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05/06/2014 | FRANCE | N°13/17797

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre b, 05 juin 2014, 13/17797


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 05 JUIN 2014

om

N° 2014/228













Rôle N° 13/17797







[E] [G],





C/



[T] [Z]

[I] [J]

[V] [C] épouse [J]





















Grosse délivrée

le :

à :



Me Jean-Louis BONAN



Me Stéphane CECCALDI









Décision déférÃ

©e à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 27 Juin 2013 enregistré au répertoire général sous le n°10/14333.





APPELANT



Monsieur [E] [G],

né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 2] (13), demeurant [Adresse 3]



représenté par Me Jean-Louis BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE





INTI...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 05 JUIN 2014

om

N° 2014/228

Rôle N° 13/17797

[E] [G],

C/

[T] [Z]

[I] [J]

[V] [C] épouse [J]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Jean-Louis BONAN

Me Stéphane CECCALDI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 27 Juin 2013 enregistré au répertoire général sous le n°10/14333.

APPELANT

Monsieur [E] [G],

né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 2] (13), demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Jean-Louis BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [T] [Z]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 2] (13), demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [I] [J]

né le [Date naissance 4] 1943 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [V] [C] épouse [J]

née le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Avril 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Odile MALLET, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Odile MALLET, Président

Monsieur Jean-Luc GUERY, Conseiller

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2014,

Signé par Mme Odile MALLET, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [T] [Z], propriétaire des parcelles cadastrées commune de [Localité 2], section BY n°[Cadastre 1], [Cadastre 6] et [Cadastre 9], Monsieur [I] [J] et son épouse, Madame [V] [C], propriétaires des parcelles voisines cadastrées section BY n° [Cadastre 7] et [Cadastre 8], ont assigné Monsieur [E] [G] aux fins de se voir accorder un droit de passage sur les parcelles [Cadastre 2], [Cadastre 3] à [Cadastre 5], [Cadastre 10], [Cadastre 11] à [Cadastre 12] appartenant à ce dernier.

Le 2 mai 2013 le tribunal s'est transporté sur les lieux.

Par jugement du 27 juin 2013 le tribunal de grande instance de Marseille a :

constaté que les fonds situés lieu-dit '[Adresse 4]', cadastrés sous les n° [Cadastre 1], [Cadastre 6], [Cadastre 9] d'une part, [Cadastre 7] et [Cadastre 8] d'autre part, sont enclavés,

dit qu'ils bénéficieront d'une servitude de passage sur le chemin privé dit 'les Ramades', puis en bordure sud des parcelles cadastrées section BY n°[Cadastre 10], [Cadastre 4], [Cadastre 3] et [Cadastre 2],

débouté les parties du surplus de leurs demandes,

partagés les dépens par moitié entre les demandeurs et le défendeur.

Monsieur [G] a interjeté appel de ce jugement le 2 septembre 2013.

A l'audience, avant l'ouverture des débats, à la demande de Monsieur [G] et avec l'accord des parties adverses, l'ordonnance de clôture rendue le 31 mars 2014 a été révoquée et la procédure a été à nouveau clôturée.

POSITION DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions déposées le 3 avril 2014 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, Monsieur [G] demande à la cour, au visa des articles 682, 1134 et 555 du code civil :

d'infirmer le jugement,

de débouter les intimés de leurs demandes en constatant qu'en renonçant à emprunter le chemin au levant, ils se sont volontairement enclavés,

de condamner Monsieur [Z] à lui payer une somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

de condamner les époux [J] à lui payer une somme de 3.000 € pour procédure abusive et 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

de condamner Monsieur [Z] et les époux [J] aux entiers dépens d'instance et d'appel.

Dans leurs dernières écritures déposées le 27 mars 2014 auxquelles il est également renvoyé pour l'exposé des moyens, Monsieur [Z] et les époux [J] demandent à la cour, au visa des articles 682, 685 et 1382 du code civil, R 111-5 et R 111-34 du code de l'urbanisme, et du PLU de la commune :

de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté l'état d'enclave de leurs fonds en raison de l'insuffisance du chemin situé à l'ouest qui n'excède pas 2,80m de large,

le cas échéant, dire que la servitude et son assiette ont été acquises par la prescription en raison du passage imposé depuis plus de 30 ans sur le fonds [L] appartenant aujourd'hui à Monsieur [G],

de les recevoir en leur appel incident et condamner Monsieur [G] à leur payer une somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du trouble de voisinage subi depuis 2008,

de condamner Monsieur [G] aux entiers dépens et au paiement d'une somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

* sur l'état d'enclave

Selon l'article 682 du code civil est enclavé le fonds qui n'a sur la voie publique aucune issue ou qu'une issue insuffisante pour son exploitation normale.

Dans le cas présent les parcelles BY [Cadastre 1], [Cadastre 6] et [Cadastre 9] appartenant à Monsieur [Z] et BY [Cadastre 7] et [Cadastre 8] appartenant aux époux [J] ne disposent d'aucune façade donnant sur la voie publique.

Toutefois elles sont desservies, côté ouest, par un chemin d'exploitation qui rejoint la voie publique, à savoir le chemin [Adresse 4]. Il ressort du procès-verbal de transport sur les lieux dressé par le premier juge que ce chemin d'exploitation est goudronné et bordé de murs en pierres sèches sur la quasi-totalité de son parcours, qu'il dessert sept propriétés à gauche et trois à droite lesquelles ne disposent pas d'autre accès à la voie publique, qu'aux points les plus étroits la largeur du chemin est de 2,50 mètres.

Le 12 septembre 2013 la SARL Géoexpertise a dressé, à la demande de Monsieur [G], un plan topographique des lieux. Ce document a été régulièrement communiqué aux débats et soumis à la libre discussion des parties, de sorte qu'il constitue un moyen de preuve parfaitement recevable. Il en ressort que le chemin d'exploitation menant des fonds [Z] et [J] au chemin [Adresse 4] présente une largeur irrégulière variant de 8,99 m en son point le plus large à 2,23m en son passage le plus étroit, une moyenne de 4m de large sur la plus grande partie de son tracé avec cinq rétrécissements inférieurs à 3m et des aires de stationnement et de retournement. Six portails desservant des propriétés riveraines ouvrent sur ce chemin.

Monsieur [Z] et les époux [J] ont acquis leurs propriétés entre les mains des époux [E] [Q] respectivement les 19 janvier 2001 et 18 avril 1991. Les terrains étaient déjà bâtis lors de ces acquisitions.

Dans le paragraphe relatifs aux servitudes des titres [Z] et [J] il est indiqué :

'Il est précisé que dans l'acte de partage des 9 et 12 août 1941 il est mentionné la clause suivante : de convention expresse entre les co-partageants, le chemin particulier situé côté couchant de l'immeuble partagé reste commun entre eux et les héritiers de [F] [W]'.

et dans le paragraphe relatif aux conditions particulières :

'Il est expressément convenu entre les parties que l'accès à la parcelle vendue se fera par le chemin au couchant ci-dessus visé dans l'acte du 12 août 1941 et non par celui au levant qui ne constitue qu'une simple tolérance, aucun acte de servitude n'ayant jamais été régularisé. Si l'accès par le levant était supprimé, l'acquéreur renonce expressément à tout recours contre le vendeur.'

Il ressort des constatations matérielles consignées dans le procès-verbal de transport sur les lieux et du plan dressé par Géoexpertise que le chemin d'exploitation est, compte tenu de sa configuration, de sa largeur, de son état et de son revêtement, de nature à assurer suffisamment le passage de véhicules et la desserte des parcelles bâties [Z] et [J]. Le caractère suffisant de cette desserte est confirmé par le fait que ce chemin est le seul accès à plusieurs autres terrains construits.

Il ressort en outre des titres que Monsieur [Z] et les époux [J] ont été parfaitement informés que les fonds qu'ils achetaient ne bénéficiaient d'aucun droit de passage sur le fonds [G] et étaient desservis par le chemin d'exploitation situé à l'ouest de leurs propriétés.

Monsieur [Z] et les époux [J] ne sauraient utilement soutenir que la largeur du chemin d'exploitation est insuffisante à la desserte de propriétés bâties au regard des dispositions du plan local d'urbanisme révisé en 2006 qui exige que les voies d'accès puissent satisfaire aux règles de sécurité et notamment aux passages des véhicules contre l'incendie alors que leurs fonds sont déjà bâtis, que le chemin dessert plusieurs autres habitations et qu'en tout état de cause, en cas de besoin, les services incendie pourront passer par l'accès le plus approprié et le plus rapide .

Ils ne sauraient davantage soutenir utilement que ce chemin n'a jamais été entretenu et est inutilisable alors d'une part qu'il s'agit là d'affirmations qui ne sont démontrées par aucune des pièces produites aux débats, alors d'autre part que le riverain d'un chemin d'exploitation ne saurait se prévaloir de ce qu'il n'a pas entretenu l'assiette du chemin pour solliciter un droit de passage pour cause d'enclave sur le fonds d'un tiers.

Il en résulte que l'état d'enclave allégué n'est pas démontré.

Il convient au surplus de relever que le fonds de Monsieur [G] n'est pas lui-même riverain de la voie publique, à savoir le chemin [Adresse 3], et que Monsieur [Z] et les époux [J] n'ont pas appelé en cause les propriétaires des fonds joignant à l'Est le chemin [Adresse 3], de sorte que le droit de passage sollicité ne serait pas de nature à désenclaver leurs fonds.

* sur l'acquisition de la servitude par prescription

Selon l'article 685 du code civil l'assiette et le mode de servitude de passage pour cause d'enclave sont déterminés par trente ans d'usage continu.

En application de cet article, il ne saurait être fait droit à une demande en reconnaissance d'une servitude de passage en raison de la prescription alors que seuls l'assiette et le mode du passage pour cause d'enclave sont déterminés par trente ans d'usage.

Dès lors, Monsieur [Z] et les époux [J] ne sauraient revendiquer une servitude de passage sur le fonds de Monsieur [G] au motif que depuis 50 ans le passage y a été exercé en l'absence d'état d'enclave de leurs propriétés.

En conséquence, le jugement sera infirmé et Monsieur [Z] et les époux [J] seront déboutés de leur demande tendant à se voir accorder un droit de passage sur les parcelles BY [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 4], [Cadastre 3] et [Cadastre 2] appartenant à Monsieur [G].

* sur le trouble anormal de voisinage

Exposant que Monsieur [G] leur occasionnait un trouble anormal de voisinage du fait de l'encombrement de son terrain par divers détritus, dépôts en tout genre et entreposage de caravanes, Monsieur [Z] et les époux [J] avaient saisi le juge des référés qui les a déboutés de leur demande par une ordonnance rendue le 4 avril 2008.

Monsieur [Z] et les époux [J] demandent à la cour de condamner Monsieur [G] à leur payer la somme de 20.000 € de dommages et intérêts en réparation de ce trouble anormal de voisinage.

A l'appui de leur demande ils versent aux débats :

un procès-verbal de constat dressé le 4 juin 2007 énonçant que sont visibles sur le terrain de Monsieur [G] de nombreux objets divers et hétéroclites, ferrailles, conteneurs à poubelle, planches, tuyaux, vieux meubles, bouteille de gaz, cumulus, bateau sur remorque...,

un rapport d'expertise dressé par Monsieur [N] dans un litige opposant la SCI Bouvier à Monsieur [G] indiquant qu'il existait, au 9 juillet 2009, sur le terrain de ce dernier un dépôt d'objets hétéroclites, surtout des bungalows et tentes de grande taille, visible depuis le chemin des Ramades mais que Monsieur [G] a débarrassé son terrain de ces objets hétéroclites au 18 mai 2010, seuls subsistant à cette date tentes et bungalows,

un procès-verbal de constat dressé le 7 octobre 2011 à la demande de Monsieur [J] mentionnant qu'au [Adresse 2] se trouvent entreposés un mobile-home et des baraquements métalliques appartenant à Monsieur [G],

une photographie aérienne.

Il convient toutefois de relever que le procès-verbal du 4 juin 2007 a été établi à la demande de la SCI Bouvier et que l'huissier a procédé à ses constatations à partir de la terrasse de la maison de cette SCI laquelle surplombe le terrain [G] de sorte que ce procès-verbal n'est pas de nature à établir que les objets divers entreposés sur le fonds [G] étaient visibles à partir des fonds [Z] et [J]. Il en est de même du rapport d'expertise établi par Monsieur [N]. De même, le procès-verbal dressé le 7 octobre 2011 décrit ce qui est visible à partir du chemin [Adresse 3], et non à partir des terrains [Z] et [J].

C'est donc à juste titre que le premier juge a considéré que la preuve d'un trouble anormal de voisinage n'était pas rapportée et a rejeté la demande de dommages et intérêts.

* sur les demandes de dommages et intérêts

Un action en justice ne peut, sauf circonstance particulière qui n'est pas démontrée en l'espèce, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont la décision est l'objet en appel. En conséquence Monsieur [G] sera débouté de ses demandes en dommages et intérêts pour procédure abusive.

* sur les dépens et frais irrépétibles

Le jugement sera infirmé. Echouant en cause d'appel Monsieur [Z] et les époux [J] seront condamnés aux dépens et ne peuvent, de ce fait, prétendre au bénéfice de l'article 700 du code de procédure civile. A ce titre ils seront condamnés à payer à Monsieur [G] une somme de 2.000 €.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré.

Statuant à nouveau,

Déboute Monsieur [T] [Z], Monsieur [I] [J] et Madame [V] [C] épouse [J] de leur demande tendant à se voir accorder une servitude de passage sur les parcelles cadastrées commune de [Localité 2], section n° BY [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 4], [Cadastre 3] et [Cadastre 2] appartenant à Monsieur [E] [G].

Déboute Monsieur [Z] et les époux [J] de leur demande de dommages et intérêts pour trouble anormal de voisinage.

Déboute Monsieur [G] de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute Monsieur [Z] et les époux [J] de leur demande et les condamne in solidum à payer à Monsieur [G] une somme de deux mille euros (2.000,00 €).

Condamne in solidum Monsieur [Z] et les époux [J] aux dépens de première instance et d'appel.

le greffier le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/17797
Date de la décision : 05/06/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4B, arrêt n°13/17797 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-06-05;13.17797 ?
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