sur la demande de remise des documents légaux

Aucun motif ne s'oppose à cette demande, sans qu'il soit opportun de prévoir une astreinte à la charge de l'employeur.

Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation de Monsieur [V] devant le bureau de conciliation jusqu'au jugement d'ouverture de la procédure collective ;

Les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du jugement déféré jusqu'au jugement d'ouverture de la procédure collective ;

Sur la Garantie de l'AGS

En application de l'article D.3253-5 du code du travail, le montant maximum de la garantie de l'AGS s'apprécie à la date à laquelle est due la créance du salarié et au plus tard à la date du jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation judiciaire.

Dès lors que le salarié a été licencié avant l'ouverture de la procédure collective, sa créance a pris naissance à la date de la rupture et doit être garantie par l'AGS dans la limite du plafond applicable à cette date.

Le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels.

Compte tenu de la nature des sommes allouées, l'UNEDIC délégation AGS CGEA doit sa garantie dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail,

Cet organisme ne devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à son paiement ;

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Aucune considération tirée de l'équité ne conduit à condamner l'une ou l'autre des parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le jugement est en conséquence infirmé ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Déclare l'appel recevable en la forme.

Infirme partiellement le jugement du Conseil de Prud'hommes de Marseille

Statuant à nouveau sur les points infirmés

Dit le licenciement de Monsieur [V] sans cause réelle et sérieuse

Fixe la créance de Monsieur [V] au passif de la liquidation de la société MARSEILLE PAIN FRAIS aux sommes suivantes:

- 14477,50 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, en deniers ou quittance,

- 1447,75 € à titre d'incidence congés payés sur indemnité précitée, en deniers ou quittance,

- 17 011,06 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, en deniers ou quittances.

- 30 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 300 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information sur les droits acquis au titre du droit individuel à la formation

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel,

Rappelle que le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels.

Dit que l'UNEDIC délégation AGS CGEA doit sa garantie pour ces sommes dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail, et que cet organisme ne devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à son paiement

Ordonne la délivrance par M° [I] à Monsieur [V] des documents légaux

Dit n'y avoir lieu à fixation d'une astreinte

Confirme le jugement pour le surplus

Déclare les dépens en frais privilégiés de la liquidation judiciaire de la société MARSEILLE PAIN FRAIS

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre c
Numéro d'arrêt : 13/00507
Date de la décision : 31/10/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°13/00507 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-31;13.00507 ?
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