COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 04 SEPTEMBRE 2014
FG
N° 2014/459
Rôle N° 13/23997
SARL ETUDE LODEL
C/
[P] [N]
[W] [G] épouse [N]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP COHEN - GUEDJ - MONTERO - DAVAL-GUEDJ
Me Alexandre RAMETTE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 28 Novembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 11/01202.
APPELANTE
S.A.R.L. ETUDE LODEL
poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié au siège social sis [Adresse 3]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN - GUEDJ - MONTERO - DAVAL-GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me DUTERTRE de la SCP FRANCK-BERLINER-DUTERTRE-LACROUTS, avocat au barreau de NICE.
INTIMES
Monsieur [P] [N]
né le [Date naissance 3] 1947 à [Localité 2],
demeurant [Adresse 1]
représenté et assisté par Me Alexandre RAMETTE, avocat au barreau de NICE
Madame [W] [G] épouse [N]
née le [Date naissance 2] 1946 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 1]
représentée et assistée par Me Alexandre RAMETTE, avocat au barreau de NICE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Juin 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Septembre 2014.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Septembre 2014,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,
Le 29 novembre 2010 une promesse synallagmatique de vente était signée par l'entremise de la société Etude LODEL entre Mme [Q] [F] veuve [U], venderessse, représentée par sa tutrice, Mlle [O] [D], et M.[P] [N] et Mme [W] [G] épouse [N], acquéreurs, pour l'acquisition d'un bien immobilier à [Localité 3] au prix de 450.000 €.
Une commission d'agence de 30.000 € était convenue, à verser par les acquéreurs, au profit de l'agence immobilière Etude LODEL.
Les époux [N] ont versé une somme de 20.000 € à la société Etude LODEL, séquestre .
Un litige est apparu alors que les époux [N], exposant qu'ils auraient contracté cette acquisition en vue de construire une deuxième maison à côté de celle existante, ont constaté que cela ne serait pas possible. Après quelques difficultés, ils ont cependant signé l'acte authentique.
L'acte authentique de vente a été reçu le 1er février 2011 par Me [B], notaire.
Par contre, estimant avoir été trompé par l'agence immobilière, Etude [I], ils ont refusé de verser la commission d'agence.
Le 21 février 2011, la Sarl Etude LODEL a fait assigner M.[P] [N] et Mme [W] [G] épouse [N] devant le tribunal de grande instance de Grasse sur le fondement de l'article 1134 du code civil aux fins de les voir condamner à lui payer la somme correspondant à la commission contractuelle.
Par jugement contradictoire en date du 28 novembre 2013, le tribunal de grande instance de Grasse a :
- constaté que la Sarl Etude LODEL a manqué à ses obligations en donnant des renseignements incomplets,
- dit que la Sarl Etude LODEL ne peut de ce fait prétendre au paiement de l'intégralité de sa commission,
- débouté en conséquence la Sarl Etude LODEL de sa demande de paiement à hauteur de
30.000 € et de ses demandes subséquentes,
- condamné les époux [N] à verser à la Sarl Etude LODEL la somme de 5.000 € au titre de la commission,
- condamné la Sarl Etude LODEL à restituer aux époux [N] la somme de 20.000 € qu'elle détient à titre de séquestre, outre intérêts courant au taux légal à compter de la mise en demeure qui lui a été adressée le 11 février 2011,
- débouté les époux [N] de leur demande en dommages et intérêts,
- condamné la Sarl Etude LODEL au paiement de la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la Sarl Etude LODEL de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toutes autres demandes plus amples et contraires,
- condamné la Sarl Etude LODEL aux dépens distraits au profit de Me PALLUAUD, avocat.
Par déclaration de Me Maud DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, en date du 16 décembre 2013, la Sarl Etude LODEL a relevé appel de ce jugement.
L'affaire a été fixée à bref délai, en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 4 février 2014, la Sarl Etude LODEL demande à la cour d'appel de:
- vu le mandat de vente,
- vu le compromis de vente,
- vu l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970,
- dire la Sarl Etude LODEL recevable et fondée en son appel et y faire droit,
- infirmer le jugement entrepris et statuant a nouveau,
- constater que la commission n'est en rien excessive et que le mandat a été intégralement exécuté, la vente ayant été signée par acte authentique aux. conditions et prix convenus,
- juger en conséquence n'y avoir lieu à réduction de la rémunération du mandataire fixée contractuellement,
- débouter les époux [N] de leurs prétentions à ce titre,
- condamner solidairement les époux [N] à payer à la Sarl Etude LODEL la somme de 30.000 € correspondant à la commission stipulée, outre intérêts de droit à compter de l'assignation introductive d'instance par application des articles 1134, 1999 et 1153 du code civil,
- juger que la Sarl Etude LODEL n'a commis aucune faute en relation de cause à effet avec un quelconque préjudice né, certain et actuel des époux [N] de nature à engager sa responsabilité à leur encontre et ouvrir droit à réparation,
- débouter les époux [N] de leurs demandes indemnitaires exorbitantes et radicalement infondées,
- débouter les époux [N] de leur demande en restitution du dépôt de garantie de
20.000 € restés consignés sur le compte séquestre de la Sarl Etude LODEL et à l'inverse autoriser la Sarl Etude LODEL à débloquer cette somme qu'elle détient en tant que séquestre à son profit, à valoir sur les 30.000 € dus,
- condamner les époux [N] à payer la somme de 2.500 € à la Sarl Etude LODEL pour résistance abusive,
- les condamner au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appe1, ces derniers distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL-GUEDJ, avocats.
La société Etude LODEL se prévaut de son droit à commission une fois la vente conclue et alors que le mission a été intégralement exécutée.
Elle rappelle que l'acte a été passé dans les conditions de la vente prévue à l'avant contrat.
Elle expose que le projet de construction des époux [N] n'avait jamais été indiqué comme déterminant de leur engagement. Elle estime la commission due et non réductible.
La société Etude LODEL rappelle que bien a été vendu comme bâti et non terrain à bâtir.
Elle rappelle que les époux [N], après avoir envisagé de prévoir une condition suspensive de certificat d'urbanisme, ont finalement renoncé à cette condition, de sorte qu'ils savaient que la constructibilité résiduelle était incertaine. Elle rappelle que la venderesse étant âgée de 99 ans, la promesse de vente a été établie en urgence et les époux [N] ont voulu signer tout de suite.
L'agence rappelle que la somme séquestrée peut être affectée au paiement de la commission.
Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 26 mars 2014, M. [P] [N] et Mme [W] [G] épouse [N] demandent à la cour d'appel, au visa des articles 1382 et 1383 du code civil, de l'article 1944 du code civil et de l'article 1589 du code civil, de :
- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de la Sarl Etude LODEL,
- constater les fautes commises par la Sarl Etude LODEL,
- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné la Sarl Etude LODEL au paiement de la somme de 20.000 € au titre du séquestre et réduit à 5.000 € sa commission d'intermédiaire,
- condamner la Sarl Etude LODEL à restituer la somme de 20.000 €, outre intérêts à compter de la sommation délivrée par Huissier de Justice le 11 février 2011, à M. et Mme [N], somme qui représente l'acompte sur le prix qu'ils ont versé et qui n'a pas été représenté par l'appelante,
- réduire la commission d'intermédiaire de la Sarl Etude LODEL à la somme de 5.000 € en raison des fautes commises par elle,
- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts relatives au refus fautif de restituer l'acompte sur le prix à hauteur de 5.000 € et la demande de dommages et intérêts à hauteur de 70.000 €,
- condamner la Sarl Etude LODEL à payer à M. et Mme [N] la somme de 5.000 € en raison du refus abusif de l'appelante de leur restituer l'acompte de 20.000 € sur le prix de vente,
- condamner la Sarl Etude LODEL à payer à M. et Mme [N] la somme de 70.000 € à titre de dommages intérêts en raison des fautes commises, qui leur ont causé préjudice certain et direct,
- condamner la Sarl Etude LODEL au paiement d'une somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. et Mme [N] ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de Me Alexandre RAMETTE, avocat.
Les époux [N] exposent qu'ils se sont retrouvés contraints d'acquérir un bien immobilier qui ne correspondait pas à leur objectif qui était de construire une seconde maison pour leur fils et petit-fils sur le terrain.
Les époux [N] estiment que la société Etude LODEL a commis des fautes à leur égard alors qu'ils avaient exposé acquérir pour construire et que le terrain ne permettait pas de nouvelle construction et était affecté de servitudes non aedificandi et que l'agence ne les a pas informés à ce sujet. Ils considèrent que l'agence aurait dû inclure dans la promesse une condition suspensive relatives aux servitudes. Ils estiment que la publicité faite par l'agence était trompeuse.
Ils considèrent que l'agence a commis un véritable abus de confiance en se payant sur la somme remise qui était destinée à être un acompte sur le prix et non sur la commission d'agence.
Ils demandent des dommages et intérêts pour avoir acquis un bien immobilier d'une valeur moindre que celle qu'ils ont payée.
MOTIFS,
Une promesse synallagmatique de vente sous seing privé a été signée le 29 novembre 2010 entre Mme [Q] [F] veuve [U], née le [Date naissance 1] 1911, venderessse, représentée par sa tutrice, Mlle [O] [D], et M.[P] [N] et Mme [W] [G] épouse [N], acquéreurs, pour l'acquisition d'un bien immobilier consistant en une maison d'habitation sise [Adresse 2]), au prix de 450.000 €.
Cette promesse a été réalisée par l'entremise de l'agence immobilière Sarl Etude LODEL.
Il est convenu dans cette promesse, une rémunération de l'agence immobilière Etude LODEL de 30.000 € à verser les acquéreurs M.et Mme [N].
Cette promesse a abouti à un acte authentique conforme signé le 1er février 2011 devant Me [B], notaire, avec le concours de Me [H] [J].
En conséquence de cette réalisation définitive de l'opération immobilière, concrétisée par l'acte authentique, en par application de la convention du 29 novembre 2010, et en conformité avec les dispositions de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970, la commission d'agence que les époux [N] s'étaient engagés à payer à la société Etude LODEL était due.
Cette commission a été contractuellement convenue à un montant de 30.000 €. Cette convention est la loi des parties et il n'appartient pas à la cour de la modifier. Il ne s'agit pas d'une clause pénale et son montant ne peut être modéré.
Cette somme est due dès régularisation authentique de la vente.
Les époux [N] forment une demande de dommages et intérêts contre la société Etude LODEL, prétendant que celle-ci a mal accompli sa mission et que cette mauvaise exécution leur a causé un préjudice.
Il n'y a pas eu de mandat passé entre les époux [N] et la société Etude LODEL.
Le seul mandat est entre la venderesse et l'agence immobilière. Il ne peut y avoir de manquement contractuel.
Les époux [N] ont signé une promesse synallagmatique de vente.
Cette promesse comportait 3 conditions suspensives : que la note de renseignements d'urbanisme et celle de voirie ne révèlent pas de servitude grave pouvant déprécier la valeur des biens vendus, qu'aucune collectivité locale n'exerce son droit de préemption, que l'état hypothécaire ne révèle pas une hypothèque supérieure au prix de vente.
Les époux [N] n'ont pas exigé de condition suspensive relative à un certificat d'urbanisme leur assurant la possibilité de construire une autre maison.
Aucun manquement de nature délictuel n'est établi à l'égard de l'agence immobilière.
Le jugement sera infirmé.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement rendu le 28 novembre 2013 par le tribunal de grande instance de Grasse,
Statuant à nouveau,
Condamne M.[P] [N] et Mme [W] [G] épouse [N] à payer à la Sarl Etude LODEL la somme de trente mille euros (30.000 €) contractuellement due, avec intérêts aux taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance du 21 février 2011,
Condamne M.[P] [N] et Mme [W] [G] épouse [N] à payer à la Sarl Etude LODEL la somme de trois mille euros (3.000 €) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute M.[P] [N] et Mme [W] [G] épouse [N] de leurs demandes,
Condamne M.[P] [N] et Mme [W] [G] épouse [N] aux entiers dépens, avec distraction au profit de la SCP Hervé COHEN, Laurent COHEN, Paul GUEDJ, Jean-Philippe MONTERO et Maud DAVAL-GUEDJ, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT