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06/06/2014 | FRANCE | N°12/12474

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre b, 06 juin 2014, 12/12474


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 06 JUIN 2014



N° 2014/1289













Rôle N° 12/12474





[C] [K]





C/



SA SOCIETE INDUSTRIELLE TRAFIC MARITIME (INTRAMAR)

SA SOCIETE COOPERATIVE DE MANUTENTION (SOCOMA)

M° [W], Liquidateur judiciaire de la SA UNION PHOCEENNE D'ACCONAGE (UPA)

AGS - CGEA DE [Localité 2] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST

BUREAU CENTRAL DE LA MAIN D'OEUVRE

CAISS

E DE COMPENSATION DES CONGES PAYES DU PERSONNEL DES ENTREPRISES DE MANUTENTION

GRAND PORT MARITIME DE [1]

[S] [O]

































Grosse délivrée

le :

à :



Me Eric SEMELAIGNE



Me Nico...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 06 JUIN 2014

N° 2014/1289

Rôle N° 12/12474

[C] [K]

C/

SA SOCIETE INDUSTRIELLE TRAFIC MARITIME (INTRAMAR)

SA SOCIETE COOPERATIVE DE MANUTENTION (SOCOMA)

M° [W], Liquidateur judiciaire de la SA UNION PHOCEENNE D'ACCONAGE (UPA)

AGS - CGEA DE [Localité 2] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST

BUREAU CENTRAL DE LA MAIN D'OEUVRE

CAISSE DE COMPENSATION DES CONGES PAYES DU PERSONNEL DES ENTREPRISES DE MANUTENTION

GRAND PORT MARITIME DE [1]

[S] [O]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Eric SEMELAIGNE

Me Nicolas FALQUE

Me Frédéric MARCOUYEUX

Me Nicolas FALQUE

Me Cyril MICHEL

Me Arnaud CLERC

Me Michel FRUCTUS

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE - section C - en date du 05 Juin 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 09/3203.

APPELANT

Monsieur [C] [K], demeurant [Adresse 8]

comparant en personne, assisté de Me Cyril MICHEL, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

SA SOCIETE INDUSTRIELLE TRAFIC MARITIME (INTRAMAR), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Frédéric MARCOUYEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

SA SOCIETE COOPERATIVE DE MANUTENTION (SOCOMA), demeurant [Adresse 9]

représentée par Me Frédéric MARCOUYEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

M° [W], Liquidateur judiciaire de la SA UNION PHOCEENNE D'ACCONAGE (UPA), demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Frédéric MARCOUYEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

AGS - CGEA DE MARSEILLE - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST, demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Michel FRUCTUS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me AIMINO-MORIN Colette, avocat au barreau de MARSEILLE

et

Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS substitué par Me CAPPE DE BAILLON avocat au barreau de PARIS

BUREAU CENTRAL DE LA MAIN D'OEUVRE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nicolas FALQUE, avocat au barreau de MARSEILLE

CAISSE DE COMPENSATION DES CONGES PAYES DU PERSONNEL DES ENTREPRISES DE MANUTENTION DES PORTS DE MARSEILLE, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Frédéric MARCOUYEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

GRAND PORT MARITIME DE [1], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Nicolas FALQUE, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [S] [O] en qualité de liquidateur sociétaire de la SA SOCIETE MODERNE DE TRANSBORDEMENTS (SOMOTRANS), demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Eric SEMELAIGNE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Mars 2014 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Christine LORENZINI, Conseiller

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Fabienne MICHEL.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2014.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2014.

Signé par Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller faisant fonction de Président et Mme Priscille LAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par requête reçue le 14 septembre 2009, Monsieur [C] [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille d'une demande en réparation de préjudices liés à son exposition à l'amiante, en tant qu'ouvrier docker professionnel pour le compte de diverses entreprises de manutention sur le port de [2], à l'encontre de : la Caisse de Compensation des Congés payés du Personnel des Entreprises de Manutention de Marseille, le Port Autonome de [1], la société Union Phocéenne d'Acconage (U.P.A.), représentée par son liquidateur Me [W], et le CGEA de Marseille.

Le Port de Marseille a été classé, par arrêté du 7 juillet 2000 modifié, sur la liste des ports susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante en faveur des ouvriers dockers professionnels et personnels portuaires assurant la manutention (de 1957 à 1993).

Par jugement de départage en date du 5 juin 2012, mentionnant dans son chapeau et/ou dans l'exposé du litige : - en qualité de défendeurs : la Caisse de Compensation des Congés Payés du Personnel des Entreprises de Manutention du Port de [1], pour elle-même et aux droits du Service Auxiliaire de la Manutention (S.A.M.), la société INTRAMAR, la société SOCOMA, la société Union Phocéenne d'Acconage (U.P.A.) représentée par Me [W], liquidateur judiciaire, la société SOMOTRANS représentée par Me [O], mandataire ad hoc et liquidateur sociétaire, et le Grand Port Maritime de [1], établissement public, - en qualité d'intervenant forcé : le Bureau Central de la Main d'Oeuvre (B.C.M.O.), - et en qualité d'intervenant volontaire : le CGEA gestionnaire de l'AGS du Sud-Est, le conseil de prud'hommes :

- s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes dirigées à l'encontre de la C.C.C.P. et a renvoyé le demandeur à se pourvoir, le cas échéant, devant le Tribunal de Grande Instance de Marseille ;

- a rejeté les exceptions d'incompétence au profit du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale et du FIVA ;

- a déclaré l'intervention forcée du Bureau Central de la Main d'Oeuvre recevable, mais non fondée, et a mis celui-ci hors de cause ;

- a constaté le désistement du demandeur à l'encontre du Grand Port Autonome de Marseille, a déclaré ce désistement parfait et a dit qu'il mettait fin à l'instance ;

- a déclaré les sociétés INTRAMAR, U.P.A et SOMOTRANS solidairement responsables du préjudice d'anxiété causé au demandeur ;

- a constaté que les sociétés U.P.A. et SOMOTRANS avaient fait l'objet d'une liquidation et a fixé la créance de ce dernier au passif de la liquidation de chacune d'elles à la somme de 8.000 € ;

- a condamné la société INTRAMAR à payer à Monsieur [K] la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;

- a mis hors de cause la société SOCOMA ;

- a dit que le CGEA devait sa garantie dans les limites et conditions prévues par le code du travail ;

- a rejeté les autres demandes comme étant injustifiées ou infondées ;

- a dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit des parties mises hors de cause ;

- a dit n'y avoir lieu de prononcer l'exécution provisoire ;

- a condamné solidairement les sociétés INTRAMAR, U.P.A et SOMOTRANS à payer au demandeur une indemnité de 250 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- a condamné ces sociétés sous la même solidarité aux dépens.

Monsieur [K] et le CGEA de Marseille ont interjeté appel de cette décision, respectivement le 4 et 11 juillet 2012.

Enregistrées sous les numéros 12/12474 et 12/13286, les procédures ont été jointes sous le premier numéro par ordonnance du 23 juillet 2012.

' Monsieur [K] a fait déposer et soutenir oralement à l'audience des conclusions écrites, communes à l'ensemble des affaires du rôle, dans lesquelles, confirmant son désistement à l'égard du Grand Port Maritime de Marseille et déclarant se désister également à l'égard de la Caisse de Compensation des Congés Payés du Personnel des Entreprises de Manutention de [Localité 2], il demande à la cour de :

- constater que le jugement déféré est entaché d'une erreur matérielle en ce qu'il a condamné les sociétés SOMOTRANS et INTRAMAR, alors que celles-ci n'étaient pas parties à l'instance ;

- confirmer ce jugement en ce qu'il a déclaré la société U.P.A. responsable de son préjudice d'anxiété ;

- fixer sa créance au passif de la liquidation de cette société aux sommes suivantes : 15.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de ce préjudice et 1.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- déclarer l'arrêt à intervenir opposable au CGEA.

Il fait principalement valoir qu'il a travaillé en qualité d'ouvrier docker sur le port de [2], pour le compte et sous la subordination de diverses entreprises de manutention (les acconiers), du 1er avril 1963 au 1er mai 1993 ; qu'il était soumis au statut prévu par la loi du 6 septembre 1947 modifiée et codifiée en 1978 sous les articles L. 511-2 et suivants du code des ports Maritimes, antérieur à la loi du 9 juin 1992 ; qu'il a bénéficié de l'ACAATA à partir du 1er novembre 2001 ; que la juridiction prud'homale est compétente pour statuer sur sa réclamation ; que l'employeur est tenu à une obligation de sécurité de résultat ; que parmi les acconiers ayant réalisé la majorité des déchargements d'amiante figure notamment la société U.P.A., qui est mentionnée sur la liste établie par la direction générale du port de [1] dans une lettre adressée au ministère de l'équipement et des transports le 21 décembre 1999 ; que la preuve de l'existence de ses relations contractuelles avec cette société résulte des bulletins de salaire et/ou des attestations versées aux débats ; que la cour pourra ordonner si nécessaire à ladite société de produire les D.A.D.S. depuis 1977 ; qu'il a été mis en contact avec l'amiante sans protection efficace, en méconnaissance de la législation applicable (loi du 12 juin 1893 concernant l'hygiène et la sécurité des travailleurs dans les établissements industriels, décret du 10 juillet 1913 modifié le 13 décembre 1948, le 6 mars 1961 et le 15 novembre 1973, décret de 1977) ; que l'indemnisation du préjudice d'anxiété est ouverte à tout salarié ayant travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel, pendant une période où étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante ; qu'il n'existe aucune corrélation entre la durée d'exposition et la probabilité de développer une pathologie, en sorte que le préjudice d'anxiété doit être indemnisé de manière forfaitaire et équivalente pour l'ensemble des demandeurs ; que la prescription n'a pas couru tant que son droit ne lui a pas été révélé et que la publication de l'arrêté du 7 juillet 2000 ayant classé le Port de [Localité 2] comme 'établissement amiante' a été le premier élément générateur de son anxiété ; que sa créance est née avant l'ouverture de la procédure collective à l'encontre de la société U.P.A, qu'elle n'avait pas à figurer sur le relevé des créances en raison de sa nature indemnitaire et que la forclusion prévue par l'article 123 de la loi du 25 janvier 1985 ne peut lui être opposée.

' Dans ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience, communes aux autres affaires inscrites au rôle, au motif que l'anxiété alléguée est une pathologie trouvant son origine dans l'exercice des fonctions de docker, Me [W] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société U.P.A. soulève in limine litis l'incompétence rationae materiae de la juridiction prud'homale et demande de renvoyer les salariés à mieux se pourvoir devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Bouches-du-Rhône, en application des articles L. 451-1 et L. 452-1 à L. 452-5 du code de la sécurité sociale et L. 1411-4 al. 2 du code du travail, et au visa de la décision du Conseil Constitutionnel n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, le cas échéant après qu'ils aient sollicité la reconnaissance du caractère professionnel de leur pathologie auprès du service compétent, à savoir la caisse d'assurance maladie.

Subsidiairement sur le fond, Me [W] demande d'infirmer le jugement déféré, de débouter les salariés de leurs prétentions et de les condamner à payer la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, aux motifs qu'ils ont eu de multiples employeurs et qu'ils ne justifient pas avoir travaillé pour la société U.P.A., ou alors à de très rares occasions ; que les attestations qu'ils produisent ont été établies pour les besoins de la cause, qu'elles sont imprécises et sans valeur probante ; qu'ils ne démontrent pas avoir été exposés à l'amiante par la société U.P.A., ni que cette société a commis une faute, ni qu'il existe en un lien de causalité entre cette prétendue faute et le préjudice allégué ; que la société U.P.A. justifie d'un cas de force majeure exonératoire de responsabilité, en ce qu'elle n'était nullement renseignée sur le risque auquel elle pouvait exposer ses salariés alors qu'elle s'était entourée de l'ensemble des institutions ayant pour mission de l'alerter, qu'elle avait l'obligation réglementaire de manutentionner les navires, et qu'en tout état de cause, aucune mesure utile ne pouvait être prise en l'état d'un travail en plein air et de l'absence de moyen utile de protection individuelle à l'époque des faits.

A titre infiniment subsidiaire, Me [W] soutient que le préjudice d'anxiété allégué n'est pas indemnisable ni justifié et qu'il n'existe en l'espèce aucune obligation solidaire ou in solidum.

' Le CGEA Délégation Régionale du Sud-Est a fait développer oralement à l'audience des conclusions écrites, communes à l'ensemble des affaires du rôle, aux termes desquelles il demande à la cour, à titre liminaire, de :

- de se déclarer incompétente au profit du Tribunal des Affaires de sécurité sociale, seul compétent pour statuer sur les demandes des salariés bénéficiaires de l'ACAATA, qui tendent à contester le montant de l'allocation ;

- déclarer les demandes des autres salariés irrecevables au motif qu'elles doivent être portées devant le fonds spécifique créé par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998.

- prononcer sa mise hors de cause concernant la société SOMOTRANS pour laquelle sa garantie ne peut intervenir, dès lors qu'après avoir été placée en redressement judiciaire par jugement du 18 avril 1996 et suite à la cession de ses actifs, cette société a fait l'objet d'un jugement de clôture des opérations de la procédure, prononcé le 21 novembre 2007, suivi d'un procès-verbal de décision de l'actionnaire unique en date du 14 décembre 2007, désignant Me [S] [O] en qualité de 'liquidateur sociétaire' ;

- prononcer sa mise hors de cause concernant la société U.P.A., qui n'a pas employé les dockers demandeurs avant 1993, l'employeur étant alors le B.C.M.O. auquel ils se présentaient quotidiennement pour être affectés sur des missions de manutention portuaire ;

- prononcer sa mise hors de cause en ce qu'aucun élément ne permet d'établir pour quelle(s) société(s) certains demandeurs ont travaillé, ni pendant quelles périodes ;

- déclarer irrecevables les demandes de condamnation solidaire à l'encontre de sociétés dont l'une est en liquidation judiciaire.

Sur le fond, le CGEA demande de débouter le salarié aux motifs qu'il ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice d'anxiété, lequel ne résulte pas du dispositif légal ni d'une simple relation de travail avec les sociétés concernées, mais du fait d'avoir travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi de 1988 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, et qu'il ne justifie pas avoir subi des contrôles et examens médicaux réguliers ; que l'obligation de sécurité de résultat n'était pas applicable à l'époque des faits, puisqu'elle découle de dispositions de la loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991, aujourd'hui codifiées à l'article L. 4121-1 du code du travail ; que l'adhésion à l'ACAATA n'implique pas la faute de l'employeur ; que le Conseil d'Etat a reconnu la responsabilité de l'Etat pour ses carences dans la prévention des risques liés à l'exposition des travailleurs aux poussières d'amiante ; que le salarié ne démontre pas avoir été personnellement victime d'une violation des dispositions d'hygiène et de sécurité alors en vigueur, ni ne prouve l'existence d'un lien de causalité direct entre une telle faute et le préjudice allégué.

Subsidiairement, le CGEA demande de dire et juger qu'en application de l'article L. 3253-8 du code du travail, la créance ne lui est pas opposable comme étant née postérieurement à l'ouverture de la procédure collective.

À titre encore plus subsidiaire, il demande de réduire le montant des dommages et intérêts à de plus justes proportions et de faire application des dispositions du code du travail concernant la mise en oeuvre et le plafonnement de sa garantie, laquelle ne couvre pas l'astreinte ni les frais irrépétibles.

' Aux termes de leurs écritures plaidées à l'audience, faisant valoir qu'elles n'étaient pas parties en première instance et que le préalable obligatoire de conciliation n'a pas eu lieu, les sociétés INTRAMAR et SOCOMA demandent à la cour :

- in limine litis, de se déclarer incompétente rationae materiae au profit du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Bouches-du-Rhône et de déclarer l'appel de Monsieur [K] irrecevable en application de l'article 547 du code de procédure civile ;

- à titre très subsidiaire sur le fond, par des motifs analogues à ceux développés par Me [W] ès qualités, de débouter l'intéressé de l'ensemble de ses prétentions et de le condamner à payer à chacune d'elles une indemnité de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

' Dans ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience, communes à l'ensemble des affaires inscrites au rôle, déclarant représenter la société SOMOTRANS en qualité de liquidateur sociétaire, Monsieur [S] [O] demande à la cour de prendre acte de ce que Monsieur [K] n'agit pas, en appel comme en première instance, contre SOMOTRANS.

Il demande reconventionnellement de condamner ce dernier à lui payer la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre au paiement des dépens.

' Dans ses conclusions écrites soutenues oralement à l'audience, observant qu'il n'a jamais été l'employeur de Monsieur [K], comme celui-ci l'a d'ailleurs admis, le [Localité 1] Port Maritime de Marseille demande de lui donner acte en tant que de besoin de ce qu'il accepte sans réserve le désistement du demandeur.

' Par l'intermédiaire de son conseil à la barre, la Caisse de Compensation des Congés Payés du Personnel des Entreprises de Manutention déclare également accepter en tant que de besoin le désistement d'instance et d'action du salarié.

' En l'absence de demande formée par la société SOMOTRANS à son encontre dans la présente instance, le Bureau Central de la Main d'Oeuvre a fait déposer et soutenir oralement des écritures générales ne visant pas Monsieur [K], dans lesquelles il indique qu'il n'a pas la personnalité juridique et n'est pas l'employeur.

MOTIFS DE L'ARRÊT

- sur l'exception d'incompétence

Selon l'article L.1411-1 du Code du Travail, le Conseil de Prud'hommes est compétent pour connaître des différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions de ce code entre les employeurs ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient.

En l'espèce, dès lors que le préjudice spécifique d'anxiété lié à l'exposition à l'amiante ne constitue pas une maladie professionnelle, que la demande en réparation de ce préjudice est fondée sur l'inexécution par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat dérivant du contrat de travail, et que ni le droit au bénéfice du dispositif prévu par l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, ni le montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité, dont Monsieur [K] a été attributaire à compter du 1er janvier 2002, ne sont contestés, la juridiction prud'homale est compétente et le jugement sera confirmé à ce titre.

- sur le désistement à l'égard du Grand Port Maritime de [1] et de la Caisse de Compensation des Congés Payés du Personnel des Entreprises de Manutention

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté le désistement de Monsieur [K] à l'égard du [Localité 1] Port Maritime de Marseille et dit ce désistement parfait.

Il sera en outre donné acte à l'intéressé de ce qu'il se désiste en appel de ses demandes à l'encontre de la Caisse de Compensation des Congés Payés du Personnel des Entreprises de Manutention et ce désistement sera également déclaré parfait.

- sur la mise hors de cause des sociétés SOMOTRANS, SOCOMA et INTRAMAR, et du B.C.M.O.

Aucune demande n'ayant été formée à l'encontre des sociétés SOCOMA, SOMOTRANS et INTRAMAR, ni du Bureau Central de la Main d'Oeuvre, tant en première instance qu'en cause d'appel, le jugement sera confirmé sur la mise hors de cause de la première société et du B.C.M.O., mais infirmé pour le surplus, et les autres sociétés seront également mises hors de cause.

- sur le fond

En application des dispositions des articles 1134 et 1147 du code civil et L.4121-1 du code du travail, l'employeur est tenu envers le salarié d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise.

Cette obligation ne résulte pas de l'ancien article L. 230-2 du code du travail issu de la loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991, mais du contrat de travail.

Au demeurant, l'ancien article 233-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à cette loi, disposait déjà que les établissements et locaux industriels devaient être aménagés de manière à garantir la sécurité des travailleurs.

En l'espèce, outre les témoignages de Mme [U] et de Monsieur [M], qui ne concernent pas la société U.P.A., Monsieur [K] communique essentiellement :

- le certificat de travail établi par la Caisse de Compensation des Congés Payés du Personnel des Entreprises de Manutention des Ports de Marseille, le 23 janvier 2009, mentionnant qu'il a été inscrit le 1er avril 1963 en qualité d'ouvrier docker professionnel intermittent, radié le 1er mai 1993, et en congé conversion du 1er mai 1993 au 31 octobre 2001 ;

- 6 bulletins de paie dont il résulte qu'il a travaillé pour la société U.P.A. 28 jours en juin 1985, 26 jours en juillet 1986, 28 jours en juillet 1987, 1 jour en juillet 1988, 19 jours en juin 1989 et 1 jour en juillet 1990 ;

- les attestations établies par Messieurs [Z] [L], le 5 janvier 2009, [I] [J], le 9 février 2009, et [F] [A], le 13 février 2009, certifiant, brièvement et en termes quasiment identiques, avoir travaillé avec lui comme dockers 'dans les années 1976 à 1986" (1 et 2) ou 'dans les années 1975 à 1985" (3), dans diverses entreprises sur la zone portuaire (U.P.A., SOMOTRANS, RODRIGUES, SMTM etc...) et avoir manipulé des sacs d'amiante, sans protection ni information sur la dangerosité de ce produit, étant observé que la société SOMOTRANS, mise hors de cause dans la présente instance, verse aux débats une 'attestation de témoignage' comportant deux modèles préétablis, sur laquelle son nom figure parmi d'autres entreprises de manutention (U.P.A., INTRAMAR, STIM, EUROMA), en indiquant, sans être contredite, que cette pièce (n° 22) a été produite, de manière probablement fortuite, dans le dossier d'un autre demandeur, en sorte que ces témoignages imprécis, dont la crédibilité est ainsi entachée, sont dépourvus de valeur probante ;

- la lettre du Directeur Général du Port de Marseille au Ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement, datée du 21 décembre 1999, et la fiche annexe relative à l'activité de chargement ou déchargement d'amiante entre 1966 et 1993, mentionnant notamment :

'(...) Entreprises concernées : L'ancienneté des périodes concernées ne permet pas de déterminer les acconiers ayant participé à ces opérations, nombre de professionnels pouvant intervenir sans qu'aucun soit spécialisé dans ce type de trafic. Par ailleurs, le paysage de la manutention a notablement évolué et certaines entreprises ont disparu de notre environnement ou fusionné avec d'autres.

Après consultation des archives du Port, une liste non exhaustive des entreprises ayant pu opérer des trafics d'amiante a été établi : - Société Industrielle de Trafic Maritime (INTRAMAR) - Union Phocéenne d'Acconage (UPA) - Société Moderne de Transbordements (SOMOTRANS) - Société MANUCAR - Etablissements MAIFFREDY - Société CARFOS.

Nombre de dockers concernés encore en activité : Les personnels exécutant les manutentions travaillent aussi bien à bord des navires qu'à l'air libre et les marchandises sont conditionnées sous des formes variables. Vu la multiplicité des chantiers et le caractère intermittent et journalier du personnel affecté, il n'est pas possible d'établir avec certitude quels ouvriers (intermittents, complémentaires, permanents) ont été exposés au produit en cause, avec quelle fréquence et pendant quelle durée (...)', étant observé que les tableaux relatifs aux modes de conditionnent indiquent : 'vrac' en 1973 et 1974, 'autres conditionnements' de 1966 à 1990"et 'conteneurs' à partir de 1991.

Si Monsieur [K] prouve par ailleurs que les ouvriers dockers étaient unis aux entreprises d'acconage (environ 80 sur le port de Marseille, entre 1957 et 1993, selon l'attestation établie le 15 juin 2010 par le Syndicat des Entrepreneurs de Manutention Portuaire), par un lien de subordination, et que celles-ci étaient donc bien leurs employeurs, à la différence du B.C.M.O., organisme paritaire dépourvu de la personnalité juridique, il n'en demeure pas moins que les témoignages et autres pièces qu'il verse aux débats ne suffisent pas à faire la preuve qu'il a travaillé de manière régulière pour la société U.P.A., ni qu'il a été exposé habituellement à l'amiante du fait de cette société pendant la période visée dans l'arrêté.

En conséquence et sans qu'il soit nécessaire d'ordonner les productions sollicitées, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a fait droit à sa demande en réparation d'un préjudice d'anxiété à l'encontre de ladite société et celle-ci sera rejetée.

- sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les demandes sur ce fondement seront rejetées et Monsieur [K], qui succombe, supportera les entiers dépens de l'instance.

Ces dispositions du jugement seront également infirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale, par mise à disposition au greffe,

Reçoit les appels,

Confirme le jugement déféré sur la compétence de la juridiction prud'homale, le désistement du salarié à l'égard du Grand Port Maritime de [1], et la mise hors de cause de la société SOCOMA et du B.C.M.O.,

L'infirme pour le surplus,

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Donne acte à Monsieur [K] de ce qu'il se désiste en appel de ses demandes à l'égard de la Caisse de Compensation des Congés Payés du Personnel des Entreprises de Manutention et déclare ce désistement parfait,

Met hors de cause les sociétés SOMOTRANS et INTRAMAR,

Déboute Monsieur [K] de sa demande en réparation d'un préjudice d'anxiété à l'encontre de la société U.P.A.,

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [K] aux entiers dépens.

LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre b
Numéro d'arrêt : 12/12474
Date de la décision : 06/06/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence B8, arrêt n°12/12474 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-06-06;12.12474 ?
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