La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/05/2014 | FRANCE | N°13/18155

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15e chambre a, 09 mai 2014, 13/18155


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 09 MAI 2014



N° 2014/328













Rôle N° 13/18155







SA BANQUE POPULAIRE COTE D AZUR (BPCA)





C/



[S] [F] [B]

[P] [V] [X] épouse [B] [S] [F]

[A] [R]

[L] [M]

[E] [H]





















Grosse délivrée

le :

à : Me Romain CHERFILS



Me Jean-Pierre GAULTIE

R



la SCP COHEN L ET H GUEDJ



Me Hervé BOULARD







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 23 Août 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 11/00137.





APPELANTE



SA BANQUE POPULAIRE COTE D AZUR (BPCA) agis...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 09 MAI 2014

N° 2014/328

Rôle N° 13/18155

SA BANQUE POPULAIRE COTE D AZUR (BPCA)

C/

[S] [F] [B]

[P] [V] [X] épouse [B] [S] [F]

[A] [R]

[L] [M]

[E] [H]

Grosse délivrée

le :

à : Me Romain CHERFILS

Me Jean-Pierre GAULTIER

la SCP COHEN L ET H GUEDJ

Me Hervé BOULARD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 23 Août 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 11/00137.

APPELANTE

SA BANQUE POPULAIRE COTE D AZUR (BPCA) agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, plaidant par Me Gilbert MANCEAU, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [S] [F] [B]

né le [Date naissance 1] 1952 en SUEDE, demeurant [Adresse 5] / SUEDE

représenté par Me Jean-Pierre GAULTIER, avocat au barreau de NICE

Madame [P] [V] [X] épouse [B] [S] [F]

née le [Date naissance 2] 1955 en SUEDE, demeurant [Adresse 5] / SUEDE

représentée par Me Jean-Pierre GAULTIER, avocat au barreau de NICE

Maître [A] [R], demeurant [Adresse 4]

représenté par la SCP COHEN L ET H GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, plaidant par Me Hélène BERLINER, avocat au barreau de NICE substitué par Me Philippe DUTERTRE, avocat au barreau de NICE

Maître [L] [M], demeurant [Adresse 1]

représenté par la SCP COHEN L ET H GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, plaidant par Me Hélène BERLINER, avocat au barreau de NICE substitué par Me Philippe DUTERTRE, avocat au barreau de NICE

Maître [E] [H] prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL KAPRIM, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Hervé BOULARD de la SCP PETIT & BOULARD, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 27 Novembre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Olivier COLENO, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier COLENO, Président (rédacteur)

Monsieur Christian COUCHET, Conseiller

Madame Françoise BEL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Janvier 2014, puis prorogé au 28 Février 2014, 28 Mars 2014 et 09 Mai 2014.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Mai 2014,

Signé par Monsieur Olivier COLENO, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Par le jugement d'orientation dont appel du 23 août 2013, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nice statuant en formation collégiale a annulé la procédure de saisie immobilière engagée en vertu de son droit de suite par la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR (BPCA) pour recouvrement d'une créance de 1.946.026,20 € contre [S] [B] et son épouse [P] [X], tiers détenteurs par l'acquisition qu'ils ont faite en état futur de rénovation d'un lot du programme immobilier que la banque avait financé par un prêt de 3.000.000 € dont 2.200.000 € de prix d'achat et 800.000 € d'une ouverture de crédit pour travaux respectivement garantis par un privilège de prêteur de deniers et une affectation hypothécaire sur l'ensemble immobilier, le promoteur de l'opération et emprunteur, la S.A.R.L. KAPRIM, ayant été placé en liquidation judiciaire le 18 mai 2011 sans avoir remboursé au dernier terme convenu en janvier 2009, et la créance de la banque ayant fait l'objet d'une décision d'admission pour 1.980.796,05 €,

aux motifs :

que l'examen du compte centralisateur ouvert par la banque au nom de la S.A.R.L. KAPRIM fait apparaître qu'elle a fait fonctionner celui-ci comme un compte courant au-delà de la somme de 800.000 € pour laquelle il avait été ouvert et au-delà du terme fixé pour le remboursement puisqu'elle n'a arrêté le compte que le 21 août 2009 pour le 13 janvier 2009,

que le compte de l'étude notariale fait apparaître que la somme de 800.000 € a été très vite remboursée à la banque dès le mois de juin 2007 selon ce que révèlent les écritures créditrices en sa faveur, ce qui soldait la garantie hypothécaire,

tandis que pour la somme de 2.200.000 €, le même compte étude fait ressortir des remboursements s'élevant à 3.297.481,59 € excédant le montant du principal, des intérêts et des accessoires, même après retranchement des sommes remboursant l'ouverture de crédit de 800.000 €, de sorte que la garantie procurée par le privilège de prêteur de deniers était elle aussi éteinte par paiement de la créance,

que s'il advenait que des sommes soient encore dues, elles ne peuvent procéder que d'une créance chirographaire ne permettant pas d'exercer un droit de suite,

ce dont il suit que la banque ne disposait pas d'une créance liquide et exigible lui permettant de mettre en 'uvre un droit de suite.

Le juge de l'exécution a dit en conséquence privées d'objet les questions de responsabilité de la banque et du notaire que les parties avaient prétendu élever devant lui.

Il avait préalablement déclaré les époux [B] irrecevables en leurs prétentions tendant à la nullité de l'assignation et la caducité du commandement fondées sur un défaut de mention de la date de l'acte alors qu'il s'avère que l'assignation a bien été remise à l'autorité centrale de Stockholm le 28 juillet 2011, soit dans le délai de deux mois suivant la publication du commandement le 30 mai 2011, rectifiée le 6 juin 2011.

Vu la remise faite au greffe le 26 novembre 2013 des assignations à jour fixe délivrées en vertu de l'autorisation présidentielle donnée par ordonnance du 20 septembre 2013 sur une requête déposée le 19 septembre après déclaration d'appel du 11 septembre 2013,

Vu les dernières conclusions déposées le 26 novembre 2013 par la SA BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR, appelante, tendant à l'infirmation de cette décision et demandant à la Cour de déclarer irrecevable l'exception de péremption du commandement, de valider la procédure de saisie immobilière et d'ordonner la vente forcée du bien saisi,

soutenant notamment :

-que la demande tendant à la péremption du commandement est irrecevable comme nouvelle en vertu des dispositions de l'article R311-5 du code des procédures civiles d'exécution, s'agissant d'une demande qui, prétendant que la péremption aurait été acquise le juin 2013, pouvait et devait donc être soulevée à l'audience d'orientation tenue le 20 juin 2013, principe auquel l'article R321-21 ne fait pas exception,

-que le premier juge a méconnu :

*le principe d'indépendance des patrimoines, le compte ouvert à la banque au nom de l'emprunteur n'étant pas accessible à la banque, les paiements enregistrés par les ventes ayant été faits à l'ordre du vendeur et non du prêteur, quoique sur un compte ouvert en ses livres, et seul le disponible en compte à la date d'exigibilité du concours servant à l'amortir, que l'autorité de chose jugée attachée à la décision d'admission excluait que le premier juge puisse envisager qu'un solde restant dû puisse n'avoir qu'un caractère chirographaire,

*les principes régissant le fonctionnement des concours bancaires, les sommes inscrites au crédit du compte centralisateur avant l'échéance du concours au terme de deux ans ne pouvant valoir paiement à la banque, aucune mainlevée partielle n'ayant été demandée ni effectuée et le fonctionnement des concours ayant été conforme aux prévisions contractuelles, le solde débiteur du compte ayant même été d'un montant inférieur le 21 août 2009 à ce qu'il était le 10 février précédent, ledit solde n'ayant jamais excédé le montant du crédit ouvert,

-que les époux [B] ont méconnu leurs propres obligations en effectuant des versements sur un compte autre que le compte centralisateur, fait fautif qui est à l'origine de la situation qu'ils subissent,

Vu les dernières conclusions déposées le 14 novembre 2013 par M°[M] et M°[R], notaires, tendant à la confirmation du jugement dont appel, la créance privilégiée et hypothécaire de la banque ayant été intégralement réglée par prélèvements sur les prix de revente des lots, et le solde chirographaire ne pouvant fonder l'exercice d'un droit de suite,

subsidiairement au rejet de toute demande à leur encontre, l'information des acquéreurs, prétendument omise, ayant bien été délivrée tant par les termes précis et explicites de l'acte de vente que par l'attestation de vente qui leur a été remise, le notaire ayant rempli son obligation d'information et de conseil, et l'acquéreur étant seul responsable des conséquences de ses manquements à l'obligation contractuelle qu'il avait contractée de payer les fractions de prix exclusivement sur le compte centralisateur,

plus subsidiairement à la limitation de toute condamnation éventuelle au profit des tiers détenteurs au seul montant des versements non libératoires effectués par les acquéreurs compte tenu des engagements pris en ce sens par la banque à leur égard,

soutenant notamment :

que l'ouverture de crédit stipulait d'une part un emploi des fonds exclusivement aux fins d'acquitter les dépenses de l'opération et d'autre part que les fonds issus des ventes successives serviraient en tout ou partie à son remboursement, entraîneraient la diminution progressive de l'autorisation de crédit, et ne pourraient être utilisés par l'emprunteur que pour les dépenses nécessaires à la réalisation des travaux et avec l'accord spécial et préalable de la banque et sur justification,

que l'examen des relevés de compte fait apparaître que la BPCA a encaissé au total une somme de 5.062.363,10 € dont plus de 4 millions d'euros provenant des ventes spécialement et légalement affectés au paiement des créances privilégiée et hypothécaire, dont le montant est de 3 millions d'euros en principal et les trois ans d'intérêts conservés soit 504.900 €, ainsi éteintes,

que la BPCA n'est pas fondée à prétendre qu'aucun amortissement ne pouvait intervenir avant l'exigibilité, en contradiction avec l'institution du compte centralisateur et le mécanisme de diminution progressive de l'autorisation de crédit, comme de l'engagement de la banque à donner mainlevée des inscriptions grevant les lots vendus dès que leur prix aura été intégralement payé et, en cas de poursuite contre l'acquéreur défaillant, à limiter sa créance privilégiée à la fraction du prix de vente restant due par ledit acquéreur -engagement qu'elle prétend méconnaître ici en réclamant la totalité de sa créance contre chaque acquéreur,

que tous les paiements sont venus en amortissement des créances garanties par application des articles 2374 du code civil,

que le compte centralisateur, qui relevait d'une affectation spéciale, n'est pas un compte courant, que l'hypothèque sur les lots n'a pas pour objet de garantir le solde débiteur d'un compte courant, qu'il ne s'agit pas d'une hypothèque rechargeable,

que le solde débiteur résulte du dépassement de l'ouverture de crédit autorisée, qui n'est assorti d'aucune garantie, et est la conséquence des manquements de la banque qui a laissé décaisser plus de 6 millions d'euros,

que la décision d'admission leur est inopposable, n'étant pas parties à la procédure collective et n'ayant pas qualité pour la contester,

que les acquéreurs peuvent se prévaloir du bénéfice de discussion et que des ventes se sont poursuivies par le liquidateur,

que le juge de l'exécution n'est pas compétent pour statuer sur une action en responsabilité civile contre le notaire, mais que l'argument n'a plus lieu d'être, la cour d'appel n'étant pas le juge de l'exécution,

Vu les dernières conclusions déposées le 21 novembre 2013 par Maître [H], liquidateur à la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. KAPRIM tendant à la confirmation du jugement dont appel sauf en ses dispositions relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile, soutenant notamment avoir communiqué à première demande les renseignements sollicités, précisant avoir obtenu les autorisations nécessaires pour réaliser l'actif immobilier restant de la S.A.R.L. KAPRIM et énumérant les ventes réalisées, pour partie de gré à gré, pour partie aux enchères publiques,

Vu les dernières conclusions déposées le 21 novembre 2013 par [S] [B] et [P] [X] son épouse tendant à titre principal à la péremption du commandement et subsidiairement à la confirmation du jugement dont appel sauf en ses dispositions sur l'article 700 du code de procédure civile, et demandant à la Cour à tout le moins de juger que la BPCA n'est pas recevable en ses poursuites pour avoir été défaillante dans le contrôle de l'utilisation des fonds prêtés avec affectation spéciale, qu'ils sont recevables en leur demande de discussion préalable avec pour conséquence un sursis à la vente, à titre subsidiaire de juger que les notaires ont commis une faute engageant leur responsabilité civile professionnelle à leur égard et de les condamner à leur payer la somme de 1.946.026,20 €, subsidiairement 455.060,65 €, en tout état de cause de condamner la BPCA à leur payer la somme de 10.000 € pour appel abusif, plus subsidiairement dans le cas où la Cour jugerait que le juge de l'exécution est incompétent pour statuer sur la responsabilité des notaires, de renvoyer l'action contre ceux-ci devant le tribunal de grande instance de Nice et d'ordonner le sursis aux poursuites dans l'attente d'une décision passée en force de chose jugée,

soutenant notamment :

qu'aucune vente ni décision de prorogation n'étant intervenue dans le délai de la publication du commandement le 30 mai 2011, le commandement est périmé, l'article R311-5 du code des procédures civiles d'exécution n'interdisant de former une demande postérieurement à l'audience d'orientation que sauf disposition contraire et l'article R321-21 précisant justement que la péremption du commandement peut être soulevée à tout moment jusqu'à la publication du titre de vente,

qu'ils sont recevables en leur discussion préalable sur les biens du débiteur, qui ont permis des ventes s'élevant à 779.500 € au total,

qu'ils ont été induits en erreur par les libellés des références bancaires associées aux appels de fonds émis par la S.A.R.L. KAPRIM qu'ils ont suivis en payant sur un compte HSBC,

que le notaire ne les a pas informés des conséquences qui résulteraient d'un paiement faits sur un compte bancaire autre que celui ouvert à la BPCA,

que le juge de l'exécution est compétent pour statuer sur la responsabilité civile des notaires en vertu de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire tel qu'il est interprété par la Cour de cassation mais également du principe de concentration des moyens,

sur l'article 700 du code de procédure civile, que la mise en cause des notaires était à tout le moins nécessaire pour que ceux-ci apportent tous éclaircissements nécessaires,

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu, sur la péremption du commandement valant saisie immobilière, que l'appel du jugement d'orientation ne produit un effet dévolutif que limité aux contestations et demandes incidentes soumises au juge de l'exécution ;

que la Cour, qui n'est pas le juge de l'exécution, n'a en conséquence pas le pouvoir de prononcer sur une demande tendant, sur le fondement de l'article R321-21 du code des procédures civiles d'exécution, à voir constater la péremption du commandement qui n'a pas été soumise à l'examen du premier juge ;

que la demande est irrecevable ;

Attendu, sur le fond, que le tiers détenteur, qui est poursuivi à raison de la détention de l'immeuble mais n'est pas tenu à la dette, est recevable, à l'occasion de la poursuite exercée à son encontre, à se prévaloir contre le créancier poursuivant tant des exceptions qui lui seraient personnelles que des exceptions relatives à la dette, y compris son existence et son caractère privilégié, même n'auraient-ils pas été contestés par le débiteur ;

Attendu que l'admission d'une créance par le juge commissaire acquiert l'autorité de la chose jugée à l'égard de tous quant à l'existence, la nature et le montant de la créance, dans les conditions prévues aux articles L624-3-1 et R624-8 du code de commerce ;

qu'il n'est pas prétendu que l'état des créances aurait été déposé ni publié ;

qu'au demeurant, le liquidateur présent à l'instance qui n'a communiqué qu'un état du passif intitulé liste succincte, a conclu à la confirmation du jugement sans réserve ;

Attendu que l'acte notarié du 13 février 2007 comportait prêt par la BPCA à la S.A.R.L. KAPRIM de la somme de 3.000.000 € pour une durée de 24 mois, réalisé selon le paragraphe A « modalités de réalisation du crédit » par :

-un versement de la somme de 2.200.000 € destinée au paiement du prix d'acquisition, garanti par le privilège de prêteur de deniers,

-et une ouverture de crédit de 800.000 €, garantie par une hypothèque conventionnelle, destinée à financer les travaux au fur-et-à-mesure de leur exécution, étant précisé que l'emprunteur est tenu de l'utiliser exclusivement aux fins d'acquitter les dépenses afférentes à l'opération et qu'il « devra procéder dans le délai de 24 mois au remboursement de ce crédit par tout ou partie des fonds issus des ventes successives objet de l'opération, lesdites sommes remboursées entraînant la diminution progressive de l'autorisation de crédit accordée par la banque » ;

Attendu qu'en paragraphe B, « conditions et modalités de remboursement », il stipulait « qu'en tout état de cause le crédit prendra immédiatement et de plein droit fin à l'expiration du délai de 24 mois (') et qu'à l'expiration de ce délai, l'emprunteur devra rembourser en une seule fois à la banque la somme de 2.200.000 € (') ainsi que le montant total des sommes qu'il aura utilisées sur celle précitée », outre les intérêts, frais et accessoires ;

Attendu que pour l'application de ces principes, l'acte prévoyait une série d'obligations à la charge de l'emprunteur et de contrôles de la part de la banque ;

qu'il stipulait en effet d'une part, en 5°/, que tous les prix de vente des lots du programme devront être versés sur le compte centralisateur ouvert en les livres de la banque, d'autre part que l'emprunteur ne pourra disposer de ceux-ci que pour le règlement des sommes dues au titre des dépenses nécessaires à la réalisation des bâtiments et avec l'accord préalable et spécial de la banque à laquelle toutes justifications devront être fournies -« sans qu'une responsabilité quelconque puisse directement ou non en résulter pour la banque à l'égard de qui que ce soit » précise l'acte-, enfin que sur demande de l'emprunteur, la banque pourra consentir des mainlevées successives et partielles des inscriptions qui auront été prises à son profit à l'effet de dégrever tout ou partie des lots qui auront été vendus par l'emprunteur ;

qu'il ajoutait également, en 6°/, qu'une situation financière du programme de construction devrait lui être remise chaque fin de trimestre ;

Attendu, sur le compte dit centralisateur, que la convention stipulait, en paragraphe B/ que la somme de 2.200.000 € ainsi que les sommes représentatives de l'utilisation de l'ouverture de crédit seront portées au débit du compte de l'emprunteur ouvert en son agence et seront productives d'un intérêt ;

qu'elle prévoyait en faveur de la banque le droit, pendant ce délai, de prélever sur ledit compte centralisateur les intérêts des sommes prêtées, payables mensuellement et à terme échu, et la commission annuelle d'engagement par trimestre et d'avance sur la somme de 3.000.000 € ;

qu'elle stipulait que tous les prix de vente par l'emprunteur des lots qui dépendront du programme de construction devront être versés sur ce compte, et que l'emprunteur ne pourra disposer de ces prix que pour le règlement des sommes dues au titre des dépenses nécessaires à la réalisation des bâtiments, et avec l'accord spécial et préalable de la banque à laquelle toutes justifications devront être fournies ;

Attendu, sur les garanties, que l'acte stipule que la somme de 2.200.000 € prêtée est garantie par l'inscription du privilège de deniers, et pour le surplus, « soit la somme de 800.000 € » outre intérêts, frais, indemnités et autres accessoires, par une inscription d'hypothèque conventionnelle ;

Attendu que de l'ensemble des stipulations du paragraphe « modalités de remboursement », il résulte que la banque est fondée à soutenir que les sommes prêtées étaient remboursables au terme du délai de deux ans ;

mais qu'il n'en reste pas moins que la convention prévoyait bien la possibilité d'un amortissement partiel avant le terme en envisageant la diminution progressive de l'ouverture de crédit, de sorte qu'elle n'est pas fondée à soutenir qu'aucun amortissement ne pouvait intervenir avant le terme ;

Attendu qu'il résulte également de ces stipulations que les parties étaient convenues de regrouper les opérations débitrices et créditrices afférentes à la réalisation du programme immobilier de vente en l'état futur de rénovation sur un compte unique ouvert au nom de l'emprunteur dans les livres de la banque, dit centralisateur ;

que la banque soutient certes à juste titre que ce compte est le reflet de mouvements affectant le patrimoine de la S.A.R.L. KAPRIM ;

mais qu'il n'en reste pas moins que ce compte avait par nature vocation à constater l'amortissement des prêts, ce qu'elle admet ne serait-ce qu'au travers d'un disponible en compte le cas échéant à la date d'exigibilité ;

que la banque n'a pas expliqué comment l'amortissement aurait pu avoir lieu autrement que par les prix de vente, dont le montant finalement constaté était propre à l'assurer amplement ;

or attendu qu'au jour de l'échéance, le compte centralisateur qui accusait un solde débiteur de 2.693.139,34 € ne constatait pas un amortissement excédant 300.000 €, soit le dixième du prêt ;

Attendu que le mécanisme contractuel est plus complexe que celui dont la banque prétend se prévaloir puisque, outre le terme, et en même temps qu'il stipule le remboursement de l'ouverture de crédit, dans le délai de deux ans, par tout ou partie des fonds issus des ventes successives objet de l'opération avec diminution progressive de l'autorisation de crédit accordée par la banque, il prévoit aussi que l'emprunteur peut disposer des prix de vente des lots du programme ;

qu'il suit de ce mécanisme que, contrairement à ce que soutiennent les acquéreurs et les notaires, les remboursements par le crédit des fonds issus des ventes successives et la réduction progressive du montant de l'ouverture de crédit ne s'opèrent pas conventionnellement par le seul effet de l'entrée en compte desdits fonds, mais qu'autant que lesdits fonds issus des ventes successives ne sont pas en tout ou partie utilisés par l'emprunteur, par ledit compte ;

mais attendu que ce n'est pas ce qui est soutenu par la banque qui prétend que le compte centralisateur aurait fonctionné comme un compte courant dont les articles successifs sont sans effet sur les échéances contractuelles du prêt, et qu'elle ne pouvait à aucun titre empêcher que l'emprunteur exerce ses droits de tirage dans la limite d'un concours que n'auraient pas affecté les entrées en compte ;

Attendu d'une part que les termes ci-dessus rappelés du contrat de prêt relatifs au compte centralisateur ne traduisent pas une telle convention de compte courant ;

Attendu d'autre part et surtout que, selon la convention, l'utilisation des prix de vente par l'emprunteur exigeait selon la convention l'accord préalable et spécial de la banque et sur justification de leur emploi conforme à la réalisation de l'opération ;

or l'utilisation des prix de vente déposés sur le compte centralisateur se faisait par le débit du compte centralisateur ;

qu'il ressort de cette stipulation une restriction des droits de l'emprunteur sur le compte centralisateur dont les intimés sont fondés à souligner le caractère essentiel puisqu'elle se rapporte à l'affectation même du prêt, au fonctionnement de celui-ci et à ses garanties réelles ;

qu'il s'ensuit que la banque appelante, qui ne se prévaut pas d'accords qu'elle aurait donnés préalablement à ces utilisations et ne s'est pas expliquée de cette restriction significative ni des contrôles qui lui incombaient, n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne pouvait à aucun titre empêcher que l'emprunteur exerce ses droits de tirage dans la limite d'un concours que n'auraient pas affecté les entrées en compte, alors-même que par convention, ces entrées en compte des prix de vente ne pouvaient être utilisées par le débit du compte et ainsi soustraites à leur fonction d'amortissement du prêt qu'avec son accord préalable, sur justification d'un emploi conforme à l'affectation du prêt, et compte tenu de la situation financière trimestrielle du programme ;

qu'elle ne discute donc pas valablement que, comme le soutiennent acquéreur et notaires, l'utilisation des prix portés au crédit du compte centralisateur par autant de débits dudit compte a constitué autant de nouvelles ouvertures de crédit sitôt constaté un crédit audit compte excédant 800.000 € ;

Attendu enfin que les intimés soutiennent à juste titre que l'affectation hypothécaire n'est stipulée que pour le remboursement de la somme de 800.000 € prêtée, et non pas pour le remboursement de toute somme dont l'emprunteur resterait débiteur au terme du délai, et spécialement d'un solde de compte courant ou d'une ligne de crédit pratiquée comme rechargeable ;

et attendu que la banque ne conteste pas que les prix de vente de lots entrés en compte ont totalisé un montant qui était à lui seul suffisant à la remplir en totalité des droits garantis tant par le privilège de prêteur de deniers que l'hypothèque conventionnelle s'ils n'avaient été utilisés à d'autres fins par l'emprunteur dans le cadre d'un fonctionnement du compte centralisateur étranger à celui prévu par la convention ;

que la banque, qui a délivré au tiers détenteur commandement de payer ou de délaisser pour le montant total de la créance résultant de la décision d'admission dont elle se prévaut, 1.946.026,20 €, n'est pas fondée à lui opposer un défaut partiel de paiement (455.060,65 € sur leur prix de 800.000 €) sur le compte centralisateur sur lequel elle ne prétend pas avoir exercé le moindre contrôle, apparu par l'effet d'une man'uvre de l'emprunteur qu'elle n'aurait de la sorte pas dépistée, et sans s'expliquer aucunement de l'engagement qui lui est opposé et résultant de la lettre du 4 juin 2007 visé à l'acte de vente de ses lots, selon lequel : « en cas de poursuites exercées contre les acquéreurs défaillants, nous nous engageons à limiter notre créance privilégiée à la fraction du prix de vente restant due par lesdits acquéreurs » ;

Attendu qu'il s'ensuit que c'est à bon droit et par une juste appréciation des faits qui est vainement critiquée par l'appelante que le premier juge a annulé la saisie à tiers détenteurs au motif de l'extinction de la créance privilégiée fondant les poursuites ;

Attendu que le caractère abusif de l'action de la banque n'est cependant pas démontré ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu en appel plus qu'en première instance, à prononcer du chef des autres prétentions subsidiaires qui se trouvent privées d'objet ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement dont appel du seul chef de ses dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Confirme le jugement dont appel en toutes ses autres dispositions,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes tant au titre de la première instance qu'en appel;

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples;

Condamne la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 15e chambre a
Numéro d'arrêt : 13/18155
Date de la décision : 09/05/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-05-09;13.18155 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award