COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
4e chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 26 JUIN 2014
N° 2014/278
Rôle N° 13/15143
Syndicat des copropriétaires [Adresse 3]
C/
SCI [Adresse 3]
Grosse délivrée
le :
à :
Me RULLIER
Me BERIDOT
Décision déférée à la Cour :
Jugement du tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 11 juin 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01185.
APPELANT
LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE LA [Adresse 3]
[Adresse 4]
pris en la personne de son syndic en exercice la Société MARINE IMMOBILIER dont le siège est [Adresse 1]
représenté et assisté par Me Philippe-Louis RULLIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Aïda VARTANIAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉE
LA SCI [Adresse 3]
dont le siège est [Adresse 2]
représentée et assistée par Me Marc BERIDOT de la SCP ROUSTAN-BERIDOT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 27 mai 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Torregrosa, président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Georges TORREGROSA, président
Madame Anne DAMPFHOFFER, conseiller
Madame Sylvaine ARFINENGO, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 juin 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 juin 2014,
Signé par Monsieur Georges TORREGROSA, président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Les Faits, la procédure et les prétentions :
La société civile immobilière [Adresse 3] a acquis le 15 mars 1995 un lot numéro 18 situé dans le bâtiment I de la résidence du même nom à [Localité 1], l'état descriptif de division de l'immeuble qui est intégré au règlement de copropriété faisant état du caractère commercial de ce lot, ainsi que de tous les autres lots situés au rez-de-chaussée.
La société civile immobilière a donné à bail en meublé le lot numéro 18, et le syndicat estime que la modification de la destination sans autorisation est illicite.
Par acte en date du 2 mars 2012, le syndicat donc assigné la société civile immobilière afin de la voir condamnée à remettre les lieux en état.
Les parties ont conclu et par jugement contradictoire en date du 11 juin 2013, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a débouté le syndicat.
Le syndicat a relevé appel le 18 juillet 2013 de façon régulière et non contestée. Il sera fait application de l'article 455 du code de procédure civile.
L'appelant a conclu le 17 octobre 2013 et demande à la cour d'infirmer le jugement, de juger que la modification de l'affectation du lot est en contradiction avec les dispositions du règlement de copropriété, et que les travaux ont été effectués sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale.
La société civile immobilière devra remettre les lieux en l'état sous astreinte de 150 € par jour de retard, passé le délai d'un mois suivant la signification de l'arrêt.
Une somme de 2000 € est réclamée au titre des frais inéquitablement exposés.
La société [Adresse 3], intimée, a conclu le 13 décembre 2013 à la confirmation, avec allocation d'une somme de 5000 € au titre des frais inéquitablement exposés.
L'ordonnance de clôture est en date du 13 mai 2014.
SUR CE:
Attendu qu'il n'est pas contesté que le règlement de copropriété a prévu une destination d'habitation pour les appartements situés à l'étage, et une destination commerciale pour les locaux du rez-de-chaussée dont fait partie le lot numéro 18;
Attendu que cela est corroboré par l'état descriptif de division qui précise bien la destination à usage commercial du lot, le règlement de copropriété à valeur contractuelle étant donc en parfaite concordance avec les mentions de l'état descriptif de division ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que le lot numéro 18 litigieux est actuellement consacré fut ce pour partie à une location en meublé ;
Attendu que s'il est certain que l'immeuble voit certains de ses lots consacrés à l'habitation, et d'autres au commerce, il n'en demeure pas moins que cette affectation n'est pas indifférenciée et consacre les étages à l'habitation et le rez-de-chaussée au commerce ;
Attendu qu'à admettre l'argumentation de l'intimée , il serait possible de proche en proche que tout le rez-de-chaussée soit consacré à l'habitation, tandis que tout ou partie des étages puisse faire place aux commerces , ce qui exposerait les habitants des étages aux allées et venues des clientèles respectives et aux horaires des commerçants, alors que bien évidemment le cantonnement du commerce rez-de-chaussée préserve la destination de l'immeuble à usage d'habitation (avec son corollaire de tranquillité et de sécurité) pour les étages ;
Attendu qu'il sera rappelé à cet égard que le règlement de copropriété prévoit que les appartements ou locaux ne pourront être occupés que bourgeoisement, les propriétaires occupants devant veiller à ce que la tranquillité de l'ensemble immobilier ne soit à aucun moment troublée (page 42) ;
Et attendu que cette destination différenciée selon le rez-de-chaussée où les étages ne saurait se diviser, tout changement de destination du rez-de-chaussée vers l'habitation devant faire l'objet d'une autorisation d'assemblée générale, de même que tout changement de destination des étages vers le commerce devrait faire l'objet d'une semblable autorisation ;
Attendu qu'en l'espèce et au surplus, il est suffisamment démontré par le constat d'huissier produit et par l'arrêté de cessation d'occupation aux fins d'habitation en date du 26 septembre 2012 , même s'il est relativisé par l'intimée et contesté par voie de justice, que l'aménagement des lieux pour en faire un meublé porte par nature atteinte à la commercialité du rez-de-chaussée, qui n'est plus homogène, ainsi qu'aux droits des autres copropriétaires habitant de l'étage, qui sont confrontés à une habitation supplémentaire, y compris de nuit sur place, alors que des locaux commerciaux sont normalement vides et sécurisés en dehors des heures de chalandise et d'ouverture légale ;
Attendu que le constat produit par le syndicat en date du 25 octobre 2011 ne permet pas de déterminer avec exactitude les travaux entrepris à l'intérieur du lot, la seule certitude acquise aux débats étant qu'il a fait l'objet d'une location meublée ;
Attendu qu'en conséquence, la demande du syndicat est fondée en ce qu'elle sollicite la remise en état d'origine des lieux, c'est-à-dire leur seule affectation au commerce avec impossibilité d'habiter ou de louer aux fins d'habitation ;
Attendu que l'ancienneté du litige et la résistance infondée du copropriétaire intimé nécessite l'instauration d'une astreinte raisonnable, ainsi que précisé au dispositif ;
Attendu que les frais inéquitablement exposés justifient l' allocation d'une somme de 2000 €
au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, LA COUR statuant contradictoirement :
Déclare l'appel fondé ;
Infirme le jugement de premier ressort dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
dit et juge que le règlement de copropriété affecte le lot numéro 18 à un usage de commerce au rez-de-chaussée, ce qui interdisait l'habitation et notamment la location en meublé sans autorisation préalable régulière de l'assemblée générale ;
Condamne en conséquence la société civile immobilière [Adresse 3] à remettre les lieux dans leur état d'origine, en ne pouvant les affecter qu'au commerce, sans possibilité d'habitation ou de location aux fins d'habitation ;
Assortit cette condamnation d'une astreinte de 100 € par jour de retard, à compter d'une période de 15 jours francs postérieurs à la signification du présent arrêt, l'astreinte étant due dès lors qu'il ne serait pas mis fin à l'habitation ou à la location en meublé ;
Condamne l'intimée au entiers dépens, qui seront recouvrés au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile, outre le paiement à l'appelant d'une somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
Le greffier, Le président,
S. Massot G. Torregrosa