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06/02/2014 | FRANCE | N°13/14779

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre b, 06 février 2014, 13/14779


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 06 FEVRIER 2014

hg

N° 2014/60













Rôle N° 13/14779







[C] [S] [K] [B]





C/



[C] [O]-[U]





















Grosse délivrée

le :

à :

la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU



Me BUVAT















Décision déférée à la Cour :r>


Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 06 Avril 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 09/07852.





APPELANTE



Madame [C] [S] [K] [B], née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 1], venant aux droits de Madame [L] [B]

demeurant [Adresse 2]



représentée par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avoc...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 06 FEVRIER 2014

hg

N° 2014/60

Rôle N° 13/14779

[C] [S] [K] [B]

C/

[C] [O]-[U]

Grosse délivrée

le :

à :

la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU

Me BUVAT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 06 Avril 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 09/07852.

APPELANTE

Madame [C] [S] [K] [B], née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 1], venant aux droits de Madame [L] [B]

demeurant [Adresse 2]

représentée par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Michel PIERCHON, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Alain PORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE

Madame [C] [O]-[U]

née le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 1], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Robert BUVAT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE, ayant pour avocat plaidant la SELARL BOUZEREAU- KERKERIAN, avocat au barreau de DRAGUIGNAN,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Décembre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Hélène GIAMI, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Odile MALLET, Président

Monsieur Jean-Luc GUERY, Conseiller

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Février 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Février 2014,

Signé par Mme Odile MALLET, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE:

[C] [B] est propriétaire d'un bien immobilier situé à [Adresse 1], cadastré section I n°[Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 6] .

[C] [O] [U] se revendique propriétaire du fonds cadastré I n°[Cadastre 5] .

Depuis 1997, [C] [O] [U] se plaint d'un empiétement sur sa propriété dû à une construction réalisée par [C] [B].

Un premier litige tendant au bornage des fonds a donné lieu à un arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 4 janvier 2006, qui a fixé la ligne divisoire des fonds suivant le tracé A B C D E F G H du plan de l'expert [D] annexé au rapport d'expertise du 18 mars 1999.

Par arrêt de la Cour de Cassation du 11 décembre 2007, le pourvoi a été déclaré non admis.

Par jugement du tribunal de grande instance de Draguignan en date du 6 avril 2012':

- il a été constaté que [C] [B] avait réalisé une construction empiétant sur la parcelle de [C] [O] [U],

- la démolition de l'ouvrage sous astreinte de 100 € par jour de retard au delà de six mois après la signification du jugement a été ordonnée,

- [C] [B] a été condamnée à payer 15 000 € de dommages et intérêts et 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile à [C] [O] [U], ainsi qu'aux dépens

- l'exécution provisoire de la décision a été ordonnée, mais arrêtée par ordonnance du 8 février 2013.

Le 27 juillet 2012, [C] [B] a interjeté appel du jugement.

Le 4 juin 2013, l'affaire a été retirée du rôle.

A la demande de [C] [O] [U], elle a été remise au rôle le 8 juillet 2013.

La clôture des débats a été prononcée le 2 décembre 2013.

Aux termes de ses dernières conclusions reçues au greffe et notifiées aux parties le 16 mai 2013, auxquelles il convient de se référer, [C] [B] sollicite:

- la nullité du jugement, en ce qu'il a modifié la cause de la demande en relevant d'office la notion de notoriété publique et de possession non équivoque,

- en tous cas, son infirmation,

- l'irrecevabilité de [C] [O] [U] pour défaut de qualité,

subsidiairement,

- la reconnaissance de son acquisition par prescription de 10 ans de la propriété de la partie du terrain revendiquée par [C] [O] [U], sur la base du bornage même s'il est manifestement erroné,

- le rejet de la demande en démolition,

- la condamnation de [C] [O] [U] à lui payer 50 000 € de dommages et intérêts et 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens

Elle fait valoir que':

-le jugement doit être annulé dans la mesure où [C] [O] [U] fondait son action sur la détention d'un titre de propriété tandis que la décision a retenu «'la notoriété publique'» ainsi que «'la possession continue et non interrompue, paisible, publique et non équivoque'» alors que ces prétentions n'étaient pas dans le débat'; il a ainsi modifié la cause et l'objet de la demande.

-À défaut de titre sur la parcelle revendiquée, [C] [O] [U] est irrecevable à agir';

-[C] [O] [U] n'est pas valablement titrée sur le fonds cadastré I n°[Cadastre 5] (anciennement [Cadastre 7]) en effet tous les actes translatifs examinés de 1946 à 1979 ne visent pas cette parcelle, qui n'apparait':

- pour la première fois que dans l'attestation de propriété immobilière après décès de [Z] [E] veuve de [I] [U], survenu le [Date décès 1] 1988, délivrée le 4 avril 1989, alors même que cette parcelle ne figure pas dans les actes énumérés à la rubrique «'origine de propriété'»

- et ensuite dans l'acte de licitation des consorts [U] du 8 août 1991.

Seuls les consorts [W] restent titrés sur cette parcelle et lui ont d'ailleurs offert de l'acquérir';

-la vente du 7 juin 1957 entre [V] [W] et les époux [U] ne portait pas sur cette parcelle,

-elle n'était toujours pas visée dans l'attestation de propriété immobilière après décès de [I] [U], survenu le [Date décès 2] 1979, délivrée le 30 juillet 1970';

-l'attestation de propriété du 25 février 1989 n'est pas translatif de propriété et ne peut faire preuve de cette transmission, ni de possession continue et non interrompue, paisible, publique et non équivoque'; elle est entachée d'erreur';

-les extraits cadastraux ne sauraient faire preuve de la propriété revendiquée';

en toute hypothèse, et à titre subsidiaire, elle a acquis par prescription la partie de parcelle I n°[Cadastre 5] sur laquelle préexistaient des constructions très anciennes datant au moins du début du vingtième siècle, et toujours occupées de manière paisible, publique et non équivoque par elle ou ses auteurs depuis plus de trente ans, et notamment depuis les années 1950- 1960';

Aux termes de ses dernières conclusions reçues au greffe et notifiées aux parties le 3 juin 2013, auxquelles il convient de se référer, [C] [O] [U] conclut à':

- la confirmation du jugement,

-la condamnation de [C] [B] à lui payer 10 000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que':

-le jugement n'a pas lieu d'être annulé car l'objet ou la cause de la demande n'a pas été modifié, le litige ayant été tranché dans les conditions posées par l'article 12 du code de procédure civile.

-Dès le dépôt du permis de construire par [C] [B] en 1995, il était apparu qu'elle allait empiéter sur sa propriété, et en dépit des restrictions du permis délivré et de son intervention pour faire constater la limite des propriétés, les constructions litigieuses ont été réalisées en 1996';

- le bornage avait fait ressortir l'empiétement';

- la cour d'appel d'Aix en Provence, dans son arrêt du 4 janvier 2006, a définitivement tranché l'absence d'acquisition par prescription de la partie litigieuse par [C] [B]';

-elle même établit être propriétaire du fonds cadastré I n°[Cadastre 5] par son acte du 8 août 1991 aux termes duquel elle a racheté à son frère [R] [U] la part indivise de la maison avec jardin cadastrée section I n° [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 5]';

-la parcelle [Cadastre 5] avait appartenu à [P] [W] qui l'avait vendue avec toutes ses possessions dans le hameau à Monsieur [U], comme en atteste [Y] [W], petit neveu d'[P] [W].

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la nullité du jugement':

Aux termes de l'article 12 du code de procédure civile, «'le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Toutefois, il ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties, en vertu d'un accord exprès et pour les droits dont elles ont la libre disposition, l'ont lié par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat.'»

Il est prétendu que le premier juge a violé l'article 12 du code de procédure civile en reconnaissant à [C] [O] [U] un droit de propriété fondé sur l'usucapion dont personne ne faisait état alors qu'elle n'invoquait que son titre pour établir sa qualité de propriétaire.

S'il est admis qu'un jugement soit annulé en cas d'excès de pouvoir, celui-ci s'apprécie restrictivement et la violation des règles de procédure n'en fait pas partie.

Il ne peut être considéré, en l'espèce qu'il y a matière à annulation du jugement alors que la demande formée par [C] [O] [U] tendait à obtenir la condamnation de [C] [B] à faire démolir les constructions empiétant sur sa parcelle dont elle se déclarait propriétaire par titre et par rejet d'une reconnaissance d'usucapion en faveur de [C] [B] dans l'instance en bornage.

La demande d'annulation du jugement sera rejetée.

Sur l'irrecevabilité de [C] [O] [U]':

[C] [B] dénie à [C] [O] [U] sa qualité de propriétaire du fonds cadastré I n°[Cadastre 5] (anciennement [Cadastre 7]) et dès lors sa recevabilité à agir afin d'obtenir sa condamnation à démolir la construction empiétant sur la limite fixée au terme des décisions de bornage.

[C] [O] [U] est titrée par acte notarié de licitation du 8 août 1991 ayant fait cesser l'indivision qui existait entre elle et son frère [R] [U] depuis le décès de leur mère [Z] [E] [U], le [Date décès 1] 1989.

Elle est donc recevable à agir.

Sur la revendication de propriété de [C] [B]':

[C] [B] ne prétend pas disposer d'un titre sur le bien litigieux, mais revendique une prescription acquisitive, tout en indiquant que seuls les consorts [W], descendants d'[P] [W], sont les véritables propriétaires, alors qu'elle ne les a pas mis en cause.

En application de l'article 2261 du code civil «'pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.'»

Si [C] [B] produit aux débats de nombreuses attestations, celles-ci ne permettent nullement d'établir que leurs rédacteurs font état de la parcelle [Cadastre 5] et de son occupation par [C] [B] ou ses auteurs.

Par ailleurs, lorsque [L] [B] a sollicité en 1995 le premier permis de construire à l'origine des travaux litigieux, elle avait mentionné son projet d'échanger à l'amiable les parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 6], cette dernière lui appartenant, ce qui met en évidence qu'elle ne se considérait pas propriétaire de la parcelle [Cadastre 5].

Enfin, les considérations de [C] [B] sur l'absence de transmission de cette parcelle depuis son attribution à [P] [W] lors du partage du 10 juillet 1946 et sur la qualité de propriétaires des héritiers [W], exclut qu'elle ait pu prescrire dans les conditions prévues par l'article 2261 du code civil, à titre de propriétaire.

Ainsi, elle ne justifie d'aucune possession continue, non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.

Sur la qualité de propriétaire de [C] [O] [U]':

Eu égard au titre de propriété de [C] [O] [U], à l'absence de prescription acquisitive retenue en faveur de [C] [B] et à l'attestation émanant de [Y] [W] suivant laquelle son «'grand oncle, [P] [W] et son épouse [A] [Q] ont vendu la totalité des parcelles qu'ils détenaient dans le [Adresse 1] à Monsieur et Madame [U]'», il doit être considéré qu'en dépit de l'absence de mention de la vente de cette parcelle n°[Cadastre 5] (anciennement [Cadastre 7]) dans l'acte d'acquisition du 10 novembre 1955 par lequel

[P] [W] et son épouse [A] [Q] ont vendu leurs biens à [I] [U], [C] [O] [U] en est propriétaire.

Sur la demande en démolition':

[C] [B] n'établit pas que les constructions qui empiètent sur le terrain de [C] [O] [U] aient existé depuis plus de trente ans.

Sur le fondement de l'article 544 du code civil, [C] [O] [U] est donc fondée à obtenir la démolition des constructions situées sur son terrain.

Le jugement ayant accueilli cette demande sera donc confirmé.

Sur l'astreinte':

[C] [B] devra procéder à la démolition ordonnée dans les six mois de la signification de cette décision, sous astreinte passé ce délai de 100 euros par jour de retard pendant trois mois.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ':

Les parties sont en litige depuis 1997 alors que [C] [O] [U] a alerté [L] puis [C] [B] sur les constructions réalisées et sur leur empiétement depuis 1995, en s'appuyant sur le rapport amiable de l'expert géomètre [F] [T] du 16 octobre 1996 qui précisait déjà que les constructions en cours empiétaient sur la parcelle [Cadastre 5].

[C] [O] [U] a néanmoins dû subir une instance en bornage à propos de laquelle le pourvoi en cassation diligenté par [C] [B] a été déclaré non admis le 11 décembre 2007, et n'a pu faire procéder à l'implantation des bornes qu'après une décision du juge de l'exécution du 16 décembre 2010 à raison de l'opposition de [C] [B].

Elle a ensuite dû se défendre sur sa qualité de propriétaire.

Il y a lieu de considérer qu'en l'espèce, [C] [B] a ainsi fait preuve d'une légèreté blâmable en poursuivant ses constructions malgré la contestation de [C] [O] [U] qui n'a pu faire respecter ses droits qu'à l'issue de plusieurs années de procédure.

Le jugement ayant accueilli la demande de dommages et intérêts de [C] [O] [U] à hauteur de 15 000 euros sera donc confirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile':

Le jugement ayant condamné [C] [B] à payer 5 000 euros à [C] [B] sera confirmé.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette la demande d'annulation du jugement,

Rejette la fin de non-recevoir formulée par [C] [B] tirée du défaut de qualité à agir de [C] [O] [U].

Confirme le jugement entrepris, sauf à préciser concernant l'astreinte que [C] [B] devra procéder à la démolition ordonnée dans les six mois de la signification de cette décision, sous astreinte passé ce délai de 100 euros par jour de retard pendant trois mois.

Y ajoutant,

Déclare [C] [O] [U] recevable à revendiquer la propriété de la parcelle située à [Adresse 1], cadastrée I n°[Cadastre 5],

La reconnaît propriétaire de cette parcelle,

Rejette la demande de [C] [B] tendant à en être reconnue propriétaire,

Condamne [C] [B] aux dépens qui seront recouvrés dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/14779
Date de la décision : 06/02/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4B, arrêt n°13/14779 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-02-06;13.14779 ?
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